Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 14 juin 2018, n° 15/19615

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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www.nomosparis.com · 27 septembre 2018

Par une décision du 14 juin 2018, la Cour d'appel d'Aix en Provence a rappelé, avec une certaine souplesse d'interprétation, qu'il était possible en France de diffuser des publicités comparatives. La société Distribution Casino France, qui exploite notamment le magasin Géant Casino de la ville d'Aix en Provence, avait fait diffuser sur le parking du magasin Dia de la même ville des prospectus avec le slogan publicitaire suivant : « Maintenant Géant Casino c'est moins cher, La preuve sur un caddie de 7 produits de grandes marques : Géant Casino Aix-en-Provence 13,07 euros, DIA …

 

Gouache Avocats · 26 juin 2018

Le message « MAINTENANT GEANT CASINO c'est moins cher » suivi immédiatement de la mention « LA PREUVE sur un caddie de 7 produits de grandes marques » listés et précisant les deux enseignes de comparaison ne revêt dans cette présentation aucun caractère général, de sorte que cette publicité comparative est licite. Pour mémoire, la publicité comparative est définie par l'article L. 122-1 du Code de la consommation (ancien article L. 121-8), comme la publicité « qui met en comparaison des biens ou services en identifiant, implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 2e ch., 14 juin 2018, n° 15/19615
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 15/19615
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Aix-en-Provence, 18 octobre 2015, N° 14/009240
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 14 JUIN 2018

N° 2018/ 287

Rôle N° N° RG 15/19615 – N° Portalis DBVB-V-B67-5T2P

SAS ERTECO FRANCE ANCIENNEMENT DENOMMEE DIA

C/

SAS DISTRIBUTION X FRANCE

Grosse délivrée

le :

à :

Me BOISRAME

Me CABANES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d’AIX-EN-PROVENCE en date du 19 Octobre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/009240.

APPELANTE

SAS ERTECO FRANCE anciennement dénommée DIA,

dont le siège est […]

représentée par Me Alexandra BOISRAME, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assistée et plaidant par Me Janine FRANCESCHI BARIANI, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Julie BARIANI, avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE

SAS DISTRIBUTION X FRANCE,

dont le siège est […]

représentée par Me Cédric CABANES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assistée et plaidant par Me Jean Louis FOURGOUX, avocat au barreau de PARIS,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 14 Mai 2018 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, madame AIMAR, présidente a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Y Z.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2018,

Signé par Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente et Madame Y Z, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile,

Vu le jugement contradictoire du 19 octobre 2015 rendu par le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence,

Vu l’appel interjeté le 5 novembre 2015 par la SAS ERTECO anciennement dénommée DIA France,

Vu les dernières conclusions de la SAS ERTECO, appelante en date du 5 avril 2016,

Vu les dernières conclusions de la SAS DISTRIBUTION X France, intimée en date du 10 mars 2016,

Vu l’ordonnance de clôture en date du 16 avril 2018,

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,

Il sera simplement rappelé que :

Le 23 juillet 2014, la société DISTRIBUTION X France, qui exploite sur le territoire national des entreprises de supermarché et d’hypermarché sous l’enseigne A et qui possède un établissement secondaire à Aix-en-Provence, a fait distribuer, sur le parking du magasin de la société DIA situé à Aix-en-Provence, qui est une société spécialisée dans le commerce alimentaire hard discount en France sous les enseignes DIA et ED, un prospectus publicitaire indiquant 'Maintenant A X c’est moins cher,

La preuve sur un caddie de 7 produits de grandes marques : A X Aix-en-Provence 13,07 euros, DIA Aix-en-Provence 16,01 euros,

A X 18,4 % moins cher que DIA '

La SAS DIA France, a selon acte d’huissier du 1er octobre 2014 fait assigner la SAS X DISTRIBUTION France devant le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence sur le fondement des articles L 211-8 et L 121-9 du code de la consommation et 1382 et 1383 du code civil aux fins de voir juger que la diffusion du prospectus publicitaire constitue une publicité comparative illicite constitutive d’une concurrence déloyale et à l’effet de la voir condamner à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts et voir ordonner des mesures de publications judiciaires.

Suivant jugement contradictoire du 19 octobre 2015 dont appel, le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence a :

— débouté la SAS DIA FRANCE de l’ensemble de ses demandes,

— débouté la SAS X DISTRIBUTION FRANCE de sa demande d’affichage du jugement,

— condamné la SAS DIA FRANCE à payer à la SAS X DISTRIBUTION FRANCE une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamnée aux dépens.

