Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 12 mars 2019, n° 17/07718

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Sur la décision

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

TA

Code nac : 36D

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 MARS 2019

N° RG 17/07718 – N° Portalis DBV3-V-B7B-R5FO

AFFAIRE :

[C] [M] agissant ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SA ANTONUTTI-DELMAS société anonyme au capital de 1.000.000 €, RCS PONTOISE n° 319 747 291, dont le siège social est [Adresse 1], désigné en cette qualité par jugement du Tribunal de Commerce de PONTOISE du 30 janvier 2015

C/

SA GET LOCATION

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 20 Octobre 2017 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre : 02

N° Section : 00

N° RG : 2013F00904

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Franck LAFON,

Me Martine DUPUIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Maître [C] [M] agissant ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SA ANTONUTTI-DELMAS société anonyme au capital de 1.000.000 €, RCS PONTOISE n° 319 747 291, dont le siège social est [Adresse 1], désigné en cette qualité par jugement du Tribunal de Commerce de PONTOISE du 30 janvier 2015

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20170422

Représentant : Me Nassim GHALIMI et Me LAFUSTE Paul de l’ASSOCIATION VEIL JOURDE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T06 -

APPELANT

****************

SA GET LOCATION

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentant : Me Philippe GLASER de la SELAS SELAS VALSAMIDIS AMSALLEM JONATH FLAICHER et ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J010 – Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1758544

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Janvier 2019 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Thérèse ANDRIEU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

FAITS ET PROCEDURE

La société Antonutti-Delmas, transporteur, a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 19 avril 2011.

La société Get Location était un des actionnaires de la société Antonutti-Delmas.

Lors de l’assemblée générale extraordinaire du 16 février 2012, il a été procédé à l’augmentation du capital de la société Antonutti-Delmas par compensation avec le compte courant détenu par la société Get Location.

Par actes sous seing privés des 23 mars 2012 et 23 juin 2012, les actionnaires ont cédé l’intégralité des actions qu’ils détenaient au sein du capital social de la société Antonutti-Delmas à la société CHP Logistique et Services pour un prix total de 1.420.000 € sous la condition résolutoire de l’absence d’arrêté d’un plan de redressement au bénéfice de la société Antonutti-Delmas au plus tard au 30 avril 2012.

Le 6 avril 2012, un plan de redressement a été arrêté.

La société Antonutti-Delmas a ensuite été reprise par la société CHP Logistique et services (ci-après CHP).

Par jugement du 6 décembre 2013, le tribunal de commerce de Pontoise a décidé la résolution du plan de redressement de la société Antonutti-Delmas.

Par jugement du 9 décembre 2013, le tribunal de commerce de Pontoise a ouvert une nouvelle procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Antonutti-Delmas et a nommé Me [W] [T] en qualité d’administrateur judiciaire et Me [M] en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 30 janvier 2015, le tribunal de commerce de Pontoise a prononcé la liquidation judiciaire de la société Antonutti-Delmas et a désigné Me [M] en qualité de liquidateur de ladite société ;

Par acte introductif d’instance du 26 décembre 2013 devant le tribunal de commerce de Pontoise, la société Antonutti-Delmas a fait assigner la société Get Location et M. [W] [T], es qualités de commissaire à l’exécution du plan de redressement de la société Antonutti-Delmas, devant le tribunal de commerce de Pontoise céans aux fins de voir :

Condamner la société Get Location à payer à la société Antonutti-Delmas la somme de 400 000 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2013, date de la première mise en demeure, au titre des actions souscrites et non libérées ;

Condamner la société Get Location à payer à la société Antonutti-Delmas la somme de 10 000 euros pour résistance abusive ;

Condamner la société Get Location au paiement de la somme de 10 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société Get Location au entiers dépens ;

Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

En sa qualité de liquidateur de la société Anttonutti-Delmas, Me [M] a déposé des conclusions d’intervention volontaire dans l’instance engagée devant le tribunal de commerce de Pontoise aux fins de contestation de l’augmentation de capital du 16 février 2012 par compensation avec le compte-courant d’associé et a demandé à la société Get Location de régler ses titres en numéraire.

