Cour d'appel d'Angers, Troisième chambre, 11 mars 2021, n° 18/00647

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, troisième ch., 11 mars 2021, n° 18/00647
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 18/00647
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Le Mans, 8 juillet 2014, N° 23059
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

d’ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/00647 – N° Portalis DBVP-V-B7C-EMNV.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 09 Juillet 2014, enregistrée sous le n° 23 059

ARRÊT DU 11 Mars 2021

APPELANTE :

L’URSSAF DES PAYS DE LA LOIRE VENANT AUX DROITS DE L’URSSAF DE LA SARTHE

[…]

[…]

représentée par Maître ROGER, avocat au barreau de NANTES

INTIMEES :

Société SCWHEITZER MAUDUIT INDUSTRIES

Lieu-dit Le Grand Plessis

[…]

représentée par Me CIROT, avocat substituant Maître Philippe HERY de la SELAS ORATIO AVOCATS, avocat au barreau d’ANGERS

Société MERCER

[…]

La Défense 9

[…]

représentée par Maître MARIE, avocat au barreau de PARIS substituant Maître Bruno SERIZAY, avocat au barreau de PARIS

Société CNP ASSURANCES

[…]

[…] représentée par Maître CONTE, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Janvier 2021 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame A, conseiller chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Z A

Conseiller : Monsieur Yannick BRISQUET

Conseiller : Madame Marie-Christine DELAUBIER

Greffier lors des débats : Madame X Y

ARRÊT :

prononcé le 11 Mars 2021, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame A, conseiller faisant fonction de président, et par Madame X Y, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCEDURE

La SAS Schweitzer Maudit Industries a fait l’objet d’un contrôle de l’application des législations de sécurité sociale pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 par l’URSSAF du Morbihan, à l’issue duquel une mise en demeure de payer une somme de 9156 euros lui a été notifiée le 5 décembre 2012, pour non-respect du caractère collectif de la prévoyance complémentaire mise en place par la société.

La société Schweitzer Maudit Industries a saisi la commission de recours amiable le 27 décembre 2012 et par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 avril 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Sarthe d’un recours à l’encontre de la décision implicite de rejet, la commission n’ayant pas statué.

Dans le cadre de la procédure de première instance, la société Schweitzer Maudit Industries a demandé la mise en cause de la CNP Assurances et de la société Mercer.

Par jugement en date du 9 juillet 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Sarthe a :

— reçu la société Schweitzer Maudit Industries en son recours et l’a dit bien fondé ;

— annulé le redressement notifié à la société Schweitzer Maudit Industries qui a donné lieu à la mise en demeure de l’URSSAF des Pays de la Loire du 5 décembre 2012, pour un montant de 9156 euros au titre des cotisations et majorations ;

— débouté les parties de leurs autres demandes y compris celles formées sur le fondement de l’article

700 du code de procédure civile.

Le tribunal a en effet considéré que le caractère collectif du contrat est établi et qu’il répond aux exigences légales pour permettre la déduction de l’assiette des cotisations et que la clause litigieuse correspond à une erreur matérielle.

Par lettre recommandée avec accusé de réception postée le 29 juillet 2014, l’URSSAF des Pays de la Loire a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 24 octobre 2016, l’affaire a fait l’objet d’une radiation pour défaut de diligence des parties. Cette ordonnance a fait l’objet d’une rectification d’erreur matérielle le 2 mai 2017.

Par conclusions de ré-enrôlement reçues au greffe le 8 octobre 2018, l’URSSAF des Pays de la Loire a sollicité la réinscription de ce dossier.

L’affaire a été convoquée à l’audience du conseiller rapporteur de la chambre sociale de la cour d’appel d’Angers du 5 janvier 2021. À cette audience, toutes les parties sont présentes ou représentées.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions récapitulatives et en réponse déposées à l’audience, régulièrement soutenues et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, l’URSSAF des Pays de la Loire demande à la cour de :

— la recevoir en son appel et la dire bien fondée ;

— réformer le jugement déféré et confirmer le redressement de cotisations effectué au titre du non-respect du caractère collectif du contrat de prévoyance à hauteur de 8059 euros.

