Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 6 décembre 2018, n° 18/08357

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Sur la décision

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRET DU 06 DECEMBRE 2018

(n°613, 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/08357 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5SAM

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Avril 2018 -Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU – RG n° 17/00122

APPELANT

Monsieur Y X agissant poursuites et diligences en tant que président de la SAS ETABLISSEMENTS BOUILLET

[…]

[…]

né le […] à […]

Représenté et assisté par Me Frédérick JUNGUENET de la SELARL DBCJ AVOCATS, avocat au barreau de MELUN, toque : M30

INTIME

COMMUNE DE CHAMPAGNE SUR SEINE représentée par son maire en exercice, dûment habilité par délibération du conseil municipal en date du 27 juin 2017

Mairie

[…]

[…]

Représenté par Me Sandra NADJAR de la SCP DSC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1033

Assisté par Me Vincent CORNELOUP de la SCP DSC AVOCATS, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 Novembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bernard CHEVALIER, Président

Mme Véronique DELLELIS, Présidente

Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. A B

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Bernard CHEVALIER, Président et par Anais SCHOEPFER, Greffière.

M. Y X a fait ériger sur les parcelles cadastrées section AL n°175/176/294 sises sur le territoire de la commune de Champagne sur Seine, un bâtiment en parpaing dont 'le rez-de-chaussée et le premier étage sont hors d’air et de construction non récente ainsi qu’un deuxième étage en cours d’édification avec la présence de murs périphériques' , suivant les termes du procès-verbal établi par les agents de la police municipale de Champagne sur Seine le 2 mai 2017.

Cette construction n’avait fait l’objet d’aucun permis de construire.

Suivant arrêté en date du 4 mai 2017, le maire de commune de Champagne sur Seine a mis en demeure M. X de cesser immédiatement les travaux de construction entrepris sur les parcelles en cause et précisé que le défaut de respect de cette mise en demeure serait constitutif d’une nouvelle infraction prévue et réprimée par l’article L480-3 du code de l’urbanisme.

Le constat d’infraction et l’arrêté de mise en demeure étaient fondés sur trois éléments :

— L’interdiction de toute nouvelle construction ou occupation du sol sauf cas particuliers dans la zone NI du plan d’urbanisme;

— L’inclusion des parcelles dans le plan de zonage du plan de prévention des risques prévisibles en vigueur et soumises au risque inondation zone jaune foncé;

— L’inclusion des parcelles sur lesquelles la construction est édifiée dans le périmètre de protection d’un monument historique et l’absence de soumission des travaux à l’architecte des bâtiments de France.

Par acte du 2 août 2017, la commune de Champagne sur Seine a fait assigner M. Y X devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Fontainebleau aux fins de voir :

• Constater que la construction érigée par M. Y X sur les parcelles cadastrées section AL n°175/176/294 et qui n’est pas achevée occasionne un trouble manifestement illicite et ordonner sa destruction ;

• Ordonner la destruction de cette construction ;

• Condamner M. Y X à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par ordonnance de référé rendue le 10 avril 2018, la juridiction saisie a :

• Ordonné la démolition de la construction érigée par M. Y X sur les parcelles cadastrées section AL n° l75/176/294 situées à Champagne Sur Seine (77), selon procès-verbal des agents de la Police Municipale de cette commune en date du 2 mai 2017,

• Débouté M. Y X de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

• Condamné M. Y X aux dépens de la présente instance,

• Condamné M. Y X à payer à la commune de Champagne Sur Seine la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

• Rappelé que la présente décision bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire,

• Rejeté les demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration en date du 23 avril 2018, M. Y X a relevé appel de cette ordonnance.

Au terme de ses conclusions communiquées par voie électronique le 23 octobre 2018, M. Y X demande à la cour, sur le fondement de l’article 1240 du code civil et de l’article L. 421-6 du code de l’urbanisme, de :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

— Le déclarer recevable et fondé en son appel ainsi qu’en ses demandes, fins et conclusions ;

Y faisant droit,

— Infirmer l’ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Fontainebleau en date du 10 avril 2018 ;

En conséquence,

— Dire qu’il n’y a pas lieu à démolir la construction érigées par ses soins sur les parcelles cadastrées section AL n°175/176/294 situées à Champagne sur Seine (77) ;

— Condamner la commune de Champagne-sur-Seine à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée ;

En toute hypothèse,

— Condamner la commune de Champagne sur Seine à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner la commune de Champagne sur Seine aux entiers dépens.

La commune de Champagne sur Seine, par conclusions transmises par voie électronique le 23 octobre 2018, demande à la cour, sur le fondement du code de procédure civile, du code de l’urbanisme, notamment des articles R. 111-2, R. 111-27, R. 421-5 et R. 431-20 et du code du patrimoine, notamment les articles L. 621-30 et suivants, de :

• Déclarer ses conclusions recevables en sa qualité d’intimé,

En conséquence :

• Confirmer l’ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Fontainebleau,

• Dire qu’il y a lieu d’ordonner la démolition de la construction litigieuse et érigée sur les parcelles cadastrées section AL n°175/176 et 294 aux frais de M. X,

• Condamner M. Y X à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

• Condamner M. Y X aux entiers dépens.

Il sera renvoyé aux conclusions susvisées pour un exposé complet des faits, moyens et prétentions des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE LA COUR

Aux termes des dispositions de l’article 809, alinéa 1, du code de procédure civile, le juge des référés du tribunal de grande instance peut, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L’article L 480-14 du code de l’urbanisme dispose que la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme peut saisir le tribunal de grande instance en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d’un ouvrage édifié ou installé sans l’autorisation exigée par le présent livre, en méconnaissance de cette autorisation ou, pour les aménagements, installations ou travaux dispensés de toute formalité au titre du présent code, en violation de l’article L 412-8.

