Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 23 septembre 2021, n° 18/04523

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 5, 23 sept. 2021, n° 18/04523
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/04523
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 13 décembre 2017, N° 15/18616
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2021

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/04523 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5FMZ

Décision déférée à la cour : jugement du 14 décembre 2017 -tribunal de grande instance de PARIS – RG n° 15/18616

APPELANTE

SAS SEMPEREGO

Ayant son siège social […]

[…]

N° SIRET : 512 003 658

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

INTIMEE

Association PARIS BIOTECH SANTE

[…]

[…]

N° SIREN : 434 969 317

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Eva BERDUGO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1569

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 juin 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme X SOUDRY, conseillère.

Greffière, lors des débats : Mme Yulia TREFILOVA-PIETREMONT

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Z-A B, présidente de chambre,

Mme X SOUDRY, conseillère

Mme Camille LIGNIERES, conseillère

qui en ont délibéré,

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Z-A B, présidente de chambre et par Mme X Y, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

L’association Incubateur Paris Biotech Santé (ci-après « PBS »), association loi 1901, est un incubateur de mission de service public dont l’objet est de promouvoir et de développer l’incubation de projets de création d’entreprise de haute technologie à caractère innovant en santé humaine dans le cadre de la loi n°99-587 du 12 juillet 1999 sur l’innovation et la recherche.

La société Semperego, créée le 24 avril 2009 et spécialisée dans la recherche et développement en biotechnologie, a déposé un dossier auprès de l’association PBS pour être intégrée dans la structure d’incubation.

Le 29 octobre 2010, une convention d’incubation a été signée entre l’association PBS et la société Semperego.

Le 13 juin 2012, l’association PBS a émis une facture d’un montant de 12.000 euros HT, soit 14.352 euros TTC.

La société Semperego est sortie de l’incubation en octobre 2012.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 janvier 2014, l’association PBS a mis en demeure la société Semperego de lui régler la facture d’un montant de 14.352 euros dans le délai d’un mois.

Par ordonnance du 17 juillet 2015, sur requête de l’association PBS, le président du tribunal de grande instance de Paris a fait injonction à la société Semperego de payer à l’association PBS la somme de 14.352 euros au titre de la facture litigieuse.

Le 29 octobre 2015, la société Semperego a formé opposition à l’injonction de payer.

Par ordonnance en date du 8 septembre 2016, le juge de la mise en état a débouté la société Semperego de sa demande de communication de pièces et l’a condamnée à payer à l’association PBS la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’incident.

Par jugement du 14 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :

Condamné la SAS Semperego à verser à l’Association Incubateur Paris Biotech Santé la somme de 14.352 euros au titre de la facture n°006/2012 émise le 13 juin 2012, avec intérêt au taux légal à compter du 20 janvier 2014, date de la première mise en demeure ;

Débouté la SAS Semperego de sa demande de délai de paiement ;

Rappelé que, conformément à l’article 1420 du code de procédure civile, le présent jugement se substitue à l’ordonnance d’injonction de payer du 17 juillet 2015 ;

Condamné la SAS Semperego à payer à l’Association Incubateur Paris Biotech Santé la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SAS Semperego aux dépens de la présente instance ;

Ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

Par déclaration du 28 février 2018, la société Semperego a interjeté appel de ce jugement en visant la totalité des chefs du jugement critiqués.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 3 mai 2021, la société Semperego demande à la cour de :

Vu les articles 3, 9, 16, 455, 563 à 566, 763, 770 et 910-4 du code de procédure civile,

Vu les articles 10, 32-1, 1382,1383, 1384, 1305-3 du code civil,

Vu les articles 1315, 1134 et 1162 du code civil,

Vu l’article L.441-3 du code de commerce,

Vu l’article 1244-1 du code civil,

Vu l’article 117 du code de procédure civile,

Vu l’article 441-1 du code pénal,

Vu l’article 289 du code général des impôts,

Vu l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme,

Vu le contrat d’incubation signé le 29 octobre 2010,

Vu la facture du 13 juin 2012,

Vu le jugement du 14 décembre 2017,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces visées,

