Cour d'appel d'Agen, Chambre civile, 3 mars 2021, n° 19/00299

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Agen, ch. civ., 3 mars 2021, n° 19/00299
Juridiction : Cour d'appel d'Agen
Numéro(s) : 19/00299
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Agen, 9 janvier 2019, N° 16/00467
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DU

03 Mars 2021

DB/CR


N° RG 19/00299

N° Portalis

DBVO-V-B7D-CVHR


D C Veuve X

C/

A X,

B X,

Y-N X


GROSSES le

à

ARRÊT n° 133-2021

COUR D’APPEL D’AGEN

Chambre Civile

LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1re chambre dans l’affaire,

ENTRE :

Madame D C Veuve X

née le […] à […]

de nationalité Française

Retraitée

[…]

[…]

Représentée par Me Sandrine FOURNIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AGEN

APPELANTE d’un Jugement du Tribunal de Grande Instance d’AGEN en date du 10 Janvier 2019, RG 16/00467

D’une part,

ET :

Monsieur A X

né le […] à PARIS

de nationalité Française

[…]

Ministère des Affaires Etrangères

[…]

Représenté par Me Frédéric ROY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AGEN

Mademoiselle B X

née le […] à PARIS

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentée par Me Frédéric ROY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AGEN

Monsieur Y-N X

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représenté par Me Frédéric ROY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AGEN

INTIMÉS

D’autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 07 Décembre 2020 devant la cour

composée de :

Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre,

Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller qui a fait un rapport oral à l’audience

Y-Paul LACROIX-ANDRIVET, Conseiller

Greffière : Nathalie CAILHETON

ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

' '

'

FAITS :

Le 29 août 1984, F X, né le […], divorcé de H I le […], et d'[…] le […], a épousé en troisièmes noces D C, après avoir établi un contrat de mariage de séparation de biens.

F X était le père des enfants suivants :

— G X née le […] de H I,

— Y-N X né le […] de J K,

— A X né le […] d'[…],

— B X née le […] d'[…].

En 1990, F X et D C ont acquis en indivision une maison d’habitation située […]) devenu leur domicile conjugal.

Par jugement rendu le 15 septembre 2009 par le juge des tutelles de Villeneuve-Sur-Lot, F X a été placé sous curatelle renforcée et Y-N X désigné en qualité de curateur.

A partir du 9 octobre 2009, F X a été placé dans une maison de retraite à Villeneuve-sur-Lot.

Par jugement rendu le 28 juin 2011 par le juge des tutelles, la curatelle renforcée a été transformée en tutelle, Y-N X étant désigné en qualité de tuteur.

F X est décédé le […], laissant pour lui succéder ses quatre enfants et sa veuve D C.

Fin novembre 2013, D C a quitté l’immeuble indivis et s’est installée dans une maison d’habitation située à Villeneuve sur Lot dont elle avait fait l’acquisition à titre personnel.

G X est décédée le […] laissant pour lui succéder son fils L M né le […].

Par acte du 15 décembre 2015, L M a renoncé à la succession d’F X.

Les mauvaises relations entre D C et les enfants de feu son mari n’ont pas permis de vendre l’immeuble indivis.

Par acte délivré les 27 janvier, 3 et 9 février 2016, D C veuve X a fait assigner A, B et Y-N X devant le tribunal de grande instance d’Agen afin, en vertu de l’article 815-5 du code civil, d’être autorisée à mettre l’immeuble indivis en vente pour un prix de 170 000 Euros.

Par ordonnance du 16 novembre 2016, sur demande des défendeurs, le juge de la mise en état a ordonné une expertise de l’immeuble indivis confiée à Y-O P, afin de le décrire et d’en estimer la valeur, d’estimer l’indemnité d’occupation éventuellement due par Mme C, et de vérifier les travaux effectués sur l’immeuble.

L’expert a déposé son rapport le 25 avril 2017 et a estimé la valeur de l’immeuble à la somme de 145 000 Euros, identifiant des travaux d’isolation des combles exposés par Mme C pour un montant de 2 900 Euros et des travaux d’entretien de 4 082 Euros, proposant enfin une indemnité mensuelle d’occupation de 450 à 500 Euros.

Par jugement rendu le 10 janvier 2019, le tribunal de grande instance d’Agen a :

— ordonné la vente de l’immeuble indivis situé […]300) pour un prix qui ne pourra pas être inférieur à la somme de 150 000 Euros net vendeur,

— dit qu’à l’occasion du partage de l’indivision Mme D C veuve X sera créancière de l’indivision de la somme de 4 082 Euros au titre des travaux d’entretien de l’immeuble, et débitrice de cette indivision de la somme de 5 000 Euros au titre des dégradations de l’immeuble, et de la somme de 10 925 Euros au titre de l’indemnité d’occupation du dit immeuble,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement,

— condamné Mme D C veuve X à payer aux défendeurs, ensemble, la somme de 2 000 Euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens,

— dit que les frais d’expertise seront partagés par moitié entre Mme D C veuve X, d’une part, et les défendeurs, d’autre part,

— débouté les parties de leurs autres demandes.

