Tribunal correctionnel de Paris, 2 juin 2020, n° 16347000195

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Sur la décision

Référence :
T. corr. Paris, 2 juin 2020, n° 16347000195
Numéro(s) : 16347000195

Texte intégral

Cour d’Appel de Paris

Tribunal de Grande Instance de Paris

Jugement du = : 02/06/2020

lle chambre correctionnelle 1

N° minute : 1 Extrait des minutes du greffe du tribunal judiciaire de Paris

N° parquet 16347000195

JUGEMENT CORRECTIONNEL

A l’audience publique du délibéré du Tribunal Correctionnel de Paris le DEUX, JUIN DEUX MILLE VINGT,

Composé de : Président : Monsieur AI Benjamin, vice-président,

Assesseurs : Madame AE AF, juge Monsieur AG AH, juge

Assistés de Madame JABO KAKO Linda, greffière

en présence de Monsieur AM AN, substitut,

de de de

À l’audience publique des débats du Tribunal Correctionnel de Paris le DEUX, TROIS et QUATRE MARS DEUX MILLE VINGT,

— Â\PP@L Pul’L'-Ptl 1/("JU…, (4. 3/o6jacee Président : Monsieur AI AJ vice-président, JN« " (;J’lCLfÜHJ’ (Ü1 Nllmdfi An {lu LÜ( Assesseurs : -- Madame AK AL, juge cle 3 / 06 [2020 Madame AE AF, juge – […],

{lC(/ÆÇ/"'

Composé de :

Assistés de Madame JABO KAKO Linda, greffière pdt-lue Cwils C. . en présence de Monsieur AM AN, substitut,

a été appelée l’affaire

ENTRE :

Monsieur le PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE, près ce tribunal, demandeur et poursuivant

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PARTIES CIVILES :

L’ÉTAT

Représenté par Monsieur le Ministère des Finances et des Comptes publics, agissant par Monsieur le Directeur régional des Finances publiques d’Île-de-France et du département de Paris – Pôle de gestion fiscale centre – […].

Dépôt de conclusions de partie civile de Maître AO AP, visées à l’audience du 26/02/2020.

À l’audience des débats : représenté par Maître AO AP, avocate au barreau de Paris (Toque P1I37). A l’audience du délibéré : non représenté.

LA SELARL AJRS prise en la personne de Maître AQ AR, administrateur judiciaire, demeurant […],

agissant en qualité de mandataire ad hoc de la société AU CENTRE DES PROJETS (ACDP), SARL immatriculée au RCS de PARIS sous le n°488 148 834 nommé à ces fonctions par ordonnance de monsieur le président du tribunal de commerce de Paris en date du 19 juin 2019.

Dépôt de conclusions de partie civile de Maître BD BE, avocate au barreau de PARIS (Toque D1668), substituée par Maître SORLAT Géraldine, avocate au barreau de PARIS (Toque D1668), visées à l’audience du 26/02/2020.

À l’issue des débats : non représentée. À l’audience du délibéré: non représentée.

Maître AS AT, administrateur judiciaire dont l’Étude est à […], agissant en sa qualité de mandataire ad hoc de la SCI PAP, société au capital de 15200 euros immatriculée au RCS de Paris sous le n°478 950 207, dont le siège social est situé à […]

Dépôt de conclusions de partie civile de Maître DQ-CI CS, avocat au barreau de PARIS (Toque DO62) substitué par Maître MOKRI Dalila, avocate au barreau de PARIS (Toque DO62), visées à l’audience du 02/03/2020.

À l’audience des débats : non représenté. À l’audience du délibéré: représenté par Maître DQ-CI CS, avocat au barreau de PARIS (Toque DO62).

L’ASSOCIATION « ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE » (ECR)

association Loi 1901 dont le numéro RNA est W751218699, dont le siège social est sis […], représentée par son mandataire ad’hoc, Maître AU AV, administrateur judiciaire dont l’Étude est sise […], fonction à laquelle elle a été désignée suivant ordonnance sur requête signée le 4 juin.

Dépôt de conclusions de partie civile de Maître DM-DN BM, visées à l’audience du 04/03/2020.

À l’audience des débats: représentée par Maître DM-DN BM, avocat au barreau de PARIS (Toque C165). À l’audience du délibéré : non représentée.

Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins, partie jointe. Page 2 / 82

ET 1 .\ ame ©« 'J\ Prévenu

Nom : Y N

né le […] à […]

de Y AW et de DO X-DP

DG : française

Situation familiale : divorcé

Situation professionnelle : inconnue

Antécédents judiciaires : déjà condamné

Demeurant : […] pénale : placé sous contrôle judiciaire depuis le 21 mai 2019

À l’audience des débats: comparant, assisté de Maître BP C-DT avocat au barreau de PARIS (Toque P. 079);

À l’audience du délibéré :

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Prévenu des chefs de :

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE au cours des années 2013 à 2017 , à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

+ – ESCROQUERIE commis au préjudice de l’association _ ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE le 27 novembre 2014, à Paris en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

: – ABUS, PAR UN GÉRANT DE SARL, DE SES POUVOIRS OU DE SES VOIX, A DES FINS PERSONNELLES commis au préjudice de la SARL AU CENTRE DES PROJETS, anciennement AU CŒUR DES PRISONS, au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

: – ABUS DES BIENS OU DU CRÉDIT D’UNE SARL PAR UN GERANT A DES FINS PERSONNELLES commis au préjudice de la SARL _AU CENTRE DES PROJETS, anciennement AU CŒUR DES PRISONS, au cours des années 2013 à 2017 à PARIS.

