Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale section a, 15 octobre 2020, n° 20/00623

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. soc. sect. a, 15 oct. 2020, n° 20/00623
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 20/00623
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Valence, 27 janvier 2020, N° 19/00066
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 29 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

AMM

N° RG 20/00623

N° Portalis DBVM-V-B7E-KK7N

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Stéphane GRENIER

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU JEUDI 15 OCTOBRE 2020

Appel d’une décision (N° RG 19/00066)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VALENCE

en date du 28 janvier 2020

suivant déclaration d’appel du 04 février 2020

APPELANT :

M. [D] [A]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Stéphane GRENIER, avocat au barreau de VALENCE

INTIMEE :

SA CAN, prise en la personne de son représentant légal en exercice

domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,

et par Me Loic JULIEN de la SELARL DERAMECOURT & JULIEN, avocat au barreau de VALENCE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Blandine FRESSARD, Présidente,

Monsieur Frédéric BLANC, Conseiller,

Monsieur Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l’audience du 17 juin 2020 tenue à publicité restreinte en raison de l’état d’urgence sanitaire, Monsieur [F], conseiller est chargé du rapport.

Les parties ont été entendues en leurs observations.

Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

[D] [A] a été embauché par la SA CAN en qualité de chef de chantier cordiste ' niveau D, catégorie ETAM, suivant contrat de chantier pour la période du 12 février au 27 novembre 2007, puis suivant contrat de travail écrit à durée indéterminée soumis à la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise des travaux publics.

Monsieur [A] a été élu en qualité de membre titulaire du comité d’entreprise et de délégué du personnel titulaire.

Au dernier état de la relation contractuelle, [D] [A] occupait l’emploi de chef de chantier ' qualification ETAM, position F ' selon avenant au contrat de travail du 31 juillet 2015.

Par correspondance en date du 17 septembre 2018, la SA CAN a convoqué [D] [A] à un entretien préalable à un éventuel licenciement disciplinaire, fixé au 25 septembre 2018, et mis à pied l’intéressé à titre conservatoire dans cette attente.

Suivant autorisation de l’inspecteur du travail en date du 28 novembre 2018, la SA CAN a procédé au licenciement de [D] [A] pour faute grave par correspondance en date du 3 décembre 2019.

Le 14 février 2019, [D] [A] a saisi le conseil de prud’hommes d’une contestation du licenciement dont il a ainsi fait l’objet, et de demandes salariales et indemnitaires afférentes.

Par jugement en date du 28 janvier 2020, dont appel, le conseil de prud’hommes de Valence ' section industrie ' s’est déclaré incompétent au profit du tribunal administratif de Grenoble et a réservé les dépens.

Cette décision a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec accusés de réception en date du 29 janvier 2020. [D] [A] en a interjeté appel par déclaration de son conseil transmise par voie électronique au greffe de la présente juridiction le 4 février 2020.

Saisi par requête le 11 février 2020, le magistrat délégué par le premier président a autorisé le 19 février 2020 [D] [A] à assigner la SA CAN à l’audience du 17 juin 2020.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 8 juin 2020, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, [D] [A] demande à la cour de :

'DIRE ET JUGER son appel recevable et bien fondé ;

'DIRE ET JUGER le Conseil de prud’hommes de Valence compétent pour statuer sur ses demandes et notamment pour apprécier le degré de gravité de la faute reprochée par l’employeur ;

En conséquence et statuant à nouveau sur le fond :

'DIRE ET JUGER qu’il n’a commis aucune faute grave au préjudice de son employeur ;

'REQUALIFIER son licenciement en licenciement pour cause réelle et sérieuse ;

'DIRE ET JUGER sa mise à pied conservatoire infondée et procéder à son annulation ;

'CONDAMNER la société CAN à lui payer les sommes suivantes :

— Dommages et intérêts pour la mise à pied dépourvu de fondement : 3 000 €,

—  2,5 mois de salaire (mise à pied) : 7 555 €,

— Indemnité de licenciement : 9 401,77 €,

— Indemnité de préavis : 3 022 €,

— Dommages et intérêts pour préjudice moral : 5 000 €,

— Article 700 du CPC : 3 000 €.