Le tribunal a estimé que Mme C ne démontrait pas avoir sollicité un accord amiable de vente de la part de ses co-indivisaires mais qu’il existait désormais un accord sur le principe de la vente sur la base des conclusions de l’expertise ; qu’elle avait conservé la jouissance de l’immeuble indivis, faute d’avoir notifié aux co-indivisiaires que l’immeuble était libre d’accès de sorte qu’elle était débitrice d’une indemnité d’occupation ; et qu’elle devait rendre compte d’une absence d’entretien du jardin pour un montant de 5 000 Euros.

Par acte du 22 mars 2019, D C veuve X a régulièrement déclaré former appel du jugement en désignant A X, B X et Y-N X en qualité de parties intimées et en indiquant que l’appel porte sur la totalité des dispositions du jugement, qu’elle cite dans son acte d’appel, à l’exception de celles qui ont ordonné la vente de l’immeuble.

La clôture a été prononcée le 5 octobre 2020 et l’affaire fixée à l’audience de la Cour du 7 décembre

2020.

PRETENTIONS ET MOYENS :

Par conclusions d’appelante notifiées le 17 juin 2019, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, D C veuve X présente l’argumentation suivante :

— Elle n’est pas débitrice d’une indemnité d’occupation de l’immeuble indivis :

* ayant déménagé le 21 novembre 2013, elle n’a pas utilisé l’immeuble à titre privatif et le tribunal ne pouvait pas retenir qu’elle n’avait pas notifié aux co-indivisaires que l’immeuble était libéré, ce qui ne constitue pas un critère légal.

* ses co-indivisaires pouvaient jouir librement de l’immeuble, jouissance à laquelle elle ne s’est jamais opposée, mais ne l’ont jamais fait et n’ont même pas réclamé les clés.

* elle n’a même pas profité du droit de jouissance gratuite prévue au bénéfice du conjoint survivant à l’article 763 du code civil.

— Elle n’a commis aucune dégradation :

* le défaut d’entretien du jardin et de la piscine lui a été imputé à tort par le tribunal.

* elle a même procédé à certains travaux pour éviter que l’immeuble, inhabité, ne se dégrade plus et fait établir un devis de jardinage.

— les frais d’expertise ont été rendus nécessaires par la carence des intimés.

Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :

— réformer le jugement,

— dans le cadre du futur partage, dire qu’elle est créancière de 2 900 Euros au titre des travaux d’amélioration et de 4 082 Euros pour les travaux d’entretien,

— rejeter la demande d’indemnité d’occupation et toutes autres demandes présentées à son encontre,

— condamner les intimés à lui payer la somme de 2 500 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel et celle de 1 800 Euros au titre de la procédure devant le tribunal.

— condamner les intimés aux dépens incluant les frais d’expertise,

— ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir (cette demande est sans objet en cause d’appel),

*

* *

Par conclusions d’intimés notifiées le 13 septembre 2019, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, Y-N X, A X et B X présentent l’argumentation suivante :

— L’indemnité d’occupation fixée par le tribunal est due :

* ils ont été dans l’impossibilité de revenir dans l’immeuble indivis à compter du placement de leur père en maison de retraite en février 2009.

* l’hostilité de leur belle-mère à leur égard a fait obstacle à toute possibilité d’occupation et elle ne leur a jamais notifié qu’ils pouvaient l’utiliser.

* ils n’ont appris que les clés étaient chez le notaire qu’au cours de la procédure judiciaire.

— Des détériorations sont imputables à l’appelante :

* elle doit répondre d’une moins-value chiffrée par l’expert conformément à l’article 815-13 du code civil pour la période comprise entre la date du décès et celle de délivrance de l’assignation.

* la maison a été laissée à l’abandon depuis fin 2014 et la piscine n’était plus en état de fonctionnement.

Au terme de leurs conclusions, ils demandent à la Cour de :

— confirmer le jugement,

— condamner l’appelante à payer à chacun d’eux la somme de 2 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.


MOTIFS :

1) Sur l’indemnité d’occupation :

En premier lieu, les intimés ne discutent pas la motivation du tribunal qui a considéré qu’en application de l’article 763 du code civil, aucune indemnité d’occupation de l’ancien domicile conjugal ne peut être réclamée à Mme C avant le 1er mars 2014, soit un an après le décès d’F X.