A titre principal :

Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 14 décembre 2017 dont appel ;

Constater l’absence de réussite financière de la société Semperego, telle que définie par l’article 4.1 du contrat d’incubation signé le 29 octobre 2010 et l’information faite par la société Semperego sur ce point ;

Constater le non-respect de l’Association Paris Biotech Santé du contrat d’incubation du 29 octobre 2010 dans son article 4, son article 2.1 et son annexe 4 ;

Constater le caractère indu de la facture de Paris Biotech Santé du 13 juin 2012 ;

Constater le caractère frauduleux de la facture de Paris Biotech Santé du 13 juin 2012;

Constater le caractère abusif de la procédure ;

Constater que la créance invoquée par l’Association Paris Biotech Santé n’est ni exigible, ni liquide, ni certaine ;

Constater les fautes des magistrats au cours de la procédure de première instance y compris ceux ayant délivré l’injonction d’ordonnance de payer ;

Constater l’escroquerie au jugement ainsi que la tentative d’escroquerie au jugement de l’Association Paris Biotech Santé ;

Constater les man’uvres frauduleuses employées contre Semperego par l’Association Paris Biotech Santé ;

Constater les préjudices de Semperego et de ses fondateurs ;

Faire droit aux demandes d’indemnisations de Semperego et de ses fondateurs.

En conséquence,

Dire et juger que la créance sollicitée par l’Association Paris Biotech Santé est infondée, irrecevable, illégitime et frauduleuse ;

Dire et juger que l’ordonnance d’injonction de payer ne se substitue pas au jugement de première instance ;

Dire et juger que l’injonction d’ordonnance de payer est nulle ;

Dire et juger que la procédure est nulle ;

Dire et juger que la convention d’incubation a été violée par l’Association Paris Biotech Santé au préjudice de Semperego et de ses fondateurs ;

Dire et juger que les magistrats au cours de la procédure de première instance y compris ceux ayant délivré l’injonction d’ordonnance de payer ont fauté préjudiciablement à l’encontre de Seperego et ses fondateurs ;

Dire et juger que la procédure judiciaire que subit semperego est abusive ; Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego de la moins-value boursière de 36.064,57 euros résultant de la vente forcée des actions ;

Rembourser la somme de 1.251,85 euros indûment perçue par l’Association Paris Biotech Santé au titre de la saisie sur compte bancaire ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego des sommes de 60 euros et 322,15 euros au titre de la saisie sur compte bancaire ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego de la perte de chance de gain au travers de l’action Call-Bay-Intl d’un montant de 100.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego de la perte de chance de gain boursier d’un montant de 200.000 euros à 2.000.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego du préjudice moral induit par la vente des actions d’un montant de 25.000 euros et ses fondateurs d’un montant de 150.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego du préjudice moral pour avoir été privé de sa banque pour un montant de 25.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego du préjudice moral, de cette procédure abusive à la fausse facture, pour un montant de 50.000 euros et ses fondateurs pour un montant de 75.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego du préjudice moral afférent au parasitisme subit pour un montant de 50.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego du montant de la facture qui n’a jamais été affecté à l’Incube, pour un montant de 12.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à verser à Semperego le reliquat d’incubation jamais perçu de 49.069 euros mise en exergue par la présente procédure ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego du préjudice moral, de cette procédure abusive résultant des fautes du président de l’incubateur, pour un montant de 50.000 euros et ses fondateurs pour un montant de 75.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego du préjudice moral, de cette procédure abusive par l’emploi de man’uvres frauduleuses, pour un montant de 25.000 euros par éléments faux employés par l’incubateur, et ses fondateurs pour un montant de 10.000 euros par éléments faux employés par l’incubateur ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semeperego du préjudice moral, de cette procédure abusive vu l’escroquerie au jugement employée par l’incubateur, pour un montant de 50.000 euros et ses fondateurs pour un montant de 75.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego de la perte de chance de réaliser du résultat net au travers de son projet d’innovation pour un montant de 10.000.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego et ses fondateurs du préjudice moral de la perte de chance de réaliser du résultat net au travers de son projet d’innovation pour un montant de 1.000.000 euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego et ses fondateurs de la perte de chance de réaliser du résultat net au travers de son projet dans la lutte contre la pandémie du SARS-CoV-2 pour un montant de 4 milliards d’euros ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego et ses fondateurs de la perte de chance de valorisation de la société pour un montant de 16 milliards d’euros;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego et ses fondateurs du préjudice moral de la perte de chance de réaliser du résultat net au travers de son projet dans la lutte contre la pandémie du SARS-CoV-2 pour un montant d’un milliard d’euros;