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de la société IKF HOLDING au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

. – FAUX : ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VÉRITÉ DANS UN ECRIT commis au cours du mois de décembre 2015 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

+ – USAGE DE FAUX EN ÉCRITURE commis au cours du mois de décembre 2015 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

+ CQMPIJCITÉ DE EAUX : ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VERITÉE DANS UN ECRIT commis au cours du mois de décembre 2015 à

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PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

— - USAGE DE FAUX EN ÉCRITURE commis en décembre 2015 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de la SC PAPI au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

: BLANCHIMENT : CONCOURS A UNE OPÉRATION DE PLACEMENT, DISSIMULATION OU CONVERSION DU PRODUIT D’UN DÉLIT PUNI D’UNE PEINE N’EXCÉDANT PAS 5 ANS commis entre les années 2014 et 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Prévenue

Nom : E AY-DK

née le […] à […]

de E AX et de DE DF DG : française

Antécédents judiciaires : jamais condamnée

Demeurant : […] : placée sous contrôle judiciaire depuis le 21 mai 2019

À l’audience des débats: comparant, assistée de Maître GARLIN FERRARD Odile, avocat au barreau de PARIS ( Toque P0079). À l’audience du délibéré :

Prévenue du chef de :

: ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de _ l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE au cours des années 2014 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

PROCÉDURE Y N et E AY-DK ont été déférés, le 21 mai 2019, devant le procureur de la République qui leur a notifié par procès-verbal, en application des dispositions de l’article 394 alinéa 1er du code de procédure pénale, qu’ils devaient

comparaître à l’audience du 12 juillet 2019.

Par ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 21 mai 2019, Y N et E AY- DK ont été placés sous contrôle judiciaire.

L’affaire est venue à l’audience du 12 juillet 2019 et a été renvoyée au 26 février, 2, 3 et 4 mars 2020 à 13h30 devant la 1 le chambre correctionnelle 1re section.

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[…]

À l’audience du 26 février 2020, le président s’est entretenu avec les parties pour les tenir informées qu’en raison du mouvement de grève des avocats et de la défense massive, la Ile chambre correctionnelle 1re section allait tenir une audience de délestage des dossiers de comparution immédiate, les parties ayant accepté que l’affaire vienne au fond le 2, 3 et 4 mars 2020.

dde sde 3e

Y N a comparu à l’audience assisté de son conseil ; il y a donc lieu de statuer contradictoirement à son égard.

Il est prévenu :

1. Abus de confiance au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE

Pour avoir, à PARIS, au cours des années 2013 à 2017, détourné, au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE dont il assurait la direction de droit ou de fait, des valeurs ou un bien quelconque qui lui avaient été remis et qu’il avait acceptés à charge de la rendre ou d’en faire un usage déterminé, en l’espèce :

1) en octroyant à la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) dont il était unique gérant et bénéficiaire économique, sous le couvert du paiement de factures de prestations de service émises par la SARL AU CŒUR DES PRISONS, des fonds à hauteur de 54 à 61% du produit des subventions reçues par l’association, prestations qu’il réalisait au nom et pour le compte de l’association avec la qualité affichée de « président fondateur » et notamment :

2) en faisant supporter à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE qu’il présidait le paiement d’un solde de facture initialement adressé à l’association LES PRISONS DU CŒUR le 15 mars 2013, doublement acquitté par l’association ensemble Contre la Récidive ;

3) en faisant supporter entre mai et octobre 2013 à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE qu’il présidait de droit des notes de frais établies dans le cadre de son activité pour la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) ;

4) en faisant supporter à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE qu’il dirigeait de fait des frais de conception et de rédaction prétendument supportés ou réalisés par la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS), prestations en réalité exécutées par des tiers directement rémunérés par l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE, ainsi que des commissions au nombre de pages indues : Dans le cadre de la facture n°2013-02-103 du 15/03/2013 relative au supplément MÉTRO, des frais de conception réalisation et graphisme pour 58 810 euros TTC ; Dans le cadre de la facture n°2013-07-101 du 31/07/2013 relative au supplément du POINT, des frais de conception réalisation graphisme pour un montant de 30 498 EUR TTC ; Dans le cadre de la facture n°2014-03-101 du 11/04/2013 relative au supplément LE PARISIEN et AUJOURD’HUI EN FRANCE, des frais de conception réalisation graphisme pour un montant de 45 000 EUR TTC et des commissions au nombre de pages indues pour un montant de 25 200 EUR

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TTC ;

Dans le cadre de la facture n°2014-07-104 du 11/07/2014 relative à la réalisation d’un projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de FRESNES 27 500 euros TTC ;

Dans le cadre de la facture n° 2014-09-104 relative à la réalisation d’un projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de FRESNES 20 767 euros TTC ;

5) en faisant supporter entre mars 2013 et avril 2016 à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE qu’il dirigeait de fait la rémunération de prestations réalisées au bénéfice de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU COEUR DES PRISONS) par Madame AZ I pour un montant minimum de 27 000 euros

Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal.

