Tribunal administratif de Besançon, 25 juillet 2016, n° 1601037

  • Offre·
  • Service public·
  • Sociétés·
  • Département·
  • Lot·
  • Pouvoir adjudicateur·
  • Candidat·
  • Délégation·
  • Critère·
  • Exploitation

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE BESANÇON

N°1601037

___________

SOCIETE H

___________

M. X

Juge des référés

___________

Audience du 21 juillet 2016

Lecture du 25 juillet 2016

___________

39-08-015-01

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le président du tribunal administratif,

juge des référés

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2016 complétée par des mémoires enregistrés les 11 et 18 juillet 2016, la société Transports Autocars D E (H), représentée par Me Palmier, du cabinet Palmier & Associés, demande au juge des référés, sur le fondement des dispositions de l’article L. 551-1 du code de justice administrative :

1°) d’annuler la procédure d’attribution par le département du Jura des lots n°2, n°8 et n°9, du contrat de délégation de service public relative au transport routier interurbain de voyageurs sur le territoire du département du Jura ;

2°) de condamner le département du Jura verser une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— eu égard au rôle déterminant de M. B A, élu départemental et président de la commission de délégation de service public, dans le processus de choix des offres, et alors que l’intéressé est ingénieur honoraire à la SNCF, il existe un conflit d’intérêts qui entache d’irrégularité la procédure dont l’impartialité n’est plus garantie, puisque la société Keolis Monts Jura, attributaire des lots contestés, fait elle-même partie du groupe SNCF;

— en l’absence de risques réels d’exploitation, le contrat ne pouvait être conclu selon une procédure de délégation de service public mais selon la procédure formalisée applicable aux marchés publics ;

— l’absence de hiérarchisation des différents critères de jugement des offres méconnaît les dispositions de l’article 41 de la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 du Parlement européen et du Conseil en laissant une liberté de choix discrétionnaire à l’acheteur public incompatible avec les principes de transparence des procédures et d’égalité entre les candidats ;

— les critères de jugement des offres ont été modifiés en cours de procédure, en violation des mêmes principes ;

— l’offre finale de la société Keolis est irrégulière et ne pouvait donc être retenue, eu égard à l’inexactitude des informations qu’elle a données quant à la disposition d’un local en gare de Lons-le-Saunier ;

— en l’absence de dérogation prévue par le règlement de la consultation, la société Keolis ne pouvait proposer une offre variable ou mutualisée selon le nombre de lots obtenus, et une telle offre irrégulière ne pouvait être retenue sans rupture d’égalité entre les candidats ;

— l’offre finale de la société Keolis aurait dû être écartée comme irrégulière du fait de la proposition d’une tarification non conforme aux données des cahiers des charges ;

— le département du Jura a manqué à son devoir de respect de la confidentialité des offres et a ainsi méconnu le principe d’égalité de traitement des candidats en effectuant les négociations et les transmissions des offres en cours de négociation par simples courriels non sécurisés ;

— le département du Jura lui a accordé un délai insuffisant pour la remise de son offre finale ;

— la société Keolis Monts Jura n’a pas fourni avant l’ouverture des plis la preuve que sa société mère, Monts Jura Autocars était à jour du paiement de l’impôt sur les sociétés et ainsi son offre était irrégulière.

Par un mémoire enregistré le 20 juillet 2016 la société Keolis Monts Jura, représentée par Me Gaudemet et Me Dizier, du Cabinet Joffe & Associés, conclut :

1°) au rejet de la requête,

2°) à la condamnation de la société Transparc à lui verser une somme de 5000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— aucun conflit d’intérêt ne peut résulter de la présence de M. A comme président de la commission d’appel d’offres car ses anciennes fonctions d’ingénieur de la SNCF, qu’il a quittées en 2002, étaient purement techniques et dénuées de toute thématique stratégique, commerciale, financière ou économique et en outre elle-même, n’était pas contrôlée par la SNCF à la date de son départ en retraite ;

— la prise en charge financière par le département de certaines recettes ne signifie pas que la rémunération ne soit pas substantiellement liée aux résultats de l’exploitation dès lors que ces recettes varient en fonction du nombre des usagers et qu’une partie du risque d’exploitation, fût-elle résiduelle, est assumée par le titulaire, la seule existence d’une subvention d’équilibre ne suffisant pas à disqualifier la délégation de service public en marché ;

— le projet de convention prévoit que le concessionnaire est responsable à ses risques et périls des dépenses d’exploitation et en particulier, une modification de service jusqu’à 3% des kilomètres annuels réalisés, soit 100 000 euros par année d’exploitation, demeurerait à sa charge, un écart plus important impliquant d’ailleurs non une prise en charge mais un avenant ;

— des pénalités pour défaut de qualité du service sont également prévues ;