Ordonner le concours d’un expert judiciaire financier si les juges souhaitent parfaire l’évaluation des préjudices subis par Semperego, à défaut reconnaitre le caractère parfaitement fondé et évalué des préjudices sollicités et y faire droit dans leur entier ;

Rembourser la somme de 335,30 euros indûment perçue par l’Association Paris Biotech Santé au titre d’une saisie sur compte bancaire ;

Rembourser la somme de 500 euros au titre des frais de saisie sur le compte bancaire de la société Semperego ;

Ordonner la publication, aux frais de l’Association Paris Biotech Santé, et dans un délai de 10 jours à compter du jugement à intervenir, d’un communiqué judiciaire sur la première page du site internet accessible à l’adresse https://parisbiotechsante.org/, dont le texte ne devra pas être de taille inférieure à une police 14, et libellé en caractères majuscules, indiquant les mesures qui ont été prononcées à l’encontre de l’incubateur par le tribunal de céans et ce sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir. Ce communiqué judiciaire devra rester une année entière et ce sous astreinte de 2.000 euros par jour où ce dernier disparait du site internet indiqué jusqu’à l’accomplissement de la durée totale précitée ;

Saisir le procureur de la république en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale vu les éléments à caractère pénal portés à la connaissance des juges dans l’exercice de leur fonction ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à l’amende civile prévue à l’article 32-1 du code de procédure civile ;

Débouter l’Association Paris Biotech Santé de ses demandes, fins et prétentions ;

Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir ;

Délivrer un jugement revêtu de la formule exécutoire.

A titre subsidiaire :

Constater l’absence de capacité à agir du Président de l’Association Paris Biotech Santé;

Constater l’irrecevabilité du Procès-verbal du Conseil d’Administration de l’Association Paris Biotech Santé.

En conséquence,

Débouter l’Association Paris Biotech Santé de ses demandes, fins et prétentions ;

Dire et juger que la procédure est nulle ;

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à indemniser Semperego intégralement des préjudices subis.

Si par extraordinaire, la Cour considérait que la société Semperego était redevable de la somme de 14.325 euros au titre du paiement de la facture litigieuse :

Octroyer les plus larges délais de paiement à la société Semperego selon les modalités suivantes : une mensualité de 350 euros durant 23 mois puis le solde au 24è mois ;

Débouter l’association Paris Biotech Santé de sa demande de paiement d’intérêts de retard à compter de sa mise en demeure.

En tout état de cause :

Condamner l’Association Paris Biotech Santé à payer la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 5 mai 2021, l’association Paris Biotech Santé demande à la cour de :

Vu les articles 561 à 567 du code de procédure civile,

Vu les articles 1103 (ancien article 1134 alinéa 1), 1104 (ancien article 1134 alinéa 3), 1231-1 (ancien article 1147), et 1344 du code civil,

Vu la jurisprudence citée,

Vu les pièces,

Confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 14 décembre 2017 en ce qu’il a :

Condamné la SAS Semperego à verser à l’Association Incubateur Paris Biotech Santé la somme de 14.352 euros au titre de la facture n°006/2012 émise le 13 juin 2012, avec intérêt au taux légal à compter du 20 janvier 2014, date de la première mise en demeure ;

Débouté la SAS Semperego de sa demande de délai de paiement ;