2. Escroquerie au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE

Pour avoir à Paris le 27 novembre 2014,en employant des manœuvres frauduleuses, en l’espèce, en produisant à l’occasion d’une assemblée générale extraordinaire de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE en date du 27 novembre 2014 une facture d’un montant de 515 619 euros de prestations et de conseils, prétendument établie le 31 décembre 2012 et présentée à la Caisse des dépôts et Consignations par la SARL N Y CRÉATION, facture en réalité établie postérieurement et relative à des prestations déjà payées par l’association PRISONS DU CŒUR au cours des années 2011 et 2012, trompé l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE pour la déterminer à consentir un acte opérant obligation à son préjudice, en l’occurrence, la prise en charge de la dette constatée sur ladite facture à l’endroit de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS et N Y CRÉATION)

Faits prévus et réprimés par les articles 313-1, 313-2, 313-7, 313-8 du code pénal.

3. Abus des pouvoirs et des biens de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS)

Pour avoir, à PARIS, au cours des années 2013 à 2017, étant gérant de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS), fait de mauvaise foi, des biens de cette dernière et des pouvoirs qu’il possédait un usage qu’il savait contraire à ses intérêts, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société dans laquelle il était directement ou indirectement intéressé, en l’espèce :

1) en inscrivant au crédit du compte courant de l’associée IKF (pour l’année 2013) ou en émettant des chèques et des virements aux fins de compenser des dépenses faites au moyen de sa carte bancaire BF BG personnelle (s’agissant des années 2013 à 2016), dépenses destinées à satisfaire des besoins, intérêts ou inclinations exclusivement personnels, sous le couvert de prise en charge de notes de frais supportant des informations volontairement erronées, telles que des indemnités kilométriques non justifiées, pour un montant au moins égal à 96 916,56 euros ;

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[…]

2) en procédant, au moyen des cartes bancaires de la société, de Témission de chèques et de virements, ainsi que d’espèces retirés des comptes bancaires de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement CŒUR DES PRISONS) à des dépenses destinées à satisfaire des besoins, intérêts ou inclinations exclusivement personnels, notamment : – la prise en charge de loyers, de travaux, des frais de gaz et/ou électricité afférents à la Villa HELEN ROC, sise à CANNES, sous l’apparence d’un bail dépourvu de justification économique consenti à la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement CŒUR DES PRISONS), pour un montant au moins égal à 108 542,47 euros (représentant les exercices 2013 à 2016) ; – la prise en charge de loyers, travaux, frais d’énergie, abonnement à des services de télécommunication du logement de N Y à hauteur d’une quote-part de 50%, représentant une surévaluation du quintuple, pour un montant au moins égal à 90 386 euros (représentant les exercices 2013 à 2016) – la prise en charge de voyages, hôtellerie de luxe, restauration, esthétique dépourvus de liens avec l’activité de la société, pour un montant au moins égal à 105 175,78 euros (représentant les exercices 2013 à 2016) ; – l’acquisition d’effets vestimentaires, lingerie, objets récréatifs pour adultes, rémunération de modèles, au titre d’une activité de loisirs photographiques prise en charge par la société sous la dénomination O2B, pour un montant au moins égal à 169 702,04 euros (représentant les exercices 2013 à 2016) ;

3) en constituant, par imputation de dépenses qui lui étaient personnelles, un solde débiteur sur le compte courant ouvert au nom de la société IKF HOLDING, de droit suisse, entre le 20/08/2014 et 04/07/2016, tout en dissimulant EB la situation du compte par l’inscription au compte d’une fausse facture prétendument émise par la société IKF MANAGEMENT le 02 décembre 2014 ;

4) en inscrivant ou faisant inscrire ses dépenses personnelles au débit du compte courant ouvert au bénéfice exclusif de la société associée IKF HOLDING dans les livres de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS), détournant de la sorte à son profit l’usage de ce compte, et ce en contravention avec les lois d’ordre public relatives au monopole bancaire limitant le bénéfice du compte courant aux seuls CE de la société ;

5) en inscrivant ou faisant inscrire ses dépenses personnelles au débit du compte courant ouvert au bénéfice exclusif de la société civile associée PAPI dans les livres de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS), détournant de la sorte à son profit l’usage de ce compte, et ce en contravention avec les lois d’ordre public relatives au monopole bancaire limitant le bénéfice du compte courant aux seuls CE de la société

Faits prévus et réprimés par les articles L241-3, L249 et L249-1 du code de commerce.

4. Abus de confiance au préjudice de la société IKF HOLDING

Pour avoir, à PARIS, au cours des années 2013 à 2017, détourné, au préjudice de société IKF HOLDING des valeurs ou un bien quelconque qui lui avaient été remis et qu’il avait acceptés à charge de la rendre ou d’en faire un usage déterminé, en l’espèce, en imputant, ou en faisant imputer au débit du compte courant ouvert au nom de la société IKF HOLDING, de droit suisse dans les livres de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) des dépenses étrangères à l’intérêt de l’associé titulaire du compte et destinées à satisfaire des besoins, intérêts ou

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inclinations exclusivement personnels, et notamment : – la prise en charge de dettes alimentaires versées à ses filles, – la prise en charge de voyages, hôtellerie de luxe, restauration, dépourvus de liens avec l’activité de la société, – l’acquisition d’effets vestimentaires, lingerie, objets récréatifs pour adultes, rémunération de modèles, au titre d’une activité de loisirs photographiques – des opérations de compensation sur les dépenses déclarées comme personnelles, effectuées à l’aide des cartes bancaires à sa disposition ainsi que sur les quotes-parts lui étant applicable au titre des loyers et des charges liées (électricité, eau, etc..) pour un montant total au moins égal à 678 985,60 euros (représentant les exercices 2013 à 2016)

Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal 5. Faux et usage de faux

Pour avoir à PARIS au cours du mois de décembre 2015, par quelque moyen que ce soit, altéré frauduleusement la vérité d’un écrit ou de tout autre support de la pensée destiné à établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques, en l’espèce, en établissant une facture datée du 02 décembre 2014 ne représentant aucune des prestations y figurant, et émise à l’insu de la société IKF MANAGEMENT, son auteur apparent, et en faisant usage dudit faux comme support d’une écriture comptable visant à diminuer la dette de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) à l’endroit de son associée IKF HOLDING

Faits prévus et réprimés par les articles 441-1, 441-9, 441-100 et 441-12 du code pénal.

