Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 14 novembre 2018, n° 17/02100

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Chronologie de l’affaire

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Me Sabrina Chemakh · consultation.avocat.fr · 15 mars 2021

L'absence de remise de l'exemplaire original de la rupture conventionnelle au salarié est une cause de nullité produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dans une affaire soumise aux juges, un employeur et son salarié avaient conclu une rupture conventionnelle du contrat de travail. Le salarié avait saisi le conseil de prud'hommes afin d'obtenir un rappel de salaire et d'indemnités de trajet, des dommages et intérêts pour harcèlement moral et pour demander que la rupture du contrat de travail soit analysée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le …

 

www.invictae-avocat.com · 19 octobre 2020

Les faits Un salarié est engagé en tant que chef d'équipe couvreur. Après 15 années de collaboration, il est décidé de conclure une rupture conventionnelle du contrat de travail. N'ayant jamais été destinataire de sa convention de rupture, le salarié saisit le Conseil de Prud'hommes de Troyes afin d'obtenir un rappel de salaire et d'indemnités de trajet, des dommages et intérêts pour harcèlement moral et pour demander que la rupture du contrat de travail soit analysée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. N'ayant pas obtenu satisfaction, le salarié interjette appel du …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Reims, ch. soc., 14 nov. 2018, n° 17/02100
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 17/02100
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Troyes, 9 juillet 2017, N° F16/00073
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Arrêt n°

du 14/11/2018

N° RG 17/02100

CRW/DB

Formule exécutoire le :

à :

SELARL LEGRAS

SELARL IFAC

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 14 novembre 2018

APPELANT :

d’un jugement rendu le 10 juillet 2017 par le conseil de prud’hommes de TROYES, section industrie (n° F 16/00073)

Monsieur B Z A

[…]

[…]

Représenté par la SELARL LEGRAS, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SAS VAILLANT COUVERTURE

[…]

[…]

Représentée par la SELARL IFAC, avocat au barreau de l’AUBE

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 septembre 2018, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Christine ROBERT-WARNET, président de chambre, et Monsieur Olivier BECUWE, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 14 novembre 2018.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Monsieur Olivier BECUWE, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Daniel BERNOCCHI, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Daniel BERNOCCHI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE :

Monsieur B Z A a été embauché le 1er juin 2000 par la SARL Vaillant, devenue la SAS Vaillant Couverture, selon contrat à durée indéterminée, en qualité de couvreur ouvrier professionnel.

Dans le dernier état des relations contractuelles, Monsieur Z A a occupé un poste de couvreur chef d’équipe, niveau III, coefficient 230 de la convention collective du bâtiment de plus de 10 salariés.

Le 17 juillet 2015, les parties ont conclu une rupture conventionnelle du contrat de travail, avec effet au 5 septembre 2015.

Le 7 mars 2016, Monsieur Z A a saisi le conseil de prud’hommes de Troyes afin d’obtenir un rappel de salaire et d’indemnités de trajet, des dommages et intérêts pour harcèlement moral et pour demander que la rupture du contrat de travail soit analysée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dans le dernier état de ses conclusions, Monsieur Z A a demandé au Conseil de prud’hommes, sous exécution provisoire, de :

— condamner la SAS Vaillant couverture à lui payer les sommes de :

• 13.292,67 euros à titre de rappel de salaire brut,

• 1.329,26 euros de congés payés afférents,

• 4.837,08 euros à titre d’indemnité de trajet,

• 40.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du harcèlement moral subi ;

— dire et juger que la rupture conventionnelle du contrat de travail ayant lié les parties doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse;

— condamner la SAS Vaillant couverture à lui payer les sommes de :

• 963,83 euros à titre de rappel d’indemnité légale de licenciement,

• 20.679,48 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

• 3.446,58 euros à titre d’indemnité de préavis;

• 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La SAS Vaillant couverture a sollicité du Conseil de :

— dire et juger Monsieur Z A irrecevable et subsidiairement mal fondé en ses demandes à caractère salarial et l’en débouter ;

— le débouter de toutes ses demandes à caractère indemnitaire ;

— le condamner à la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux éventuels dépens.