— la contribution financière forfaitaire ne constitue qu’une simple subvention d’équilibre par rapport à l’équilibre prévisionnel de l’exploitation qui aura été contractualisé, avec cette nuance supplémentaire que la formule de révision comprend un indice de productivité ;

— le délai de transposition de la directive 2014/23/CE n’était pas encore écoulé à la date de lancement de la procédure et ainsi, le moyen tiré de l’absence de hiérarchisation des critères doit être écarté ;

— si les critères de sélection des offres ne peuvent être modifiés, les éléments d’appréciation de ces critères peuvent être librement définis et appliqués, ce qui est le cas du plan marketing au regard du critère technique de la qualité du service alors au demeurant que ce n’est qu’au titre du critère financier que la précision contestée a été apportée au regard des seules actions marketing menées par le groupement des transporteurs ;

— l’actuel local en gare n’est que loué à la société H par le groupement de transporteurs et la concession ne prévoit pas d’autre dispositif que cet espace mutualisé, la société requérante ne pouvant se prévaloir d’un usage exclusif d’un tel espace ;

— l’article 10 du code des marchés publics n’est pas applicable aux délégations de service public et aucune disposition ni aucun principe ne permet d’exclure la possibilité de présenter des offres mutualisées par lots dans le cadre de la négociation ;

— la liberté de négociation a légalement permis de modifier la tarification proposée sur la ligne 900 au sein du lot 9 ;

— le manquement invoqué à l’obligation de confidentialité n’est pas établi ;

— le délai de remise des offres finales n’a pas été insuffisant au regard de la dernière demande de modification qui ne portait que sur la suppression d’une ligne d’un tableur Excel et qui a d’ailleurs été suivie d’effet ;

— les attestations de régularité fiscale ont été produites en temps utile.

Par des mémoires enregistrés les 18 et 21 juillet 2016, le département du Jura, représenté par Me Labetoule, de l’association CLL Avocats, demande au juge des référés :

1°) de rejeter de la requête présentée par la société transports autocars D E H ;

2°) de condamner la société transports autocars D E H à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— la requérante ne justifie pas d’un intérêt à agir car ses cogérants ont exercé des pressions sur les personnes en charge de la procédure de mise en concurrence et ne sauraient désormais se prévaloir à leur tour d’un manquement dans l’impartialité de la procédure ;

— les liens allégués entre M. A et le groupe Keolis ne sont ni suffisamment étroits, ni suffisamment actuels pour entraîner un doute sur la partialité de la procédure dans la mesure où les sociétés Keolis et Keolis Monts Jura sont deux sociétés distinctes, où la société Keolis Monts Jura n’a pas de liens prononcés avec la SNCF et enfin où les liens qu’entretenait M. A avec la société SNCF ne sont ni actuels ni en rapport avec les activités commerciales de la société ;

— c’est au regard des recommandations de la chambre régionale des comptes que le dispositif prévu par l’ancienne délégation a été revu et fait désormais peser sur le titulaire un risque réel d’exploitation ;

— la participation financière pour le transport scolaire dépend de la fréquentation et elle est donc étroitement liée aux conditions d’exploitation et il convient de ne pas omettre les autres recettes commerciales alors en outre que l’affirmation d’une constante augmentation de la fréquentation est loin d’être établie ;

— l’existence d’une contribution financière forfaitaire ne modifie pas l’analyse, eu égard à l’absence de revalorisation automatique celle-ci-étant subordonnée à des avenants ce qui ne garantit pas la rémunération du délégataire ;

— la société requérante qui a mené des négociations dans le cadre d’une procédure de délégation et a obtenu certains lots, n’a pas été lésée par le manquement invoqué ;

— pendant le délai de transposition, la directive ne peut être invoquée que contre des dispositions à caractère général qui sont de nature à compromettre sérieusement la réalisation du résultat prescrit par la directive et le juge national ne peut pas faire application par anticipation de dispositions non transposées sans méconnaître le principe de sécurité juridique alors que le code général des collectivités territoriales n’imposait alors pas la hiérarchisation des critères sans que cette absence soit regardée comme une méconnaissance du principe de transparence ;

— le département a pu légalement, en cours de négociation, préciser le sens et la portée des critères de sélection dès lors que les principes d’égalité de traitement et de transparence ont été respectés et qu’aucun critère ni aucun élément d’appréciation n’a été abandonné contrairement à ce que soutient la requérante qui n’établit d’ailleurs pas avoir été lésée à cet égard ;

— l’offre de la société Keolis Monts Jura n’était pas irrégulière car elle ne s’est pas prévalue de la propriété de la boutique de vente qui n’est d’ailleurs pas davantage la propriété de la société requérante dont le bail peut être résilié en cas de non renouvellement de la délégation de service public et qui, au demeurant, ne peut avoir été lésée à cet égard dans le choix des offres ;