6. Complicité de faux

Pour s’être à PARIS au cours du mois de décembre 2015, rendu complice du délit de faux commis par BA I, en lui donnant des instructions aux fins de réaliser une facture 2014-12-2017 datée du 10 décembre 2014 accordant une remise « à titre tout à fait exceptionnel» fictive de la SARL AU CŒUR DES PRISONS à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE

Faits prévus et réprimés par les articles 121-6, 121-7, 441-1, 441-9, 441-10 et 441-12 du code pénal.

7. Usage de faux

Pour avoir à Paris en décembre 2015 fait usage d’un faux dans un écrit ou tout autre support de la pensée destiné à établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques, en l’espèce,

en utilisant une facture 2014-12-2017 datée du 10 décembre 2014 accordant une «remise exceptionnelle» fictive de la SARL AU CŒUR DES PRISONS à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE comme support d’une écriture comptable visant à diminuer le résultat fiscal de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement) AU CŒUR DES PRISONS

Faits prévus et réprimés par les articles 441-1, 441-9, 441-10 et 441-12 du code pénal

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8. Abus de confiance au préjudice de la société civile PAPI

Pour avoir, à PARIS, au cours des années 2013 à 2017, détourné au préjudice de la société civile PAPIL, dont il assurait la gérance, des valeurs ou un bien quelconque qui lui avaient été remis et qu’il avait acceptés à charge de la rendre ou d’en faire un usage déterminé, en l’espèce :

1) en procédant au cours des années 2013 à 2016 au moyen des cartes bancaires de la société, de l’émission de chèques et de virements issus du compte bancaire de la société civile PAPI à des dépenses destinées à satisfaire des besoins, intérêts ou inclinations exclusivement personnels, et notamment, – des dépenses de bouche et de luxe, des voyages et séjours à l’étranger – la couverture de prélèvements CE à sa carte BF BG personnelle, – des versements à ses filles X CF Y et X-AY Y ainsi qu’à sa compagne BB BC, pour un montant au moins égal à 47 879 euros,

2) en souscrivant, le 26 octobre 2016, auprès de N DH Z au nom de la société PAPI en emprunt à hauteur de 1 500000 euros en contrepartie du nantissement de parts sociales de la société civile immobilière 3MIMI représentant l’actif social,

3) en procédant à des virements dépourvus de justification économique au profit de la société AU CŒUR DES PRISONS, dont il était gérant, pour un montant de 550 000 euros entre octobre 2016 et juin 2017, en vue de permettre le financement de son train de vie,

4) en imputant, ou en faisant imputer au débit du compte courant ouvert au nom de la société civile PAPI dans les livres de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) des dépenses étrangères à l’intérêt de l’associé titulaire du compte et destinées à satisfaire des besoins, intérêts ou inclinations exclusivement personnels,

5) en constituant, par imputation de dépenses qui lui étaient personnelles, un solde débiteur sur le compte courant ouvert au nom de la société civile PAPI, dans le courant 2014 jusqu’au 26 janvier 2016, et du 06 juillet 2016 au 02 novembre 2016

Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal. 9. Blanchiment de fraude fiscale

D’avoir à Paris (75) entre les années 2014 et 2017, en tout cas sur le territoire national depuis temps non prescrit, apporté son concours à des opérations de placement, de dissimulation ou conversion du produit direct ou indirect du délit de fraude fiscale, en l’espèce, en convertissant dans des dépenses sociales et personnelles le produit direct ou indirect de l’élusion des droits dus au titre de l’impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée résultant de la minoration du résultat fiscal de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS), minoration réalisée notamment par l’enregistrement comptable au titre de charges de la société de dépenses personnelles de N Y, ou encore par la dissimulation des produits de la société par l’enregistrement d’une facture 2014-12-107 facialement datée du 10 décembre 2014 falsifiée, faisant état de remise exceptionnelle,

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en l’espèce, en convertissant dans des dépenses personnelles le produit direct ou indirect de l’élusion des droits dus au titre de l’impôt sur le revenu résultant de la minoration de ses revenus réels, lesquels représentaient 1 264 393 euros au moins sur la période – soit plus du décuple des sommes déclarées à l’administration fiscale -, et en dissimulant ces dépenses sous l’apparence de frais engagés pour le compte de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) ou d’avances réalisées à la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) par son associée IKF HOLDING

Faits prévus et réprimés par les articles 324-1, 324-1-1, 324-2, 324-7, 324-8 du code pénal, 1741 et 1743 du code général des impôts. abc le cle

E AY-DK a comparu à l’audience, assistée de son conseil, il y a lieu de statuer contradictoirement à son égard.

