Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 4 juillet 2017, n° 17/02918

  • Sociétés·
  • Données liées·
  • Expertise·
  • Client·
  • Base de données·
  • Astreinte·
  • Référé·
  • Ordonnance·
  • Demande·
  • Document

Chronologie de l’affaire

Commentaires sur cette affaire

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. En savoir plus

Sur la décision

Texte intégral

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 04 JUILLET 2017

(n° 510 , 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 17/02918

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 30 Janvier 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS
- RG n° 16/0000673

APPELANTES

SA VIAMEDIS agissant en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

C C DE MOYENS ASSURANCES (AMA) agissant en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

C C DE MOYENS RETRAITE (AMR) agissant en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

R e p r é s e n t é e s p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

assistées de Me Franck VALENTIN et de Me Marina GAU plaidant pour la SELARL ALTANA, avocat au barreau de PARIS, toque : R 021

INTIMEE

SAS JALMA HEALTH SERVICES pris en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

Représentée et assistée de Me Nicolas E de l’C D E

ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : J046

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Juin 2017, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Mireille QUENTIN DE GROMARD, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Martine ROY-ZENATI, Présidente de chambre

Mme Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Mme Mireille QUENTIN DE GROMARD, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Véronique COUVET

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Martine ROY-ZENATI, président et par Mme Véronique COUVET, greffier.

FAITS ET PROCEDURE

Le 5 janvier 2006 la SA Jalma a conclu avec la SAS Viamedis un 'accord cadre pour la commercialisation et l’utilisation de Tpassur par Viamedis’ et portant sur la commercialisation du logiciel dénommé Tpassur devenu par la suite Experteo.

Par courrier du 28 juin 2013 la SAS Jalma a résilié ce contrat de partenariat avec effet au 31 décembre 2013.

Alléguant de faits de contrefaçon par la société Viamedis par l’utilisation de la solution Argos créée par cette dernière, de concurrence déloyale et de débauchage d’une employée, la SAS Jalma Health Services (JHS) a obtenu du Président du tribunal de grande instance de Paris par ordonnances en date des 16 et 19 octobre 2015 rendues sur requêtes sur le fondement des articles 145 et 493 du code de procédure civile et L. 343-1 du code de la propriété intellectuelle, l’autorisation de faire procéder à des mesures de constat et de saisie-contrefaçon dans les locaux de la SA Viamedis au Perreux-sur-Marne et à Paris.

Les mesures de saisie ont été réalisées le 20 octobre 2015 et deux procès-verbaux ont été dressés par l’huissier instrumentaire.

Saisi par la SAS Viamedis de demandes de rétractation des ordonnances rendues les 16 et 19 octobre 2015 le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a principalement, par deux ordonnances distinctes du 8 janvier 2016 :

— déclaré irrecevable comme tardive et mal fondée la contestation de la société Viamedis relative aux mesures de saisie-contrefaçon autorisées par l’ordonnance du 16 octobre 2015,

— ordonné la rétractation des ordonnances des 16 et 19 octobre 2015 en ce qu’elles avaient autorisé les mesures d’instruction sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile dans les locaux de la société Viademis à Paris et au Perreux-sur-Marne portant sur la 'commercialisation par la société Viamedis d’une solution concurrente, présentant les mêmes fonctionnalités que Tpassur-Experteo auprès de clients communs ou de tiers',

— ordonné à l’huissier instrumentaire ayant opéré à Paris et au Perreux-sur-Marne de restituer à la société Viamedis l’intégralité des documents appréhendés à ce titre, sous quelque forme que ce soit, et d’en détruire sans délai toute copie éventuellement réalisée par ses soins,

— interdit à la société JHS de faire référence, d’invoquer ou d’exploiter de quelque manière que ce soit l’une quelconque des informations obtenues à l’occasion des opérations diligentées le 20 octobre 2015 relative à la 'commercialisation par la société Viamedis d’une solution concurrente, présentant les mêmes fonctionnalités que Tpassur-Experteo auprès de clients communs ou de tiers',

— ordonné la rétractation de l’ordonnance du 19 octobre 2015 ayant autorisé la société JHS à obtenir des informations relatives au débauchage d’une de ses ancienne salariée.