Par jugement du 10 juillet 2017, le Conseil de prud’hommes de Troyes a :

— dit Monsieur B Z A partiellement recevable et mal fondé en ses demandes ;

— débouté Monsieur B Z A de l’ensemble de ses demandes ;

— condamné Monsieur B Z A à payer à la SAS Vaillant Couverture la somme de 30,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

— condamné Monsieur B Z A aux dépens.

Le 27 juillet 2017, Monsieur B Z A a interjeté appel.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux écritures qu’elles ont transmises par RPVA :

— le 17 août 2018, pour Monsieur Z A, appelant,

— le 26 décembre 2017, pour la SAS Vaillant Couverture, intimée

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 août 2018.

Par voie d’infirmation, Monsieur Z A réitère ses demandes initiales, pour les sommes alors sollicitées sauf à porter à la somme de 4.112,30 euros la demande à titre de rappel d’indemnité légale de licenciement, à la somme de 4.655 euros la demande à titre d’indemnité de préavis et à 3.000 euros la demande au titre des frais irrépétibles.

La SAS Vaillant Couverture sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur Z A au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIFS

'Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail

Sur le rappel de salaire et congés payés afférents

* la recevabilité

Aux termes de l’article L. 1234-20 alinéa 2 du code du travail, le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.

Lorsque le salarié saisit directement le Conseil de Prud’hommes d’une contestation du solde de tout compte, celle-ci n’est valable qu’à la condition que l’employeur ait reçu la convocation à l’audience

du bureau de conciliation dans le délai de six mois de la signature

La date du reçu est une mention importante, puisqu’elle permet de connaître avec précision la date de départ du délai de dénonciation du reçu pour solde de tout compte.

En dépit de l’absence de dispositions législatives ou réglementaires mentionnant expressément la nécessité d’une date sur le reçu pour solde de tout compte, cette mention a la qualité d’une formalité substantielle. En l’espèce, le solde de tout compte produit aux débats ne porte pas de date. Il se trouve donc privé de son effet libératoire et l’employeur ne peut valablement s’en prévaloir.

Monsieur Z A est donc recevable en ses demandes à caractère salarial.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

* * * * *

* Le rappel de salaire

A l’appui de sa demande, Monsieur Z A fait valoir qu’aux termes de son bulletin de paie, il occupait les fonctions de chef d’équipe et bénéficiait, à tort, du niveau III de la convention collective, coefficient 230 correspondant aux compagnons professionnels.

Il sollicite une reclassification au niveau IV correspondant aux couvreurs chefs d’équipe, position 2, coefficient 270 de la convention collective.

La société conteste la qualification de chef d’équipe et fait valoir que le niveau IV qui correspond aux chefs d’équipe est composé de deux positions et que Monsieur Z A revendique la position 2 coefficient 270 sans aucune explication.

La mention, à compter de décembre 2010, sur les bulletins de paie de Monsieur Z A de l’emploi de 'couvreur chef d’équipe’ ne suffit pas à établir la réalité des fonctions exercées ni la volonté claire et non équivoque de l’employeur de surclasser le salarié.

Il appartient au salarié qui se prévaut d’une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu’il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu’il revendique.

L’article 12.2 de la convention collective précise que la grille de classification des ouvriers du bâtiment comporte 4 niveaux d’emplois, définis par les critères suivants :

— contenu de l’activité ;

— autonomie et initiative ;

— technicité ;

— formation, adaptation et expérience,

Selon la classification des emplois de la convention collective, les ouvriers de niveau IV/2 :

— soit réalisent, avec une large autonomie, les travaux les plus délicats de leur métier ;

— soit assurent de manière permanente la conduite et l’animation d’une équipe. (Critère: Contenu de l’activité)

Dans la limite des attributions définies par le chef d’entreprise, sous l’autorité de leur hiérarchie et dans le cadre des fonctions décrites ci-dessus, ils peuvent assumer des responsabilités dans la réalisation des travaux et assurer de ce fait des missions de représentation auprès des tiers. (Critère: Autonomie et initiative)