Elle est prévenue :

1. Abus de confiance au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE

Pour avoir, à PARIS, au cours des années 2014 à 2017, détourné, au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE dont elle assurait la présidence, des valeurs ou un bien quelconque qui lui avaient été remis et qu’elle avait acceptés à charge de la rendre ou d’en faire un usage déterminé, en l’espèce :

1) en octroyant à la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) dont N Y était unique gérant et bénéficiaire économique, sous le couvert du paiement de factures de prestations de service émises par la SARL AU CŒUR DES PRISONS, des fonds à hauteur de 50 à 59% du produit des subventions reçues par l’association ;

2) en faisant supporter à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE qu’elle présidait des frais de conception et de rédaction prétendument supportés ou réalisés par la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS), prestations en réalité exécutées par des tiers directement rémunérés par l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE, ainsi que des commissions au nombre de page indues :

Dans le cadre de la facture n°2014-07-104 du 11/07/2014 relative à la

réalisation d’un projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt

de FRESNES 27 500 euros TTC ;

Dans le cadre de la facture n° 2014-09-104 relative à la réalisation d’un projet

de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de FRESNES 20 767

euros TTC ;

3) en faisant supporter entre janvier 2014 et avril 2016 à l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE, qu’elle présidait, la rémunération de prestations réalisées au bénéfice de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) par Madame AZ I pour un montant minimum de 27 000 euros.

Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal.

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RO onÂ

DÉBATS A l’appel de la cause, le président a constaté la présence et l’identité de Y N et E AY-DK et donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.

Le président a informé les prévenus de leur droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui leur sont posées ou de se taire.

Le président a instruit l’affaire, interrogé les prévenus présents sur les faits et reçu leurs déclarations.

La société AU CENTRE DES PROJETS (ACDP) représentée par son mandataire ad hoc, s’est constituée partie civile par l’intermédiaire de Maître BD BE ayant déposé conclusions visées à l’audience du 26 février 2020.

La SCI PAPI représentée par son mandataire ad hoc s’est constituée partie civile par l’intermédiaire de Maître DQ-CI CS, ayant déposé conclusions visées à l’audience du 02 mars 2020.

Maître CS DQ-CI substitué par Maître Dalila MOKRI, conseil du mandataire ad hoc de la SCI PAPI s’est constitué partie civile dépôt de conclusions visées à l’audience du 02 mars 2020.

Maître DM-DN BM, conseil du mandataire ad’hoc de la société ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE, partie civile, a été entendu en sa plaidoirie au soutien de ses écritures.

Maître AO AP, conseil de l’ÉTAT FRANÇAIS, partie civile a été entendue en sa plaidoirie, au soutien de ses écritures

Le ministère public a été entendu en ses réquisitions.

Maître GARLIN FERRARD Odile, conseil de E AY-DK, a été entendue en sa plaidoirie.

Maître BP C-DT, conseil de Y N, a été entendu en sa plaidoirie.

Les prévenus ont eu la parole en denier. Le greffier a tenu note du déroulement des débats.

Le tribunal, après en avoir délibéré, a statué en ces termes :

I – EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

L

A) L’origine de la procédure :

1 – Le 7 décembre 2016, le directeur de la cellule TRACFIN adressait au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris une note d’information faisant état de l’existence de malversations commises au préjudice de l’association à but non lucratif ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE (ECR) et de la SARL AU CŒUR DES PRISONS (ACDP) et caractérisées par :

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d’importants transferts de fonds de l’association ECR vers la SARL ACDP sous- couvert de la délégation à cette dernière de la maîtrise d’œuvre des actions conduites par l’association ECR en faveur de la lutte contre la récidive et l’amélioration des conditions de détention des primo-délinquants ;

une utilisation non conforme de ces sommes par la SARL ACDP car appréhendées par M. N Y ;

des détournements opérés au bénéfice final de ce dernier et matérialisés par l’existence de flux à destination de ses comptes bancaires personnels ou ceux de ses proches sans justification économique apparente ainsi que par la prise en charge par la SARL ACDP de dépenses personnelles non exposées conformément à l’intérêt social ;

» la facilitation de ces détournements par les principaux dirigeants de l’association ECR dont Mme AY-DK Y, sa présidente.

2 – Il ressortait de cette note d’information qu’entre le l" janvier 2015 et le 30 septembre 2016, les deux comptes dont M. Y était titulaire dans les livres de la Banque palatine et de la Banque postale avaient bénéficié, sous la forme de chèques et de virements d’une somme totale de 243 261, 79 euros (147 890, 47 euros en 2015 et 95 371, 32 euros du 1° janvier au 30 septembre 2016). Cette situation interpellait le directeur de la cellule TRACFIN dès lors que M. Y avait déclaré n’avoir perçu, au cours de l’année 2015, que la somme de 30 000 euros au titre des salaires versés par la SARL ACDP. Par ailleurs, des décaissements opérés au bénéfice de Mme B E (ancienne épouse de M. Y) et de Mmes X-AY et X- CF Y (filles de l’intéressé entendues par les enquêteurs les 23 et 24 janvier 2018 ; feuillets 600-613 ; 616-627) étaient également constatés pour un montant total de 91 114 euros. Il était déduit de l’existence de ces mouvements de fonds que M. Y faisait supporter à la SARL ACDP l’intégralité de la charge financière correspondant aux pensions alimentaires versées à ses deux filles.