Saisi par la société JHS d’une demande d’interdiction de commercialisation par la société Viamedis de la solution concurrente Argos et de mesures probatoires 'demandées au regard de la probable réutilisation par Viamedis de tout ou partie des données liées à la solution Tpassur-Experteo dans la solution concurrente Argos et sur la possible contrefaçon de bases de données', le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a, par ordonnance contradictoire du 25 février 2016 principalement :

— débouté la société JHS de sa demande de cessation de la distribution de la solution concurrente Argos auprès des huit clients en l’absence de trouble manifestement illicite,

— ordonné une expertise en neuf points aux fins de comparaison des solutions Tpassur et Argos aux frais avancés de la société JHS.

Par ordonnance de référé du 21 juillet 2016 l’expertise a été déclarée commune d’une part à l’C de Moyens Malakoff -devenue par la suite C de Moyens Retraites (AMR)- intervenue au titre de la conception, du développement et de l’utilisation de la solution Argos et, d’autre part, à l’C de Moyens Assurances (AMA) utilisatrice de la solution Argos.

Par ordonnance contradictoire du 30 janvier 2017 le juge chargé du contrôle des expertises au tribunal de grande instance de Paris, saisi par la société JHS, a :

— supprimé les points 1, 2 et 4 de l’ordonnance de référé rendue le 25 février 2016 par le tribunal de grande instance de Paris,

— dit que pour le surplus de la mesure, celle-ci demeure inchangée, M. l’expert devant toutefois répondre aux points 5 et 8 en tenant compte des incidences qu’il a formulées du fait de la restriction précédente,

— débouté la société Viamedis et les associations AMR et AMA de leur demande visant à voir cesser la mesure d’expertise,

— ordonné à la société Viamedis et aux associations AMR et AMA, et au besoin les condamne, de communiquer à l’expert les offres et propositions commerciales (écrites ou électroniques) concernant la solution 'Argos’ formulées par la société Viamedis tel que demandé par ce dernier en point 7 de sa note aux parties n°1 suite à la réunion du 1er juin 2016,

— dit que ces pièces seront transmises à l’expert dans un délai maximal de 30 jours à compter de la signification de l’ordonnance, et passé ce délai sous astreinte provisoire de 400 euros par jour de retard dans la limite de 60 jours,

— s’est réservé la liquidation de l’astreinte.

La SA Viamedis et les associations AMR et AMA ont fait appel de cette décision le 7 février 2017.

Dans leurs conclusions régulièrement transmises le 30 mai 2017, auxquelles il convient de se reporter, la SA Viamedis et les associations AMR et AMA demandent à la cour sur le fondement des articles 145, 146, et 236 et suivants du code de procédure civile de :

—  in limine litis, se déclarer incompétent pour connaître de la demande formée par la société Jalma Health Services portant sur la liquidation de l’astreinte prononcée par le juge en charge du contrôle des expertises le 30 janvier 2017,

A titre principal :

— infirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 30 janvier 2017 et, statuant à nouveau :

— ordonner qu’il soit mis un terme à la mesure d’expertise ordonnée le 25 février 2016 et, dans l’hypothèse où un rapport d’expertise provisoire ou définitif aurait déjà été rendu, interdire à la société Jalma Health Services de l’invoquer, de l’exploiter, ou d’en faire état de quelque manière et sous quelque forme que ce soit, ainsi que de tous actes et documents échangés au cours de la procédure d’expertise en question,