En cause d’appel la SAS ERTECO, anciennement dénommée DIA, appelante demande au visa des articles L121-8 et L121-9 du Code de la consommation et 1382 et 1383 du Code civil, dans ses dernières écritures en date du 5 avril 2016 de :

— dire et juger que le prospectus publicitaire diffusé par I’établissement secondaire A X appartenant à la société X DISTRIBUTION France constitue une publicité comparative illicite,

— dire et juger que cette publicité comparative illicite constitue un acte de concurrence déloyale commis par l’établissement secondaire A X appartenant à la société X DISTRIBUTION France au préjudice de la société DIA,

en conséquence,

— infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce d’Aix-en-Provence le 19 octobre 2015,

et statuant de nouveau :

— condamner la société X DISTRIBUTION France à régler à la société DIA la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la société DIA,

— autoriser la société DIA à faire publier dans un journal de son choix et aux frais avancés de la société X DISTRIBUTION France, l’arrêt à intervenir,

— ordonner l’affichage de l’arrêt à intervenir à l’entrée du magasin A X situé Centre Commercial Aix Ouest, avenue de Bredasque à Aix-en-Provence, pendant une durée de deux mois,

— condamner la société X DISTRIBUTION France au paiement de la somme de

5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’à tous les dépens de l’instance.

La SAS DISTRIBUTION X FRANCE, intimée s’oppose aux prétentions de l’appelante, et demande au visa des articles L.121-1 et L.121-8 du Code de la consommation et 1382 du Code civil, dans ses dernières écritures en date du 10 mars 2016 de :

— confirmer le jugement déféré,

— débouter en conséquence la société ERTECO de l’ensemble de ses demandes et déclarer la publicité de la société DISTRIBUTION X France, licite,

— condamner la société ERTECO à payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance directement recouvrés par la SCP Leclerc Cabanes Canovas, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

*********************

Sur la publicité comparative,

La publicité comparative est régie par les dispositions de l’article L.121-8 du Code de la Consommation qui définit la publicité comparative et énonce ses conditions de licéité en ces termes :

' Une publicité qui met en comparaison des biens ou services en identifiant implicitement ou explicitement un concurrent ou les biens ou services offerts par un concurrent n’est licite que si :

1 ° – Elle n’est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur,

2° – Elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif,

3° – Elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services dont le prix peut faire partie'.

L’article L.121-1 du code de la consommation dispose que 'I.- Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes :

1° Lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial, ou un autre signe distinctif d’un concurrent ;

2° Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants :

a) L’existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;

b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l’usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service'.

La société ERTECO expose que le prospectus publicitaire litigieux ne compare que 7 produits parmi les 3.819 références que possède l’hypermarché DIA d’Aix-en-Provence :

Que les produits comparés sont les suivants :

— Prince Chocolat 2*300 g

— Camembert Président 250 g

— Bière Kronenbourg 6*33 CL

[…]

— Lingettes pampers Fresh Clean * 64

— Barres spécial K chocolat au lait 120 g

[…].

Que le total de ces 7 produits s’élèverait à la somme de 13,07 euros chez A X et à la somme de 16,01euros chez DIA.

Ces prix résulteraient de la comparaison d’un ticket de caisse A X du 22 juillet 2014 à 9h19 avec un ticket de caisse DIA du 22 juillet 2014 à 9h58.

Elle fait valoir que cette publicité comparative désigne nommément son concurrent, la société DIA ; qu’elle ne compare pas objectivement les prix des deux enseignes car le panel choisi par A X n’est pas représentatif par le nombre et la nature des produits, des achats moyens des consommateurs (pas de légumes, de fruits, de viande, de poisson, de féculents).

Elle ajoute que cette publicité est trompeuse car le slogan de nature générale 'maintenant A X c’est moins cher’ 'A X moins cher que DIA’ conduit le consommateur à penser que A X lui donne, de manière générale, davantage de pouvoir d’achat que DIA, alors que la comparaison ne porte que sur un magasin DIA dont la chaîne comprend plus de 750 magasins et que sur 6 produits , 2 étant identiques (bière) et que cette publicité laisse entendre que tous les produits de tous les magasins A X, sont en général, moins chers que les produits distribués par DIA et alors que les prix pratiqués par A X ne sont pas moins chers que ceux pratiqués par DIA ce qui ressort d’un constat d’huissier du 25 août 2014.

Elle poursuit en soutenant que cette publicité est dénigrante car en reproduisant la marque DIA pour la comparer sur la base d’affirmations trompeuses et inexactes, à la marque A X, cette publicité porte atteinte de façon illégitime à l’image de la marque DIA auprès des consommateurs et est de nature à entraîner le discrédit sur celle-ci et ce d’autant qu’elle est spécialisée dans le hard discount et que les prix sont donc un élément déterminant des clients de son enseigne et alors que le prospectus a été distribué sur le parking de son magasin directement entre les mains de ses clients.

