Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 17 janvier 2017, n° 15/13647

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 17 JANVIER 2017

(n°017/2017, 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/13647

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 13/15418

APPELANTE

SARL CDT DISTRIBUTION

Immatriculée au Registre du Commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 425 051 778

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

XXX

XXX

Représentée et assistée de Me Norbert GUETTA, avocat au barreau de PARIS, toque : A0541

INTIMÉES

Madame C Z

née le XXX à XXX

de nationalité belge

XXX

XXX

BELGIQUE

Entreprise C F

Immatriculée sous le XXX

Société de droit belge

XXX

XXX

Représentées et assistées de Me Nadia BENNICKS-GALDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0775

COMPOSITION DE LA COUR :

Après le rapport oral dans les conditions de l’article 785 du code de procédure civile et en application des dispositions des articles 786 et 907 du même code, l’affaire a été débattue le 23 novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie AUROY, conseillère et Madame A B, conseillère chargée d’instruire l’affaire,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nathalie AUROY, Conseillère faisant fonction de président

Madame A B, Conseillère

Mme A ROHART-MESSAGER, Conseillère, en remplacement de Benjamin RAJBAUT, président empêché

Greffier, lors des débats : Madame Karine ABELKALON

ARRÊT :

• contradictoire • par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. • signé par Madame A B, conseiller pour Monsieur Benjamin RAJBAUT, empêché et par Madame Karine ABELKALON, greffier.

***

Mme C Z est une styliste et créatrice d’accessoires de mode, notamment d’articles de maroquinerie commercialisés sous la marque C Z dont elle est titulaire. La société de droit belge C F, qu’elle a créée et dont elle est la gérante, commercialise ses créations. Mme C Z et la société C F exposent être titulaires de droits d’auteur sur un modèle de pochette en cuir, créé au mois de mai 2010 et référencé C 00.

En septembre 2013, ayant constaté qu’une pochette reproduisant, selon elles, les caractéristiques de leur modèle C 00 était offerte à la vente par la société CDT DISTRIBUTION sous la marque VIMODA PARIS et référencée 8713/AMELIA, Mme Z et la société C F, après y avoir été dûment autorisées par ordonnance présidentielle du 18 septembre 2013, ont fait pratiquer, le 19 septembre 2013, une saisie-contrefaçon au siège de la société CDT DISTRIBUTION, 242 rue Saint-Denis à XXX.

Par acte d’huissier du 11 octobre 2013, elles ont fait assigner la société CDT DISTRIBUTION en contrefaçon de droits d’auteur et en concurrence déloyale devant le TGI de Paris.

Par jugement du 15 mai 2015, le TGI a notamment :

• rejeté la fin de non-recevoir de la société CDT DISTRIBUTIONS, • dit qu’en offrant à la vente le modèle de pochette AMELIA/8713 reprenant les caractéristiques de la pochette C 00, la société CDT DISTRIBUTION a commis des actes de contrefaçon au titre du droit d’auteur au préjudice de Mme C Z et de la société C F, • interdit la poursuite de ces agissements, sous astreinte de 350 € par infraction constatée après la signification du présent jugement, • condamné la société CDT DISTRIBUTION à payer : • à la société C F la somme de 15 000 € en réparation du préjudice patrimonial né de la contrefaçon, • à Mme Z la somme de 5 000 € au titre de l’atteinte portée à son droit moral d’auteur, • condamné la société CDT DISTRIBUTION à payer à Mme C Z et à la société C F la somme globale de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, • rejeté le surplus des demandes, • condamné la société CDT DISTRIBUTION aux dépens, • ordonné l’exécution provisoire.