— débouter la société Jalma Health Services de sa demande de communication de pièces complémentaires formée devant le Juge en charge du contrôle de l’expertise et lui interdire d’invoquer, d’exploiter ou de faire référence de quelque manière que ce soit et sous quelque forme que ce soit aux pièces qui ont été communiquées à ce titre,

— dans l’hypothèse où ces pièces seraient exploitées dans ou en relation avec le rapport d’expertise à intervenir clôturant les opérations pour lesquels il a été missionné, ordonner à l’expert d’expurger ce rapport de toute référence aux dites pièces et de toute conclusion en découlant, et dire que seule la version expurgée du rapport d’expertise pourra le cas échéant être exploitée par les parties,

— débouter la société Jalma Health Services de ses demandes reconventionnelles ainsi que de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions,

— subsidiairement et dans l’hypothèse où la Cour retiendrait sa compétence, débouter la société Jalma Health Services de sa demande de liquidation de l’astreinte prononcée par le juge en charge du contrôle des expertises le 30 janvier 2017,

— en tout état de cause, débouter la société Jalma Health Services de sa demande de communication complémentaire de pièces sous astreinte formée en cause d’appel,

— condamner la société Jalma Health Services au versement de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,

— dire que les dépens de l’appel pourront être recouvrés directement par Me F G-H conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions régulièrement transmises le 26 mai 2017, auxquelles il convient de se reporter, société JHS demande à la cour sur le fondement des articles 145, 809 du code de procédure civile, L.121-3, L.131-2 et L.131-4 du code des procédures civiles d’exécution de :

— confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

— débouter la société Viamedis et les associations AMR et AMA de leurs moyens, fins et conclusions,

— dire et juger que les pièces communiquées par la société Viamedis le 14 mars 2017, incomplètes et biffées, ne satisfont pas au 'prescrit’ de l’ordonnance du 30 janvier 2017,

— liquider l’astreinte dans la limite fixée par le juge chargé du contrôle et condamner à ce titre la société Viamedis à lui payer la somme de 24 000 euros,

— faire injonction à la société Viamedis, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, de lui communiquer, sans biffer aucune mention (notamment de prix) :

— ses propositions commerciales et contrats Argos qu’elle a versés aux débats le 14 mars 2017 avec les clients communs A3M, Mutuelle Bleue et X,

— ses propositions commerciales et contrats Argos avec les clients communs B, Y, Z et A, charge à elle de justifier qu’elle a vainement réclamé la copie de ces documents aux dits clients si par impossible elle affirmait ne pas les retrouver dans ses propres dossiers,

— ses factures adressées à chacun de ces clients A3M (devenue AMA), Mutuelle Bleue, X, B, Y, Z et A, pour l’utilisation de la solution Argos,

— se réserver la liquidation de la nouvelle astreinte,

— condamner la société 'Viamedis à verser chacune à JHS’ (sic) une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice résultant de sa résistance abusive à la communication ordonnée les 25 février 2016 et 30 janvier 2017,

— condamner la société Viamedis et les associations AMR et AMA à lui payer chacune une somme de 5 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions transmises et développées lors de l’audience des débats.

SUR CE, LA COUR,

1 – sur la demande de modification de la mission de l’expert

Considérant qu’en application de l’article 236 du code de procédure civile le juge qui a commis le technicien ou le juge chargé du contrôle peut accroître ou restreindre la mission confiée au technicien ;

Considérant que par ordonnance du 25 février 2016, dont il n’a pas été relevé appel, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a ordonné une mesure d’expertise portant sur les points suivants (numérotation ajoutée par la Cour) :

1 – 'se faire remettre la copie réalisée le 19 octobre 2015 des données liées à la solution Tpassur-Experteo ainsi que les scellés constitués le 20 octobre 2015 contenant la copie des données liées à la solution Argos et les moyens mis en oeuvre par Viamedis pour les obtenir ;

2 - ouvrir les scellés et comparer les données ;