Rappelé que conformément à l’article 1420 du code de procédure civile, le présent jugement se substitue à l’ordonnance d’injonction de payer du 17 juillet 2015 ;

Condamné la SAS Semperego à payer à l’Association Incubateur Paris Biotech Santé la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SAS Semperego aux dépens de la présente instance ;

Ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

Dire et juger recevable l’action de l’Association Paris Biotech Santé et se faisant débouter la société Semperego de sa demande de nullité ;

Prononcer l’irrecevabilité des demandes nouvelles de la société Semperego résultant de ses conclusions signifiées le 3 mai 2021 tendant notamment à la condamnation de l’association Paris Biotech Santé à l’indemnisation de divers préjudices moraux et de perte de chance ;

Débouter la société Semperego de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

Débouter la société Semperego de sa demande subsidiaire de délais de paiement ;

Condamner la société Semperego à verser à l’association Paris Biotech Santé la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société Semperego aux entiers dépens et en ce compris les éventuels frais de recouvrement forcé des condamnations prononcées à son encontre.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 6 mai 2021.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

En application de l’article 1409 du code de procédure civile, le juge saisi de la requête en injonction de payer rend une ordonnance portant injonction de payer si, au vu des documents produits, la demande lui parait fondée (la procédure n’étant pas encore contradictoire à ce stade) ; les parties ayant fait valoir leur propre interprétation du contrat litigieux, les premiers juges, après avoir analysé les moyens et arguments de chacune des parties, ont motivé leur décision ; l’association s’est bornée à exécuter une décision de justice exécutoire et la société Semperego n’allègue pas, et a fortiori ne justifie pas, avoir obtenu la suspension de l’exécution provisoire ordonnée par les premiers juges. L’irrégularité de la procédure n’est donc pas démontrée.

Sur la demande en paiement de l’association Paris Biotech Santé

Sur la fin de non recevoir

Bien que l’intimée soulève seulement à titre subsidiaire l’absence de capacité à agir du président de l’association et l’irrecevabilité du procès-verbal de son conseil d’administration, il convient d’examiner d’abord ce moyen, avant d’examiner sur le fond la demande en paiement formulée par l’association Paris Biotech.

La société Semperego formule ainsi une fin de non recevoir, au sens de l’article 122 du code de procédure civile, tendant à faire déclarer l’association Paris Biotech irrecevable en sa demande de paiement sans examen du fond du droit, en raison du défaut allégué du droit d’agir de son représentant, l’association poursuivant la société Semperego en paiement d’une facture sans avoir antérieurement justifié, en application de l’article 12 de ses statuts, de l’autorisation écrite donnée à son président par son conseil d’administration pour agir en demande en justice au nom de l’association.

Si, en application de l’article 123 du code précité, la fin de non recevoir peut être présentée en tout état de cause (sauf éventuellement la possibilité pour le juge de condamner le cas échéant à des dommages et intérêts ceux qui se seraient abstenus dans une intention dilatoire de la soulever plus tôt), il convient de relever que :

— il n’a pas lieu aujourd’hui d’examiner cette fin de non recevoir au titre de la procédure antérieure d’injonction de payer, l’ordonnance en découlant ayant été mise à néant par le seul effet de l’opposition formulée dans les conditions légales par la société Semperego et, en application de l’article 1420 du code de procédure civile, le jugement déféré s’étant substitué de plein droit à l’ordonnance portant injonction de payer,

— s’il apparaît qu’en première instance devant le tribunal, l’association Paris Biotech a été 'prise en la

personne de son représentant légal', le seul défaut de justification du pouvoir d’une personne figurant au procès comme représentant d’une personne morale peut être couverte, et, en application de l’article 121 du code de procédure civile, la nullité n’est pas encourue dès lors que l’irrégularité a disparu au moment où la cour statue,