Ils possèdent la parfaite maîtrise de leur métier, acquise par formation professionnelle, initiale ou continue, et/ou une très solide expérience, ainsi que la connaissance de techniques connexes leur permettant d’assurer des travaux relevant de celles-ci. (Critère: technicité)

Ils s’adaptent de manière constante aux techniques et équipements nouveaux, notamment par recours à une formation continue appropriée. Ils peuvent être appelés à transmettre leur expérience, à mettre en valeur leurs capacités d’animation, au besoin à l’aide d’une formation pédagogique, et à assurer le tutorat des apprentis et des nouveaux embauchés au besoin à l’aide d’une formation pédagogique. (Critère: Formation, adaptation et expérience)

Monsieur Z A est totalement défaillant dans l’administration de la preuve qui n’incombe qu’à lui.

Il ne démontre en rien l’exercice effectif de telles fonctions.

Aucun élément ne permet d’établir que l’exercice de l’emploi de Monsieur Z A correspondait à la situation sus-évoquée.

Les attestations produites ne détaillent pas les fonctions occupées de sorte qu’il ne peut être vérifié l’adéquation entre les tâches que Monsieur Z A effectuait quotidiennement et celles de chef d’équipe décrites par la convention collective.

Au contraire, Monsieur X indique, dans son attestation, que Monsieur Z A était 'chef de chantier mais il n’avait jamais de chantier à lui comme chef, il y avait toujours un autre chef avec lui'. Il poursuit en indiquant que Monsieur Z A a travaillé 'sous les ordres’ de son frère.

Monsieur Y atteste que 'Monsieur Z A ne possédait pas de téléphone comme les autres chefs d’équipe. N’était plus chef d’équipe donc n’avait plus toutes les responsabilités alors que son statut sur sa fiche de paie était notifié qu’il était chef d’équipe.'

Cette attestation ne décrit pas davantage les fonctions effectivement exercées par Monsieur Z A .

En conséquence, Monsieur Z A ne produit aucun élément de nature à justifier une reclassification au niveau IV position 1 ou 2.

Monsieur Z A sera donc débouté de sa demande de reclassification et de ses demandes subséquentes de rappel de salaires et congés payés afférents et de rappel d’indemnité légale de licenciement.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef par substitution de motifs.

Sur l’indemnité de trajet

Sur le fondement des articles 8.11 et suivants, en particulier de l’article 8.17 de la convention collective et de l’accord Champagne-Ardenne du 23 octobre 2012 relatif aux indemnités de petits déplacements et d’outillage, l’appelant réclame le paiement de la somme de 4.838,08 euros à titre d’indemnité conventionnelle de trajet restant due pour la période 2010-2015.

L’employeur soulève la prescription de l’action, pour la période antérieure à 2013 et soutient que le système d’indemnisation mis en place dans l’entreprise était plus favorable.

Sur la prescription, la cour observe que l’article 21-V de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 a modifié l’article L. 3245-1 du code du travail en réduisant à 3 ans le délai de prescription de l’action en paiement des salaires qui était auparavant de 5 ans.

L’article 21-V de la même loi prévoit que « Les dispositions du code du travail prévues aux III et IV du présent article s’appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure » et que « Lorsqu’une instance a été introduite avant la promulgation de la présente loi,

l’action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne ».

En l’espèce, Monsieur Z A a introduit son action devant le conseil de prud’hommes le 7 mars 2016, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. À la date de la promulgation de la loi nouvelle, soit au 17 juin 2013, la prescription quinquennale sur la demande de rappel de salaires dus à compter de 2010 n’était pas acquise, de sorte que le nouveau délai de trois ans a commencé à courir à cette date sans toutefois que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée de cinq ans prévue par la loi antérieure. Il en résulte que l’action du salarié engagée par la saisine de la juridiction prud’homale le 7 mars 2016 pour les salaires exigibles à compter de 2010 est prescrite, pour la période antérieure à mars 2011.