3 - se faire remettre à l’occasion de la première réunion d’expertise, tous documents contractuels et comptables pertinents à déterminer entre les parties et l’expert désigné, pour accomplir sa mission,

4 - relever chaque donnée commune aux solutions Tpassur et Argos et calculer l’étendue de ces identités, en nombre et pourcentage ;

5 - se faire remettre tous documents contractuels et comptables et entendre tous sachants, concernant notamment les moyens mis en oeuvre par Viademis pour obtenir les données utilisées dans la base de données liée à la solution Argos (accords contractuels de cession, licence, prestations, extractions) et attestant de leur provenance, ainsi que ceux permettant de déterminer la date de conception de la solution 'Argos’ ;

6 – donner son avis sur l’origine des données liées à la solution Argos et sur celles liées à la solution Tpassur-Experteo ;

7 – déterminer les fonctionnalités communes entre les solutions Experteo et Argos et se faire remettre à cet effet les documents de présentation de chacune des deux solutions, ainsi que les offres et propositions commerciales (écrites ou électroniques) concernant la solution 'Argos', formulées par la société Viamedis ;

8 – vérifier si des similitudes portent sur des données enrichies, leur organisation, leur classification, la structure, l’architecture et/ou l’arborescence des deux bases de données, en indiquant si ces éléments communs sont imposés par des contraintes techniques ;

9 – donner tous éléments techniques et de fait utiles à la solution du litige, de nature à permettre de déterminer les responsabilités encoures et s’il y a lieu les préjudices subis, compte tenu notamment des dates et moyens de conception de la solution Argos et de commercialisation de celle-ci par la société Viamedis auprès des clients communs signataires de contrats tripartites avec JHS' ;

Considérant que les opérations d’expertise ont démarré le 1er juin 2016 et que sept réunions se sont tenues avant que la société JHS informe par courrier du 1er décembre 2016 le juge en charge du contrôle des expertises, et le saisissant par la même de cette difficulté, de ce qu’elle renonçait à demander à l’expert de mener à bien les points 1, 2 et 4 de sa mission consistant à comparer les bases de données à partir des scellés, au motif d’un risque avéré de nullité des opérations de saisie effectuées le 20 octobre 2015 dans les locaux de Viamedis en ce que les documents remis ce jour-là à l’huissier porteraient sur un ensemble plus large que la solution Argos objet du litige et qu’elle ne pouvait prendre le risque que l’expertise soit menée à son terme sur ces points à partir de scellés contestés et qu’ensuite la société Viamedis et les associations AMR et AMA demandent au fond l’annulation de la saisie et du rapport d’expertise ;

Considérant que les intimés s’opposent à cette limitation de la mission de l’expert faisant valoir que l’abandon de ces mesures, qui constituent la substance même de l’expertise dont l’objet tient à la comparaison des solutions Argos et Experteo aux fins d’apporter des éléments permettant à la société JHS de confirmer ou d’infirmer l’existence d’une contrefaçon alléguée de la base de données Experteo par la solution Argos, et le maintien des seules mesures accessoires emportent dénaturation de la mesure d’expertise ;

Considérant qu’au soutien de la demande d’expertise ayant conduit à l’ordonnance du 25 février 2016 la société JHS a fait valoir devant le juge des référés, ainsi que cela résulte de ses conclusions pour l’audience du 21 janvier 2016 développées oralement devant lui, la nécessité de comparer les données de la solution Tpassur-Experteo avec celles de la solution Argos au regard de la probable réutilisation par la société Viamedis de tout ou partie des données liées à la solution Tpassur-Experteo dans la solution concurrente Argos et sur la possible contrefaçon de base de données ;

Que le juge des référés a motivé la demande d’expertise comme suit :

'En l’occurrence, la société JHS établit avoir réalisé au prix d’investissements importants, la collecte massive de données pour constituer le contenu de la base experteo et l’actualisation de celle-ci et revendique les droits sui generis du producteur de données que Viamedis ne lui a pas contestés, lorsque les parties ont conclu le contrat-cadre en 2006.