Le 23 juin 2015, la société CDT DISTRIBUTION a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions transmises le 25 août 2016, la société CDT DISTRIBUTION, poursuivant l’infirmation du jugement en toutes ses dispositions, demande à la cour :

• de déclarer Mme Z irrecevable et mal fondée à agir sur le fondement du droit d’auteur, de déclarer la société C F et Mme Z irrecevables à agir au titre de la contrefaçon et de les débouter de l’intégralité de leurs demandes à ce titre, • de débouter la société C F et Mme Z de leurs demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire, • de les condamner à lui payer solidairement la somme de 10 000 € HT au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions, numérotées 2, transmises le 7 septembre 2016, Mme Z et la société C F demandent à la cour, au-delà des demandes de 'dire et juger’ qui ne saisissent pas la cour de prétentions au sens de l’article 6 du code de procédure civile :

à titre principal :

• de confirmer le jugement en ce qu’il a considéré la société CDT DISTRIBUTION coupable d’actes de contrefaçon, • de réformer le jugement quant au quantum des dommages et intérêts et de condamner la société CDT DISTRIBUTION à payer, avec intérêt au taux légal et anatocisme à compter de la date de l’assignation : • 150 000 € à la société C F, à titre de provision sur dommages et intérêts pour contrefaçon au titre de l’atteinte à ses droits patrimoniaux, • 50 000 € à Mme X à titre de dommages et intérêts pour violation de son droit moral, • de faire interdiction à la société CDT DISTRIBUTION, sous astreinte définitive de 1500 € par infraction constatée et par jour, d’acheter, exposer ou revendre le modèle de pochette contrefaisant le modèle de pochette revendiqué à compter de la date de prononcé de la décision à intervenir, • d’ordonner la remise par la société CDT DISTRIBUTION à la société C F, des articles contrefaisants encore en sa possession, en vue de leur destruction, sous astreinte définitive de 1500 € par jour de retard et par infraction constatée, à compter de la date de prononcé de la décision à intervenir, • d’ordonner à la société CDT DISTRIBUTION, sous astreinte définitive de 1500 € par jours de retard, la communication des documents comptables suivants, certifiés conformes et exhaustifs : i) un relevé global des ventes du modèle de pochette litigieux avec le détail des ventes par coloris, par matières et par tailles, ii) la copie de la totalité des bons de commande auprès de ses fournisseurs et notamment, des bons de livraison et des factures correspondantes pour le modèle de sac litigieux, iii) ainsi que, d’une manière générale, l’ensemble des documents comptables relatifs au sac litigieux,

à titre subsidiaire : au cas où la cour considérerait que le modèle de sac pochette revendiqué n’est pas protégeable par le droit d’auteur :

• de juger que la société CDT DISTRIBUTION s’est rendue coupable de concurrence déloyale ou de parasitisme au préjudice de la société C F et de la condamner à payer : • à celle-ci la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts, • à Mme X la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de son droit moral, avec intérêt au taux légal et anatocisme à compter de la date de l’assignation, • en tout état de cause : de condamner la société CDT DISTRIBUTION au paiement à chacune d’une somme de 15 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 septembre 2016.

MOTIFS DE L’ARRET

Considérant qu’en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées ;

Sur la contrefaçon

Sur les droits de Mme Z et de la société C F au titre du droit d’auteur sur la pochette C 00

Sur la titularité des droits

Considérant que la société CDT DISTRIBUTION soutient que Mme Z ne démontre pas sa paternité sur la pochette revendiquée, ni la cession de ses droits à la société C F ;

Que Mme Z prétend justifier de sa qualité d’auteur de la pochette revendiquée, divulguée par la société C F ;

Considérant que l’article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’oeuvre est divulguée ;

Qu’il est constant, par ailleurs, qu’une personne morale qui commercialise de manière non équivoque une oeuvre sous son nom est présumée, en l’absence de toute revendication, titulaire des droits d’exploitation à l’égard des tiers poursuivis en contrefaçon ;

Considérant, en l’espèce, que les intimées versent aux débats :

