Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 31 octobre 2018, n° 17/04981

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Chronologie de l’affaire

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Gouache Avocats · 29 novembre 2018

La demande de production de pièces formée par un franchisé sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile doit être rejetée dès lors qu'il n'est pas justifié d'indices précis, sérieux et concordants étayant ses soupçons de traitement discriminatoire entre franchisés du même réseau. Un contrat de franchise avait été signé pour l'exploitation d'un magasin sous une enseigne de la grande distribution alimentaire. Le franchisé (ci-après le « franchisé A ») a dénoncé le contrat de franchise à son échéance. A la suite, estimant avoir été victime d'un traitement déloyal et …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 3, 31 oct. 2018, n° 17/04981
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/04981
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bordeaux, 30 janvier 2017, N° 16/01766
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 31 OCTOBRE 2018

(n°560, 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/04981 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B22AG

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Janvier 2017 -Tribunal de Commerce de BORDEAUX – RG n° 16/01766

APPELANTE

SARL SEBSO Agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège.

Le Bourg

[…]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée par Me Bertrand CHARLET, avocat au barreau de LILLE

INTIMEES

SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée par Me Sébastien SEMOUN, avocat au barreau de LYON

SARL IF INVESTISSEMENTS agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée par Me Anne-Julie GUIBERTEAU , avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 01 Octobre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre

Mme Laure ALDEBERT, Conseillère

Mme Sophie GRALL, Conseillère

Qui ont en délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme X Y

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre et par X Y, Greffière.

Par acte sous-seing privé du 20 novembre 2001, la société Sebso a conclu avec la société Distribution Casino France un contrat de franchise relatif à son fonds de commerce exploité à Meyssac (Corrèze) sous l’enseigne Spar et ayant pour terme la date du 19 novembre 2008. Par avenant du 24 avril 2007, les parties ont convenu de fixer au 19 novembre 2015 le nouveau terme de leurs relations contractuelles. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 mai 2015, la société Sebso a dénoncé le contrat de franchise à son échéance du 19 novembre 2015.

La société Sebso est aujourd’hui affiliée au groupe Carrefour et exploite son fonds de commerce sous l’enseigne Huit à Huit.

Estimant avoir été victime d’un traitement déloyal et discriminatoire de la part de la société Distribution Casino France, son ancien franchiseur, par rapport à un autre franchisé Spar, la société IF Investissements qui exploite un établissement aux Deux-Alpes (Isère), et qui aurait bénéficié d’avantages financiers et ristournes très supérieurs à ceux dont elle-même bénéficiait, la société Sebso a, par requête du 26 février 2015, saisi le président du tribunal de commerce de Grenoble pour obtenir la désignation d’un huissier de justice sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile afin de pratiquer une mesure d’instruction au siège de la société IF Investissement, en vue d’initier un contentieux sur le fondement des articles L.420-1 et L.442-6 du code de commerce.

Par ordonnance du 4 mars 2016, le président du tribunal de commerce de Grenoble a fait droit à sa requête, en ordonnant le séquestre des documents ainsi obtenus.

Saisi à la fois par la société Distribution Casino France et la société IF Investissement d’un référé-rétractation, et par la société Sebso d’une demande de levée du séquestre, le président du tribunal de commerce de Grenoble a, par deux ordonnances du 19 juillet 2016, rejeté la demande de rétractation et ordonné la levée du séquestre. Appel de ces deux ordonnances a été interjeté par la société Distribution Casino Groupe.

La cour d’appel de Grenoble, par arrêt du 10 novembre 2016, a infirmé ces ordonnances, estimant que le tribunal de commerce de Grenoble n’était pas compétent pour connaître de ce litige dans

lequel étaient invoquées des dispositions relatives aux pratiques anticoncurrentielles.

Par acte d’huissier du 17 novembre 2016, la société Sebso a alors fait assigner la société Distribution Casino France et la société IF Investissements devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bordeaux afin d’obtenir la communication sous astreinte de documents en vue d’agir sur le fondement des articles L.420-1 et L.442-6 du code de commerce.

