Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 9 décembre 2021, n° 20/00862

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Chronologie de l’affaire

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www.avolex-avocats.com · 21 mars 2023

Par une jurisprudence récente du 14 décembre 2022 (n°21-18.139), la Cour de cassation revient sur la charge de la preuve du respect des durées maximales du travail, notamment lorsque le salarié est en télétravail. Nous reverrons les notions clés, puis l'apport de cet arrêt rendu par la chambre sociale. I. Les notions clés. A. Durée maximale de travail. La durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est, en principe, de 35 heures par semaine [1]. Cette durée du travail peut néanmoins être adaptée conventionnellement ou contractuellement, mais reste soumise à certaines …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, chbre soc. prud'hommes, 9 déc. 2021, n° 20/00862
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 20/00862
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Bonneville, 12 juillet 2020, N° F19/00123
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 09 DECEMBRE 2021

N° RG 20/00862 – FP / CM

N° Portalis DBVY-V-B7E-GPVP

Société ALPA ADVENTURE

C/ C A X

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BONNEVILLE en date du 13 Juillet 2020, RG F19/00123

APPELANTE :

Société ALPA ADVENTURE

dont le siège social est sis […]

[…]

prise en la personne de son représentant légal en exercice

Représentée par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL NUMA AVOCATS, avocat plaidant au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE et APPELANTE INCIDENT:

Madame C A X

[…]

[…]

Représentée par M. Philippe GAGNIEUX, défenseur syndical inscrit sur la liste établie par le DIRECCTE Auvergne Rhône Alpes

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue en audience publique le 19 Octobre 2021, devant Monsieur Frédéric PARIS, Président de chambre désigné par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui s’est chargé du rapport, les parties ne s’y étant pas opposées, avec l’assistance de Madame Catherine MASSONNAT, Greffier lors des débats, et lors du délibéré :

Monsieur Frédéric PARIS, Président, qui a rendu compte des plaidoiries,

Madame Françoise SIMOND, Conseiller

Monsieur Timothée de MONTGOLFIER, Conseiller, secrétaire général (ordonnance de Madame la Première Présidente en date du 12 octobre 2021)

********

Faits et procédure

Mme C X a été embauchée le 11 juin 2018 par la société Alpa Adventure pour un contrat à durée déterminée avec terme fixé au 26 octobre 2018, en qualité d’assistante administrative et comptable.

Ce contrat a été conclu dans le cadre d’un accroissement de l’activité de la société.

Mme X bénéficiait du statut d’employé, groupe B de la convention collective applicable à la société des agences de voyage et de tourisme (IDCC 1710), pour une rémunération de 1 800 € bruts mensuelle.

Elle exécutait ses fonctions à son domicile en télétravail en contre partie d’une indemnité mensuelle de 40 € correspondant à la contrainte de l’affectation d’une partie de son domicile privé à des fins professionnelles.

Le 7 août 2018, elle demandait une rupture amiable de son contrat de travail, il y a été mis fin le 10 août 2018.

Par requête du 12 août 2019, Mme X a saisi le conseil des prud’hommes de Bonneville pour demander la requalification de la rupture du contrat de travail en rupture abusive et le paiement de rappels de salaires et dommages et intérêts.

Par jugement en date du 13 juillet 2020, le conseil de prud’hommes de Bonneville a :

— dit que la rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— condamné la société Alpa Adventure de payer à Mme X les sommes suivantes :

* 4 500 € en paiement des salaires jusqu’à la fin du contrat à durée déterminée,

* 795 € au titre des heures supplémentaires, et 79,5 €de congés payés afférents,

* 500 € au titre des dommages et intérêts pour non respect des temps de repos,

* 1 000 € au titre des dommages et intérêts pour occupation du domicile de la salariée au profit de la société,

* 700 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné la remise des bulletins de salaire des mois de juin, juillet et août ainsi que de l’attestation Pôle emploi rectifiée, sous astreinte de 100 € par jour de retard, à compter d’un mois après le prononcé du jugement,

— ordonné l’exécution provisoire en application des dispositions de l’article R. 1454-28 du code du travail, sur les salaires et accessoires,

— dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal en application des articles 1153-1 et 1154 du code civil à compter de la décision,

— débouté Mme X du surplus de ses demandes,

— débouté la société Alpa Adventure de ses demandes,

— condamné la société Alpa Adventure aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 30 juillet 2020 par RPVA, la société Alpa Adventure a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions notifiées le 28 octobre 2020 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, la société Alpa Adventure demande à la cour de :

— infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

En conséquence, et statuant à nouveau,

— constater qu’aucune heure supplémentaire n’est due à Mme X,

— déclarer que la demande au titre du prétendu travail dissimulé n’est pas fondée,

— constater qu’aucune indemnité d’occupation supplémentaire n’est due à Mme X,

— constater que la société Alpa Adventure a parfaitement rempli ses obligations relatives aux temps de repos,

En conséquence,

— débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre reconventionnel :

— condamner Mme X au paiement de la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la Selarl F G H.

Elle fait valoir essentiellement que les fiches horaires versées par la salariée ne sont pas des documents internes à la société et n’ont pas été validées ou contresignées par la société.

La société n’a ni demandé, ni autorisé la salariée à effectuer des heures supplémentaires, sa charge de travail ne justifiait pas la nécessité d’effectuer des heures supplémentaires.

La société conteste les demandes à compter du 4 juin 2018 car la salariée a travaillé à partir du 11 juin 2018.

Aucun élément ne pouvait justifier de travailler en horaires décalés, ses seuls interlocuteurs étaient Mme D et M. E, travaillant tous deux en France.

Elle ne démontre pas avoir envoyé des mails, ni reçu des appels téléphoniques tardifs.

Mme X n’apporte pas la preuve d’avoir effectué des heures supplémentaires, ni une intention frauduleuse de la société de dissimuler les heures effectuées par la salariée.

Le salarié en télétravail gère l’organisation de son temps de travail dans le cadre de la législation, des conventions collectives et règles d’entreprise applicable (ANI 19 juillet 2005, article 9).

La salariée ne démontre pas de quelle manière l’employeur n’aurait pas respecté ses temps de repos.

Mme X a signé avec la société une convention de rupture en bonne et due forme et ne démontre pas avoir subi un préjudice du fait de la rupture du contrat. Elle conteste que la rupture du contrat de travail est due à la réalisation d’heures supplémentaires par la salariée et au non-respect de ses temps de repos.

Elle a retrouvé un emploi au sein de la mairie de Chamonix et ne justifie pas d’une inscription à Pôle emploi après le 10 août 2018.

La société avait mis à disposition des salariés un espace de travail à Argentière mais la salariée préférait organiser les réunions chez elle.

Le télétravail a permis à la salariée de s’occuper de son enfant, la société lui a accordé une indemnité d’occupation de 40 € par mois.

Dans ses conclusions notifiées le 20 janvier 2021 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, Mme X demande à la cour de :

— confirmer le jugement en ce qu’il a :

* dit que la rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* ordonné à la société Alpa Adventure de payer à Mme X les sommes suivantes :

°4 500 € en paiement des salaires jusqu’à la fin du contrat à durée déterminée,

°500 € au titre des dommages et intérêts pour non respect des temps de repos,

°1 000 € au titre des dommages et intérêts pour occupation du domicile de la salariée au profit de la société,

°1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— statuant à nouveau, condamner la société Alpa Adventure à payer à Mme X :

* 757 € au titre des heures supplémentaires de juin 2018,

* 1 265 € au titre des heures supplémentaires de juillet 2018,

* 89 € au titre des heures supplémentaires d’août 2018,

* outre 10% de congés payés, soit 211,10 € et outre 10 % de prime de précarité, soit 232,20 €,

* 10 800 € au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

* 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeter les demandes de la société Alpa Adventure.

Elle soutient notamment que la requalification en rupture aux torts de l’employeur est justifiée car les nombreuses heures supplémentaires effectuées, l’état de stress continu dû aux sollicitations téléphoniques permanentes et à toutes heures, le non-respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires par son employeur ont mis en danger sa santé.

Ces faits imputables à l’employeur l’ont amené à demander la rupture amiable.

Elle travaillait à domicile par simple commodité pour l’entreprise.