Par conclusions en réponse notifiées par voie électronique le 5 mai 2020, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA CAN demande à la cour de :

In limine litis,

'DÉCLARER irrecevable la déclaration d’appel puisqu’elle n’est pas motivée et ne précise pas qu’elle est dirigée contre un jugement statuant sur la compétence,

A titre subsidiaire,

'CONFIRMER le jugement entrepris en ce que le premier juge s’est déclaré incompétent au profit du Tribunal administratif de Grenoble,

A titre infiniment subsidiaire et, le cas échéant, statuant au fond,

'DIRE ET JUGER qu’elle n’a pas à répondre favorablement aux demandes de communication de pièces formulées par Monsieur [A] devant le premier juge,

'CONSTATER que Monsieur [A] a commis des fautes graves qui justifient son licenciement sans préavis d’autant que la question a déjà été définitivement tranchée par l’autorité administrative,

En conséquence,

'DÉBOUTER Monsieur [A] de l’intégralité de ses demandes,

En tout état de cause,

'CONDAMNER Monsieur [A] à lui payer la somme de 6 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

'LE CONDAMNER aux entiers dépens de première instance et d’appel.

SUR CE :

— Sur la recevabilité de la déclaration d’appel :

Il résulte des articles 83, 84 et 85 du code de procédure civile que, nonobstant toute disposition contraire, l’appel dirigé contre la décision d’une juridiction du premier degré se prononçant sur la compétence sans statuer sur le fond du litige doit comporter les mentions prescrites selon le cas par les articles 901 ou 933, mais également préciser qu’elle est dirigée contre un jugement statuant sur la compétence et doit, à peine d’irrecevabilité, être motivée, soit dans la déclaration elle-même, soit dans des conclusions jointes à cette déclaration.

Or, il apparaît au cas particulier que la déclaration d’appel formée le 4 février 2020 par [D] [A] à l’encontre du jugement du 28 janvier précédent par lequel le conseil de prud’hommes de Valence s’était déclaré incompétent au profit du tribunal administratif de Grenoble pour connaître de ses demandes, sans statuer sur le fond, précise que l’appel est « limité aux chefs de jugement expressément critiqués : « Se déclare incompétent au profit du tribunal administratif de Grenoble et dit qu’à défaut de recours dans le délai de 15 jours, le dossier sera transmis à cette juridiction ». ».

Il apparaît parallèlement que la déclaration d’appel précitée était accompagnée d’un formulaire exposant la motivation de l’appel formé par [D] [A] à l’encontre du jugement ayant exclusivement statué sur la compétence.

Il ressort de ces énonciations que les allégations de la SA CAN relatives au non-respect par l’appelant des dispositions de l’article 85 du code de procédure civile ne sont pas fondées, et il convient par conséquent de constater la recevabilité de l’appel ainsi formé le 4 février 2020.

— Sur la rupture du contrat de travail :

Il résulte des dispositions des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail que, même si le juge judiciaire ne peut, au regard de l’autorisation délivrée par l’inspecteur du travail le 28 novembre 2018 de procéder au licenciement de [D] [A], qui n’a pas été contestée devant les juridictions administratives, apprécier le caractère réel et sérieux des motifs retenus pour justifier le licenciement, il reste compétent pour apprécier le degré de gravité de la faute privative des indemnités de rupture et justifiant la mise à pied conservatoire.

Et il convient de rappeler à cet égard qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-2 du code du travail qu’il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’une part, et de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis, d’autre part. En cas de saisine du juge, la lettre de licenciement fixe alors les limites du litige à cet égard.

Les motifs invoqués par l’employeur doivent être précis, objectifs et vérifiables et il ressort de l’article L. 1235-1 du code du travail qu’il appartient au juge d’apprécier non seulement le caractère réel du motif du licenciement disciplinaire mais également son caractère sérieux.

Au cas particulier, la lettre de licenciement adressée à [D] [A] le 3 décembre 2018 est rédigée dans les termes suivants :

« A la suite de la décision de Monsieur l’Inspecteur du travail du 28 novembre 2018 ayant autorisé votre licenciement, nous vous informons, par la présente, de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants :

Alors que notre politique de prévention en matière de sécurité au travail requiert de la part de l’encadrement, et notamment des responsables travaux, le strict respect des consignes de sécurité mises en place, notamment celles contenues dans la matrice des attributions « santé et sécurité au travail » qui vous a été remise et commentée le 18/09/2015, vous avez enfreint les règles suivantes :

— Appliquer la consigne de l’utilisation du MULVEX uniquement par un salarié titulaire du Certificat de Préposé au Tir, en l’occurrence vous-même, et en laissant réaliser l’opération par un salarié non habilité, en l’occurrence Monsieur [N] [G] [C],

— Approvisionner le chantier en matériel adapté, en l’occurrence ne pas avoir apporté la ligne de tir et la marmotte nécessaires à l’utilisation du MULVEX en sécurité.

Nous considérons que ces graves manquements ont contribué à l’accident du travail mortel dont a été victime Monsieur [N] [G] [C].

Cette faute grave rend impossible la poursuite de votre contrat de travail même pendant le préavis.

Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement ».