Au soutien de ses intérêts, l’URSSAF des Pays de la Loire fait valoir que :

— la condition du respect du caractère collectif des régimes de prévoyance complémentaire ou de retraite supplémentaire est une condition impérative pour pouvoir bénéficier des exonérations de cotisations sur les contributions patronales au financement des régimes complémentaires de prévoyance ;

— l’inspecteur lors du contrôle a constaté, à la lecture du contrat de prévoyance, souscrit auprès de la société CNP Assurances que ce dernier excluait de ses garanties certaines catégories de salariés en fonction de leur âge ;

— la circulaire du 30 janvier 2009 n’est pas venue ajouter de règles nouvelles pour bénéficier des exonérations de cotisations fixées à l’article L. 242'1 du code de la sécurité sociale, le tribunal s’est mépris en considérant qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne définissait la notion de caractère collectif jusqu’au décret du 9 janvier 2012 ;

— la circonstance que la clause litigieuse n’a pas été mise en 'uvre dans les faits, aucun salarié n’ayant été exclu du fait de son âge, ne peut avoir pour effet de restituer au contrat son caractère collectif ;

— la cour d’appel de Rennes et la Cour de cassation ont validé le redressement contesté par la société SWM Services et la société Schweitzer Mauduit sans retenir l’existence d’une omission ou d’une erreur dans la rédaction de la clause litigieuse.

Par conclusions d’intimée et récapitulatives n°2 déposées à l’audience, régulièrement soutenues et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries conclut :

— à la recevabilité et au caractère bien fondé de ses demandes ;

— qu’elle a respecté les dispositions de l’article L. 242'1 alinéa 6 dans sa rédaction applicable ;

— que la circulaire DSS/5B/2009/32 du 30 janvier 2009 ne peut ajouter à la loi et ne s’impose pas à elle ;

— que les articles 18'4 des contrats de prévoyance en cause qu’elle a souscrits par l’intermédiaire de la société Mercer France auprès de la CNP Assurances, ont été rédigés de manière incorrecte sans que cela entraîne une méconnaissance des dispositions de l’article L. 242'1 alinéa 6 du code de la sécurité sociale ;

— que dans les faits aucun salarié n’a été discriminé ;

— que sa contribution au financement de la retraite supplémentaire ainsi constituée doit être exclue de l’assiette des cotisations sociales dans la mesure où cette prestation revêt un caractère collectif et obligatoire déterminé dans le cadre d’une des procédures mentionnées à l’article L. 911'1 du code de la sécurité sociale ;

en conséquence :

— à la confirmation du jugement qui a annulé l’entier redressement opéré par l’URSSAF ayant donné lieu à une mise en demeure pour un montant de 9156 euros ;

— à l’annulation de la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de l’URSSAF des Pays de la Loire ;

— à l’infirmation du jugement qui l’a déboutée de ses autres demandes ;

— qu’il soit jugé que les sociétés Mercer France et CNP Assurances ont, par leurs divers manquements, causé le redressement opéré par l’URSSAF et un préjudice qu’il conviendra de réparer ;

— que l’arrêt à intervenir soit déclaré commun aux sociétés Mercer France et CNP Assurances ;

en toute hypothèse :

— à la condamnation de l’URSSAF des Pays de la Loire à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Au soutien de ses intérêts, la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries fait valoir que :

— les salariés de plus de 60 ans ont bénéficié et continuent de bénéficier sans restriction du régime collectif et à verser une prime d’assurance calculée au même taux que l’ensemble des autres salariés ;

— en sa qualité de gestionnaire des régimes, la société Mercer France lui a formellement indiqué que son système informatique n’était de toute façon pas paramétré pour exclure les salariés du fait de leur âge ;

— la société Mercer France a également confirmé qu’aucun traitement manuel n’a conduit à l’exclusion de salariés âgés de plus de 60 ans ;

— la CNP Assurances a, quant à elle, confirmé sa responsabilité dans le caractère erroné de la rédaction des contrats d’assurance et confirmé qu’il n’était pratiqué ni exclusion ni modulation des garanties du fait de l’âge et ce depuis l’origine des contrats ;

— la rédaction des articles 18'4 des contrats cadres et non cadres incriminés constitue une évidente erreur matérielle non créatrice de droit ni d’obligations ;

— le tribunal de première instance a justement interprété la clause au regard des autres documents décrivant le régime comme instaurant des garanties identiques pour l’ensemble des salariés et du fait que ce régime en pratique bénéficiait à l’ensemble des salariés ;