La connexion internet de l’entreprise était inexistante, un partage de connexion était nécessaire. La mauvaise qualité de connexion obligeait le personnel à travailler au domicile de la salariée, ce dont atteste une salarié, Mme Y.

Son ex-conjoint, M. Z, partage le droit de garde depuis juillet 2018. Il atteste avoir assuré la garde de l’enfant afin qu’elle s’investisse dans son travail.

Elle justifie de sa prise en charge par pôle emploi du 16 août au 13 décembre 2018.

L’employeur ne fournit aucun justificatif des horaires que la salariée a réalisé, il a demandé à ce que les relevés horaires lui soient transmis par mail et non sur une feuille volante.

L’employeur devait respecter les règles de contrôle des horaires de travail conformément à l’article R.3171-8 du code du travail, même dans le cadre d’un télétravail. L’article 4 de l’ANI du 19 juillet

2005 prévoit que les salariés en télétravail ont les mêmes droits et avantages que les salariés travaillant dans les locaux de l’entreprise.

Elle indique s’être tenue à disposition dès le 8 juin 2018 anticipant ainsi sa formation, soit la semaine du 4 au 10 juin 2018.

La prime qu’elle perçoit en contrepartie de l’utilisation de son domicile a été proratisée par la société. Cette prime n’a pas été augmentée lorsque le personnel de l’entreprise s’est rendu chez la salariée pour travailler.

L’employeur a fait preuve de négligence en ne respectant pas ses obligations de transmettre les bulletins de salaire et documents sociaux, de payer les heures supplémentaires. Il s’est intentionnellement soustrait à son obligation de contrôle et de paiement de toutes les heures de travail effectuées.

Cette absence d’organisation va à l’encontre de l’obligation de résultat qui incombe à l’employeur prévue à l’article L.4121-1 du code du travail, et de veiller par tout moyen à la santé physique et mentale de ses salariés.

L’instruction de l’affaire a été clôturée le 4 juin 2021.

Motifs de la décision

Attendu sur les heures supplémentaires qu’il résulte de l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable ;

Qu’il ressort de la jurisprudence la plus récente de la chambre sociale de la cour de cassation qu’ 'en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.' ;

Attendu qu’aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Attendu que contrat de travail prévoit que la salariée exécute son travail en télétravail ;

Attendu que ce contrat de travail est conforme aux articles L 1222-9 à L 1222-11 du code du travail ; que l’article L 1222-10 précise notamment que l’employeur est tenu à l’égard du salarié aux obligations de droit commun ;

Attendu que le contrat de travail stipule au titre de la durée du travail que la durée de travail hebdomadaire de travail est de 35 heures par semaine et que le salarié peut être amené à effectuer des

heures supplémentaires à la demande de la société ;

Que le contrat ajoute : 'la salariée procèdera à un relevé de ses horaires de travail pour chaque jour travaillé à son domicile sur un document qu’il remettra chaque mois à son supérieur hiérarchique. Ce document de contrôle et de suivi de l’amplitude des journées de travail permettra de vérifier le respect des durées de repos minimales entre deux journées de travail et de vérifier la charge du salarié.

Attendu qu’il en résulte que l’employeur avait à juste titre compte tenu de la particularité du télétravail prévu un système de relevé quotidien des horaires, ce qui devait permettre un décompte incontestable des heures travaillées et par suite de permettre à l’employeur d’exercer d’une part un contrôle sur les heures de travail accomplies, et de s’assurer du respect des durées maximales de travail ;

Qu’il devait donc veiller à ce que le salarié transmette régulièrement ses relevés horaires et en cas de difficulté de lui demander de respecter cette obligation de transmission.

Attendu que l’employeur se contente de critiquer les relevés produits par la salariée en exposant qu’il n’a pas signé les relevés qui n’ont pas été transmis ;

Que pourtant il ne justifie par aucune pièce avoir demandé à la salariée de transmettre les dits relevés.

