Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 mai 2018, 17-15.146, Publié au bulletin

  • Adaptation judiciaire de la clause d'échelle mobile·
  • Référence à un indice de base fixe·
  • Fixation du loyer révisé·
  • Clause d'échelle mobile·
  • Bail commercial·
  • Office du juge·
  • Détermination·
  • Conséquence·
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  • Révision

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Lorsqu’il est procédé à la révision judiciaire du loyer et que la date d’effet du loyer révisé ne correspond pas à la date prévue pour l’indexation annuelle, le juge doit adapter la clause d’échelle mobile en modifiant l’indice de base de manière à ce que la révision du loyer ne crée pas, par elle-même, la distorsion prohibée par l’article L. 112-1 du code monétaire et financier

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Sur la décision

Texte intégral

CIV.3

IK

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 17 mai 2018

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 447 FS-P+B+I

Pourvoi n° Q 17-15.146

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Paris Look, société par actions simplifiée (société à associé unique), dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 6 janvier 2017 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 3), dans le litige l’opposant à la société A. Hôtel, société par actions simplifiée, dont le siège est […],

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 5 avril 2018, où étaient présents: M. Chauvin, président, Mme Provost-Lopin, conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Brenot, M. Echappé, Mmes Andrich, Dagneaux, M. Barbieri, conseillers, Mmes Corbel, Collomp, M. Jariel, Mme Schmitt, conseillers référendaires, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Provost-Lopin , conseiller, les observations de la SCP Hémery, Thomas-Raquin et Le Guerer, avocat de la société Paris Look, de la SCP François-Henri Briard, avocat de la société A. Hôtel, l’avis de M. Sturlèse, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 6 janvier 2017), que, le 11 juillet 1994, la société Hôtelière Lutetia Concorde, dénommée A. Hôtel, a donné à bail commercial à la société Paris Look des locaux pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 1994, moyennant un loyer indexé annuellement sur l’indice du coût de la construction ; que, le 29 juin 2010, la société bailleresse a saisi le tribunal de grande instance en révision du loyer indexé à la valeur locative à compter du 23 décembre 2009 ; qu’à titre reconventionnel, la société locataire a demandé de réputer non écrite la clause d’indexation stipulée au bail ;

Attendu que la société Paris Look fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que les clauses d’échelle mobile sont illicites dès lors que leur application conduit à une distorsion entre la période de variation de l’indice et celle de variation du loyer ; qu’en l’espèce, le contrat de location conclu entre la société A. Hôtel et la société Paris Look contient une clause d’échelle mobile stipulant que la révision du loyer opéré chaque 1er juillet « s’effectuera en prenant pour indice de référence l’indice de départ du 4ème trimestre 1993 et pour indice de comparaison, celui du 4ème trimestre de l’année civile précédant le jour anniversaire de la révision » ; qu’ainsi que la société Paris Look le faisait valoir cette clause est illicite alors qu’elle conduit, dans le cadre de la révision judiciaire du loyer sollicitée par le bailleur fixant la date de révision du loyer renouvelé au 23 décembre 2009, à une distorsion entre la période de variation de l’indice et celle contenue entre chaque révision ; qu’en refusant néanmoins de déclarer ladite clause illicite, la cour d’appel a violé l’article L. 112-1 du code monétaire et financier ;

2°/ que le juge saisi d’une demande de révision judiciaire, en cas de variation du montant du loyer, de plus d’un quart depuis la dernière révision, ne peut modifier l’indice et la méthode d’indexation que les parties ont convenu d’appliquer ; qu’en refusant de déclarer la clause d’échelle mobile litigieuse illicite bien que son application conduise à une distorsion entre la période contenue entre chaque révision et celle de variation de l’indice au motif qu’il appartenait au juge « d’adapter le jeu de la clause d’échelle mobile à la valeur locative par application de l’article R. 145-22 du code de commerce de sorte que la révision du loyer ne peut elle-même organiser la distorsion prohibée », quand le juge saisi d’une demande de révision judiciaire ne dispose pas du pouvoir de modifier le contenu ou les modalités d’application de la clause d’échelle mobile convenue par les parties, la cour d’appel a violé les articles R. 145-22 du code de commerce et L. 112-1 du code monétaire et financier et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 ;