En effet, Viamedis a reconnu la propriété de Jalma sur l’ensemble des informations et données mises à sa disposition, la protection de celles-ci au titre tant du droit d’auteur que du droit spécifique de la protection des bases de données et s’est engagée à respecter strictement les droits de propriété intellectuelle de son cocontractant.

JHS justifie par ailleurs qu’avant même la résiliation du contrat, à effet du 1er janvier 2014, la société Viamedis a participé en qualité de maître d’oeuvre à l’élaboration d’un outil permettant d’analyser en temps réel le positionnement des tarifs selon les pratiques du marché de la santé et mettre en place une 'base tarifaire Marché santé’ (pièce 31 Viamedis).

JHS apparaît donc légitime eu égard à la chronologie des faits et au développement par son adversaire d’une solution ayant les mêmes prospects et les mêmes objectifs, de craindre une

probable reprise des données sur lesquelles elle dispose de droits, en violation des dispositions

contractuelles et en violation de la clause de confidentialité insérée dans les contrats tripartites (article 9 alinéas 1 et 5), laquelle prohibe l’utilisation des données 'recueillies pendant l’exécution du contrat tripartite’ et qui concerne non seulement 'le flux aller’ (données collectées auprès des clients communs) et le flux retour (analyse de Jalma portant sur le montant de la dépense maximum autorisée) et ce, nonobstant le fait que la défenderesse établit par ailleurs, avoir inclus dans la base Argos, d’autres sources de données telles que celles obtenues de l’agence Technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) et du Système National d’Information Inter régimes de l’assurance maladie (SNIIRAM).

Il convient donc d’ordonner une expertise, qui apparaît l’unique moyen probatoire, eu égard au

litige potentiel existant entre les parties, aux fins de comparaison des solutions TPassur et Argos, selon les modalités fixées au dispositif de la présente ordonnance, aux frais avancés de JHS.' ;

Qu’ainsi la mission confiée à l’expert par le juge des référés et détaillée en neuf points, aux fins de comparaison des solutions Tpassur-Experteo et Argos, a été ordonnée en raison du motif légitime démontré par la société JHS d’un litige potentiel entre les parties portant sur une possible contrefaçon de base de données ;

Que dès lors la mission de l’expert ne peut être amputée de trois de ses chefs -le point 1 consistant à 'se faire remettre la copie réalisée le 19 octobre 2015 des données liées à la solution Tpassur-Experteo ainsi que les scellés constitués le 20 octobre 2015 contenant la copie des données liées à la solution Argos et les moyens mis en oeuvre par Viamedis pour les obtenir', le point 2 'ouvrir les scellés et comparer les données' et le point 4 'relever chaque donnée commune aux solutions Tpassur et Argos et calculer l’étendue de ces identités, en nombre et pourcentage' sauf à vider la mesure d’instruction de son objet principal et ce alors en outre que l’appréciation de la régularité des opérations de saisie pratiquées le 20 octobre 2015 relève des juges du fond ; que le courrier de l’expert judiciaire du 6 décembre 2016 qui émet un avis sur une interprétation possible des autres chefs de sa mission dans l’hypothèse d’une annulation des points 1, 2 et 4 est sans incidence -sauf à ce qu’il démontre au contraire le lien existant entre ces différents points- dès lors qu’en l’espèce la demande de la société JHS relève d’une appréciation juridique sur laquelle il n’appartient pas à l’expert de se prononcer ; qu’en conséquence il n’y a lieu à référé sur la demande de la société JHS de modification de la mission de l’expert ; que dès lors la demande subséquente de la société Viamedis et des associations AMA et AMR de voir ordonner qu’il soit mis un terme à la mesure d’expertise devient sans objet ;