Elle souligne que le libellé des slogans 'la preuve’ sur un caddie de 7 produits de grandes marques et la mention 'quelques exemples de produits’ assortis d’une photographie d’un caddie rempli de marchandises, sans préciser que la comparaison se limite à deux magasins, laissent supposer que A X, dans son ensemble, serait moins cher.

Elle indique également que la publicité incriminée ne repose pas sur des éléments vérifiables en raison de l’absence de précision sur le ticket de caisse de A X.

Elle soutient que cette publicité comparative illicite est constitutive d’un acte de concurrence déloyale.

La société DISTRIBUTION X FRANCE expose que depuis la fin de 2012 elle s’est engagée dans une action de réduction des prix de vente des produits aux consommateurs et que cette évolution substantielle a été reconnue par de nombreux professionnels et notamment UFC QUE CHOISIR ;

Qu’elle a effectué une communication en juillet 2014 autour de son action et notamment diffusé la publicité comparative litigieuse.

Elle indique que le régime de la publicité comparative portant notamment sur les prix, a été assoupli par la directive communautaire du 6 octobre 1997 modifiée par la directive du 11 mai 2005 transposées en droit interne ;

Qu’il suffit d’effectuer une comparaison sur des produits qui répondent aux mêmes besoins ou qui ont le même objectif sans être rigoureusement identiques ; que l’annonceur a le libre choix d’échantillon des produits représentatifs et du périmètre de comparaison et que la publicité mise en oeuvre par elle est licite car elle porte sur un assortiment bien déterminé de produits répondant aux mêmes besoins, et permet au consommateur de s’assurer de la réalité de la comparaison.

Elle précise que son message 'A X c’est moins cher’ est immédiatement suivi de la mention sur un caddie de 7 produits de grandes marques de sorte que le slogan général associé à des produits limitativement énumérés directement sur l’affiche commerciale confirme son souhait de démonter que ses produits sont moins chers sur une sélection de produits et qu’un consommateur moyennement attentif ne peut se méprendre sur la portée nécessairement limitée de la comparaison.

Elle poursuit en indiquant qu’en l’espèce le critère de comparaison est le prix sur des produits déterminés représentatifs de consommation courante qui répondent aux mêmes besoins et objectifs et pour les établissements d’Aix-en-Provence comme précisé ;

Que la publicité n’a aucun caractère général ;

Que cette publicité est objective dont les éléments sont parfaitement identifiés et vérifiables sur la base d’achat effectué le même jour.

Elle ajoute que la comparaison des produits et tickets de caisse permet de constater un écart de prix justifié puisque sur les 7 produits comparés, X était moins cher ; qu’il s’agit d’une information objective et vérifiable et que les slogans sont des affirmations résultant d’une comparaison objective et vérifiable circonscrite à un nombre de produits qui est portée à la connaissance du consommateur sur le même support de communication publicitaire, de sorte qu’il prend connaissance de ces informations de façon simultanée.

Que le message véhiculé est clair et dénué de caractère trompeur.

Elle conteste les résultats de la comparaison constatée par huissier le 25 août 2014 aux motifs que les tickets sont illisibles et incomplets et porte sur deux caddies moyens ne contenant pas le même nombre de produits, plus 9 pour A;

Elle fait valoir que cette publicité comparative est objective et loyale sur des produits clairement identifiés et exclusive de toute concurrence déloyale.

Elle ajoute que la société ERTECO FRANCE n’a pas rapporté la preuve d’un détournement de clientèle à la suite de la distribution de la publicité comparative litigieuse.

Ceci rappelé, l’échantillonnage relève du libre choix de l’annonceur et porte en l’espèce sur des produits très précisément identifiés qui répondent aux mêmes besoins ;

Le message qui y est associé 'MAINTENANT A X c’est moins cher’ suivi immédiatement de la mention 'LA PREUVE sur un caddie de 7 produits de grandes marques’ listés et précisant les deux enseignes de comparaison A Aix-en-provence et DIA Aix-en-provence ne revêt dans cette présentation aucun caractère géénral.

Par ailleurs les prix avancés sont justifiés par les tickets d’achat effectués le même jour de sorte que la comparaison opérée sur les prix est objective.

Que l’ensemble de ces éléments sont vérifiables par les consommateurs qui ne sont pas induits en erreur.

Le constat effectué portant sur la comparaison de produits effectués un mois plus tard n’est pas de nature à contredire les éléments portés sur la publicité comparative litigieuse.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que le tribunal a rejeté l’ensemble des demandes de la société appelante.

L’équité commande d’allouer à la société intimée la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter la demande formée à ce titre par la société appelante.

Les dépens resteront à la charge de la société appelante qui succombe et seront recouvrés par le conseil de l’intimée dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Condamne la société appelante à payer à la société intimée la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société appelante aux entiers dépens qui seront recouvrés par le conseil de l’intimée dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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