— le code des marchés publics ne s’appliquant pas en l’espèce, aucune disposition n’interdit la possibilité de permettre, en cours de négociation, la présentation d’offres mutualisées sur plusieurs lots dès lors que cette adaptation du contrat est limitée, justifiée par l’intérêt du service et non discriminatoire et alors que la société requérante a également profité de cette possibilité ;

— il en est de même de la proposition de tarification différente sur la ligne Lons-le-Saunier-Bourg-en Bresse ;

— le fait de ne pas avoir recouru à une plateforme dématérialisée ne suffit pas à établir une méconnaissance en l’espèce du principe de confidentialité alors en outre que la directive invoquée n’était pas encore directement applicable pendant son délai de transposition, qu’il ne s’agit pas, en l’espèce, d’une procédure formalisée et qu’en l’espèce, aucune divulgation des offres n’a été établie ni constatée ;

— le délai de modification qui a été laissé pour déposer l’offre finale, était suffisant au regard de la faible importance des modifications sollicitées et la société requérante l’a d’ailleurs respecté ;

— la société attributaire a remis les attestations fiscales qui étaient requises, concernant sa société mère avant l’ouverture des plis contenant les offres et en tout état de cause, un tel manquement, dès lors que la situation fiscale de l’attributaire était régulière, n’aurait pas été de nature à léser la requérante.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 ;

— le code général des collectivités territoriales ;

— le code des marchés publics ;

— l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 ;

— le décret n° 97-638 du 31 mai 1997 ;

— le décret n° 2016-86 du 1er février 2016 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience publique du 21 juillet 2016 au cours de laquelle ont été entendus :

— le rapport de M. X, juge des référés,

— les observations de Me Palmier et de M. Y, pour la société H, de Me Labetoule et de Mme Z pour le département du Jura, et de Me Dizier, pour la société Keolis Monts Jura, qui ont repris leur argumentation écrite.

L’instruction a été close à l’issue de l’audience.

Une note en délibéré a été produite après cette clôture par la société H le 22 juillet 2016.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, la délégation d’un service public ou la sélection d’un actionnaire opérateur économique d’une société d’économie mixte à opération unique. Le juge est saisi avant la conclusion du contrat. » . Aux termes de l’article L. 551-2 du même code : « Le juge peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l’exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s’il estime, en considération de l’ensemble des intérêts susceptibles d’être lésés et notamment de l’intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l’emporter sur leurs avantages. Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. (…) ». Il appartient au juge administratif, saisi en application de ces dispositions de se prononcer sur le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à l’administration. En vertu de cet article, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d’être lésées par de tels manquements. Il appartient, dès lors, au juge des référés précontractuels de rechercher si l’opérateur économique qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésé ou risquent de le léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant un opérateur économique concurrent.

2. Par un avis publié le 16 juin 2015, le département du Jura a lancé une procédure d’appel à candidatures et de mise en concurrence pour l’attribution des neuf lots géographiques d’une délégation de service public ayant pour objet le transport routier interurbain de personnes (scolaires et clientèle commerciale). La date limite de dépôt des offres était fixée au 7 janvier 2016 et la société H a présenté, soit individuellement, soit en tant que membre d’un groupement, une offre pour chacun des lots n°1, 2, 4, 5, 6, 8 et 9. Après l’examen des conditions de candidature puis une première analyse des offres par la commission de délégation de service public, le 24 mars 2016, cette société a été autorisée à participer aux négociations qui se sont déroulées du 4 avril au 19 mai 2016. A l’issue de ces échanges, la société H a été informée, par un unique courrier du 28 juin 2016, de ce que les offres qu’elle avait présentées en tant que cotraitante dans le cadre d’un groupement, pour les lots n°4, 5 et 6 avaient été retenues mais que celles correspondant aux lots n°1, 2, 8 et 9, présentées individuellement, avaient été rejetées au profit respectivement de l’entreprise Transdev Pays d’Or (lot n°1), du groupement composé des sociétés Keolis Monts Jura et Ramousse, (lot n°2) et de la seule société Keolis Monts Jura (lots n°8 et 9). Après avoir demandé la communication des motifs détaillés de rejet de ces offres, qu’elle a obtenus en cours d’instance, la société H a saisi le juge des référés d’une demande tendant à l’annulation de l’ensemble de la procédure s’agissant des quatre lots dont elle n’a pas été déclarée attributaire.

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir soulevée en défense ;

Sur la qualification du contrat et le choix subséquent de la procédure d’attribution

3. La société requérante soutient qu’en l’espèce, le mode de délégation du service public mis en œuvre par le département du Jura ne transfère pas au délégataire un risque significatif pouvant justifier le recours à la procédure prévue par les dispositions de l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales mais s’est irrégulièrement substitué à une procédure de marché public.