Par ordonnance du 31 janvier 2017, le juge des référés du tribunal de commerce de Bordeaux a :

— Donné acte à la société Sebso qu’elle n’entendait pas engager d’action à l’encontre de la société IF Investissement ;

— Constaté que la société IF Investissements avait communiqué les bilans dont la communication était sollicitée par la société Sebso ;

— Débouté la société Sebso de l’ensemble de ses demandes ;

— Condamné la société Sebso à payer à la société Distribution Casino France la somme de 1000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamné la société Sebso aux dépens.

Par déclaration du 8 mars 2017, la société Sebso a interjeté appel de cette ordonnance.

Par arrêt en date du 8 novembre 2017, la cour a décidé de surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la Cour de cassation saisie d’un pourvoi à l’encontre de l’arrêt du 10 novembre 2016 de la cour d’appel de Grenoble entre les parties.

Par arrêt du 18 janvier 2018, la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société Sebso.

L’affaire a été rétablie à la demande de la société Sebso.

Par ses conclusions transmises par voie électronique le 17 septembre 2018, la société Sebso demande à la cour de :

— Infirmer la décision déférée,

— Déclarer irrecevable la société IF Investissements en sa demande de condamnation reconventionnelle à des dommages et intérêts de la concluante pour procédure abusive, comme se heurtant à l’autorité de chose jugée, qui s’attache à la décision rendue par la cour d’appel de Grenoble, en application de l’article 480 du code de procédure civile,

— Déclarer irrecevables les intimées en leur demande d’aménagement des conditions de communication des pièces sollicitées, fondée sur des prétentions dirigées à l’encontre d’un tiers à la procédure, en application des dispositions des articles 31 et 32 du code de procédure civile,

En toute hypothèse, déboutant les sociétés IF Investissements et Distribution casino France, en toutes leurs prétentions :

— Ordonner sous astreinte aux sociétés IF Investissements et Distribution casino France la communication des pièces suivantes :

' le contrat de franchise SPAR régularisé entre elles avec l’annexe n° 3 portant sur les

conditions de ristournes ;

' l’avenant au contrat de franchise SPAR tel qu’il existe en leur possession.

— Ordonner à la société IF Investissements la communication des pièces suivantes :

' éléments bilanciels de la société IF Investissements (annexes non publiées) depuis l’année 2013.

— Condamner la société IF Investissements au paiement de la somme de 5.000 euros et la société Distribution casino France au paiement de la somme de 10.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens.

Estimant être victime de discrimination ayant des effets anticoncurrentiels, la société Sebso soutient qu’il existe un litige potentiel avec son ancien franchiseur qui justifiait d’ordonner la mesure de communication de pièces demandée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile.

Elle fait grief au premier juge d’avoir fait une inexacte application des conditions prévues par l’article 145 du code de procédure civile, en visant l’absence de risque de dépérissement des preuves et lui reproche d’avoir méconnu les limites de sa saisine en examinant à partir des pièces 'existence d’une situation discriminatoire entre les deux supérettes (différence de format, de secteur géographique), cette exigence n’étant absolument pas requise à ce stade de la procédure pour caractériser le motif légitime.

Elle soutient que le requérant est uniquement tenu de justifier de la vraisemblance du litige, son intérêt à agir n’étant pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de son action ; que ce n’est que dans le cas où la prétention est manifestement vouée à l’échec que le motif légitime fait défaut, si bien que le premier juge n’avait pas à apprécier la pertinence du raisonnement et à se livrer à l’interprétation des pièces mais uniquement à apprécier la plausibilité du litige ; qu’il ne pouvait pas lui reprocher de ne pas avoir apporté la preuve de la discrimination alors que telle était la finalité de la mesure d’instruction sollicitée,

Elle prétend que la vraisemblance d’un traitement déloyal et discriminatoire est étayée par des indices précis, sérieux et concordants ; que certains franchisés Spar pouvaient bénéficier de ristourne allant jusqu’à 9,75 % du chiffre d’affaires entrepôt hors taxe, alors qu’à des conditions comparables, elle-même ne percevait qu'1 % .

Elle fait état des éléments contenus dans l’avenant au contrat de franchise conclu entre la société Distribution Casino France et la société IF Investissements qu’elle a comparé à sa situation personnelle et relève notamment des différences de traitement au titre du budget d’enseigne en faisant valoir qu’à la suite des travaux de rénovation, elle n’a perçu qu’une somme de 37.104 euros de la part de son franchiseur, alors que la société IF Investissements a perçu la somme de 286.000 euros ; que la société IF Investissements bénéficie d’un coût des livraisons et prestations logistiques nul alors qu’elle supportait des coûts importants.