— depuis le 1er janvier 2016, il est instauré une modulation des redressements en fonction de la gravité des erreurs ou manquements de l’employeur selon l’article L. 133'4'8 du code de la sécurité sociale ;

— l’article 18'4 des contrats souscrits ne comporte pas de cas d’exclusion en fonction de l’âge mais uniquement des exceptions à la cessation des garanties à la date de la liquidation de la pension vieillesse ;

— l’URSSAF a fondé le redressement sur une circulaire ministérielle qui établit une série de conditions qui ajoutent aux dispositions pourtant très claires de la loi, alors qu’une circulaire n’a aucun pouvoir normatif ;

— la décision de la cour d’appel de Rennes s’en tient strictement à la lettre du contrat d’assurance, qui est contraire à l’acte fondateur du régime qui ne prévoyait aucune exclusion, celui-ci devant bénéficier à tous les salariés uniformément ;

— la Cour de cassation n’a pas répondu à l’intégralité des moyens de cassation soulevés ;

— la société CNP Assurances est la rédactrice des contrats litigieux et la société Mercer France les lui a vendus, en qualité d’intermédiaire courtier de conseil.

Par conclusions déposées au greffe le 5 janvier 2021, régulièrement soutenues, et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, la SAS Mercer France conclut :

à titre principal :

— à la confirmation du jugement de première instance en ce qu’il l’a mise hors de cause du présent litige ;

à titre subsidiaire :

— à la confirmation du jugement de première instance en ce qu’il a annulé le redressement opéré par l’URSSAF sur le chef des contributions patronales versées par la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries au titre du régime de prévoyance complémentaire ;

en toute hypothèse :

— au rejet de toutes les demandes présentées par la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries et l’URSSAF à son encontre;

— à la condamnation de la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries à lui verser la somme de 5000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— à la condamnation de la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries et l’URSSAF aux entiers dépens.

Au soutien de ses intérêts, la SAS Mercer France fait valoir que :

— le litige l’opposant à la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries sur un différend contractuel ne relève en aucun cas de la compétence des juridictions du contentieux de la sécurité sociale ;

— la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries ne peut prétendre avoir un intérêt à ce que la décision à intervenir lui soit déclarée opposable ;

— il est parfaitement établi que les régimes de prévoyance instaurés au sein du groupe SWM présentent le caractère collectif et obligatoire au sens de l’article L. 242'1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable, conformément au règlement des régimes et aux articles 1 et 4 des contrats d’assurance ;

— l’article 18'4 des contrats d’assurance comporte une erreur matérielle commise par la CNP ;

— ses systèmes d’information ne lui permettent aucune prise en compte de l’âge du salarié pour attribuer des prestations ou les en écarter ;

— la volonté de n’appliquer aucune distinction selon l’âge du salarié est encore révélée par les informations remises au comité d’entreprise, la notice établie par l’assureur et remise à chaque salarié, la communication intranet, l’ensemble des documents techniques établis lors de la préparation des règlements et les communications individuelles faites le 24 décembre 2008 adressées à chaque salarié ;

— il est de jurisprudence constante que la simple erreur ou omission ponctuelle spontanément corrigée par l’employeur ne fait pas perdre au régime de prestations complémentaires de prévoyance son caractère obligatoire et collectif ;

— l’URSSAF pour justifier le redressement s’est fondée sur la seule circulaire du 30 janvier 2009 comme l’indique clairement la lettre d’observations, cette circulaire n’étant pourtant pas opposable à l’entreprise ;

— cette circulaire ajoute à la loi des conditions pour pouvoir bénéficier de l’exonération des cotisations patronales de sécurité sociale ;

— à titre infiniment subsidiaire, le redressement ne pourra qu’être annulé en considération des circonstances dans lesquelles la société applique le régime et que 100 % des salariés quel que soit leur âge ont bien été affiliés aux contrats d’assurance conclus auprès de la CNP.

Par conclusions déposées au greffe le 5 janvier 2021, régulièrement soutenues et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, la SA CNP Assurances conclut :

— qu’il soit jugé que l’URSSAF des Pays de la Loire est mal fondée en son appel principal à l’encontre du jugement de première instance ;

— qu’il soit jugé que la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer

Mauduit Industries est mal fondée en son appel incident ;

— à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

— à la condamnation conjointement et solidairement de l’URSSAF des Pays de la Loire et de la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous les dépens d’appel.