Enfin, il est constant que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible, que pour les salariés payés au mois, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise et concerne l’intégralité du salaire afférent au mois considéré.

En conséquence, l’action en paiement des indemnités conventionnelles mensuelles est atteinte par la prescription, pour la période antérieure à mars 2011.

* * * * *

L’article 8.17 alinéa 1 de la convention collective relatif aux indemnités de trajet dispose : 'L’indemnité de trajet a pour objet d’indemniser, sous une forme forfaitaire, la sujétion que représente pour l’ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d’en revenir.'

En application des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à Monsieur Z A de rapporter la preuve du bien-fondé de sa prétention.

Si Monsieur Z A liste une série de chantiers et la durée passée sur chacun d’eux, il ne justifie d’aucun élément permettant de déterminer les dates auxquelles ces chantiers ont été réalisés, de sorte que le montant de l’indemnité ne peut être déterminé.

Au surplus, l’indemnité revendiquée à compter de 2010 est calculée à partir d’un taux applicable au 1er janvier 2013; il s’ensuit que le montant est nécessairement erroné.

Il convient par conséquent de débouter Z A de sa demande.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur le harcèlement moral

Il résulte de l’application des dispositions de l’article L.1152-1 du code du travail qu’aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteint à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Il résulte de l’application des dispositions de l’article L.1154-1 du même code, en sa rédaction applicable à l’espèce, qu’il appartient au salarié, qui invoque avoir subi des faits de harcèlement moral d’établir la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement.

Lorsque ces faits sont établis, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris en leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral. Dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Monsieur Z A fait grief à l’employeur de l’avoir mis volontairement dans la même équipe que son frère avec lequel il y avait mésentente et de l’avoir ainsi placé dans un climat conflictuel au quotidien.

Il produit deux attestations selon lesquelles l’employeur plaçait les deux frères Z A dans les mêmes équipes tout en ayant connaissance des tensions existantes.

Il fait ensuite grief à la société de lui avoir supprimé les avantages dont il bénéficiait à savoir un téléphone portable et la possibilité de conduire un camion de chantier et d’avoir été privé d’une partie de sa rémunération.

Il est attesté par son frère, Monsieur E Z A que depuis 2010, l’appelant ne possédait plus de téléphone de l’entreprise ni ne conduisait de camion de chantier.

Monsieur Z A produit également un certificat médical faisant état d’un syndrome anxiodépressif réactionnel à ses conditions de travail.

Or, le certificat médical se borne à recueillir les doléances du patient sur l’imputabilité des symptômes au travail, sans établir par eux-mêmes les moindres agissements de l’employeur, de sorte que les faits ne sont pas suffisamment établis.

Monsieur Z A soutient que le 26 juin 2015 au matin, l’employeur a voulu le renvoyer chez lui sans motif ni écrit.

Monsieur Z A communique la lettre qu’il a adressée à son employeur le jour même relatant les faits de la matinée.

Pris dans leur ensemble, ces faits sont de nature à laisser présumer l’existence d’un harcèlement moral.

Il incombe à l’employeur de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Eu égard aux éléments et attestations communiqués par l’employeur, le conseil de prud’hommes a fait une parfaite appréciation des éléments de la cause et c’est à bon droit qu’il a débouté Monsieur Z A de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur la rupture conventionnelle

Monsieur Z A soutient que la rupture conventionnelle du contrat de travail est nulle et produit dès lors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A l’appui de sa demande de nullité, il fait notamment valoir qu’aucun exemplaire de la convention ne lui a été remis.

La remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié est nécessaire à la fois pour que chacune des parties puisse demander l’homologation de la convention dans les conditions prévues par l’article L.1237-14 du code du travail, et pour garantir le libre consentement du salarié, en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en connaissance de cause.

Il est constant que l’employeur a eu un exemplaire de la convention de rupture puisque c’est lui qui l’a adressé à la DIRRECTE.

Il n’est pas mentionné sur le formulaire rempli par les parties qu’un exemplaire a été remis au salarié.