— le vice du défaut d’autorisation écrite formelle du conseil d’administration de l’association au moment de la saisine de la juridiction du premier degré, peut être couvert par une délibération ultérieure dès lors que c’est dans le seul intérêt de l’association que l’article 12 de ses statuts a stipulé l’autorisation écrite du conseil d’administration pour agir en justice en demande au nom de l’association, il apparaît que, par délibération du 20 juillet 2018, le conseil d’administration de l’association Paris Biotech a reconnu qu’il avait initialement donné de manière informelle des instructions pour le recouvrement de la facture litigieuse et a, en tant que de besoin, tant ratifié tous les actes de procédure antérieurement accomplis, qu’expressément donné tous pouvoirs au président aux fins de défendre les intérêts de l’association dans le cadre de la procédure pendante devant la cour d’appel de Paris et plus généralement d’accomplir tous actes de procédure tendant aux mêmes fins, en l’état des pièces du dossier, aucune irrégularité de ladite délibération n’a été démontré par l’appelante, la cour n’en n’ayant pas davantage relevé

Dès lors, la fin de non recevoir soulevée par la société Semperego ne sera pas accueillie.

Sur la demande en paiement de la facture

Sur le fond, l’association Paris Biotech poursuit la confirmation du jugement, tandis que la société Semperego, critiquant l’interprétation de la convention litigieuse par les premiers juges, fait valoir qu’au sens de celle-ci, un projet d’incubation est réussi si le plan de développement a été mené à son terme, ou si une opération de levée de fonds a été réussie, ou encore s’il a été opéré une cession de 51 % des titres sociaux, ou d’actifs ou de fonds de commerce, ce qui n’a pas été son cas à ce jour. L’appelante soutient encore qu’il résulte des articles 4.1.1, 4.1.2 et 4.1.3 de la convention d’incubation, que les dépensesées par l’incubateur ne sont remboursées qu’en cas de réussite du projet d’incubation, le fait générateur de la créance se situant deux ans après la sortie de l’incubé, le projet étant, en revanche, considéré en échec au sens de l’article 4.3 de la convention litigieuse, si dans les cinq ans, il ne remplit pas les conditions précitées, la société Semperego rappelant que les éventuelles ambiguïtés devant être interprétées en faveur de celui qui s’engage.

Néanmoins, en application de l’article 1161 ancien du code civil, encore applicable à la cause, toutes les clauses des conventions s’interprètent les unes par les autres en donnant à chacune le sens qui résulte de l’acte entier, l’article 1162 ancien du même code ne prévoyant l’interprétation en faveur (par principe) de celui qui s’oblige, uniquement en présence d’un doute. L’auteur des écritures de l’appelante précise qu’en sa qualité 'de scientifique il a fait une étude attentive des faits, des preuves, de la loi et du droit ainsi que du comportement sciemment opéré et révélé par l’association Paris Biotech'. Mais il ressort de l’analyse minutieuse ci-après de la convention d’incubation que :

— le paragraphe D de son préambule stipule que les parties acceptent […] la notion de mutualisme pour les prestations, les ressources et les moyens mis à disposition de l’incubé [soit de la société Semperego],

— si l’article 4 est intitulé 'contrepartie financière en cas de succès de l’incubation’ , il se divise en un sous article 4.1, consacré à la définition d’un projet réussi d’incubation, et en un sous article 4.2, prévoyant les remboursements par l’incubé à l’incubateur en cas de réussite du projet, ce dernier sous article (4.2) se subdivisant lui même en deux paragraphes, soit :

*le paragraphe 4.2.1, consacré au remboursement proprement dit de l’incubé à l’incubateur en cas de réussite du projet d’incubation,

*et le paragraphe 4.2.2, uniquement dédié à la participation de la société Semperego dans le cadre du fond Paris Innovation Amorçage, sans ici faire expressément référence au succès ou à l’échec du projet d’incubation, le sous-paragraphe 4.2.2.1 stipulant expressément qu’en cas de recevabilité du dossier de Semperego par l’OSEO au titre du fonds de la convention d’amorçage conclu en 2009 entre le Département de Paris et l’OSEO, l’incubateur pourra alors émettre à l’encontre de Semperego, une demande de participation de cette dernière à ses frais d’incubation de son projet sans subordonner cette participation à la réussite du projet d’incubation.