Qu’il s’ensuit que l’ordonnance querellée doit être infirmée en ce qu’elle a supprimé les points 1, 2 et 4 de l’ordonnance de référé du 25 février 2016 et que statuant à nouveau il y a lieu de dire n’y avoir lieu à référé sur cette demande ; que cette ordonnance sera par contre confirmée, pour un motif se substituant à celui retenu par le premier juge, en ce qu’elle a débouté la société Viamedis et les associations AMA et AMR de leur demande visant à voir cesser la mesure ;

Que la demande subséquente formée en appel par la société Viamedis d’interdiction de l’utilisation du rapport d’expertise dans l’hypothèse où la Cour mettrait un terme à la mesure est dès lors sans objet ;

2 – sur la demande de communication de documents sous astreinte

Considérant que la société JHS demande de contraindre par une astreinte la société Viamedis à remettre à l’expert les offres et propositions commerciales (écrites ou électroniques) concernant la solution Argos ainsi qu’elle y a déjà été obligée par l’ordonnance du 25 février 2016 mais qu’elle refuserait de produire ;

Qu’elle fait valoir que la communication réalisée par la société Viamedis est incomplète et caviardée ce qui ne lui permettrait pas de chiffrer pleinement le préjudice subi qui doit prendre en compte le chiffre d’affaires réalisé indûment par l’appelante ;

Considérant que la société Viamedis réplique que les documents commerciaux remis le 29 mai 2016 sont conformes à l’ordonnance du 25 février 2016 ;

Considérant que l’ordonnance du 25 février 2016 prévoit au point 7 de la mission de l’expert que celui-ci devra ' déterminer les fonctionnalités communes entre les solutions Experteo et Argos et se faire remettre à cet effet les documents de présentation de chacune des deux solutions, ainsi que les offres et propositions commerciales (écrites ou électroniques) concernant la solution 'Argos', formulées par la société Viamedis’ ;

Que la société Viamedis établit avoir remis à l’expert le 29 mai 2016 sept documents commerciaux comprenant des plaquettes de démonstration, des présentations de la solution Argos telles que faites auprès de ses clients et prospects, des réponses à appel d’offres détaillées, un modèle de lettre de proposition commerciale ;

Que la communication des offres et propositions commerciales ordonnée par le juge des référés ayant pour objet de permettre la détermination des fonctionnalités communes entre les solutions Experteo et Argos dans le cadre d’une recherche d’une éventuelle contrefaçon entre ces deux solutions, la société JHS ne justifie pas avec l’évidence requise devant le juge des référés du caractère insuffisant des documents d’ores et déjà transmis par l’appelante à l’expert et de la nécessité de voir ordonner de nouveau la communication 'à l’expert des offres et propositions commerciales (écrites ou électroniques) concernant la solution 'Argos’ formulées par la société Viamedis tel que demandé par ce dernier en point 7 de sa note aux parties n°1 suite à la réunion du 1er juin 2016" ainsi que l’a retenu le premier juge dans la décision critiquée et ce alors que dans cette note n°1 précitée l’expert judiciaire ne fait qu’indiquer en son point 7 'les parties communiqueront les documents de présentation des deux solutions. Viamedis communiquera les offres et propositions commerciales concernant la solution Argos' reprenant en cela les termes même de l’ordonnance de référé du 25 février 2016 ;

Qu’il s’ensuit qu’il n’y a lieu à référé sur cette demande de communication de documents sous astreinte et que l’ordonnance attaquée doit être infirmée sur ce point ; que la demande de liquidation d’astreinte formée devant la Cour est dès lors sans objet ;

Considérant par ailleurs que devant la Cour la société JHS demande de faire injonction à la société appelante de lui communiquer, sous astreinte, sans biffer aucune mention (notamment de prix) :

— ses propositions commerciales et contrats Argos qu’elle a versés aux débats le 14 mars 2017 avec les clients communs A3M, Mutuelle Bleue et X,