4. Aux termes de l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales en sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 et en vigueur à l’ouverture de la consultation litigieuse : « Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d’acquérir des biens nécessaires au service. Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l’autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d’Etat. Les garanties professionnelles sont appréciées notamment dans la personne des associés et au vu des garanties professionnelles réunies en son sein. Les sociétés en cours de constitution ou nouvellement créées peuvent être admises à présenter une offre dans les mêmes conditions que les sociétés existantes. La commission mentionnée à l’article L. 1411-5 dresse la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières, de leur respect de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés prévue aux articles L. 5212-1 à L. 5212-4 du code du travail et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l’égalité des usagers devant le service public. La collectivité adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s’il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l’usager. Les offres ainsi présentées sont librement négociées par l’autorité responsable de la personne publique délégante qui, au terme de ces négociations, choisit le délégataire. ».

5. Il résulte de ces dispositions que pour qualifier un contrat de délégation de service public et en déduire les règles qui s’appliquent à sa passation, il appartient au juge, non seulement de déterminer l’objet du contrat envisagé, mais aussi d’apprécier si, une part significative du risque demeurant à la charge du délégataire, les modalités de sa rémunération sont substantiellement liées aux résultats de l’exploitation de l’activité. Tel n’est le cas qu’à la double condition, d’une part, qu’une fraction substantielle des recettes de l’exploitant soit variable et directement liée aux résultats de l’exploitation et d’autre part, que le mode réel de rémunération du délégataire ne neutralise pas le transfert du risque.

6. En premier lieu, il résulte de l’instruction que le contrat envisagé a pour objet de confier à chacun des cocontractants attributaires d’un ou plusieurs lots, l’exploitation dans le ou les secteurs géographiques concernés, du service public départemental des transports interurbains de voyageurs, pour une durée de huit ans. La rémunération contractuelle comprend, conformément au point 3.1. du projet de convention, des recettes commerciales perçues directement auprès des usagers non scolaires, selon les tarifs fixés par le département, des recettes diverses (affichage, produit des amendes, redevances, loyers, services de messagerie…) et la compensation tarifaire versée par le département en contrepartie de la gratuité du transport des scolaires. Contrairement à ce que soutient la société H, cette compensation ne constitue pas une part fixe de la rémunération dès lors qu’elle est elle-même déterminée en fonction de la fréquentation réelle du service : en effet, pour les collégiens et lycéens, elle est fixée à raison de 0,90 euros par élève et par voyage, au regard des données fournies par le système de billettique embarquée ; pour les élèves de maternelle et de primaire, elle repose sur un système d’abonnement mensuel dépendant du calendrier scolaire de l’établissement et du nombre de voyages journaliers (entre 13,50 et 16,50 euros par mois) ; pour les élèves du 1er degré non subventionnés par le département, elle repose sur un système de carnet de dix voyages ou d’abonnement mensuel (10 ou 20 euros). Ainsi, et alors qu’il n’est pas soutenu que le niveau des tarifs fixés par le département serait surévalué, le seul constat de ce que la proportion que prendrait, dans l’ensemble de la rémunération contractuelle, cette compensation tarifaire versée par le département pour les transports scolaires, serait, au regard des données disponibles relatives à l’ancienne délégation de service public, de l’ordre de 93 à 96 % ne suffit pas à établir que cette rémunération ne serait pas substantiellement liée aux résultats de l’exploitation, alors en outre que les documents produits par la requérante ne permettent pas d’établir que la fréquentation du réseau de transport, y compris scolaire, sera nécessairement, d’une année sur l’autre et sur l’ensemble de la période contractuelle, en constante évolution alors qu’au cours de la période antérieure, elle a pu, pour certains lots, connaître un tassement voire une baisse de la fréquentation.

7. Si, en second lieu, la société se prévaut également du mécanisme de contribution financière forfaitaire institué à l’article 3 du projet de convention, et constitué par la différence entre les coûts prévisionnels d’exploitation et les recettes prévisionnelles d’exploitation sur lesquelles le contractant s’est engagé, dès l’origine, pour l’ensemble de la durée de la concession, elle n’établit pas qu’un tel mécanisme, qui est, selon les termes mêmes de la convention, destiné à compenser les sujétions de service public imposées au délégataire, aurait pour effet de systématiquement prévenir, tout risque de déficit réel d’exploitation alors d’une part, qu’il n’est pas contesté que la formule de révision annuelle comporte un coefficient fixe de productivité qui contrebalance partiellement l’impact, dans sa mise en œuvre, de l’évolution des coûts de production et que d’autre part, la convention prévoit que le département est en mesure d’imposer une adaptation de la consistance et des modalités d’exécution des services, sans être tenu de modifier, par avenant, le montant de la contribution lorsque la variation de ces modalités, mesurée en kilomètres annuels, ne dépasse pas 3%.