• un dessin en original de la pochette revendiquée, daté de mai 2010, portant le nom et la signature de Mme C Z, • un courrier du 5 septembre 2016 de la société KEYSTONE basée à Hong Kong qui indique qu’elle travaille depuis 5 ans avec la société C F et que les modèles sont fabriqués exclusivement sous les instructions de Mme C Z, • un échange de courriels des 29 juin et 2 juillet 2010 entre Mme C Z et son fabricant KEYSTONE concernant deux propositions de dessin pour 'NANA 0« (solution 1 avec rabat et solution 2 sans rabat) et un prototype ('NANA 0 solution 2 ») (en PJ) correspondant à la pochette revendiquée, • un bon de commande du 16 octobre 2010 de Mme C Z à son fabricant KEYSTONE pour un sac 'C collection NANA', • la facture de la société KEYSTONE en date du 18 octobre 2010 adressée à la société C F concernant des produits 'NANA', • une attestation et des factures de Mme G, attachée de presse de Mme C Z, desquelles il ressort qu’elle a commencé à promouvoir la pochette C 00 à compter de septembre 2010, • un extrait du Elle (édition belge) de décembre 2010 reproduisant la pochette revendiquée dans un encart consacré au travail de création de Mme C Z, • des factures adressées à des revendeurs en France, de janvier 2011 à octobre 2013, • une revue de presse relative à des parutions dans les magazines Elle, Madame Y, J-K et Victoire de mars 2011 à octobre 2013, • des articles concernant les acteurs Sharon STONE et H I arborant la pochette revendiquée ;

Que ces éléments concordants établissent suffisamment que la date de création de la pochette revendiquée est mai 2010, peu important que les affirmations de Mme C Z ait pu précédemment varier au cours de la procédure quant à cette date, que Mme Z a réalisé un croquis – fût-il sommaire – de la pochette, donné des instructions à un fabricant, lequel a mis au point un prototype et a fourni la pochette et que, comme l’a retenu le tribunal, la pochette C 00 fait partie de la collection 'NANA 0" mentionnée dans les échanges entre Mme C Z et son fabricant KEYSTONE ;

Qu’il n’est pas contesté que la pochette a été divulguée par la société C F, créée en avril 2010, dont l’activité est, notamment, le commerce d’articles de maroquinerie et de voyage et dont Mme C Z est co-gérante ;

Que, dans ces conditions, c’est à juste raison que le tribunal a estimé que tant Mme Z que la société C F établissent être titulaires de droits d’auteur sur la pochette revendiquée ; que le jugement doit être confirmé sur ce point ;

Sur la protection de la pochette C 00 par le droit d’auteur

Considérant que la société CDT DISTRIBUTION argue que Mme Z s’est bornée à ajouter, sur une pochette 'NANA’ proposée par la société KEYSTONE, une fine languette de cotte de mailles cuivrée, élément de décoration utilisé depuis des années (notamment par Paco Rabanne) et non protégeable ; que selon l’appelante, le modèle C 00 revendiqué est antériorisé en tous points par un modèle 330106 créé et commercialisé par la société ENERGY MASTER et exposé au salon de Canton d’octobre à novembre 2010 et qu’il est donc dépourvu d’originalité, 'de nouveauté et de caractère propre’ et qu’il ne peut bénéficier de la protection au titre du droit d’auteur ; qu’elle ajoute que la société ENERGY MASTER, qui est son propre fournisseur de la pochette litigieuse 8713/AMELIA, lui a certifié par courrier avoir elle-même créé et commercialisé ce modèle en 2010 et l’avoir exposé lors d’un salon à Canton en novembre de la même année, et qu’elle lui a adressé le catalogue dudit salon ;

Que les intimées opposent que la combinaison des choix arbitraires revendiqués par Mme Z et leur agencement constituent un parti pris esthétique qui traduit l’effort créatif de Mme Z et l’empreinte de sa personnalité et confère à la pochette son originalité ; Considérant que l’article L.112-1 du code de la propriété intellectuelle protège par le droit d’auteur toutes les 'uvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination, pourvu qu’elles soient des créations originales ; que selon l’article L. 112-2, 14° du même code, sont considérées comme 'uvres de l’esprit les créations des industries saisonnières de l’habillement et de la parure, parmi lesquelles l’industrie de la maroquinerie ;

Que la notion d’antériorité est indifférente en droit d’auteur, qui exige plutôt que celui qui se prévaut de ces dispositions justifie de ce que l’oeuvre revendiquée présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur ;