— ses propositions commerciales et contrats Argos avec les clients communs B, Y, Z et A, charge à elle de justifier qu’elle a vainement réclamé la copie de ces documents aux dits clients si par impossible elle affirmait ne pas les retrouver dans ses propres dossiers,

— ses factures adressées à chacun de ces clients A3M (devenue AMA), Mutuelle Bleue, X, B, Y, Z et A, pour l’utilisation de la solution Argos,

invoquant l’impossibilité pour elle de chiffrer son préjudice ;

Considérant cependant au regard de l’objet de l’expertise ordonnée le 25 février 2016 que la communication par la société Viamedis pour chaque client commun des documents contractuels -accords conclus- et comptables -factures et chiffre d’affaires Argos- n’est pas utile et est de nature à générer un risque d’atteinte au secret des affaires et ce alors qu’il n’est pas établi que l’expert les ait réclamés pour compléter son travail de comparaison des fonctionnalités des solutions Experteo et Argos prévu au point 7 de sa mission ; qu’il s’ensuit, ajoutant à l’ordonnance attaquée, qu’il n’y a lieu à référé sur cette demande ;

Considérant par ailleurs et compte tenu du rejet de la demande de communication complémentaire que la demande de la société Viamedis de voir interdire à la société Jalma Health Services d’invoquer, d’exploiter ou de faire référence de quelque manière que ce soit et sous quelque forme que ce soit aux pièces qui ont été communiquées suite à sa demande de communication de pièces complémentaires et, dans l’hypothèse où ces pièces seraient exploitées dans ou en relation avec le rapport d’expertise à intervenir clôturant les opérations pour lesquels il a été missionné, d’ordonner à l’expert d’expurger ce rapport de toute référence aux dites pièces et de toute conclusion en découlant, et de voir dire que seule la version expurgée du rapport d’expertise pourra le cas échéant être exploitée par les parties, doit être accueillie sous réserve de préciser, comme indiqué dans le présent dispositif, la nature de ces documents ;

3 – autres demandes

Considérant que la société JHS ne caractérisant pas une faute de la société Viamedis dans la communication des documents, sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive doit être rejetée ;

Considérant, au vu des circonstances de la cause, qu’il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la présente espèce ;

Que la société JHS partie perdante supportera la charge des dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme l’ordonnance attaquée sauf en ce qu’elle a dit que pour le surplus de la mesure celle-ci demeurait inchangée et en ce qu’elle a débouté la société Viamedis et les associations AMR et AMA de leur demande visant à voir cesser la mesure,

Statuant à nouveau,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de restriction de la mesure d’expertise,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de communication de documents sous astreinte,

Y ajoutant,

Dit sans objet la demande subséquente formée en appel par la société Viamedis d’interdiction de l’utilisation du rapport d’expertise dans l’hypothèse où la Cour mettrait un terme à la mesure,

Dit sans objet la demande de liquidation d’astreinte,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de communication de nouveaux documents sous astreinte,

Interdit à la société Jalma Health Services d’invoquer, d’exploiter ou de faire référence de quelque manière que ce soit et sous quelque forme que ce soit aux avenants et proposition commerciale conclus avec les clients communs comprenant des éléments tarifaires, aux factures des clients communs et au chiffre d’affaires Argos,

Ordonne à l’expert d’expurger son rapport de toute référence aux accords conclus avec les clients communs comprenant des éléments tarifaires, aux factures des clients communs, aux tarifs pratiqués pour chacun des clients communs et au chiffre d’affaires Argos et de toute conclusion en découlant, et dit que seule la version expurgée du rapport d’expertise pourra le cas échéant être exploitée par les parties,

Rejette la demande de dommages-intérêts de la société JHS,

Rejette les demandes des parties au titre des frais irrépétibles,

Condamne la société JHS aux dépens de première instance et d’appel lesquels seront distraits au profit de Maître F G-H en application de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 4 juillet 2017, n° 17/02918