3°/ que si le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au montant du loyer précédemment fixé ; que dès lors que le montant du loyer a augmenté de plus du quart par le jeu de la clause d’échelle mobile, toute demande de révision tendant à ce que soit fixé le loyer à une valeur locative supérieure doit être déclarée irrecevable ; qu’en l’espèce, la société Paris Look faisait valoir que « lorsque le loyer se trouve augmenté de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, la révision qui peut être demandée ne peut tendre à obtenir un loyer supérieur à l’augmentation de 25 % » ; qu’en retenant néanmoins, pour dire recevable

la demande de révision judiciaire du loyer de la société A. Hôtel, que c’est à tort que la société Paris Look faisait valoir que la valeur locative ne saurait être supérieure au montant du loyer indexé, la cour d’appel a violé les articles L. 145-39 et R. 145-22 du code de commerce ;

Mais attendu qu’ayant constaté que la clause d’indexation disposait que le loyer serait indexé tous les ans sur l’indice du coût de la construction et, pour la première fois, le 1er janvier 1995 et qu’en raison du décalage existant entre la date de publication de l’indice et le jour d’échéance de la révision, l’indice de référence serait celui du 4e trimestre 1993 et l’indice de comparaison celui du 4e trimestre de l’année civile précédant le jour anniversaire de la révision et, pour la première révision au 1er juillet 1995, l’indice du 4e trimestre 1994 et relevé qu’aucune distorsion n’avait été constatée entre l’indice de base fixe (4e trimestre 1994) et l’indice multiplicateur qui avait été, lors des révisions successives, celui du 4e trimestre précédant la date de révision et que, si le loyer révisé à venir était fixé à une date différente de celle prévue par la clause, le juge devrait adapter le jeu de la clause d’échelle mobile à la valeur locative, la révision du loyer ne pouvant elle-même organiser la distorsion prohibée par la loi, la cour d’appel en a exactement déduit que la clause d’indexation n’était pas illicite et que, le loyer ayant augmenté de plus du quart depuis sa dernière fixation, la demande de fixation du loyer révisé à la valeur locative était recevable ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Paris Look aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande la société Paris Look et la condamne à payer à la société A. Hôtel la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Hémery, Thomas-Raquin et Le Guerer, avocat aux Conseils, pour la société Paris Look