3 – En outre, le directeur de TRACFIN évoquait des retraits d’espèces sans lien apparent avec l’activité de la SARL ACDP. Ainsi, entre janvier 2015 et septembre 2016, 174 retraits d’espèces d’un montant total de 76 000 euros (soit 3619 euros par mois) étaient vérifiés sur les relevés bancaires de cette personne morale et ce sans qu’il ait été possible d’identifier leur utilisation. Certains retraits apparaissaient comme ayant été opérés au Royaume-Uni, aux Émirats Arabes Unis, en Italie, au Canada et en Thaïlande ou encore à Cannes (06). Il était de plus observé des dépenses conséquentes effectuées par cartes VISA GOLD et BF BG. L’examen détaillé des dépenses effectuées faisait ressortir l’existence de nombreuses dépenses exposées auprès des enseignes SEPHORA, THE KOOPLE, VICTORIA’S SECRET, BH BI, la FNAC, CARTIER, YVES SAINT CM, MAISONS DU MONDE, IKEA, QUICKSILVER, NIKE et MONOPRIX de même que des dépenses d’optique ou de pharmacie. Étaient également constatées de très nombreuses dépenses de transport (taxis, SNCF, AIR FRANCE), d’hôtels et de restaurant. Le montant total de celles-ci était fixé à la somme de 155 469, 66 euros.

4 – La note de renseignement mentionnait par ailleurs de possibles détournements réalisés au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE (ECR) – LES PRISONS DU CŒUR. Sur la période analysée, d’importants flux financiers ayant transité sur les comptes de cette personne morale étaient inventoriés : 1 530 551 euros au titre des mouvements créditeurs et 1 671 167 euros au titre des mouvements débiteurs. Les encaissements étaient, pour l’essentiel, constitués de dons et

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[…]

subventions correspondant quasi-exclusivement à du mécénat d’entreprise et émanant, plus marginalement, de particuliers. Les contributeurs les plus importants étaient les sociétés TOTAL SA (230 000 euros), la société AXA ASSURANCES (158 500 euros), la société LAGARDÈRE MÉDIAS (110 000 euros), M. N-DH Z (61 500 euros), la Ligue de football professionnel (60 000 euros), la Fondation M6 (57 000 euros), la société GTM BATIMENT (55 000 euros), la Fondation EDF (50 000 euros) et la société BOLLORE TRÉSORERIE (50 000 euros). S’agissant des débits bancaires, leur analyse mettait en exergue le fait que l’association ECR ne paraissait directement financer aucune des actions dont elle revendiquait la réalisation. Ainsi, hors charges diverses découlant du fonctionnement de l’association (salaires, URSSAF, frais de transports…) et remboursements d’emprunts, étaient principalement constatés des flux significatifs à destination de la SARL ACDP. La cellule TRACFIN estimait ainsi à la somme de 811 000 euros le montant de la somme versée à la SARL ACDP par l’association ECR entre le 1" janvier 2015 et le 30 septembre 2016.

5 – L’association ECR n’ayant pas disposé, au sein de ses effectifs, de l’ensemble des moyens humains nécessaires à l’accomplissement de ses missions, celle-ci aurait alors choisi de déléguer la maîtrise d’ouvrage à la SARL ACDP laquelle ne comprenait qu’un seul salarié en la personne de M. Y. L’examen des décaissements réalisés entre le 1" janvier 2015 et le 30 septembre 2016 révélait que les seuls paiements identifiés comme étant indubitablement liés à l’activité de l’association ECR étaient 4 chèques d’un montant total de 90 000 euros et établis à l’ordre de la société BG GAZON dans le cadre de la rénovation, en 2015, des installations sportives de la prison de Fresnes (94).

6 – L’analyse d’une période-test de trois mois (avril à juin 2015) permettait de confirmer que les flux débiteurs constatés semblaient, pour l’essentiel, ne pas être liés à l’activité de l’association ECR au nom de laquelle la SARL ACDP était censée intervenir. Ainsi, les débits d’un montant total de 148 000 euros étaient constitués de versements ayant bénéficié à M. Y (38 000 euros), à Mmes B E, X-CF Y et X-AY Y (13 000 euros), de retraits d’espèces à hauteur de 10 500 euros, de dépenses effectuées au moyen de la carte bancaire de l’association ECR pour un montant total de 10 800 euros et auprès des mêmes enseignes que précédemment.

7 – Par soit-transmis en date du 5 janvier 2017, le procureur de Paris saisissait donc le chef de la Brigade financière afin que celui-ci diligente une enquête préliminaire sur les faits ainsi révélés et alors pénalement qualifiés d’abus de biens sociaux et abus de confiance.

8 – Le 6 février suivant, une seconde note d’information était adressée par la cellule TRACFIN au parquet de Paris. Celle-ci contenait des éléments complémentaires relatifs à de nouvelles opérations financières atypiques réalisées par M. Y depuis octobre 2016 et ce au préjudice des sociétés PAPI et ACDP. Il était mentionné qu’à la suite de l’obtention d’un prêt de 1 500 000 euros auprès de M. Z, la société civile PAPI avait transféré la somme de 550 000 euros à la SARL ACDP sans que la justification économique de cette opération fût appréhendée. Ces transferts de fonds ne semblaient en outre pas conformes à la convention de prêt conclue entre la SC PAPI et M. Z.

