Cour d'appel de Paris, 10 juin 2016, n° 15/04466

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 10 juin 2016, n° 15/04466
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/04466
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 2 septembre 2014, N° 14/017470

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 8

ARRET DU 10 JUIN 2016

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/04466

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 03 Septembre 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 14/017470

APPELANTS

Monsieur A Y

XXX

XXX

né le XXX à XXX

XXX

agissant poursuites et diligences de son Président y domicilié en cette qualité.

XXX

XXX

Représentés par Me Philippe GALLAND de la SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assistés de Me Tatiana SAIDI, substituant Me Gilbert DESVALLONS, avocat au barreau de PARIS, toque : L12

INTIMÉE

SAS X TRAVAIL !

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 482099249, prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège.

XXX

XXX

Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

Assistée de Me Jean ROSENBERG, avocat au barreau de PARIS, toque : P460

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 avril 2016, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre, et Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère, chargées d’instruire l’affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre

Mme E-F G, Conseillère

Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Patricia PUPIER

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Annie DABOSVILLE, présidente et par Mme Patricia PUPIER, greffière présente lors du prononcé.

La SAS X Travail! et la SAS XXX – dont M. A Y qui, actionnaire de X Travail! depuis 2007, est le dirigeant – ont collaboré à partir de 2006 à la co-production des émissions « Echapées Belles » et « Routes Mythiques », diffusées sur France Television.

Arguant d’un désaccord sur la cession par M. Y de ses parts dans la société X Travail! au dirigeant de celle-ci le 12 avril 2012 et soutenant que M. Y aurait détourné des contrats et actifs de X Travail!, dont il aurait été dirigeant de fait de 2006 à 2012, au profit de sa propre société 2F production, X Travail! l’a assigné ainsi que XXX aux fins d’expertise financière pour évaluation de son préjudice devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, qui, par ordonnance du 3 septembre 2014, constatant l’échec de la tentative de conciliation qu’il avait ordonnée et retenant que les relations contractuelles des parties constituaient un ensemble complexe nécessitant interprétation, a :

— dit n’y avoir lieu à référé, ni à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— renvoyé l’affaire à l’audience collégiale du 6 octobre 2014, 1re chambre A, à 14 heures pour qu’il soit statué au fond ;

— condamné X Travail aux dépens.

La société XXX et M. Y, appelants de cette décision suivant déclaration d’appel reçue le 25 février 2015, par leurs dernières conclusions transmises le 6 avril 2016, demandent à la cour de :

— confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé

— l’infirmer en ce qu’elle a renvoyé l’affaire à l’audience du 6 octobre 2014 devant le tribunal de commerce de Paris pour qu’il soit statué au fond et, statuant à nouveau, débouter X Travail! de sa demande à ce titre et la renvoyer à mieux se pourvoir

— condamner X Travail! à leur verser une indemnité de procédure de 4.000 euros chacun

— condamner X Travail! aux dépens

Ils soutiennent :

— que l’utilisation de la procédure passerelle n’est pas une mesure d’administration judiciaire et est donc susceptible de recours,

— que le premier juge ne pouvait renvoyer l’affaire au fond par le biais de cette passerelle, étant saisi à titre principal d’une demande visant uniquement à obtenir une mesure in futurum qui relève du seul pouvoir du juge des référés, qu’il ne pouvait pas non plus renvoyer l’affaire au fond concernant une cause différente de celle pour laquelle il avait été saisi et qu’au demeurant, X Travail! ne faisait pas état de l’urgence qui n’est pas caractérisée,

— que la question de la recevabilité de l’utilisation de la passerelle ne se confond pas avec celle de la régularité de l’appel du jugement au fond du 10 février 2015,

— qu’ils n’ont pas acquiescé à la décision de renvoi de l’affaire au fond.

X Travail !, intimée, par ses dernières conclusions transmises le 7 avril 2016, demande à la cour, en substance et en l’absence de toute demande expresse de confirmation ou infirmation de l’ordonnance entreprise, de :

— juger l’appel irrecevable,

— déclarer sans objet l’appel du chef disant n’y avoir lieu à référé,

— rejeter toutes les demandes adverses,

— condamner chacun des appelants au paiement d’une indemnité de procédure de 6.000 euros,

— les condamner aux dépens.

X Travail! soutient :

— que la procédure de passerelle est une mesure d’administration judiciaire et n’est donc pas susceptible de recours

— qu’en tout état de cause :

* c’est au juge du fond saisi par la procédure de passerelle qu’il appartient de statuer sur la régularité de sa saisine

* que les appelants qui ont acquiescé au renvoi ne peuvent se contredire au détriment de leur adversaire en contestant l’utilisation de la passerelle alors qu’ils ne s’y sont opposés ni devant le premier juge ni par la suite, dans les courriers échangés entre les parties

* ce renvoi au fond était opportun, dans la mesure ou plus aucune prétention n’était formulée devant le juge des référés et que le présent appel, 18 mois après l’ordonnance entreprise, est dilatoire.

La cour renvoie à l’ordonnance entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE LA COUR

Seul le chef de l’ordonnance entreprise relatif au renvoi de l’affaire au fond étant contesté, celle-ci ne peut qu’être confirmée pour le surplus.