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la société Paris Look de sa demande tendant à déclarer illicite la clause d’indexation, constaté que le montant du loyer par l’effet de l’application de la clause d’échelle mobile se trouve augmenté de plus du quart par rapport au prix précédemment fixé et dit que la demande en révision est recevable au regard des dispositions de l’article L. 145-39 du code de commerce ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « La société Paris Look appelante demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il dit la demande de révision recevable et de juger qu’en présence d’un loyer augmenté de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement par l’effet des indices, la révision ne peut tendre à obtenir un loyer supérieur à l’augmentation de 25 % mais uniquement à un loyer inférieur à celui résultant d’une telle augmentation ; qu’elle sollicite également l’infirmation de ce chef sur le fondement de l’article L. 112-1 du code monétaire et financier, au motif que la clause d’indexation stipulée à l’article 6 du bail crée une distorsion contraire aux dispositions d’ordre public précitées et doit être réputée non écrite, de sorte qu’aucune demande de révision ne saurait être accueillie ; qu’en réponse à la partie adverse, elle affirme que ce moyen n’est pas nouveau en cause d’appel et qu’en toute hypothèse la nouveauté du moyen est indifférente par effet des dispositions de l’article 565 du code de procédure civile ; qu’elle s’oppose par ailleurs à l’application d’un nouvel indice et à toute forme de réécriture de la clause par la cour, considérant qu’il n’appartient pas ici au juge de modifier l’économie du contrat ; qu’elle demande ainsi de dire que les demandes adverses tendant à voir constater que la prochaine indexation interviendra le cas échéant le 1er juillet 2010 et tendant à voir constater la résiliation du bail sont nouvelles en cause d’appel et partant irrecevables par effet de l’article 564 du code de procédure civile ; que sur la demande subsidiaire de la bailleresse tendant à voir fixer la prochaine révision au 1er juillet 2010, elle soutient au surplus qu’elle ne saurait prospérer faute de clause d’indexation valide au bail et que l’arbitrage contractuellement prévu pour pallier la disparition de l’indice en l’absence d’accord entre les parties ne s’applique pas au cas présent ; que sur la demande subsidiaire de résiliation, elle relève que la clause réputé non écrite n’ayant jamais existé ne peut motiver la mise en oeuvre d’une clause de résiliation de plein droit désormais sans objet ; qu’à titre subsidiaire, elle demande à la cour de surseoir à statuer sur la demande de fixation dans l’attente du dépôt du rapport Pain ; que la société A. Hôtel intimée sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a jugé que les dispositions de l’article L. 145-39 du code de commerce trouvaient à s’appliquer par effet du jeu de la clause d’échelle mobile stipulée au bail (loyer augmenté de 49,9% entre le 1er juillet 2003, date de fixation du prix du bail renouvelé, et le 1er juillet 2009) et constater que le loyer révisé devait être fixée suivant la valeur locative des lieux au 23 décembre 2009, date de la demande de révision ; qu’elle réfute en conséquence toute distorsion délibérée générée par l’application stricte de ces stipulations ; qu’elle soutient à titre subsidiaire que la clause et les indexations subséquentes sont valides jusqu’à la date de révision et qu’il appartient au juge de rechercher la commune intention des parties à compter de cette date, laquelle était bien d’opérer une indexation annuelle à la date d’anniversaire de la prise d’effet du bail ; qu’elle demande en conséquence à la cour d’adapter le jeu de la clause d’échelle mobile en la suspendant et en jugeant qu’elle pourra être appliquée au 1er juillet 2010 ; qu’à défaut, elle indique que les parties sont convenues de recourir à l’arbitrage dans l’hypothèse où un nouvel indice doit être fixé et demande à titre subsidiaire à la cour de maintenir une clause d’indexation adaptée et réécrite, conformément à la volonté des parties de voir le loyer indexé ; qu’à titre plus subsidiaire, pour le cas où la cour ferait droit à l’appel principal, elle demande à la cour de constater la résiliation de plein droit du bail par application de son article 6 ; qu’en réponse à l’irrecevabilité soulevée par la partie adverse, elle soutient que sa demande de résiliation n’est pas nouvelle mais d’une réponse à l’argumentation de la locataire ; que ceci exposé, il convient de rappeler que la clause d’indexation contenue dans le bail liant les parties est libellée de la façon suivante : « Les parties conviennent d’indexer le loyer sur l’indice de construction INSEE. Le loyer sera réajusté tous les ans en fonction de la variation de cet indice et pour la première fois le 1° janvier 1995. En raison du décalage existant entre la date de publication de l’indice et le jour d’échéance de la révision, celle-ci s’effectuera en prenant pour indice de référence l’indice de départ du 4° trimestre 1993 et pour indice de comparaison, celui du 4° trimestre de l’année civile précédant