Par jugement du 20 octobre 2017, le tribunal de commerce de Pontoise a :

— Mis hors de cause dans la présente instance : Me [W] [T] en qualité d’administrateur de la société Antonutti-Delmas ; Me [C] [M] en qualité de mandataire judiciaire de la société Antonutti-Delmas ;

— Pris acte de la poursuite de l’instance par Me [C] [M] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas ;

— Déclaré Me [C] [M], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas, mal fondé en ses demandes et l’en a débouté ;

— Constaté que l’augmentation de capital de la société Antonutti-Delmas a eu lieu par compensation légale avec le compte courant détenu par la société Get location ;

— Dit qu’il n’y a pas lieu d’annuler l’augmentation de capital réalisée par compensation ;

— Fixé la créance de la société Get Location, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, au passif de la société Antonutti-Delmas à la somme de 5 000 euros ;

— Déclaré Me [C] [M], es qualités, mal fondé en sa demande en paiement sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, l’en a débouté ;

— Ordonné l’emploi des dépens liquidés en frais privilégiés de procédure collective de la société Antonutti-Delmas.

Par déclaration du 30 octobre 2017, M. [M] es qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas a interjeté appel du jugement.

Par dernières conclusions notifiées le 2 juillet 2018, M.[M] es qualités de liquidateur de la société Antonutti-Delmas demande à la cour de :

— Recevoir Me [C] [M], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas, en son appel ; l’en dire bien fondé ;

— Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 20 octobre 2017 dont appel en ce qu’il a mis hors de cause Me [W] [T] en qualité d’administrateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas, Me [C] [M] en qualité de mandataire judiciaire de la société Antonutti-Delmas ; pris acte de la poursuite de l’instance par Me [C] [M] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas ;

— Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 20 octobre 2017 pour le surplus ;

Et statuant à nouveau :

— Condamner la société Get Location à payer à Me [C] [M], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas, la somme de 400.000 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2013, date de la première mise en demeure, au titre des actions souscrites et non libérées ;

— Débouter la société Get Location de l’ensemble de ses demandes ;

— Condamner la société Get Location à payer à Me [C] [M], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas, la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

— Condamner la société Get Location à payer à Me [C] [M], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas, la somme de 10.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner la société Get Location aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Franck LAFON, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 13 juillet 2018, la société Get Location prie la cour de voir :

Vu le principe « nemo auditur »

Vu les articles 1172 et 1289 et suivants du code civil,

Vu les articles L.225-128 et suivants du code de commerce

A titre principal :

— Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 20 octobre 2017 en toutes ses dispositions,

En conséquence

— Débouter Maître [M] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions;

A titre subsidiaire :

— Dire et juger que la société Get Location n’a accepté de souscrire à de nouvelles actions de la société Antonutti-Delmas que pour autant que cette souscription soit libérée par compensation avec le compte-courant d’associé qu’elle détenait au sein de cette dernière,

— Dire et juger que l’augmentation de capital est nulle ;

En conséquence,

— Débouter Maître [M] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions;

— Ordonner que la créance de la société Get Location au titre du compte courant de son compte-courant dans la société Antonutti-Delmas soit inscrite au passif de cette dernière pour la somme de 413.569,48 €

En tout état de cause :

— Condamner Maître [M] à payer à la société Get Location la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner Maître [M] aux entiers dépens, dont distraction au profit du Cabinet LEXAVOUES, avocat au Barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 13 décembre 2018.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur la compensation entre la créance de l’associé Get Location sur la société Antonutti-Delams au titre de son compte courant et la créance de celle-ci sur l’associé au titre de la libération du capital souscrit

Me [M] qui conclut à l’infirmation du jugement dont appel fait valoir que la société Get Location ne pouvait pas libérer les actions souscrites par compensation avec une créance de compte courant d’associé d’un montant de 413569,48 € qu’elle prétend détenir sur la société Antonutti-Delmas.

Il rappelle que l’augmentation de capital est intervenue au cours de la période d’observation, fait valoir que la créance qui doit être considérée comme antérieure à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire n’a pas été déclarée au passif de la société, qu’elle est inopposable à la procédure en application des dispositions de l’article L 622-26 du code de commerce. Au surplus, il rappelle que même si la déclaration de créance avait été faite, aucune compensation ne pouvait intervenir faute de connexité entre les créances.

La société Get Location répond que la résolution du 16 février 2012 prévoyant la compensation entre les créances n’est pas intervenue à l’insu des organes de la procédure comme le prétend Me [M] es qualités mais que ceux-ci en étaient parfaitement informés et qu’ils ont participé à l’opération qu’ils dénoncent désormais.