Les faits de construction sans permis pour ce faire sont établis aux termes du procès-verbal dressé par les policiers municipaux. Du reste, dans le cadre de ce procès-verbal, M. X a admis avoir fait édifier l’immeuble litigieux sans permis.

L’appelant fait valoir toutefois que la construction litigieuse n’a été édifiée que parce que, lors d’un contrôle effectué par les Voies Navigables de France, celles-ci lui ont fait remarquer que bien que son entrepôt principal ne soit pas en zone jaune foncé du Plan de Prévention des Risques d’Inondation, sa société se devait de respecter un certain nombre de contraintes tenant à la sécurité de son activité ; qu’ainsi , l’article 5-3 du règlement du PPRI dispose que les articles dangereux , polluants ou sensibles à l’humidité devront être stockés au-dessus des Plus Hautes Eaux .

Il indique en conséquence que c’est de parfaite bonne foi et par souci de répondre aux observations des Voies Navigables de France qu’il a souhaité mettre hors d’eau les produits dangereux , polluants et sensibles en créant le bâtiment litigieux et que cette construction est donc utile.

Toutefois, l’édification d’un bâtiment, en l’absence de tout permis de construire et de surcroît dans une zone sensible, constitue à l’évidence un trouble manifestement illicite comme l’a indiqué le premier juge, car elle correspond d’une part à une violation flagrante de la loi et d’autre part à une remise en cause des dispositions prises pour prévenir les risques liés aux inondations.

Pour s’opposer à la demande, M. X fait encore valoir qu’il est susceptible d’obtenir un permis de construire de nature à régulariser la situation.

Il est effectif qu’il a déposé une demande de permis de construire le 13 février 2018, soit au demeurant à une date très postérieure à la constatation des faits et à l’assignation en référé.

Le maire de la commune de Champagne sur Seine a toutefois rejeté le 11 juin 2018 la demande de

régularisation ainsi déposée, en considérant d’une part que le projet ne respectait pas les dispositions de l’article N2 du plan local d’urbanisme et que d’autre part que la demande était irrecevable, dès lors que le projet faisait l’objet d’une extension sur un local existant illicite sans autorisation d’urbanisme.

Le recours gracieux, suivant les propres indications de l’appelant, n’a été suivi d’aucune décision favorable , l’administration ayant accusé réception de la demande en précisant que son silence vaudrait rejet.

Dans ses dernières conclusions, M. X indique qu’il est encore dans les délais pour un recours devant le tribunal administratif compétent et a préparé une requête à cet effet.

Il sera relevé toutefois que l’article L 421-6 du code de l’urbanisme prévoit que le permis de construire ou d’aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l’utilisation des sols, à l’implantation, la destination, la nature, l’architecture, les dimensions, l’assainissement des constructions et à l’aménagement de leurs abords et s’ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d’utilité publique.

Sur ce point la commune de Champagne sur Seine a produit aux débats le plan local d’urbanisme.

Il résulte de la lecture de ce plan que, dans le secteur où se trouve le bâtiment litigieux, les articles N1 et N2 prévoient qu’à l’exception des secteurs Ne et Ns (le bâtiment de M. X se situant en zone Ni), les nouvelles constructions ou installations, à l’exception de celles définies à l’article N2, sont interdites.

L’article N2 prévoit à cet égard que sont admises à des conditions particulières dans les secteurs Ns et Ni :

— les infrastructures de franchissement de fleuve,

— les infrastructures techniques nécessaires à son entretien et à son fonctionnement,

— les équipements de chargement et de déchargement pour le transport fluvial ,

— les constructions et installations de sport et de loisirs.

M. Rémy soutient que sa construction entre dans la catégorie des infrastructures nécessaires pour assurer le transport fluvial, faisant valoir que sa société assure le ravitaillement des bateaux en carburant et en divers produits, les biens stockés dans la construction litigieuse étant, outre du fuel, des batteries , de la peinture, du vernis ou encore de la laque, tous produits qu’il indique nécessaires aux embarcations fluviales et qu’elle est connue depuis des décennies comme étant une station de chargement pour le transport fluvial.

La commune de Champagne sur Seine fait observer que la construction litigieuse, qui n’est qu’un espace de stockage et qui a été présentée comme tel dans le cadre du dépôt de la demande de permis de construire, ne correspond pas à la définition des équipements de chargement et de déchargement pour le transport fluvial, lesquels concernent en réalité des ouvrages bien précis tels que les quais, les ponts de déchargement, les portiques.

Quelle que soit la façon dont M. X décrit l’activité de sa société, il existe un doute très sérieux sur ses chances de régularisation.

Dès lors et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs invoqués par la commune, la cour estime que, au regard de la réalité de l’infraction aux dispositions du code de l’urbanisme, du doute

très sérieux quant aux perspectives de régularisation de la situation de M. X et enfin de l’état d’avancement de la construction, la demande en suppression de l’ouvrage est justifiée et proportionnée .

Il convient de confirmer la décision en ce qu’elle a ordonné la démolition de la construction.

C’est par une motivation pertinente que la cour adopte que le premier juge a débouté M. X de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive. Il convient de confirmer la décision de ce chef.

Sur les dépens et l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le sort des dépens et l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure pour la procédure de première instance ont été exactement réglés par le premier juge. Il convient de confirmer l’ordonnance entreprise de ces chefs.

M. X succombant dans son appel en supportera les dépens.

Il sera par ailleurs condamné à payer à l’intimée une indemnité procédurale pour la procédure d’appel dont le montant est repris au présent dispositif.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance querellée en toutes ses dispositions ;

Condamne M. X aux dépens d’appel ;

Le condamne à payer à la partie intimée une indemnité de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel.

LA GREFFIERE LE PRÉSIDENT

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