Or, il ressort notamment du document de synthèse « Recueil des faits ' AT du 17/08/2018 ' [N] [G] [C] » que :

— à l’été 2018, [D] [A] a été affecté par son employeur, en qualité de responsable de travaux, sur le chantier du sentier de la Brague sur la commune de [Localité 4], confié par le conseil départemental des Alpes Maritimes, consistant notamment à dégager des blocs de roches éboulés qui entravaient le gabarit du sentier, dont l’un devait préalablement être fragmenté à l’aide d’un produit pyrotechnique (MULVEX) ;

— à l’issue d’une visite de chantier en compagnie de son supérieur hiérarchique [S] [P], [D] [A], en charge de l’approvisionnement, a transmis le 23 juillet 2018 une liste de préparation du matériel nécessaire, retiré dans les entrepôts de l’entreprise par [N] [G] [C] le lundi 27 août 2018 au matin ;

— [D] [A] a quitté les lieux du chantier dans l’après-midi du 27 août 2018 après avoir transmis aux trois membres de l’équipe de la SA CAN chargés du chantier les consignes de travail et de sécurité, et demandé à [N] [G] [C] de procéder à l’achat d’une pile 9V pour procéder au déclenchement du dispositif pyrotechnique du fait de l’oubli du déclencheur (marmotte) qui devait initialement être utilisé pour cette opération ;

— à l’issue des opérations d’installation du dispositif pyrotechnique, [N] [G] [C] et les autres salariés présents ont constaté l’absence de toute ligne de déclenchement dans le matériel dont ils disposaient, leur permettant de respecter la distance de sécurité précédemment définie de 20 mètres entre le déclencheur et le lieu de l’explosion ;

— « [N] [G] [C] n’a pu se poster qu’à une distance d’environ 4m du fait de la longueur (de la ligne de déclenchement) prémontée sur la cartouche ' déduction faite de la partie intégrée dans le trou de foration » ;

— [N] [G] [C] est décédé des suites du traumatisme à la tête provoqué par un éclat de roche, projeté par l’explosion du dispositif pyrotechnique qu’il a déclenché.

Il apparaît parallèlement que, ainsi qu’il ressort notamment des termes de l’attestation établie par [J] [W], [D] [A] a omis de procéder, ainsi qu’il en avait été convenu avec celui-ci, au retrait de la valise de tir contenant notamment le déclencheur nécessaire aux opérations de fragmentation qu’il envisageait, conservée dans un lieu distinct des entrepôts du matériel pyrotechnique.

Il convient de relever à titre liminaire qu’indépendamment de la promotion de [D] [A] au poste de responsable de travaux intervenue à titre probatoire sur le chantier en cause, [S] [P] restait désigné en qualité de responsable des travaux pour le chantier du sentier de la Brague, et était seul titulaire de la délégation de sécurité afférente, consentie par la SA CAN le 2 mai 2016.

Il convient de relever par ailleurs, en premier lieu, que le chantier considéré avait fait l’objet d’un plan particulier de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) le 22 mai 2018, cosigné par [S] [P] en qualité de chargé d’affaires et de responsable des travaux, et [D] [A] en qualité de responsable de chantier, et qui portait mention détaillée ' dans la fiche d’analyse des risques jointe ' des risques induits par l’utilisation du MULTEX pour la fragmentation des roches, s’agissant tout particulièrement du risque de projection.

Pour autant, les termes généraux des attestations établies par [Y] [O], intervenu au sein de la SA CAN en qualité de formateur à l’utilisation des explosifs, et de [U] [R], responsable d’agence, dont il ressort que « les participants à la formation de recyclage » auraient été informés par l’employeur « que les personnes utilisant chez CAN des produits pyrotechniques d(evai)ent être titulaire du « CPT » et d’un « permis de tir » », ce que ne confirment pas les autres pièces produites aux débats par l’employeur, ne permettent pas de considérer que l’utilisation du MULTEX aurait effectivement fait l’objet de restrictions d’utilisations par l’employeur à ses salariés titulaires du certificat de préposé au tir, tandis qu’une telle restriction d’utilisation ne ressort d’aucune disposition législative ou réglementaire applicable, ni d’aucune fiche technique du produit considéré.

En outre, la circonstance qu’un tel produit pyrotechnique soit utilisé de façon récurrente par des salariés de la SA CAN ne disposant pas du certificat de préposé au tir, ainsi qu’il ressort des attestations convergentes d'[K] [B], [M] [E], [X] [V], [Z] [L] et [T] [H] que produit aux débats [D] [A], tend à mettre en évidence l’existence d’une tolérance ancienne de l’employeur quant à cette pratique.