Par courriel du 24 janvier 2012 (16H35), la société Semperego a reconnu avoir perçu le 16 janvier 2012, la première tranche de l’aide 'Paris Innovation Amorçage’ à hauteur de la somme de 16.000 euros, montant à partir duquel a été établi le montant HT de 12.000 euros de la facture litigieuse, soit la somme TTC de 14.352 euros (le taux de TVA étant à l’époque de 19,6 %). Il s’en suit que la facture litigieuse n° 006/2012 du 13 juin 2012 d’un montant de 14.352 euros TTC est entièrement justifiée par la seule application du sous paragraphe 4.2.2.1 sus-analysée qu’elle vise expressément.

La société Semperego sollicite aussi subsidiairement les plus larges délais de paiement. Néanmoins, outre que la facture litigieuse a été émise il y a plus de 9 années, en ne fournissant une situation au 31 décembre 2017 (déclaration 2033), l’appelante ne produit aucun élément récent concernant la réalité de sa situation financière actuelle, de sorte que le rejet de délais doit être aussi confirmé.

Le jugement déféré doit dès lors être entièrement confirmé.

Sur les demandes en paiement de la société Semperego et de ses fondateurs

Parmi ses prétentions exprimées devant la cour, l’appelante formule aussi des demandes d’indemnités en faveur de ses fondateurs (au demeurant sans autre précision). Il convient de relever que ceux-ci ne sont pas parties à la présente instance, de sorte que toutes les demandes correspondantes sont irrecevables.

Sur les demandes au titre de la saisie sur compte bancaire

Les demandes de paiement des sommes de 60 euros, et 500 euros au titre de la saisie sur compte bancaire et des frais, et de remboursement de la somme de 335,30 euros qui aurait été 'indûment perçue par l’association’ au titre de ladite saisie et dont il est allégué qu’elles résultent de l’exécution provisoire du jugement seront rejetées, le jugement étant confirmé, et la cour n’étant pas saisie d’une contestation liée à une procédure d’exécution.

Sur les demandes d’indemnisation de la société Semperego

Concernant les demandes d’indemnisation de préjudice formulées en cause d’appel par la société Semperego, il ressort de la relation de la procédure en première instance qu’outre l’indemnisation des frais irrépétibles, l’association Paris Biotech a sollicité le paiement du

montant de la facture litigieuse, majoré des intérêts de retard et que la société Semperego à titre principal, s’y est uniquement opposée, en sollicitant subsidiairement des délais de paiement. Dès lors, les autres diverses demandes d’indemnités formulées par la société Semperego pour la première fois devant la cour, n’ont pas été préalablement soumises aux premiers juges et que, contrairement à ce que prétend l’appelante, celles-ci n’existaient pas antérieurement pour permettre d’invoquer une compensation, ne tendent pas, au sens de l’article 564 du code de procédure civile, à écarter la demande de paiement de l’association et ne résultent pas de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

C’est donc à juste titre que l’association Paris Biotech en soulève l’irrecevabilité en application de l’article 564 précité.

La société Semperego demande aussi que l’association Paris Biotech soit condamnée à lui verser 'le montant de la facture de 12.000 euros qui n’a jamais été affecté à l’incubé', et le reliquat d’incubation d’un montant de 49.069 euros'. Cette dernière demande non formulée en première instance doit, en conséquence, être déclarée irrecevable comme nouvelle en appel.

Quant à la demande en paiement de la somme de 12 000 euros, s’agissant de la facture, objet du présent litige, qui a donné lieu à condamnation de la société Semperego, celle-ci sera déboutée de sa demande de ce chef.

Sur les autres demandes

La société Semperego demande aussi :

— d’une part, la publication de la décision aux frais de l’association, sous astreinte de 2.000 euros par jour,

— d’autre part, de saisir le procureur de la République 'en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale, vu les éléments à caractère pénal portés à la connaissance des juges dans l’exercice de leur fonction'.

Cependant, il n’apparaît pas nécessaire d’ordonner la publication de la présente décision dans la presse et aucun fait ne justifie le recours à l’article 40 du code de procédure pénale.