Elle fait valoir que cet avenant non signé mais paraphé par les parties est un début de preuve qui démontre tout l’intérêt qu’elle a à en obtenir la version définitive dans un but probatoire .

Elle ajoute que la valeur probante de ce document est renforcée par l’aveu de la société Distribution Casino France de l’existence d’une différence de traitement dans ses écritures devant la cour d’appel de Grenoble.

Elle rappelle que le requérant d’une mesure d’instruction fondée sur l’article 145 du code de procédure civile n’a pas à justifier du fondement de son action future mais confirme cependant qu’ elle entend introduire son action sur le fondement de l’ancien article 1134 du code civil pour

déloyauté contractuelle du franchiseur ou de l’article L.442-6-I 2° du code de commerce compte tenu de la discrimination subie dans le réseau Spar qui produit également des effets anticoncurrentiels au sens de l’article L.420-1 du code de commerce;

que le fait que ces fondements soient discutés ou la question de savoir si, pour qu’il y ait discrimination à l’intérieur d’un réseau, le franchisé victime doit apporter la preuve d’un seul exemple ou de plusieurs exemples du réseau, relèvent de l’appréciation du juge du fond ; que ces questions sont indifférentes à ce stade et ne font pas obstacle au prononcé d’une mesure d’instruction.

Enfin concerant le contenu de la mesure, elle fait valoir que le secret des affaires ne saurait être invoqué aux seules fins de porter atteinte à son action, alors qu’elle n’a jamais caché avoir adhéré au groupe Carrefour.

Elle s’oppose aux demandes reconventionnelles de la société IF Investissements en dommages et intérêts pour procédure abusive. Elle soulève l’irrecevabilité dela demande en réparation à raison des procédures précédentes portées devant la juridiction de Grenoble qui ont déjà été jugées et soutient qu’elle n’a commis aucun abus en renouvelant sa demande de communication devant la juridiction compétente contre la société IF Investissements qui détenait les pièces.

Par ses conclusions transmises le 17 septembre 2018, la société IF Investissements demande à la cour de :

— Confirmer l’ordonnance du président du tribunal de commerce de Bordeaux du 31 janvier 2017 en ce qu’elle a rejeté les demandes de la société Sebso ;

— Donner acte à la société Sebso qu’elle n’entend pas engager d’action à l’encontre de la société IF Investissements ;

— Constater que la société IF Investissements a déjà communiqué les bilans dont la communication est sollicitée par la société Sebso ;

Pour le surplus :

— Dire et juger que les conditions de l’article 145 du code de procédure civile ne sont pas réunies à défaut d’intérêt légitime ;

— Rejeter les demandes de la société Sebso ;

A titre subsidiaire,

— Déclarer recevable la demande d’aménagement des conditions de communication des documents formées par la société IF Investissements ;

— Faire interdiction à la société Sebso sous astreinte :

* d’utiliser les documents et informations obtenus à d’autres fins que l’action qu’elle indique vouloir engager à l’encontre de la société Distribution casino France au titre d’une prétendue pratique discriminatoire ;

* de communiquer à toute personne autre que son dirigeant actuel les documents et informations obtenus ;

En toute hypothèse,

— Condamner la société Sebso à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive outre la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle fait valoir :

À titre préliminaire que la société Sebso n’a pas, en violation de l’article 56 du code de procédure civile, tenté de résoudre amiablement le litige ;

Que comme le premier juge l’a constaté, elle a transmis spontanément à la société Sebso les éléments bilantiels demandés (bilans 2013, 2014, 2015) et que la demande tendant à obtenir les données financières du contrat de franchise conclu avec la société Distribution Casino France qui sont par nature confidentielles, est privée de motif légitime dans la mesure où :

— ces éléments comptables sont conservés par la société IF Investissements et qu’il n’existe aucun risque de dépérissement des preuves,

— la société Sebso ne dispose d’aucun élément en l’état pour justifier de sa demande de communication,

— l’action envisagée est vouée à l’échec faute de remplir aucune des conditions des articles L.420-1 et L.442-6, I, 2° du code de commerce.