le jour anniversaire de la révision, c’est-à-dire pour la première révision au 1° juillet 1995, l’indice du 4° trimestre 1994. Il en sera ainsi tous les ans. L’augmentation ou la diminution en résultant sera applicable chaque année et pour la première fois le 1° juillet 1995. Si pour une raison quelconque, l’indice pris pour base de notification devenait inapplicable, il sera remplacé par un nouvel indice équivalent choisi d’un commun accord entre les parties. A défaut d’accord amiable, cet indice sera déterminé par arbitrage. La clause d’indexation du prix du loyer constitue une clause essentielle et déterminante sans laquelle le bailleur n’aurait pas contracté. En conséquence, sa non application partielle ou totale pourra autoriser la bailleur seul à résilier de plein droit sans qu’il soit besoin de formuler une demande en justice si bon lui semble par lettre recommandée avec accusé de réception. » ; que l’appelante demande de dire sur le fondement de l’article L. 112-1 du code monétaire et financier que cette clause est illicite au motif qu’elle crée une distorsion contraire aux dispositions d’ordre public de l’article précité et qu’elle doit être réputée non écrite, de sorte qu’aucune demande de révision ne saurait être accueillie ; qu’elle admet que si la jurisprudence ne condamne pas la référence à un indice de base fixe, c’est à la condition qu’il n’existe pas de distorsion entre période de révision et période de variation de l’indice, que tel n’est pas le cas en l’espèce dès lors que la prochaine indexation contractuelle après fixation du loyer révisé au 23 décembre 2009 interviendra le 23 décembre 2010 en prenant en compte l’indice du 4ème trimestre 1994 et celui du 4ème trimestre 2009 soit une période de variation de l’indice de 16 années pour un temps écoulé entre deux révisions de 16 ans, 5 mois et 23 jours entre les deux termes ; qu’en prenant en compte le loyer fixé judiciairement au 1er juillet 2003, la distorsion existe, de la même façon qu’en prenant en compte le loyer fixé judiciairement au 23 décembre 2009 ; qu’or l’appelante n’opère aucune démonstration convaincante de la distorsion prétendue entre périodes de variation de l’indice et périodes de révision dès lors que si l’indice de référence a été constamment celui du 4° trimestre 1994 comme le prévoit la clause contenue dans le bail initial ainsi que dans les baux renouvelés, l’indice de comparaison lors des révisions successives tel que prévu dans le bail a été celui du 4° trimestre précédant la date de révision (1er janvier de chaque année) de telle sorte qu’il n’y a eu aucune distorsion organisée entre périodes de variation de l’indice et périodes de révision contrairement à ce qui est soutenu ; que s’agissant de la révision à venir, à supposer que le juge de la révision fixe le loyer révisé à une date distincte de celle prévue par la clause d’indexation, il lui appartiendra également d’adapter le jeu de la clause d’échelle mobile à la valeur locative par application de l’article R.145-22 du code de commerce de sorte que la révision du loyer ne peut elle-même organiser la distorsion prohibée ; qu’en conséquence et compte tenu de la présence dans le bail de la clause d’échelle mobile, la bailleresse est recevable à solliciter ainsi qu’il a été jugé que le loyer ayant augmenté de plus du quart depuis la dernière fixation –ce point n’étant pas contesté – il doit être fixé à compter de la demande à sa valeur locative ; que c’est à tort au surplus que la locataire invoque sur le fondement de l’article L. 145-39 du code de commerce qui déroge à l’article L. 145-38 du même code, que la valeur locative ne saurait être supérieure au montant du loyer indexé qui constituerait en quelque sorte le montant plafond au-delà duquel ne pourrait être fixé le loyer révisé ; que les premiers juges seront approuvés enfin d’avoir, en présence d’expertises amiables contradictoires et faute d’éléments d’appréciation suffisants permettant de connaître la valeur locative des lieux loués au 23 décembre 2009, ordonné une expertise et d’avoir dit que pendant la durée de l’instance, le loyer provisionnel sera celui du loyer contractuel en cours en principal » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Par acte sous seing privé du 11 juillet 1994, la société HOTELIERE LUTETIA CONCORDE, dont la dénomination sociale est aujourd’hui SOCIETE A HOTEL a donné à bail à la société PARIS LOOK, société du groupe MARIONAUD, divers locaux à usage commercial sis […] pour une durée de 9 années à compter du 1er juillet 1994, pour un loyer annuel de 1.400.000 Francs, soit 213.428,62 € HT ; que ce loyer était indexé annuellement sur l’indice INSEE du coût de la construction, l’indice de départ étant celui du 4e trimestre 1994, soit 1019, selon la clause suivante contenue dans le bail : « 6. INDEXATION DU LOYER Les parties conviennent d’indexer le loyer sur l’indice de construction INSEE. Le loyer sera réajusté tous les ans en fonction de la variation de cet indice et pour la première fois le 1er janvier 1995. En raison du décalage existant entre la date de publication de l’indice et le jour d’échéance de la révision, celle-ci s’effectuera en prenant pour