9 – Il était de plus précisé que la SC PAPI avait été immatriculée au Registre du commerce et des sociétés (RCS) de Paris le 5 octobre 2004 (feuillet 30) et que celle-ci avait disposé d’un capital social de 1000 euros composé de 100 parts sociales détenues à hauteur de 72 % par M. BJ A, 24 % par Mme BK BL et des 4 %

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restants par M. Y. Après diverses modifications capitalistiques, était intervenue, en juillet 2010, une augmentation de capital de 75 000 euros par la création de 7500 nouvelles parts d’une valeur unitaire nominale de 10 euros détenues par Mme X-AY Y (2500 parts) et Mme X-CF Y (5000 parts). Ladite augmentation était, par la suite, suivie d’une réduction de capital destinée à apurer les pertes par diminution de la valeur nominale unitaire de 8 euros. Dès lors, le capital social s’était élevé à la somme de 15 200 euros divisé en 7600 parts détenues à hauteur de 33, 32 % par Mme X-AY Y, 66, 63 % par Mme X-CF Y et de 0, 05 % par M. Y.

10 – La cellule TRACFIN indiquait également, dans sa seconde note d’information, que la SC PAPI détenait intégralement le capital de la SAS CHOC’ELEC depuis le rachat des titres possédés par M. Z (40%) et M. BM P (20%) et intervenus en janvier 2017 et décembre 2016 et qu’elle détenait aussi des participations au sein de la SCI 3 MIMI et de la SARL AU CENTRE DES PROJETS.

11 – La SCI 3MIMI apparaissait comme ayant été constituée, en juillet 2002, par M. BJ A et Mme BN BO. En mars 2010, M. Y devenu gérant de la SC PAPI était également nommé gérant de la SCI 3MIMI jusqu’à sa révocation intervenue le 3 octobre 2014. Cette personne morale avait été constituée pour l’acquisition d’une villa située […] à Cannes (06) et réalisée moyennant le paiement d’un prix de 305 000 euros financé par un emprunt bancaire. À la suite de désaccords existant entre les CE de la SCI 3 MIMI – à savoir la SC PAPI et M. A – et concemant l’usage et l’occupation de la villa, les comptes sociaux et la prise en charge des dettes bancaires, un protocole d’accord tendant au retrait de M. A par cession de ses parts et remboursement de son compte courant était signé le 17 mai 2017 (feuillets 471-482). Le prix de cession des 52 parts détenues par M. A, initialement fixé à la somme de 490 000 euros, était ensuite porté à la somme de 520 000 euros par l’avenant n° 1 établi le 6 juillet 2017 (feuillet 480). Le compte courant d’associé de l’intéressé affichait quant à lui un solde de 650 178 euros. Ainsi, la SC PAPI devait verser la somme de 1 170 178 euros à M. A. Ledit protocole stipulait que la SC PAPI devait régler la totalité du prix de la cession ainsi que les frais afférents au moyen d’un prêt de 1 500 000 euros consenti le 26 octobre 2016 par M. Z. Selon la convention de prêt, cette somme ne devait permettre que l’acquisition de l’ensemble des parts sociales détenues par M. A dans le capital de la SCI 3MIMI, le remboursement à celui-ci du solde de son compte courant d’associé, l’apurement de tout ou partie du passif de la SCI 3MIMI ainsi que des honoraires et émoluments des auxiliaires chargés de réaliser la cession des parts et la réalisation, au seul bénéfice de l’emprunteur, d’une avance de trésorerie aux fins de lui permettre notamment de réaliser les travaux nécessaires. Il était au demeurant prévu que la somme prêtée fût remise à un avocat sous la forme d’un chèque établi à l’ordre de la CARPA.

12 – S’agissant de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (ACDP)!, il était constaté que les encaissements étaient principalement constitués de flux provenant de la SC PAPI, l’association ECR n’alimentant plus les comptes de la SARL ACDP que de façon marginale. Concernant l’étude des débits, celle-ci mettait en exergue l’existence de flux conséquents à destination de M. Y. Ainsi, l’analyse des virements émis, des copies de chèques et le rapprochement avec les comptes de l’intéressé permettaient d’établir que celui-ci avait été destinataire d’une somme de 107 802 euros entre le 1" octobre 2016 et le 30 juin 2017. En outre, sur la période précitée, étaient inventoriés des virements émis par la SARL ACDP au bénéfice de Mme B

1 Immatriculée au RCS de Paris le 27 janvier 2006, cette société a eu pour unique gérant M. Y (feuillet 779). Page 14 / 82

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E et de Mmes X-AY et X-CF Y à hauteur de la somme de 28 515 euros ainsi que des retraits d’espèces pour un montant total supérieur à 43 000 euros et sur les comptes de la SARL ACDP étant observé que plusieurs d’entre eux avaient été effectués à l’étranger ou à Cannes (06). À cela devait s’ajouter les dépenses réalisées par cartes VISA GOLD et BF BG pour la somme de 112 874, 39 euros (feuillets 86-94 ; 95-100).