Aussi la SA CAN n’apparaît-elle pas valablement fondée, comme expressément souligné par l’inspecteur du travail dans sa décision d’autorisation du licenciement de [D] [A] du 28 novembre 2018, à faire grief à son salarié de ne pas avoir appliqué la consigne de réserver exclusivement l’utilisation du MULVEX à un salarié titulaire du certificat de préposé au tir.

Il convient de relever, en second lieu, que la matérialité du second grief tiré par l’employeur du défaut d’approvisionnement du chantier en matériel adapté, s’agissant de la ligne de tir et de la marmotte nécessaires à l’utilisation du MULVEX en sécurité, est établie par les éléments de l’enquête interne mise en 'uvre par la SA CAN à la suite de l’accident survenu le 28 août 2018, et l’examen des mentions de la fiche de préparation qu’il a transmise au responsable logistique le 23 juillet 2018.

Pour autant, il n’est ni soutenu ni démontré que l’utilisation d’une pile 9V, pour le déclenchement, destinée à compenser l’absence de « marmotte » sur le chantier de [Localité 4], aurait joué un rôle causal dans l’accident survenu le 28 août 2018 ni qu’elle aurait exposé les salariés présents à un risque pour leur intégrité physique.

Et les échanges intervenus lors de la réunion du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 14 septembre 2018 ont mis en évidence l’absence d’échanges ' pourtant prévus expressément en pareille circonstance par la « matrice des attributions » mise en 'uvre dans l’entreprise ' entre le responsable logistique et [D] [A], en qualité de responsable travaux, quant à l’oubli d’une ligne de déclenchement lors de la préparation et du recueil du matériel pyrotechnique destiné à être utilisé sur le chantier du sentier de la Brague.

Ainsi, le manquement fautif dont la SA CAN établit la matérialité apparaît-il insuffisant, au regard des énonciations qui précèdent et nonobstant l’avertissement et la mise à pied disciplinaire de trois jours dont avait précédemment fait l’objet [D] [A] les 1er septembre 2010 et le 5 novembre 2015 à raison du non-respect de dispositions et consignes en matière de sécurité du travail, à établir l’impossibilité de poursuivre la relation de travail pendant la durée limitée du préavis.

Et la SA CAN, qui n’avait pas estimer devoir mettre à pied son salarié à titre conservatoire suite à l’accident survenu le 28 août 2018 et avait réuni l’ensemble des éléments lui permettant d’apprécier l’étendue et la gravité des manquements susceptibles d’être imputés à [D] [A], ne justifie pas des circonstances susceptibles de justifier de la mise à pied conservatoire de son salarié à compter de sa convocation, le 17 septembre 2018, à un entretien préalable à son éventuel licenciement pour motif disciplinaire.

Il convient, par conséquent, de condamner la SA CAN à verser à [D] [A] les sommes de 7 555 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, de 9 401,77 € à titre d’indemnité de licenciement, et de 3 022 € à titre d’indemnité de préavis.

Pour autant, les circonstances de l’espèce, telles qu’elles ressortent des éléments de fait ci-dessus rappelées, sont insuffisantes à elles-seules et en l’absence de toute pièce justificative produite à cet égard par l’appelant, à caractériser l’existence, et a fortiori à démontrer l’étendue, du préjudice moral dont [D] [A] sollicite réparation, de sorte qu’il devra être débouté des demandes indemnitaires qu’il forme de ce chef.

— Sur les demandes accessoires :

La SA CAN, qui succombe partiellement à l’instance, sera tenue d’en supporter les entiers dépens.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la charge de [D] [A] l’intégralité des sommes qu’il a été contraint d’exposer en justice pour la défense de ses intérêts, en première instance puis en cause d’appel, de sorte qu’il convient de condamner la SA CAN à lui verser la somme de deux mille euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement déféré et, statuant de nouveau,

CONSTATE la recevabilité de la déclaration d’appel formée le 4 février 2020 ;

CONDAMNE la SA CAN à verser à [D] [A] les sommes de :

— sept mille cinq cent cinquante-cinq euros (7 555 €) bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,

— neuf mille quatre cent un euros et soixante-dix-sept centimes (9 401,77 €) à titre d’indemnité de licenciement,

— trois mille vingt-deux euros (3 022 €) bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

DEBOUTE [D] [A] de ses demandes indemnitaires ;

CONDAMNE la SA CAN à verser à [D] [A] la somme de deux mille euros (2 000 €) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la SA CAN de sa demande fondée sur l’application de ces mêmes dispositions ;

CONDAMNE la SA CAN au paiement des entiers dépens de l’instance.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Blandine FRESSARD, Président et par Madame Chrystel ROHRER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLa Présidente

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