Elle soutient que du fait de la résolution du plan par jugement du 6 décembre 2013, la créance au titre du compte courant d’associé a pu être valablement réglée par compensation avec la créance de la société requérante antérieurement à la date d’ouverture de la procédure collective du 9 décembre 2013, les dispositions de l’article L 622-7 du code de commerce n’ayant pas à s’appliquer. Elle estime que seules les règles du code civil sur la compensation légale doivent être retenues, les créances s’étant compensées de plein droit et à l’insu des débiteurs.

******

Au jour de l’ouverture de la procédure collective de la société Antonutti-Delmas, cette

dernière était détenue par :

— la société Get Location ;

— M. [O] [V] ;

— Mme [Q] [J], épouse [V] ;

— M. [P] [A] ;

— Mme [H] [A] ;

— M. [Z] [V] ;

— M. [F] [W].

Au cours de la période d’observation, les actionnaires susmentionnés (ci-après « les Cédants ») ont, par actes sous seing privé du 23 mars 2012 et du 22 juin 2012, cédé l’intégralité des actions qu’ils détenaient au sein du capital social de la société Antonutti-Delmas à la société CHP Logistique et Services (ci-après « CHP »), pour un prix total de 1.420.000 €, sous la condition résolutoire de l’absence d’arrêté d’un plan de redressement au bénéfice de la société Antonutti-Delmas au plus tard le 30 avril 2012

Le 16 février 2012, soit au cours de la période d’observation, l’assemblée générale extraordinaire de la société Antonutti-Delmas a adopté la résolution suivante :

« L’assemblée générale extraordinaire après avoir entendu les rapports du Commissaire aux Comptes certifiant le solde positif de 413 569,48 € du compte courant GET LOCATION approuve son incorporation au capital à hauteur de 400 000 € par création de 2546 actions au nominal de 157,11 €. Le capital est ainsi porté à 1 million d’euros divisé en 6365 actions. Cette résolution est adoptée à l’unanimité'.

Sur la compensation en cours de période d’observation

L’article L 622-7 du code de commerce dispose notamment que le jugement ouvrant la procédure emporte de plein droit, interdiction de payer toute autre créance née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception du paiement par compensation de créances connexes.

La société Get Location reconnaît qu’il n’y a pas connexité entre sa créance de compte-courant d’associé et la créance en capital de la société Antonutti-Delmas.

La compensation entre les deux créances ne pouvait dès lors intervenir à ce stade de la procédure.

Sur la compensation légale

L’article 1289 ancien du code civil (1347 nouveau ) dispose que la compensation est l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre deux personnes. Elle s’opère sous réserve d’être invoquée à due concurrence à la date où ses conditions se trouvent réunies.

L’article 1290 ancien édicte que la compensation n’a lieu qu’entre deux obligations fongibles, certaines, liquides et exigibles. Sont fongibles les obligations de sommes d’argent, même en différentes devises, pourvu qu’elles soient convertibles, ou celles qui ont pour objet une quantité de choses de même genre.

La résolution du plan de redressement judiciaire de la société Antonutti-Delmas a été prononcée le 6 décembre 2013.

Une procédure de redressement judiciaire a été à nouveau ouverte le 9 décembre 2013.

Sur la période entre les deux jugements, la société Get Location soutient que toutes les créances même non déclarées à la première procédure collective, se sont retrouvées opposables à la société Antonutti-Delmas, les créanciers n’étant plus soumis aux effets de la procédure collective et que les règles de la compensation légale doivent trouver à s’appliquer.

M.[M] es qualités considère qu’aucune compensation n’a pu avoir lieu. Il fait valoir que la société Get Location a renoncé à se prévaloir des effets de la compensation légale qu’elle invoque aujourd’hui, que les conditions de la compensation légale n’ont jamais été réunies, que la libération par compensation est en tout état de cause impossible compte-tenu de la situation financière de la société Antonutti-Delmas au jour où une compensation aurait pu s’opérer.

— Sur la renonciation par la société Get Location à la compensation légale

Me [M] relève que la société Get Location a procédé à la déclaration de sa créance au passif de la société Antonutti-Delmas par lettre recommandée du 14 février 2014 , qu’en agissant de la sorte elle a sans ambiguïté renoncé définitivement à se prévaloir des effets de la compensation légale dont elle se prévaut ce que la société Get Location conteste.

La renonciation ne se déduit pas du seul silence de son titulaire. Elle ne peut résulter que d’actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer.

La société Get Location a procédé à une déclaration de sa créance d’un montant de 413569,48 € entre les mains de Maître [M] par lettre recommandée du 14 février 2014.