8. Il résulte de ce qui précède que les modalités de la rémunération du contractant, telles qu’elles sont définies par le projet de convention, et qui sont substantiellement liées aux résultats de l’exploitation, ne peuvent être regardées comme ayant pour effet de transférer de manière significative les risques afférents à cette exploitation à l’autorité délégante. La société requérante n’est donc pas fondée à soutenir que le département du Jura aurait dû mettre en œuvre une procédure de passation d’un marché public et de délégation de service public.

Sur la régularité de la procédure

9. En premier lieu, les dispositions de l’article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales prévoient que la commission habilitée à ouvrir les offres et à donner son avis sur ces dernières est présidée par l’autorité habilitée à signer le contrat de délégation de service public ou son représentant. Par ailleurs, au nombre des principes généraux du droit qui s’imposent au pouvoir adjudicateur comme à toute autorité administrative figure le principe d’impartialité, dont la méconnaissance est constitutive d’un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence.

10. A cet égard, la société requérante invoque un manquement au principe d’impartialité de la procédure au motif que M. A, conseiller départemental du Jura qui en l’espèce assurait les fonctions de président de la commission de délégation de service public, était ingénieur honoraire de la SNCF, alors que la société attributaire, Keolis Monts Jura fait partie du groupe SNCF. Il résulte toutefois de l’instruction que M. A n’a exercé, en qualité de chef de la section équipement de Mâcon entre 1995 et 2001 et de chef de pôle ingénierie à Dijon, de 2001 à 2002, date de son départ en retraite, que des missions techniques sans rapport avec la direction de la SNCF et a fortiori avec la branche « activités commerciales » à laquelle appartient, depuis lors, le groupe Keolis, dont la société Keolis Monts Jura est membre. Eu égard au niveau relatif, à la nature et à l’ancienneté des responsabilités exercées par M. A, sa présence à la présidence de la commission de délégation de service public ne peut être regardée comme susceptible de caractériser un conflit d’intérêt susceptible de porter atteinte au principe d’impartialité et d’entacher, par suite, d’irrégularité la procédure litigieuse.

11. En second lieu, la société requérante soutient qu’en ne recourant pas, pour l’organisation de ses échanges avec les candidats, à une plateforme dématérialisée et en privilégiant l’utilisation de la messagerie électronique, le département du Jura aurait méconnu son obligation de garantir la confidentialité des offres et l’égalité de traitement entre les candidats. Si elle se prévaut à cet égard des termes de l’article 29 de la directive UE n° 2014/23 du 26 février 2014, le délai de transposition de cette directive par les Etats membres était fixé au 18 avril 2016 par son article 51 et c’est d’ailleurs l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 et le décret n° 2016-86 du 1er février 2016 pris pour son application, qui y ont procédé, ces dispositions n’étant applicables qu’aux consultations ouvertes après le 1er avril 2016.

12. Il est vrai qu’ainsi que l’a précisé la Cour de justice des Communautés européennes par un arrêt rendu le 18 décembre 1997 dans l’affaire C-129/96, les autorités nationales ne peuvent légalement prendre, pendant le délai de transposition d’une directive, des mesures de nature à compromettre sérieusement la réalisation du résultat prescrit par cette directive. Toutefois, l’attribution de la délégation de service public litigieuse, qui présente le caractère d’une décision individuelle, ne peut être regardée comme de nature à compromettre la réalisation du résultat prescrit par la directive du 26 février 2014.

13. Au demeurant, il n’est pas établi en l’espèce que les modalités d’échanges par courriels, retenues en l’espèce par le département du Jura, qui avait prévu un interlocuteur unique pour réceptionner les productions des candidats, à charge pour lui de les transférer vers un dossier à accès limité aux seules personnes en charge de la procédure, auraient permis la divulgation d’informations confidentielles de nature à léser effectivement la société requérante dont le moyen doit, à cet égard, être écarté.

Sur les critères de jugement des offres

14. En premier lieu, la société requérante invoque l’irrégularité du règlement de la consultation dont elle soutient qu’il aurait dû prévoir une hiérarchisation de ces critères, sous peine de laisser un choix discrétionnaire au pouvoir adjudicateur. Ce règlement de la consultation se borne en effet à énumérer en son article 6, les quatre critères de sélection des offres qui doivent être mis en œuvre pour le jugement des offres, à savoir : optimisation de l’organisation de l’offre de transport, éléments financiers, qualité de service, mesures mises en œuvre favorables à la protection de l’environnement.