Au soutien de ses intérêts, la CNP Assurances fait valoir que :

— sur la période contrôlée de juillet à août 2012, la notion de régime collectif n’était définie que par des circulaires de la direction de la sécurité sociale, selon une interprétation restrictive qui n’a aucune force juridique contraignante, l’évolution rédactionnelle de l’article L. 242'1 du code de la sécurité sociale n’intervenant que par la loi n° 2010'1594 du 20 décembre 2010 et surtout par le décret du 9 janvier 2012 prévoyant une période transitoire initialement fixée au 31 décembre 2013, puis reportée par circulaire au 30 juin 2014 ;

— seules les dispositions fondées sur le sexe sont prohibées, mais pas celles fondées sur l’âge ;

— l’ensemble des salariés était bien affilié au régime de prévoyance supplémentaire et bénéficiait des garanties jusqu’à leur départ de l’entreprise ;

— il n’appartient pas à l’URSSAF d’apprécier la conformité d’une disposition d’un contrat d’assurance au code du travail et notamment aux articles L. 1132'1 et suivants relatifs au principe de non-discrimination ;

— aucune appréciation ne peut être portée sur les relations contractuelles entre un assureur et une entreprise dans le cadre de la présente instance et la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries ne justifie d’aucun intérêt quant à sa mise en cause.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le caractère collectif du régime de prévoyance

L’article L. 242-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale pose le principe de l’assujettissement à cotisations sociales de toutes les sommes versées en contrepartie ou à l’occasion du travail.

L’article L.242-1 du code de la sécurité sociale alinéa 6 dans la rédaction issue de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 applicable à une partie de la période contrôlée, dispose:

« Sont exclues de l’assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées par les organismes régis par les titres III et IV du présent code ou le livre II du code de la mutualité, par des entreprises régies par la code des assurances…, lorsqu’elles revêtent un caractère collectif et obligatoire déterminé dans le cadre d’une des procédures mentionnées à l’article L. 911-1 du présent code».

L’article L. 242-1 du code de la Sécurité Sociale, modifié par la loi n° 2010-1594 du 22 décembre 2010, dispose :

'Sont exclues de l’assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit par les organismes régis par les titres III et IV du livre IX du présent code ou le livre II du code de la mutualité, par des entreprises régies par le code des assurances ainsi que par les institutions mentionnées à l’article L. 370-1 du code des assurances et proposant des contrats mentionnés à l’article L. 143-1 dudit code… lorsque ces garanties entrent dans le champ des articles L. 911.1 et L. 911-2 du présent code, revêtent un caractère obligatoire et bénéficient à titre collectif à l’ensemble des salariés ou à une partie d’entre eux sous réserve qu’ils appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs déterminés par décret en Conseil d’Etat.. ».

En application de l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale ces garanties collectives en complément de celles qui résultent de l’organisation de la sécurité sociale sont déterminées soit par voie de conventions ou d’accords collectifs, soit à la suite de la ratification par la majorité des intéressés d’un projet d’accord proposé par le chef d’entreprise, soit par une décision unilatérale du chef d’entreprise constatée dans un écrit remis par celui-ci à chaque intéressé.

Il résulte de ces textes que l’exonération est subordonnée au caractère collectif et obligatoire des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance qui entrent dans le champ des articles L. 911.1 et L. 911-2 du code de la sécurité sociale.

Le caractère collectif oblige l’employeur à faire bénéficier l’ensemble des salariés du régime de prévoyance, ou à une partie d’entre eux sous réserve qu’ils appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs et donc à ne pas exclure de son bénéfice des salariés en raison de leur âge.

Cette appréciation du caractère collectif des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance ne résulte pas de l’interprétation de la circulaire du 30 janvier 2009 mais bien des dispositions précitées du code de la sécurité sociale. Dès lors que certains salariés sont exclus du bénéfice du régime de prévoyance en raison de leur âge, ce régime ne peut avoir un caractère collectif.

Il est indifférent que le redressement notifié à la SAS Schweitzer Mauduit Industries vise la circulaire du 30 janvier 2009 dénuée de valeur normative, puisque ce redressement vise au premier chef l’article L. 242-1 modifié du code de la sécurité sociale applicable en l’espèce, par l’effet de la loi du 21 août 2003.