Dans les pièces justificatives annexées à la déclaration de créance, la société Get Location fait état de la compensation qu’elle a opposée à la société Antonutti-Delmas exposant que celle-ci a entendu la poursuivre en paiement de la somme de 400000 € . Elle précise 'entendre contester les prétentions soulevées par la société Antonutti-Delmas dans le cadre de la procédure pendante devant le tribunal de commerce de Pontoise'. Elle ajoute déclarer sa créance au passif 'aux fins d’éviter toute forclusion et dans l’hypothèse où le tribunal de commerce de Pontoise viendrait à faire droit aux demandes de la société Antonutti-Delmas'.

Force est de constater que la société Get Location a pris toutes les précautions nécessaires pour expliquer procéder à une déclaration de créance dans l’objectif de préserver ses intérêts dans le cas où le tribunal saisi ne ferait pas droit à sa demande de compensation.

Dès lors, la société Get Location n’a manifesté aucune intention non équivoque de renoncer à la compensation légale entre les créances ni davantage aux effets de celle-ci par le dépôt de sa déclaration de créance qui ne pouvait qu’être faite pour préserver ses droits et ce même si la déclaration de créance équivaut à une demande en justice comme l’indique M.[M].

— Sur la réunion des conditions de la compensation légale

a) Sur le principe et le montant de la créance

M.[M] es qualités soutient qu’il résulte des dispositions du code commerce en ses articles L 225-128, L 225-146 alinéa 2 et R 225-136 du code de commerce que l’augmentation de capital en numéraire ne peut être libérée par compensation que si le souscripteur des actions détient une créance liquide et exigible sur la société émettrice ce dont doit attester le certificat du commissaire aux comptes.

Elle fait valoir qu’au jour où le certificat du commissaire aux comptes de la société Antonutti-Delmas attestant du caractère liquide et exigible de la créance de compte courant d’associé de la société Get Location a été établi le 16 février 2012, celui-ci était manifestement sans valeur et ne pouvait produire aucun effet ayant été fait pendant la procédure de redressement collective, la réalisation de l’augmentation du capital ne pouvant en aucun cas s’opérer par compensation avec la créance antérieure de la société Get Location.

Elle en déduit que la société Get Location ne pouvait dès lors s’en prévaloir au jour de la résolution du plan de redressement judiciaire de la société Antonutti-Delmas soit le 6 décembre 2013 pour prétendre détenir une créance certaine, liquide et exigible.

La cour relève que le certificat du commissaire aux comptes du 16 février 2012 mentionne qu’il ressort de l’arrêté de compte établi le 31 janvier 2012 par le président du conseil d’administration dont le commissaire aux comptes a certifié l’exactitude le 13 février 2012 que la société Get Location possède sur la société Antonutti-Delmas une créance de 413 569,48 €., que la créance est liquide et exigible.

Si la réalisation du capital social de la société Antonutty-Delmas ne pouvait s’opérer par compensation avec la créance de la société Get Location en cours de procédure collective , ce n’est pas pour autant que le certificat établi par le commissaire aux comptes de la société Antonutti-Delmas le 16 février 2012 est sans valeur pour attester du caractère certain et liquide de la créance de la société Get Location.

C’est à juste titre que la société Get Location fait valoir que si on considère que sa créance ne pouvait être exigible au moment de l’établissement du certificat du commissaire aux comptes, il est établi qu’une créance de compte courant d’associé est exigible à tout moment, le principe et le montant de la créance étant établis par le certificat précité.

b) sur le caractère litigieux de la créance

M. [M] fait valoir le caractère litigieux de la créance de compte courant d’associé l’ ayant contestée par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 octobre 2014 faute de pièces justificatives.

Il estime que cette contestation prive la créance de la société Get Location des conditions essentielles de certitude, de liquidité et d’exigibilité et fait dès lors obstacle au mécanisme de la compensation. Il fait valoir à supposer que la créance soit admise au passif, que la société Get Location ne saurait se prévaloir des effets d’une compensation légale dont les conditions devaient être remplies avant le 9 décembre 2013.

Toutefois, la contestation tardive par M.[M] du 2 octobre 2014 de la déclaration de créance déposée par la société Get Location en février 2014 ne peut faire obstacle au mécanisme de la compensation légale au motif qu’elle serait litigieuse.

c) sur l’exigibilité des créances réciproques

M.[M] es qualité considère que la condition d’exigibilité de la créance de compte-courant d’associé au 6 décembre 2013 n’est pas remplie du seul fait qu’il s’agit d’une créance remboursable à tout moment comme l’a rappelé la société Get Location.