15. A la date de l’ouverture de la consultation, les dispositions du code général des collectivités territoriales ne prévoyaient aucune disposition prescrivant explicitement l’obligation pour le pouvoir adjudicateur de préciser explicitement la hiérarchisation des critères de jugement des offres en matière de délégation de service public. La requérante se prévaut cette fois des termes du 3 de l’article 41 de la directive UE n° 2014/23 du 26 février 2014 qui prévoit une telle obligation, mais ainsi qu’il a été dit, le délai de transposition de cette directive par les Etats membres était fixé au 18 avril 2016 par son article 51, soit postérieurement à l’ouverture de la consultation litigieuse. Et, comme rappelé au point 13, l’attribution de la délégation de service public litigieuse, qui présente le caractère d’une décision individuelle, ne peut en tout état de cause être regardée comme de nature à compromettre la réalisation du résultat prescrit par cette directive. Dans ces conditions, l’absence dans le règlement de la consultation, de hiérarchisation des critères de jugement des offres ne constituait pas, en l’état du droit applicable, un manquement à l’obligation de transparence pesant sur le pouvoir adjudicateur.

16. En second lieu, la société H soutient que l’un des éléments d’appréciation composant l’un des critères de jugement des offres aurait irrégulièrement été modifié en cours de négociation. L’article 6 du règlement de la consultation incluait, parmi les éléments d’appréciation à prendre en compte s’agissant du critère de la qualité du service, le contenu du plan marketing que les candidats, dans le cadre de leur mission de promotion du réseau et d’information des usagers, devaient notamment décrire dans le cadre d’une annexe 13 (plan marketing prévisionnel pour une année). Eu égard à l’allotissement de la procédure, l’article 4 du règlement précisait toutefois que l’ensemble des concessionnaires devaient constituer un groupement dont la mission principale serait de proposer le plan marketing annuel sur l’ensemble du réseau et de coordonner les actions en découlant.

17. Si, comme le soutient la société requérante, l’autorité délégante qui choisit de faire connaître ses critères de sélection des offres dans l’avis d’appel public à la concurrence, ne peut ensuite les modifier sans porter atteinte au principe de la transparence des procédures et d’égal accès des candidats aux délégations de service public, il lui est en revanche possible de préciser le sens et la portée de ces critères de sélection au cours de la consultation, dès lors que ces précisions n’ont ni pour objet ni pour effet de créer des discriminations injustifiées entre les entreprises candidates. A cet égard, il était donc régulièrement loisible au pouvoir adjudicateur, au cours de la phase de négociation prévue tant par les dispositions de l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, que par celles du règlement de la consultation, d’indiquer à l’ensemble des candidats ayant déposé une offre et admis à participer à cette phase, que les comptes d’exploitation prévisionnels à présenter dans les offres n’auraient pas à renseigner la ligne relative aux actions marketing mises en œuvre globalement par le groupement de concessionnaires, dont le contenu devrait ultérieurement être défini par le département. Contrairement à ce qu’affirme la société H, cette précision, qui concernait le volet financier de la présentation des offres et s’est adressée à l’ensemble des candidats entre lesquels elle n’a donc créé aucune discrimination, n’a pas traduit, de la part du pouvoir adjudicateur, un abandon, lors du jugement des offres, de l’élément d’appréciation lié au plan marketing dans la mise en œuvre du critère technique de la qualité du service, ainsi qu’en atteste d’ailleurs la réponse adressée à la requérante le 11 juillet 2016 qui confirme qu’il en a notamment été tenu compte s’agissant de ses offres relatives aux lots n°2 et 9. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance, sur ce point, de la règle d’intangibilité des critères de jugement des offres manque en fait.

Sur l’irrégularité de la candidature et des offres de la société attributaire

18. En premier lieu, la requérante soutient que la candidature de la société Keolis Monts Jura ne pouvait légalement être admise en l’absence de justification de la régularité de sa situation fiscale avant la date de l’ouverture des plis contenant les offres.

19. Si les dispositions des articles L. 1411-1 et L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales et de l’article 8 du décret du 31 mai 1997 susvisé, interdisent de prendre en considération les dossiers des candidats qui ne comporteraient pas les attestations nécessaires, elles prévoient y compris après la date limite de dépôt des candidatures, une procédure de régularisation des candidatures. Dans l’hypothèse où la collectivité délégante fixe une date limite unique pour le dépôt des dossiers comportant, d’une part, les éléments nécessaires pour apprécier les garanties offertes par les candidats, notamment au regard de la satisfaction de leurs obligations fiscales et sociales, d’autre part, les offres proprement dites de ces candidats, cette procédure de régularisation, d’ailleurs explicitement prévue dans le règlement de la consultation litigieuse, trouve à s’appliquer, le cas échéant, après cette date limite et jusqu’à ce que la commission mentionnée à l’article L. 1411-5 procède à l’ouverture des plis contenant les offres.