Elle expose que la demande n’est justifiée que par un seul document qui est un avenant entre elle et son franchiseur non signé, dont la société Sebso n’explique pas comment elle l’a obtenu, et qui ne permet pas de conclure qu’il est conforme à la réalité; qu’en tout état de cause la communication du contrat de franchise serait un contrat d’un franchisé SPAR parmi des milliers de franchisés qui ne démontrerait pas le caractère fautif d’une discrimination tarifaire au sens des dispositions économiques précitées ; elle en déduit que cette action constitue un véritable détournement de la procédure instaurée par l’article 145 du code de procédure civile et qu’à défaut cette communication devrait être limitée, la société Sebso exerçant désormais dans un réseau concurrent.

Enfin au soutien de sa demande reconventionnelle en procédure abusive, elle prétend que la société Sebso a agi imprudemment et sans discernement en renouvelant sa demande devant le tribunal de commerce de Bordeaux après l’annulation de la procédure devant la cour d’appel de Grenoble au cours de laquelle elle a subi une saisie dans ses locaux.

Elle reproche à la société Sebso de l’avoir de nouveau mise dans la cause alors qu’elle n’est pas concernée par l’éventuelle procédure au fond et que la société Distribution Casino France disposait des mêmes informations.

Par ses conclusions d’intimée transmises le 27 août 2018, la société Distribution Casino France demande à la cour de :

A titre principal,

— Confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du président du tribunal de commerce de Bordeaux du 31 janvier 2017 ;

En tout état de cause :

— Constater que la société Sebso fonde sa demande sur la copie d’un avenant non signé, prétendument conclu entre les sociétés Distribution casino France et IF Investissements qui ne le lui ont pas remis et qu’elle refuse d’indiquer les conditions de son obtention ;

— Constater l’absence de risque de dépérissement des documents dont la communication est demandée ;

— Constater que la société Sebso prétend justifier d’un intérêt légitime en prétendant avoir été victime d’un traitement discriminatoire par rapport aux autres franchisés SPAR ;

— Constater, cependant, que la société Sebso n’a, à aucun moment, tenté de justifier le fait de se trouver dans la même situation que la société IF Investissements afin de légitimer un intérêt ;

— Constater, en effet, que la société Sebso ne peut affirmer qu’elle serait victime d’un traitement discriminatoire en produisant un seul document sans aucune valeur probante qui aurait été régularisé avec un seul franchisé placé dans une situation différente de la sienne et dont elle dissimule les conditions d’obtention ;

— Constater, que la société Sebso affirme, mais ne démontre pas :

* qu’elle se situerait dans une situation identique à celle de la société IF Investissements,

* qu’elle aurait bénéficié de conditions moins favorables que la société IF Investissements, sans raison valable.

En conséquence,

— Dire que la société Sebso ne démontre pas l’existence d’un motif légitime à établir ou conserver la preuve de faits nécessaires à la solution du litige ;

— Débouter la société Sebso de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions;

A titre subsidiaire,

— Faire interdiction sous astreinte à la société Sebso de communiquer, directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit, les éléments reçus en exécution de l’arrêt à intervenir ou son contenu à tout tiers, hormis son conseil lui-même tenu par une obligation légale de secret professionnel, et en particulier à l’une quelconque des sociétés du groupe carrefour ou affiliés à un réseau animé par le groupe carrefour, quelle qu’en soit la forme;

En tout état de cause,

— Condamner la société Sebso à payer à la société Distribution casino France la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle fait valoir comme la société IF Investissements l’absence de motif légitime, faute de preuve et le caractère inutile de la mesure en mettant en avant la différence de situation entre la supérette de la société Sebso et celle exploitée par la société IF Investissements aux deux Alpes.

Selon elle, cette procédure vise un autre but que celui poursuivi, à savoir l’obtention par le groupe Carrefour à bon compte des informations confidentielles.

SUR CE LA COUR

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile suppose que soit constaté qu’il existe un procès « en germe » possible sur la base d’un fondement juridique suffisamment déterminé et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.

En l’espèce, la société Sebso qui a été le franchisée pendant 14 ans de la société Distribution Casino France indique qu’après avoir quitté le réseau SPAR en 2015, elle a appris que certains franchisés dont la société IF Investissements bénéficiaient à situation comparable d’avantages particuliers dont elle aurait été privée.