Et attendu qu’il convient de rappeler que le télétravail ne dispense pas l’employeur de ses obligations en matière de décompte des horaires hebdomadaires de travail ; qu’au contraire, le contrat de travail prévoyait un système permettant à l’employeur de décompter les heures et d’assurer un contrôle effectif des heures effectuées par le salarié ;

Que l’attestation du responsable hiérarchique, M. E I de Bez d’Arve relatant que les tâches de la salariée ne justifiaient pas d’effectuer des heures supplémentaires ne peut suppléer l’employeur de son obligation d’établir le temps de travail si le salarié comme en l’espèce en cas de litige présente des éléments suffisamment précis sur son temps de travail.

Que même si les relevés téléphoniques de la salariée ne mentionnent pas d’appel tardifs ou décalés par rapport à la journée de travail, cet élément n’implique pas que la salariée n’effectuait pas d’heures supplémentaires ;

Attendu qu’il ressort du message de M. J D L, que celui-ci considérait que compte tenu que la salariée travaillait en télétravail, 'il était impossible pour nous de contrôler ton temps de travail'. Cette position de l’employeur est contraire au contrat de travail et au code du travail qui impose à l’employeur un contrôle du temps de travail ;

Que concernant les absences de la salariée évoquées par l’employeur, l’une d’elle s’est produite au cours de la dernière semaine travaillée, et la salariée dans son décompte en a tenu compte ; que pour la dernière absence, celle relative au mariage, cet événement avait lieu après la date de rupture du contrat de travail.

Attendu enfin que l’employeur qui avait assuré une formation rapide de la salariée et qui explique que celle-ci prenait trop de temps à réaliser ses tâches ne pouvait ignorer qu’une salariée placée dans un contexte de télétravail était susceptible d’effectuer des heures au delà de 35 heures. En n’effectuant aucun contrôle, l’employeur se satisfaisait des heures faites par la salariée et acceptait implicitement la réalisation d’heures supplémentaires.

Dans ces conditions, c’est à juste titre que le conseil des prud’hommes a condamné l’employeur à payer des heures supplémentaires. Toutefois, le jugement sera infirmé partiellement sur le montant des heures supplémentaires au vu du décompte exact des heures supplémentaires effectués à partir de la semaine du 11 au 17 juin figurant dans les écritures de la salariée ainsi qu’il suit :

— juin 2018 = 42,5 heures, soit 757 €,

— juillet 2018 = 71 heures soit 1265 €,

— août 2018 = 5 heures soit 89 €,

ce qui établit un total de 2111 €, outre les congés payés afférents de 211,10 €, et les 10 % de prime de précarité calculée sur 2322,10 €, pour un montant de 232,20 €.

Attendu sur les temps de repos, s’il ressort des feuillets de décompte que la salariée n’a dépassé la durée de dix heures par jour prévu par l’article L 3121-18 du code du travail qu’à trois reprises sur trois mois, deux dépassements de trente minutes, et un dépassement d’une heure, en revanche les même feuilles de décompte mentionnent les durées de travail hebdomadaire suivantes :

—  48,50 heures du 18 juin au 24 juin

—  51 heures du 25 juin au 1er juillet,

—  52,5 heures du 2 juillet au 8 juillet,

—  52 heures du 9 au 15 juillet,

—  59 heures du 16 au 22 juillet,

—  48,5 heures du 23 juillet au 29 juillet ;

Attendu que la durée maximale de 48 heures par semaine travaillée prévue par l’article L 3120-20 du code du travail a donc été enfreint à six reprises ;

Qu’une telle durée du travail empiétait sur la vie privée de la salariée et ses temps de repos ;

Que le contrat de travail d’ailleurs stipulait que 'la société s’engage à mettre en place une organisation permettant de respecter la vie privée de la salariée’ ;

Attendu que le jugement allouant des dommages et intérêts de 500 € pour non respect du repos sera confirmé ;

Attendu sur les frais au titre de l’utilisation des locaux privés de la salariée, que le remboursement de frais professionnels est une obligation de l’employeur résultant du contrat de travail, un tel remboursement étant une suite de ce contrat conformément à l’article 1194 du code civil et à l’article L 1221-1 du code du travail disposant que le contrat de travail est soumis aux règles de droit commun ;

Que le contrat de travail prévoyait le versement d’une prime de sujétion de 40 € par mois correspondant à la contrainte de l’affectation d’une partie du domicile privé à des fins professionnelles ; qu’une telle clause est licite ;