indice de référence l’indice de départ du 4e trimestre 1993 et pour indice de comparaison, celui du 4° trimestre de l’année civile précédant le jour anniversaire de la révision, c’est-à-dire pour la première révision au 1er juillet 1995, l’indice du 4 e trimestre 1994. Il en sera ainsi tous les ans. L’augmentation ou la diminution en résultant sera applicable chaque année et pour la première fois le 1° juillet 1995. Si pour une raison quelconque, l’indice pris pour base de notification devenait inapplicable, il sera remplacé par un nouvel indice équivalent choisi d’un commun accord entre les parties. A défaut d’accord amiable, cet indice sera déterminé par arbitrage. La clause d’indexation du prix du loyer constitue une clause essentielle et déterminante sans laquelle le bailleur n’aurait pas contracté. En conséquence, sa non application partielle ou totale pourra autoriser le bailleur seul à résilier de plein droit sans qu’il soit besoin de formuler une demande en justice si bon lui semble par lettre recommandée avec accusé de réception. » ; que par acte d’huissier du 31 décembre 2002, la bailleresse a donné congé à la locataire pour le 30 juin 2003, avec offre de renouvellement ; que par jugement du 5 mai 2006, le juge des loyers commerciaux, s’estimant insuffisamment informé a, à nouveau désigné expert, puis par jugement du 17 février 2012 a dit n’y avoir lieu à déplafonnement et a fixé le loyer du bail renouvelé à compter du 1er juillet 2003, en fonction de l’évolution des indice INSEE du coût de la construction à la somme annuelle en principal de 246.199,16 € ; que le 1er juillet 2009, le loyer a été porté à la somme de 319.932,86 € HT, par application de l’indice du 4° trimestre 2008, soit 1523 ; que par acte d’huissier du 23 décembre 2009, la société A HOTEL a signifié une demande de révision de loyer sur le fondement de l’article L 145-39 du Code de Commerce et a indiqué que, puisque le loyer avait augmenté de plus du quart, le nouveau loyer devait être fixé à compter de la date de cet acte à la valeur locative qu’elle entendait évaluer à la somme de 1.066.784 € hors taxes hors charges ; que la société locataire ayant soutenu devant le juge des loyers commerciaux l’illicéité de la clause d’indexation, celui-ci, par jugement du 3 septembre 2012, s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris ; que sur ce, la société locataire soutient que la clause d’échelle mobile contenue dans le bail serait nulle, au motif qu’elle ne serait pas licite au regard des dispositions de l’article L 112-1 alinéa 1 du code monétaire et financier ; que la société bailleresse, de son côté, soutient que les actions en nullité d’une clause du bail, et plus généralement toutes les actions nées de l’application du statut des baux commerciaux sont, en application des article L 14515 et L 145 – 60 du code de commerce prescrites au terme d’un délai de 2 ans ; que toutefois, ainsi que l’a relevé le juge des loyers commerciaux, ce moyen étant présenté par voie d’exception, il n’est pas susceptible d’être atteint par la prescription, car l’action par voie d’exception est perpétuelle ; qu’il résulte de l’article 112 – 1 alinéa 1 du code monétaire et financier que « est réputée non écrite toute clause d’un contrat à exécution successive, notamment des baux de location de toute nature, prévoyant la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieur à la durée s’écoulant entre chaque révision » ; que le tribunal relève que la rédaction de la clause du bail aboutit à une période indexation qui n’est pas supérieure à un an et qu’elle est donc licite ; que la société bailleresse demande de constater que le loyer a varié de plus du quart de fixer le loyer à la valeur locative qu’elle estime à la somme de 1.066,974 € hors charges et hors taxes à compter du 23 décembre 2009 et elle demande, au cas où un expert serait désigné, de fixer le loyer prévisionnel à ce montant ; que le tribunal constate que par le jeu de la clause d’échelle mobile le loyer initial de 213 428,62 euros a été porté au 1er juillet 2009 à 319 932,26 euros, de sorte que l’on peut constater une variation du loyer de plus de 25 % ; qu’il y a donc lieu en application de l’article L 14539 du code de commerce, de fixer le loyer révisé à la date du 23 décembre 2009 à la valeur locative ; que selon un rapport du 12 mai 2012 Monsieur Y… indique que la valeur locative s’élèverait au 1er juillet 2003 à 344 400 € et Monsieur Marc-Olivier Z… proposait de retenir à la même date un loyers se situant entre 335 000 et 430 000 € par an ; que toutefois les dates d’effet auxquelles se situent ces rapports sont trop anciennes pour servir d’éléments de référence pertinents ; que les parties s’opposant sur le montant de la valeur locative des locaux et la présente juridiction ne disposant pas en l’état de moyens suffisants pour apprécier son montant, il convient de recourir à une mesure d’expertise comme il est dit au dispositif de la présente décision ; qu’il convient de fixer pendant la durée de l’instance un loyer provisionnel égal au montant du loyer contractuel en principal, en application des dispositions de l’article L 145-57 du code de commerce » ;