Pour constituer une preuve des faits reprochés avant l’introduction d’une instance au fond, elle a sollicité qu’il soit ordonné aux sociétés IF Investissements et Distribution Casino France la communication des pièces suivantes :

' le contrat de franchise SPAR régularisé entre elles avec l’annexe n° 3 portant sur les

conditions de ristournes ;

' l’avenant au contrat de franchise SPAR tel qu’il existe en leur possession.

ordonner à la société IF Investissements la communication des pièces suivantes :

' éléments bilanciels de la société IF Investissements (annexes non publiées) depuis l’année 2013

Le fait qu’ il n’existe aucun risque de dépérissement des preuves n’interdit pas à la société Sebso de former sa demande dans un but probatoire contre les intimées qui disposent des éléments visés.

Sans apprécier le bien fondé des demandes susceptibles d’être ultérieurement soutenues devant le juge du fond au regard des différents fondements juridiques que la société Sebso propose d’engager , ni d’entrer dans la comparaison de la situation des deux supérettes dont l’appréciation excède la compétence du juge des référés, la cour relève que les éléments produits ne confortent pas le caractère vraisemblable des faits allégués par la société Sebso dans sa requête.

Qu’en effet contrairement à ce qu’elle soutient, la société Sebso ne justifie pas d’indices précis, sérieux et concordants pour étayer ses soupçons de traitement discriminatoire entre franchisés du même réseau SPAR dans la mesure où elle se contente d’affirmer que d’autres franchisés auraient bénéficié d’avantages et de ristournes supérieurs à ceux qui étaient prévus dans son contrat sans verser aucun élément de nature à rendre crédibles ses allégations.

Elle produit seulement la copie d’un avenant au contrat de franchise entre la société IF Investissements et la société Distribution Casino France qui contiendrait des conditions plus avantageuses que celles consenties par son franchiseur à l’époque où elle était franchisée Spar.

Ce document dont les conditions d’obtention sont inconnues et qui est contesté par les intimées est seulement paraphé et aucun élément de preuve postérieur ne permet de s’assurer qu’il a été signé.

Sa reconnaissance ne ressort pas non plus des conclusions de la société Distribution Casino France devant la cour d’appel de Grenoble qui a seulement indiqué « même si le contrat IF Investissements prévoyait ce que la société Sebso prétend, cela ne permettrait pas pour autant de démontrer l’existence d’un traitement discriminatoire de la société Sebso et donc la possibilité d’une action sur ce fondement » en procédant à l’examen des éléments de différenciation.

Enfin la société Sebso ne démontre pas en quoi les bilans de la société IF Investissements qui étaient pourtant demandés au titre des pièces utiles et qui lui ont été communiqués devant le premier juge

établissent un indice en ce sens.

Dans ces conditions c’est à juste titre que l’ordonnance a rejeté la demande de la société Sebso qu’il convient en conséquence de confirmer dans toutes ses dispositions.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la société IF Investissements :

L’exercice d’une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à des dommages et intérêts qu’en cas de faute susceptible d’engager la responsabilité civile de son auteur.

En l’espèce, la société IF Investissements ne justifie pas quand bien même le litige n’a pas été précédé d’une tentative de résolution amiable, d’une faute susceptible d’engager la responsabilité de la société Sebso qui a pu se méprendre sur la portée de ses droits en renouvelant dans un but probatoire devant la juridiction compétente sa demande de communication de pièces détenues par la société IF Investissements de sorte que celle ci sera déboutée de sa demande formée à ce titre.

Sur les autres demandes :

En cause d’appel, la société Sebso dont le recours est rejeté devra supporter les dépens conformément à l’article 696 du code de procédure civile, lesquels sont recouvrés conformément à l’article 699 dudit code.

Il y a lieu en outre de condamner la société Sebso à verser aux sociétés Distribution Casino France et IF Investissements qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 3000 euros chacune.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance rendue le 31 janvier 2017 en toutes ses dispositions;

Statuant à nouveau et ajoutant à celle-ci,

Déboute la société IF Investissements de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive;

Condamne la société Sebso à payer à chacune des sociétés Distribution Casino France et IF Investissements la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Condamne la société Sebso aux dépens d’appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE

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