Il soutient que pour être exigible, il faut que le remboursement de la créance ait été sollicité, qu’en l’espèce ce n’est pas le cas, aucun écrit n’ayant été produit à cet égard.

Cependant, c’est de façon pertinente que la société Get Location rappelle que c’est dès le mois de février 2012 tel que celà résulte du procès verbal d’assemblée générale extraordinaire qu’elle a sollicité le remboursement de sa créance aux fins de permettre la mise en oeuvre d’une compensation entre son compte-courant d’associé et l’augmentation de capital.

M.[M] es qualités conteste en outre l’exigibilité de la créance de la société Antonutti-Delmas pour défaut de connexité des créances mais comme il a été vu précédemment cette condition de connexité des créances n’est pas exigée une fois la résolution du plan de redressement judiciaire prononcée.

Il soutient que la libération des actions souscrites aurait due être autorisée par une décision régulière du conseil d’administration de la société émettrice ce qui selon lui n’a pas été le cas, que dès lors la créance de la société Antonutti-Delmas sur la société Get Location n’était pas exigible au 6 décembre 2013 de sorte qu’aucune compensation légale n’a pu s’opérer.

Toutefois, c’est de façon exacte que la société Get Location réplique que c’est précisément la société Antonutti-Delmas qui a réclamé par sommation du 25 octobre 2013 à la société Get Location paiement de la somme de 400000 € au titre de la souscription d’action litigieuse, l’augmentation de capital ayant été décidée par l’assemblée générale laquelle n’avait pas fait le choix de déléguer cette compétence au conseil d’administration auquel il ne revenait donc pas de procéder à des appels de fonds par la suite.

Dès lors, le caractère exigible de la créance de la société Antonutti-Delmas est établi.

Au regard de ce qui précède, la cour retient qu’au 6 décembre 2013, la créance de compte-courant d’associé de la société Get Location à l’égard de la société Antonutti-Delams était certaine, liquide et exigible.

— Sur la situation financière de la société Antonutti-Delmas

M.[M] es qualités estime qu’au cas où la créance de la société Get Location serait certaine, liquide et exigible, la compensation légale ne saurait être validée du fait de la situation financière obérée de la société Antonutti-Delmas au 6 décembre 2013 incompatible avec le mécanisme d’une libération des actions par compensation.

Il fait valoir qu’il ne saurait être admis qu’un capital nouveau puisse être libéré par compensation avec une créance détenue sur la société lorsque l’actif de celle-ci est insuffisant pour couvrir ses dettes.

La cour constate qu’il est établi que dès le 9 décembre 2013, une nouvelle procédure de redressement judiciaire a été ouverte concernant la société Get Location, que dans son jugement du 6 décembre 2013 le tribunal de commerce de Pontoise a constaté que l’état de cessation des paiements de la société Antonutti-Delmas n’était pas avéré, que par jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 9 décembre 2013, il a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 6 décembre 2013.

Si pour suivre M.[M], il est retenu que le 6 décembre 2013, la compensation légale est intervenue non pas au jour de la résolution du plan mais à la date du début de la période suspecte intervenues le même jour, c’est sans conséquence sur la validité de la compensation légale, son mécanisme s’opérant de plein droit et ce même lors de la période suspecte.

M.[M] es qualités invoque de façon générale la situation financière obérée de la société Antonutti-Delmas à la date de la compensation légale pour s’y opposer mais la société Get Location estime qu’elle est indifférente sur la validité de la compensation.

La cour relève que la compensation avait été envisagée en amont par les parties, que dès lors, la compensation légale est intervenue dans le prolongement de cette situation, que M.[M] es qualités de la société Antonutti-Delmass ne peut donc invoquer sa situation financière difficile pour se soustraire à la compensation légale laquelle s’est opérée entre la créance de compte-courant d’associé de la société Get Location et la créance de la société Antonutti-Delmas à son égard au titre de la libération du capital souscrit.

Dans ces conditions, le jugement entrepris est confirmé.

Sur les autres demandes

M.[M] es qualités de la société Antonutti-Delmas qui succombe en ses demandes est débouté de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive dont il ne justifie pas.

La société Get Location est déboutée de sa demande d’indemnité fondée sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

M.[M] es qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas est condamné aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 20 octobre 2017 par le tribunal de commerce de Pontoise en toutes ses dispositions,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne M.[M] es qualités de liquidateur judiciaire de la société Antonutti-Delmas aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct,

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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