Le contrat d’assurance collectif à adhésion obligatoire de prévoyance souscrit par la SAS Schweitzer Mauduit Industries stipule dans son article 18-4 :

«Sous réserve des stipulations de l’article 19 du présent contrat, le droit à garantie cesse pour chaque assuré et ses ayants droit :

- A la date d’effet de la résiliation du présent contrat,

- A la date de cessation du contrat de travail liant l’assuré au souscripteur ou à la date à laquelle il ne fait plus partie des catégories de personnel couvertes par le présent contrat,

- A la date de liquidation de la pension vieillesse de la sécurité sociale, sauf exceptions :

• Au plus tard au 60e anniversaire de l’assuré en cas de perte totale et irréversible d’autonomie (PTIA),

• Au 60e anniversaire du conjoint ou de son partenaire pour la garantie double effet,

• Au 65e anniversaire de l’assuré en cas d’incapacité temporaire de travail,

• Au 75e anniversaire de l’assuré pour les autres garanties. »

L’article 18-4, clairement rédigé qui ne peut être sujet à interprétation sauf à le dénaturer, exclut en théorie, comme le soutient l’URSSAF dans ses écritures d’appel, des salariés en fonction de leur âge, d’une perte d’autonomie ou d’une incapacité temporaire de travail à partir d’un certain âge.

Les dispositions de cet article étant parfaitement claires, il n’y a pas lieu de les interpréter à la lumière d’autres documents versés aux débats. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de retenir l’existence d’une erreur matérielle dans la rédaction de cet article.

Les contrats d’adhésion souscrits après de la société CNP Assurances ne revêtent donc pas de caractère collectif. Le fait que dans la pratique aucun salarié n’a été exclu des régimes de prévoyance en raison de son âge est sans incidence à cet égard.

Le 26 septembre 2013, les sociétés Schweitzer Mauduit Industries, CNP Assurance et CNP IAM ont signé deux avenants 'interprétatifs', à effet du 1er janvier 2009, pour chacun des contrats non cadres (contrat n° 0295 W) et cadres (contrat n° 0293T), ayant pour 'objet de confirmer la commune volonté initiale des parties et de corriger en conséquence une erreur matérielle' en décidant d’une nouvelle rédaction de l’article 18-4.

Pour autant, ces avenants qui n’ont d’effet qu’entre les parties, en application de l’article 1165 (ancien) du code civil, ne peuvent avoir d’effet à l’égard de l’URSSAF tiers au contrat et modifier rétroactivement l’assiette des cotisations objet du redressement notifié antérieurement. Ces avenants ont d’ailleurs été élaborés postérieurement à la lettre d’observations.

A défaut de caractère collectif des contrats de prévoyance souscrits par la SAS Schweitzer Mauduit Industries, elle ne peut prétendre à une exonération de cotisations et le redressement notifié par l’URSSAF doit être validé à hauteur de 8059 euros, le jugement de première instance étant infirmé en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes

Il ne relève pas de la compétence de la cour, statuant en matière de contentieux de la sécurité sociale, de se prononcer sur les responsabilités des sociétés Mercer France et CNP Assurances au regard des manquements qu’elles auraient pu commettre dans la relation contractuelle avec la SAS Schweitzer Mauduit Industries aux droits de laquelle vient désormais la SAS Schweitzer Mauduit Holding.

En revanche, l’intérêt de la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries de demander à ce que la présente décision soit déclarée commune aux sociétés Mercer France et CNP Assurances n’est pas discutable. Il convient donc de faire droit à la demande de la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries de ce chef.

La SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries est condamnée au paiement des dépens d’appel.

Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Les demandes présentées de ce chef doivent donc toutes être rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe en dernier ressort,

INFIRME le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Sarthe du 9 juillet 2014 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

VALIDE le redressement opéré sur le chef « prévoyance complémentaire non respect du caractère collectif » à hauteur de 8059 euros ;

CONDAMNE la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industries à régler à l’ URSSAF des Pays de la Loire la somme de 8059 euros, sous réserve des majorations de retard restant à courir jusqu’à complet paiement ;

DECLARE le présent arrêt commun à la SAS Mercer France et la SA CNP Assurances;

REJETTE les demandes présentées sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS Schweitzer Mauduit Holding venant aux droits de la SAS Schweitzer Mauduit Industrie au paiement des dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

X Y Z A

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