1/ ALORS QUE les clauses d’échelle mobile sont illicites dès lors que leur application conduit à une distorsion entre la période de variation de l’indice et celle de variation du loyer ; qu’en l’espèce, le contrat de location conclu entre la société A Hotel et la société Paris Look contient une clause d’échelle mobile stipulant que la révision du loyer opéré chaque 1er juillet « s’effectuera en prenant pour indice de référence l’indice de départ du 4ème trimestre 1993 et pour indice de comparaison, celui du 4ème trimestre de l’année civile précédant le jour anniversaire de la révision » ; qu’ainsi que la société Paris Look le faisait valoir cette clause est illicite alors qu’elle conduit, dans le cadre de la révision judiciaire du loyer sollicitée par le bailleur fixant la date de révision du loyer renouvelé au 23 décembre 2009, à une distorsion entre la période de variation de l’indice et celle contenue entre chaque révision ; qu’en refusant néanmoins de déclarer ladite clause illicite, la cour d’appel a violé l’article L. 112-1 du code monétaire et financier ;

2/ ALORS QUE le juge saisi d’une demande de révision judiciaire, en cas de variation du montant du loyer, de plus d’un quart depuis la dernière révision, ne peut modifier l’indice et la méthode d’indexation que les parties ont convenu d’appliquer ; qu’en refusant de déclarer la clause d’échelle mobile litigieuse illicite bien que son application conduise à une distorsion entre la période contenue entre chaque révision et celle de variation de l’indice au motif qu’il appartenait au juge « d’adapter le jeu de la clause d’échelle mobile à la valeur locative par application de l’article R. 145-22 du code de commerce de sorte que la révision du loyer ne peut elle-même organiser la distorsion prohibée », quand le juge saisi d’une demande de révision judiciaire ne dispose pas du pouvoir de modifier le contenu ou les modalités d’application de la clause d’échelle mobile convenue par les parties, la cour d’appel a violé les articles R. 145-22 du code de commerce et L. 112-1 du code monétaire et financier et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE si le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au montant du loyer précédemment fixé ; que dès lors que le montant du loyer a augmenté de plus du quart par le jeu de la clause d’échelle mobile, toute demande de révision tendant à ce que soit fixée le loyer à une valeur locative supérieure doit être déclarée irrecevable ; qu’en l’espèce, la société Paris Look faisait valoir que « lorsque le loyer se trouve augmenté de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, la révision qui peut être demandée ne peut tendre à obtenir un loyer supérieur à l’augmentation de 25 % » ; qu’en retenant néanmoins, pour dire recevable la demande de révision judiciaire du loyer de la société A Hotel, que c’est à tort que la société Paris Look faisait valoir que la valeur locative ne saurait être supérieure au montant du loyer indexé, la cour d’appel a violé les articles L. 145-39 et R. 145-22 du code de commerce.

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