Considérant que l’extrait du catalogue du salon tenu à Canton du 31 octobre au 4 novembre 2010 produit par la société CDT DISTRIBUTION présente une pochette paraissant proche de celle revendiquée ; que cependant, cet élément est inopérant, étant postérieur à la fois à la création par Mme Z, en mai 2010, de la pochette revendiquée, à la commande adressée à la société KEYSTONE le 16 octobre 2010 et à la facturation qui s’en est suivie le 18 octobre 2010 par le fabricant ;

Considérant que Mme Z et la société C F caractérisent ainsi qu’il suit la pochette C 00 :

'- une pochette en cuir, de forme rectangulaire,

— sur la face avant :

— deux rectangles de surpiqûres,

— à l’intérieur de ces rectangles de surpiqûres une bande de cote de maille rectangulaire de 2cm de largeur sur 18 cm de longueur de couleur dorée ou argentée,

— la bande de cote de maille est encadrée d’une surpiqûre,

— cette cote de maille rectangulaire est composée de 6 rangs de cotte de maille,

— cette cote de maille de forme rectangulaire est le signe distinctif des créations de C GOLDBRENER,

— quatre rivets (ou plus selon le format) sont fixés entre les deux rectangles de surpiqûres aux extrémités de la pochette,

— la pochette se ferme au moyen d’une fermeture zip,

— la face arrière de la pochette ne comporte quant à elle aucune surpiqûre,

— à l’intérieur de la pochette :

— sous la doublure côté dos, est posée une poche zippée entourée d’une fenêtre en cuir ainsi que la griffe cousue,

— sur la doublure côté face, est posée une double poche téléphone portable et portefeuille’ ;

Considérant que c’est par des motifs exacts et pertinents, adoptés par la cour, que les premiers juges ont estimé que la pochette revendiquée, reprenant des éléments connus dans une combinaison novatrice, porte l’empreinte de la personnalité de son auteur, Mme Z, et bénéficie ainsi de la protection au titre du droit d’auteur ; que le jugement sera confirmé sur ce point également ;

Sur les actes de contrefaçon

Considérant qu’aux termes de l’article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle, 'Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque’ ;

Considérant qu’il résulte de la comparaison, à laquelle la cour a procédé, de la pochette 8713/AMELIA de la marque VIMODA PARIS saisie lors des opérations de saisie- contrefaçon et de la pochette C 00 vendue par la société C F que la première reproduit, comme les premiers juges l’ont constaté, l’ensemble des caractéristiques de la seconde, si ce n’est que le modèle contrefaisant est en simili cuir et non en cuir ;

Que la société appelante ne développe aucune argumentation pour contester la réalité des actes de contrefaçon ;

Que le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu’il a dit que la contrefaçon était constituée ;

Sur la concurrence déloyale et le parasitisme

Considérant Mme Z et la société C F obtenant gain de cause sur leur demande principale en contrefaçon, il n’y a pas lieu de statuer sur leur demande subsidiaire en concurrence déloyale et parasitaire visant les mêmes faits ; que le jugement sera confirmé de ce chef également ;

Sur les mesures réparatrices

Sur les demandes indemnitaires

Considérant qu’en application de l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle dans sa version issue de la loi du 29 octobre 2007 applicable aux faits de l’espèce, la juridiction prend en considération, pour fixer les dommages et intérêts, les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par le contrefacteur et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte ;

Considérant que la société appelante soutient que les intimées sont dans l’incapacité de démontrer un quelconque préjudice, faisant valoir notamment que l’attestation de son comptable, non conforme aux prescriptions de l’article 202 du code de procédure civile, est sans valeur probante et que le lien de causalité entre les faits reprochés et la baisse des ventes invoquée par les intimées n’est pas établi ;

Que les intimées invoquent un manque à gagner résultant d’une perte de chiffre d’affaires (107 200 €, soit une perte de marge de 64 320 €), la banalisation et la dépréciation subséquente du modèle revendiqué, un préjudice d’image pour la société C F et les bénéfices retirés de la contrefaçon par la société CDT DISTRIBUTION (marge réalisée de 33 344 €, économies d’investissements) ;