20. Il résulte des explications et justifications produites en défense qu’à la suite de la demande qui lui a été adressée après le dépôt de ses offres par le département du Jura, la société Keolis Monts Jura a présenté l’ensemble des éléments établissant la régularité de sa situation fiscale et celle de sa société mère, avant la date de l’ouverture des plis contenant les offres, soit le 19 janvier 2016. Le moyen tiré de l’irrégularité de sa candidature à cet égard manque donc en fait.

21. En deuxième lieu, la société H estime que les offres de la société Keolis Monts Jura ne pouvaient être régulièrement retenues en ce qu’elles reposeraient sur une déclaration inexacte relative à la disposition d’un local de vente en gare de Lons-le-Saunier. Il s’agissait ici de répondre à l’une des précisions apportées en cours de négociation par le pouvoir adjudicateur faisant peser sur le groupement de tous les transporteurs délégataires la charge de mettre en place un guichet unique en gare de Lons-le-Saunier, permettant de vendre les titres de transports Jurago ainsi que ceux du réseau urbain de la communauté d’agglomération, ECLA. Toutefois, si la société H en tant que seul délégataire sortant est actuellement titulaire d’un bail de la SNCF sur le point de vente Jurago situé dans la gare, une telle situation n’avait pas forcément vocation à se poursuivre à l’issue de la nouvelle procédure, soit qu’un nouveau bail soit consenti au groupement par la SNCF soit qu’un nouveau point de vente Jurago soit établi en gare. En indiquant par conséquent tant dans les offres présentées pour les lots 2, 8 et 9 que dans celle qu’elle a présentée de manière mutualisée pour les trois lots, que le point de vente exploité par le groupement serait celui de la boutique Jurago de la gare de Lons le Saunier, la société Keolis Monts Jura ne peut être regardée comme ayant fait une déclaration inexacte et la société requérante n’est donc pas fondée à soutenir que ces offres étaient irrégulières et ne pouvaient, pour ce motif, être retenues.

22. En troisième lieu, la société requérante soutient qu’en retenant l’offre mutualisée présentée en fin de négociations par la société Keolis Monts Jura sur les lots n°2,8 et 9, alors que le règlement de la consultation ne prévoyait pas une telle possibilité, le département du Jura aurait manqué à ses obligations.

23. Les dispositions du code des marchés publics, et notamment son article 10, ne trouvent pas à s’appliquer en matière de délégation de service public. Dans ce domaine, la personne responsable de la procédure de passation peut apporter au cours de la consultation engagée sur le fondement des dispositions de l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, des adaptations à l’objet du contrat qu’elle envisage de conclure au terme de la négociation lorsque ces adaptations sont d’une portée limitée, justifiées par l’intérêt du service et qu’elles ne présentent pas, entre les entreprises concurrentes, un caractère discriminatoire.

24. En l’espèce, il résulte de l’instruction que le pouvoir adjudicateur a, en début de phase de négociations, autorisé les candidats à proposer des offres « mutualisées » entre les différents lots géographiques sur lesquelles, seules ou en groupement, elles avaient déposé des offres ciblées, afin de réduire davantage les coûts, en termes de frais de structure, d’assurance, de temps de travail ou d’utilisation de véhicules. Il n’est pas contesté que l’ensemble des candidats ont été informés de cette possibilité dans des conditions identiques et dans des délais permettant de proposer des offres mutualisées. Au demeurant, la société H a elle-même usé de cette faculté en proposant une offre mutualisée sur les seuls lots 2 et 9, tout en maintenant les offres individualisées présentées seule ou en groupement sur chacun des lots n°1, 2, 4, 5, 6, 8 et 9.

25. Eu égard, d’une part, à l’intérêt que présentait pour les deniers publics cet aménagement proposé aux candidats, en vue de l’optimisation des coûts, d’autre part aux conditions de sa mise en œuvre préservant l’égalité entre les candidats, et enfin à la circonstance qu’il appartenait en tout état de cause au pouvoir adjudicateur de veiller à ce qu’après examen tant des offres individualisées que des offres mutualisées, les conditions d’exécution du service telles que prescrites dans les documents de la consultation, ne subissent, par l’effet de la mutualisation, que des adaptations de portée limitée, ce mécanisme ne peut être regardé comme ayant porté atteinte aux principes d’égalité et de transparence. Contrairement, en outre, à ce que soutient la société requérante, le département du Jura a procédé à l’analyse aussi bien technique que financière de l’ensemble des offres, qu’elles aient porté sur des lots individualisés ou sur les lots mutualisés. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l’offre de la société Keolis Monts Jura finalement retenue conduisait, par l’effet de sa présentation mutualisée, à une modification substantielle des conditions d’exécution du service telles que prévues dans le règlement de la consultation. Il s’ensuit que la société H n’est pas fondée à soutenir que l’offre présentée par la société Keolis Monts Jura sur les lots n°2, 8 et 9 était irrégulière du seul fait qu’elle était présentée de manière mutualisée ni qu’elle aurait dû être rejetée pour ce motif.