L’employeur n’apporte aucun élément de preuve tendant à démontrer la remise d’un exemplaire de la convention au salarié.

Dans ces conditions, à défaut de remise de la convention de rupture du contrat de travail à Monsieur Z A, celle-ci est atteinte de nullité et produit dès lors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur les effets de la nullité de la rupture conventionnelle

*Indemnité de licenciement

Le salarié prétend au paiement d’un rappel d’indemnité légale de licenciement, tenant compte de l’intégration de la reclassification qu’il revendique. En revanche, il ne conteste pas avoir perçu dans le cadre de la rupture conventionnelle, la somme de 8.120 euros.

Ayant été débouté en sa demande de reclassification, il sera débouté en sa demande en paiement de rappel d’indemnité légale de licenciement.

* indemnité compensatrice de préavis

Dans le cadre de la rupture conventionnelle, aucune indemnité compensatrice de préavis n’a été versée à Monsieur Z A. Par l’effet de la nullité de cette rupture conventionnelle, le salarié est bien-fondé en sa demande en paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, calculée conformément aux dispositions de la convention collective applicable.

Selon l’article 10.1 de la convention collective, la durée du préavis est de deux mois pour les salariés justifiant de plus de 2 ans d’ancienneté dans l’entreprise.

Monsieur Z A bénéficiait d’une rémunération de base de 1.800,32 euros bruts et de 13 heures supplémentaires à 125 % par mois d’un montant de 192,89 euros soit une rémunération de 1.993,21 euros bruts.

En conséquence, l’employeur sera condamné à payer à son salarié la somme de 3.986,42 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

* indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

Au jour de son licenciement, le salarié comptait plus de 2 ans d’ancienneté dans l’entreprise. Celle-ci ne justifie pas occuper moins de 10 salariés de sorte que les dispositions légales relatives à l’indemnisation du préjudice subi du fait du licenciement résultent des dispositions de l’article L 1235'3 du code du travail.

A la date de la rupture, Monsieur Z A percevait une rémunération mensuelle brute de 1.993,21 euros en moyenne sur les trois derniers mois, avait 36 ans et justifiait d’une ancienneté de 16 ans et 2 mois au sein de l’entreprise.

Compte tenu des circonstances de la rupture, de l’âge, de l’ancienneté du salarié et de sa capacité à retrouver un nouvel emploi au regard de sa formation et de son expérience professionnelle, en l’absence d’éléments complémentaires au regard de sa situation professionnelle , postérieurement à son licenciement , il sera alloué à Monsieur Z A la somme de 17.939 euros à titre de dommages-intérêts qui réparera entièrement son préjudice né de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et le jugement sera infirmé sur ce point.

Il y a lieu de préciser que toutes les condamnations sont prononcées sous réserve de déduire les cotisations salariales ou sociales éventuellement applicables.

Les conditions s’avèrent réunies pour condamner l’employeur fautif, en application de l’article L.1235-4 du code du travail, à rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement au jour de la décision judiciaire, dans la limite de six mois d’indemnités .

La SAS Vaillant Couverture sera condamnée, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, à payer à son salarié une indemnité de 1.200 euros. En revanche, elle sera déboutée en ce même chef de demande.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du 10 juillet 2017 du conseil de prud’hommes de Troyes sauf en ce qu’il a débouté Monsieur B Z A de sa demande tendant à voir dire et juger que la rupture conventionnelle du contrat de travail ayant lié les parties doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant :

Annule la convention de rupture du contrat de travail et dit qu’elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SAS Vaillant Couverture à payer à Monsieur B Z A :

• 3.986,42 euros à titre d’indemnité de préavis

• 17.939 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse

• 1.200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Précise que toute condamnation est prononcée sous déduction des éventuelles

cotisations sociales salariales applicables ;

Ordonne le remboursement, par l’employeur à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié, du jour de son licenciement au jour de la décision judiciaire, dans la limite de six mois d’indemnités ;

Déboute les parties en leurs autres demandes ;

Condamne la SAS Vaillant Couverture aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

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