Attendu que si des frais supplémentaires dépassent le montant de cette indemnité, il appartient à la salariée d’établir la réalité de ces frais ;

Que la salariée ne produit aucun justificatif de frais supplémentaires ;

Attendu que la demande de paiement de la somme de 1 000 € sera dès lors rejetée et le jugement sera infirmé sur ce point ;

Attendu sur la rupture du contrat de travail qu’il résulte des dispositions de l’article L 1243-1 du code du travail que la rupture d’un commun accord du contrat à durée déterminée ne peut résulter que d’un acte clair et non équivoque exprimant la volonté des parties de mettre fin aux relations contractuelles ;

Qu’il ressort de l’accord intitulé 'Rupture anticipée du CDD par accord commun’ que les parties ont mis fin au contrat à durée déterminée d’un commun accord ;

Attendu qu’il appartient au salarié d’établir que lors de conclusion de cet accord, que sa volonté ait été viciée par dol, violence, contrainte ou erreur ;

Attendu que la salariée n’a adressé aucune plainte à son employeur lors de l’exécution du contrat de travail ; qu’elle n’a formulé une demande de paiement d’heures supplémentaires qu’après la rupture du contrat de travail ;

Qu’elle a agi en justice pour demander des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail que plusieurs mois après la rupture d’un commun accord ;

Que les témoignages produits émanent de personnes extérieures à l’entreprise, du père de son enfant et d’une amie proche qui n’ont pas été témoins direct des conditions de travail de la salariée ; que leurs déclarations se fondent sur les plaintes de la salariée ; que ces témoignages ne sont pas suffisamment probants et ne portent pas en tout cas sur les conditions dans lesquelles la salariée a accepté la rupture du contrat de travail ;

Attendu que la salariée ne rapporte donc pas la preuve de contraintes telles que son consentement ait été vicié lors de la conclusion de l’accord amiable de rupture ;

Que le jugement sera infirmé en ce qu’il a jugé la rupture imputable à l’employeur et alloué des dommages et intérêts correspondant au montant des salaires jusqu’au terme du contrat à durée déterminée ;

Attendu sur le travail dissimulé, le non paiement des heures supplémentaires résulte d’une négligence de l’employeur qui n’a pas estimé utile de contrôler le temps de travail accompli ; qu’une telle négligence alors que le travail était déclaré, ne caractérise pas l’intention de dissimuler les heures de travail ;

Que le jugement rejetant la demande d’indemnité de travail dissimulé sera confirmé ;

Attendu sur la remise des documents de fin de contrat, que le jugement sera confirmé, la salariée ayant droit à cette remise ;

Attendu qu’aucune somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile ne sera mis à la charge de l’une ou l’autre des parties, chacune d’elle succombant partiellement à ses prétentions ;

Que pour le même motif, les dépens d’appel seront supportés par moitié entre les parties ;

Par ces motifs,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant contradictoirement,

Confirme le jugement du 13 juillet 2020 rendu par le conseil des prud’hommes de Bonneville sauf en ce qui concerne le montant de la condamnation au titre des heures supplémentaires, en ce qu’il a condamné la société Alpa Adventure à la somme de 1 000 € au titre de dommages et intérêts pour occupation du domicile, en ce qu’il a dit que la rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et condamné la société Alpa Adventure à payer la somme de 4 500 € 'en paiement de salaires jusqu’à la fin du contrat à durée déterminée ;

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées,

Condamne la société Alpa Adventure à payer à Mme C X la somme de 2 111 € au titre des heures supplémentaires et 211,10 € de congés payés afférents, et celle de 232,20 € au titre des 10 % de la prime de précarité sur les heures supplémentaires ;

Déboute Mme C X de sa demande en paiement des frais professionnels pour l’utilisation de son domicile personnel et de sa demande au titre de la rupture abusive du contrat à durée déterminée ;

Déboute les parties de leurs demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que chaque partie supportera la moitié des dépens d’appel.

Ainsi prononcé publiquement le 09 Décembre 2021 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Frédéric PARIS, Président, et Madame Catherine MASSONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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