26. En dernier lieu, la société requérante soutient que l’offre de la société Keolis Monts Jura était irrégulière en ce qu’elle proposait de modifier certains tarifs commerciaux.

27. Les principes énoncés au point 23 ci-dessus trouvent également à s’appliquer en l’occurrence. Il résulte des documents de la consultation qu’à l’exclusion de la ligne 400 à haut niveau de service prévue, dans le lot n°4, entre Lons-le-Saunier et Dole, qui pouvait faire l’objet d’une tarification spécifique, les autres lignes commerciales seraient soumises à une tarification unique à savoir 2 euros, pour un billet à l’unité, 15 euros pour une carte de dix trajets et 40 euros pour un abonnement mensuel. Le pouvoir adjudicateur a cependant, au cours des négociations relatives au lot n°9, invité les candidats formuler des propositions en vue d’améliorer l’organisation de la ligne 901 reliant Lons-le-Saunier et Bourg-en-Bresse. La société requérante et la société Keolis Monts Jura ont toutes deux déféré à cette invitation par la création d’une nouvelle ligne à haut niveau 900 en plus de la ligne 901. La société Keolis a proposé une modification du projet de convention en dotant cette ligne expresse 900 des mêmes prestations à haut niveau que la ligne 400 reliant Lons-le-Saunier et Dole, avec les mêmes tarifs que cette dernière, soit 5 euros le billet unitaire, 35 euros le carnet de dix trajets et 60 euros l’abonnement mensuel. Eu égard à l’intérêt que présentait l’amélioration des conditions de desserte de deux pôles majeurs, en termes de rapidité et de niveau des prestations fournies à bord, et du caractère limité de l’adaptation qui concernait une seule des lignes du réseau et qui est intervenue dans des conditions de procédure respectant le principe d’égalité entre les candidats, la société requérante n’est pas fondée à soutenir que l’offre ainsi proposée était irrégulière et qu’elle aurait dû être rejetée pour ce motif.

Sur le délai imparti à la société H pour remettre son offre finale

28. La société H reproche au département du Jura de ne l’avoir informée que très tardivement avant l’échéance prévue, au 20 mai 2016 à 17 h 30, pour le dépôt des offres, de son souhait de disposer, pour le lot n° 9, de deux comptes d’exploitation, l’un intégrant la ligne expresse 900 et l’autre n’en faisant pas état. Alors que les négociations étaient terminées depuis le 13 mai 2016, le courriel contenant cette demande ne lui a en effet été adressé que le 20 mai 2016 à 11 h 22. Toutefois, il ressort des termes mêmes de ce courriel que la société H avait déjà, à l’issue des négociations, prévu de proposer d’intégrer dans son offre, une ligne expresse 900 à haut niveau de service. En dépit de sa brièveté, le délai imparti pour présenter également un compte d’exploitation faisant abstraction de cette ligne, était donc et eu égard également à l’état d’avancement des négociations, à l’utilisation de logiciels de calculs performants, ainsi qu’à la circonstance que cette demande correspondait assez largement aux propositions déjà exprimées dans l’offre initiale, qui ne comprenaient pas la ligne à haut niveau de service, ne peut être regardé comme insuffisant et avoir placé la société concernée dans une situation de rupture d’égalité. Il n’est pas en outre établi que la qualité de l’offre finale de la société H, d’ailleurs déposée dans le délai prévu, aurait été affectée par la brièveté de ce dernier. Le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure relative à l’attribution de ce lot doit donc être écarté.

29. Il résulte de tout ce qui précède que la société H n’est pas fondée à demander l’annulation de la procédure d’attribution des lots 2, 8 et 9 de la délégation de service public du transport routier interurbain de voyageurs sur le territoire du département du Jura et que sa requête doit être rejetée.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens

30. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département du Jura, le versement à la société H, qui est partie perdante, de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

31. Il y a lieu, pour le même motif, de condamner la société H à verser au département du Jura et à la société Keolis Monts Jura une somme de 2000 euros chacun sur le fondement de ces dispositions.

ORDONNE

Article 1er : La requête de la société Transports Autocars D E (H) est rejetée.

Article 2 : La société Transports Autocars D E (H) est condamnée à verser au département du Jura et à la société Keolis Monts Jura une somme de 2000 euros chacun en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Transports Autocars D E (H), au département du Jura et à la société Keolis Monts Jura.

Fait à Besançon, le 25 juillet 2016.

Le juge des référés, La greffière,

E. X C. Chiappinelli

La République mande et ordonne au préfet du Jura en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision

Pour expédition conforme

Un greffier

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Besançon, 25 juillet 2016, n° 1601037