Considérant que la société C F fait valoir à juste raison que le gain manqué doit s’apprécier au regard de la totalité de la masse contrefaisante et pas seulement de la masse contrefaisante vendue par le contrefacteur ; qu’en l’espèce, lors des opérations de saisie-contrefaçon, l’huissier a découvert une masse contrefaisante de 1072 pochettes et sacs référencés 8713 ;

Que la pochette C 00 était revendue, selon sa taille, de 100 € à 395 €, pour un prix de gros de 40 € à 158 € ;

Que la perte de marge subie par la société C F s’établit ainsi à la somme de 64 320 € ; que cependant, la totalité de cette marge perdue ne peut être prise en considération pour la détermination du manque à gagner, dès lors que les clients qui ont acquis le modèle contrefaisant au prix de 40 € n’auraient pas tous acheté le modèle original C F au prix de 100 € ou plus ;

Qu’il ressort des opérations de saisie-contrefaçon que la pochette contrefaisante était acquise au prix de 8 € et revendue au prix public de 40 € ; qu’il n’est toutefois pas établi que les 1072 articles contrefaisants aient été vendus par la société CDT DISTRIBUTION ;

Que la contrefaçon a nécessairement entraîné une banalisation, et par conséquent une certaine dépréciation, de la pochette C 00 qui bénéficiait d’une certaine notoriété ainsi qu’en attestent les articles de presse versés aux débats ;

Considérant que la cour dispose ainsi des éléments suffisants pour évaluer à 50 000 € la somme devant être allouée à la société C F en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon ; que le jugement déféré sera réformé en ce sens ;

Qu’il n’y a donc lieu de prononcer la mesure de la communication de documents comptables sollicitée ;

Que le jugement sera en revanche confirmé en ce qu’il a alloué à Mme Z la somme de 5 000 € en réparation de l’atteinte à son droit moral d’auteur ;

Sur les intérêts

Considérant que l’article 1231-7 du code civil (ancien article 1153-1) prévoit qu’en toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal, même en l’absence de demande ou de disposition spéciale du jugement, ces intérêts courant, sauf disposition contraire de la loi, à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n’en décide autrement ;

Que les intimées ne justifiant d’aucune circonstance qui devrait conduire à déroger à la règle ainsi édictée, leur demande tendant à ce que les intérêts au taux légal sur les sommes à allouées courent à partir de l’assignation sera rejetée ; que le jugement sera confirmé sur ce point également ;

Sur les mesures d’interdiction et de destruction

Considérant que le sens de la présente décision conduit à confirmer le jugement déféré en ce qu’il a fait droit à la demande tendant à ce qu’il soit fait interdiction à la société CDT DISTRIBUTION de poursuivre les agissements contrefaisants, sous astreinte ;

Que la cessation des actes de contrefaçon étant ainsi suffisamment garantie, il ne sera pas fait droit aux mesures de remise et de destruction du stock également sollicitées ; que le jugement sera confirmé sur ce point également ;

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Considérant que la société CDT DISTRIBUTION qui succombe en son recours sera condamnée

aux dépens d’appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés à l’occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées ; Que la somme qui doit être mise à la charge de la société CDT DISTRIBUTION au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Mme Z et la société C F peut être équitablement fixée à 10 000 €, cette somme complétant celle allouée en première instance ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement si ce n’est en ce qu’il a condamné la société CDT DISTRIBUTION à payer à la société C F la somme de 15 000 € en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon,

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Condamne la société CDT DISTRIBUTION à verser à la société C F la somme de 50 000 € en réparation préjudice résultant de la contrefaçon,

Déboute la société CDT DISTRIBUTION et Mme Z du surplus de leurs demandes indemnitaires,

Condamne la société CDT DISTRIBUTION aux dépens d’appel et au paiement à de la somme de 10 000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

LE PRÉSIDENT LE GREFFIER

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