Sur les demandes au titre de la procédures abusive

Il résulte de l’article 1240 du code civil, qu’une partie ne peut engager sa responsabilité pour avoir exercé une action en justice ou s’être défendue que si l’exercice de son droit a dégénéré en abus. L’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits n’étant pas, en soi, constitutive d’une faute, l’abus ne peut se déduire du seul rejet des prétentions par la juridiction.

La demande en paiement formée par l’association Incubateur Paris Biotech ayant été admise en première instance et en appel, la société Semperego sera déboutée de ses demandes en indemnisation pour procédure abusive.

Enfin une partie à l’instance ne peut pas demander la condamnation d’une autre, au paiement d’une amende civile prévue par l’article 32-1 du code de procédure civile, dès lors que cette mesure est à la seule appréciation de la juridiction saisie.

Sur les demandes accessoires

Succombant dans son recours, l’appelante ne peut pas prospérer dans sa demande d’indemnisation de ses frais irrépétibles mais il serait, en revanche, inéquitable de laisser à l’intimée la charge de ceux supplémentaires qu’elle a dû engager en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Déclare irrecevables les demandes formulées au bénéfice des fondateurs de la société Semperego,

Rejette la fin de non recevoir soulevée par la société Semperego,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Déclare irrecevables comme nouvelles en appel les demandes suivantes de condamnation de l’Association Paris Biotech Santé à indemniser la société Semperego :

— de la moins-value boursière de 36.064,57 euros résultant de la vente forcée des actions ;

— de la somme de 1.251,85 euros indûment perçue par l’Association Paris Biotech Santé et 322,15 euros au titre de la saisie sur compte bancaire suite à la vente des actions ;

— de la perte de chance de gain au travers de l’action Call-Bay-Intl d’un montant de 100.000 euros ;

— de la perte de chance de gain boursier d’un montant de 200.000 euros à 2.000.000 euros;

— du préjudice moral induit par la vente des actions d’un montant de 25.000 euros ;

— du préjudice moral pour avoir été privé de sa banque pour un montant de 25.000 euros ;

— du préjudice moral afférent au parasitisme subi pour un montant de 50.000 euros ;

— du préjudice moral de la perte de chance de réaliser du résultat net au travers de son projet d’innovation pour un montant de 1.000.000 euros ;

— de la perte de chance de réaliser du résultat net au travers de son projet dans la lutte contre la pandémie du SARS-CoV-2 pour un montant de 4 milliards d’euros ;

— de la perte de chance de valorisation de la société pour un montant de 16 milliards d’euros;

— du préjudice moral de la perte de chance de réaliser du résultat net au travers de son projet dans la lutte contre la pandémie du SARS-CoV-2 pour un montant d’un milliard d’euros;

Déclare irrecevable comme nouvelle en appel la demande de condamnation de l’Association Paris Biotech Santé à verser à la société Semperego le reliquat d’incubation de 49.069 euros ;

Déboute la société Semperego de sa demande en paiement de la facture de 12 000 euros,

Déboute la société Semperego des demandes suivantes en réparation du préjudice moral pour procédure abusive :

— à la fausse facture, pour un montant de 50.000 euros ;

— résultant des fautes du président de l’incubateur, pour un montant de 50.000 euros ;

— par l’emploi de man’uvres frauduleuses, pour un montant de 25.000 euros par éléments faux employés par l’incubateur ;

— vu l’escroquerie au jugement employée par l’incubateur, pour un montant de 50.000 euros ;

Rejette les demandes de remboursement de la société Semperego des frais de saisie bancaire, pour les montants de 50', 335,30' et 60 ' ;

Rejette la demande de publication de la décision ;

Rejette la demande de saisine du procureur de la République en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale ;

Condamne la société Semperego aux dépens d’appel et à verser à l’association Incubateur Paris Biotech Santé, la somme complémentaire de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

X Y Z-A B

Greffière Présidente

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 23 septembre 2021, n° 18/04523