En second lieu, selon le dernier alinéa de l’article 815-9 du code civil, seul l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité d’occupation.

En l’espèce, il est constant que Mme C, alors âgée de plus de 71 ans et compte tenu de son âge, a quitté la maison indivise de Pujols le 31 novembre 2013 pour s’installer dans une maison qu’elle avait achetée le mois précédent située […] à Villeneuve-sur-Lot.

En effet, compte tenu de son âge, Mme C ne pouvait plus ni assumer l’entretien de la maison située à Pujols, constituée de 5/6 pièces sur 2 niveaux et d’une surface de 152 m², sur un terrain de 2 000 m² avec une piscine de 4,70 x 9,50 m couverte d’un abri, ni vivre dans un village à l’écart de l’agglomération.

Elle s’est ainsi installée dans une maison de plain-pied sur un petit terrain, à proximité du centre ville.

A partir de cette date, elle n’utilisait plus l’immeuble indivis et si elle avait conservé ses clés, Me Calvet, notaire à Villeneuve sur Lot chargé de la succession par les héritiers, atteste qu’elle lui en

avait déposé un exemplaire dès le 29 avril précédent, qui étaient ainsi à disposition des enfants du défunt.

Ceux-ci avaient toute possibilité, dont ils n’ont pas usé, d’utiliser la maison indivise.

Dès lors, il n’est pas possible de considérer que Mme C avait la jouissance privative de l’immeuble indivis.

La demande de paiement d’une indemnité d’occupation doit être rejetée et le jugement infirmé sur ce point.

2) Sur les travaux d’amélioration :

L’article 815-13 du code civil dispose :

'Lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation.

Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.'

En l’espèce, le litige ne porte que sur la somme de 2 900 Euros que réclame Mme C pour des travaux d’isolation des combles de l’immeuble indivis effectués en avril 2010, dont l’expert a indiqué qu’ils n’ont, en eux-mêmes, apporté aucune plus-value immobilière chiffrable.

Il s’agit d’une dépense qui n’a pas été exposée dans l’intérêt exclusif de Mme C mais qui a amélioré le confort de l’immeuble et qui avait par conséquent un caractère utile pour l’indivision.

Dès lors, elle est fondée à ce que cette dépense soit inscrite au compte de l’indivision.

Il sera fait droit à sa demande et le jugement infirmé sur ce point.

3) Sur les dégradations imputées à D C veuve X :

Le dernier alinéa de l’article 815-13 du code civil dispose que l’indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens par son fait ou par sa faute.

En l’espèce, le tribunal a considéré que si la dégradation de la piscine, de construction ancienne, inutilisée et non entretenue, ne pouvait être imputée à Mme C, le défaut d’entretien du jardin de l’immeuble conduisait néanmoins à mettre à la charge de cette dernière une indemnité de 5 000 Euros.

Mais Mme C n’ayant eu, comme indiqué plus haut, aucune jouissance privative de l’immeuble, le défaut d’entretien du jardin est le fait de l’ensemble des indivisaires et elle ne peut en être tenue seule responsable.

La demande en paiement d’une indemnité doit être rejetée et le jugement infirmé sur ce point.

Enfin, l’équité nécessite de condamner chacun des intimés à payer à Mme C la somme de 1 000 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

- la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

- INFIRME le jugement SAUF en ce qu’il a :

— ordonné la vente de l’immeuble indivis situé […]300) pour un prix qui ne pourra pas être inférieur à la somme de 150 000 Euros net vendeur,

— dit qu’à l’occasion du partage de l’indivision Mme D C veuve X sera créancière de l’indivision de la somme de 4 082 Euros au titre des travaux d’entretien de l’immeuble,

- STATUANT A NOUVEAU sur les points infirmés,

- REJETTE la demande d’indemnité d’occupation et la demande d’indemnité au titre des dégradations de l’immeuble indivis présentées à l’encontre de D C veuve X par Y-N X, A X et B X ;

- DIT que D C veuve X est créancière de l’indivision de la somme de 2 900 Euros au titre de l’isolation des combles ;

- CONDAMNE Y-N X, A X et B X à payer, chacun, à D C veuve X, la somme de 1 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE Y-N X, A X et B X aux dépens de 1re instance et d’appel, dans la proportion d’un tiers chacun et dit qu’ils pourront être recouvrés directement par la Selarl JL Marchi Consultants pour ceux dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

- Le présent arrêt a été signé par Claude Gate, présidente, et par Nathalie Cailheton, greffière, auquel la minute a été remise.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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Textes cités dans la décision

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