Selon l’article 873-1 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce saisi en référé peut, à la demande de l’une des parties et si l’urgence le justifie, renvoyer l’affaire au fond,

L’article 537 du même code exclut de toute voie de recours les mesures d’administration judiciaire,

Vu les articles 1352 du code civil et 122, 484, 907 et 775 du code de procédure civile,

Il est constant qu’aucun texte ne qualifie la 'passerelle’ litigieuse de 'mesure d’administration judiciaires telles, par exemple, que la connexité (art 107 CPC) la jonction (art 368 CPC) la radiation (art 383) ou le renvoi, après cassation, de l’affaire en audience solennelle.

Mais il est admis que la 'liste’ légale n’est pas exhaustive et la jurisprudence en fournit d’autres exemples, telle l’autorisation d’assigner à jour fixe (Com, 7 juin 88, n° 86-19.243; Civ 2, 24 juin 2004, B 321; Civ 2, 25 février 2010, B 48; Civ 2, 19 mars 2015, B 69; Civ 2, 17 mars 2016, XXX à paraître).

Il s’ensuit que le renvoi par le président du tribunal de commerce au visa de l’article 873-1 du code de procédure civile constitue de même une mesure d’administration judiciaire laissée à son appréciation au regard de l’urgence à statuer au fond, sans qu’aucune circonstance tirée de la lettre ou de l’esprit de cette disposition ne permette d’exclure le recours à cette disposition en matière de référé préventif.

A cet égard, les appelants ne précisent pas en quoi le fait que le juge des référés ne soit pas saisi de l’entier litige mais seulement d’une demande d’expertise serait décisif, alors même qu’en l’espèce :

— l’expertise devait permettre d’évaluer le préjudice allégué par X Travail! dans la perspective d’un litige, précisément identifié bien que futur, en responsabilité pour concurrence déloyale

— et qu’ils concluent à la confirmation du chef de l’ordonnance entreprise ayant dit n’y avoir lieu à référé, bornant leur grief au seul recours à la 'passerelle', au motif qu’ils se trouvent désormais engagés dans un lien juridique d’instance sur la seule décision du juge, lequel est inopérant dès lors qu’ils ne sont pas demandeurs au litige.

La décision de renvoi de l’affaire au fond au visa de l’article 873-1 susvisé ne peut donc pas faire l’objet d’un recours.

En tout état de cause, au vu des pièces produites, le juge du fond a déclaré l’action de X Travail! recevable par jugement du 10 février 2015 dont l’appel, interjeté par XXX et M. Y motif pris d’un excès de pouvoir des premiers juges – qui ont accepté des conclusions au fond tandis qu’ils n’étaient initialement saisis qu’aux fins de référé préventif – a été déclaré irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état du 19 novembre 2015, retenant que le jugement déféré, qui ne tranche pas le principal et se borne à statuer sur la recevabilité de la demande, n’est pas susceptible d’appel.

Ce jugement, auquel il est renvoyé :

— reprend de manière détaillée l’argumentaire de XXX et M. Y tendant à l’irrecevabilité, au visa des dispositions combinées des articles 873-1 et 4 du code de procédure civile, de toute demande autre que celle initialement faite au visa de l’article 145 du code de procédure civile aux fins de désignation d’un expert

— relève en quoi il n’y a plus lieu à application de ce dernier texte, le dommage en cause étant désormais chiffrable et en quoi les circonstances et l’objet du litige n’ont pas varié depuis l’assignation en référé, même si le quantum du préjudice objet de l’expertise n’était pas évalué à ce moment là

— retient que l’article 873-1 ne fixe pas d’autre limite au juge quant à l’urgence justifiant le renvoi de l’affaire au fond que de veiller à ce que le défendeur dispose d’un temps suffisant pour préparer sa défense et que le calendrier de procédure respecte cette exigence

Ainsi, à supposer même que le renvoi de l’affaire au fond ne soit pas une mesure d’administration judiciaire, force est de constater que XXX et Z! ont déjà contesté, comme ils le font à la présente instance, l’utilisation de cette 'passerelle’ devant le juge du fond auquel l’affaire a été renvoyée, qui, pour statuer sur cette contestation qu’il a expressément rejetée et déclarer recevable l’action de X Travail!, a admis ne serait-ce qu’implicitement cette utilisation.

Sans préjudice de la possibilité d’une remise en cause de la recevabilité de la saisine du juge du fond devant la formation de la cour saisie de l’appel du jugement du 10 février 2015, le présent appel doit donc être déclaré irrecevable.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans les termes du dispositif de la présente décision.

XXX et M. Y, parties perdantes, ne peuvent prétendre à une indemnité de procédure et doivent supporter in solidum la charge des dépens conformément aux articles 696 et 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevable l’appel du chef de l’ordonnance entreprise relatif au renvoi de l’affaire au fond,

Confirme l’ordonnance entreprise pour le surplus,

Y ajoutant,

Condamne in solidum la SAS XXX et M. A Y à payer à la SAS X Travail! la somme totale de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure,

Rejette toute autre demande,

Condamne in solidum la SAS XXX et M. A Y aux dépens.

Le Greffier,

Le Président,

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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