B) Les faits commis au préjudice de l’association ECR : 1°) Le rôle réel de M. Y au sein de l’association ECR :

13 – Il ressort des pièces du dossier que l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE a été déclarée, le 25 février 2013, à la préfecture de police et que son objet social était de « sensibiliser les décideurs, les médias et le grand public à la lutte contre la récidive ; imaginer, proposer et exploiter un ou plusieurs centres de lutte contre la récidive ; fédérer et rechercher tous les partenaires qu’ils soient privés ou publics en vue de lutter contre la récidive ; lutter contre la surpopulation carcérale sous toutes ses formes et agir en ce sens pour modifier l’univers carcéral ». Son siège social était fixé au 12 de la place du général Koënig dans le l 7e arrondissement de Paris (feuillet 41). Cette association avait repris, par voie de dévolution, les éléments de l’actif et du passif de l’association LES PRISONS DU CŒUR créée en janvier 2010. Les dettes financières s’élevaient à la somme de 74 081 euros, les dettes fournisseurs à celle de 93 647 euros soit un total de 168 028 euros (feuillet 40). L’exploitation des comptes bancaires de l’association détenus dans les livres du Crédit Mutuel, de la Société générale et de la Banque palatine permettait de constater que celle-ci avait perçu la somme de 2 835 448 euros à titre de subventions versées par des fondations d’entreprise et des personnes physiques entre le 15 juillet 2013 et le 31 mars 2017 (feuillets 108 ; 110-121).

14 – L’association LES PRISONS DU CŒUR devenue l’association ECR avait été présidée par M. Y jusqu’à sa démission intervenue le 31 décembre 2013, date à laquelle l’intéressé était officiellement devenu directeur général de la personne morale (feuillet 639). L’examen des copies de chèques tirés sur le compte Société générale de l’association permettait d’établir que M. Y avait signé ceux-ci jusqu’en avril 2014* (feuillet 224). Les investigations démontraient également l’existence de courriels adressés régulièrement par l’intéressé à Mme AY-DK E et qui contenaient des instructions de paiement. Cette dernière transmettait par suite des tableaux de CQ des chèques émis (feuillet 309). Il ressortait également de ces recherches électroniques que M. Y avait adressé aussi, au cours de l’année 2015, des directives de paiement à M. BM P (feuillet 330). De même, le 14 avril 2016, M. Y avait informé sa fille prénommée X- CF, en mettant en copie l’ensemble des membres de l’association ECR, qu’il convenait de faire valider par Me C BP un devis réalisé par la société BSKOY : « Je ne suis pas du tout un expert juridique ce que je sais c’est que tout cela doit être plus carré que carré compte tenu aussi de financement public. Je ne souhaite pas être au courant de toutes ces manœuvres juridiques mais je donnerais le feu vert lorsque C et D me diront que tout est ok » (feuillet 327).

2 De même, il était établi que la SC PAPI avait, jusqu’en janvier 2014, encaissé des chèques émis par l’association ECR pour un montant total de 21 500 euros et que lesdits chèques avaient été signés par M. Y (feuillet 145).

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15 – Le rôle de M. Y au sein de l’association ECR postérieurement à sa démission datée du 31 décembre 2013 était également analysé au regard de la possession par l’intéressé, à son domicile, d’un livre de caisse manuscrit découvert, le 10 mai 2017, lors de l’exécution d’une mesure de perquisition (feuillet 180). L’étude du scellé Y-CINQ permettait ainsi de démontrer que ce livre de caisse – noirci de manière manuscrite – comprenait les écritures afférentes à la période comprise entre le 6 juin 2013 et le 8 mai 2017. Ce constat était confirmé par la réalisation d’un recoupement avec les relevés bancaires du compte détenu par l’association dans les livres de la Société générale. Il apparaissait que les mentions manuscrites concernaient tant les opérations de crédit que les opérations de débit et que M. Y avait dès lors assuré un suivi précis et régulier de ce compte bancaire bien au-delà de sa période de présidence (feuillet 244). De même, la lecture des conventions de mécénat relatives aux années 2014 et 2015 et conclues entre l’association ECR et des fondations d’entreprises ou des partenaires publics permettait de constater que M. Y en était le signataire pour le compte de l’association ECR en qualité de « président- fondateur ». Il s’agissait de 4 conventions conclues avec la fondation M6 entre 2014 et 2016 dont l’objet était le financement du projet de centre de probation expérimental situé à Saint-Quentin Fallavier (38) et celui de médiation équine (102 000 euros). Trois d’entre elles avaient été signées par Mme AY-DK E en sa qualité de présidente de l’association quand l’autre, datée du 27 octobre 2014, l’avait été par M. Y en tant que « président fondateur, dûment habilité » (feuillet 459) à l’instar de la convention du 18 juillet 2014 conclue avec la société MADELAURE IMMO, celles signées les 28 mars et 11 juillet 2014 avec la société TOTAL et celle conclue le 9 mars 2014 avec le club de football de l’Olympique Lyonnais (feuillet 1082). D’autres conventions signées, en 2015, par M. Y en qualité de président- fondateur étaient également identifiées (feuillet 1083). À l’exception de la convention en date du 28 décembre 2016 relative à la médiation équine, aucune d’entre elles ne mentionnait le suivi financier précis de l’utilisation des fonds ainsi appréhendés (feuillet 459). Il s’agissait en outre de conventions signées par la fondation ORANGE entre le 27 janvier 2013 et le 16 février 2016 et visant à soutenir le projet intitulé « les détenus ont du talent », l’achat de matériel informatique et le projet imprimante 3D de la maison d’arrêt de Versailles (78). Le total des dons recueillis était de 137 745 euros. Celle datée du 8 janvier 2014 avait été signée par M. Y en sa qualité susmentionnée de président de l’association ECR à l’instar de celle du 24 février 2015 laquelle faisait état de la qualité de « président fondateur, dûment habilité » reconnue officiellement à M. Y (feuillet 460). Les investigations établissaient par ailleurs que la signature des conventions conclues avec la fondation ORANGE en

3 – Entendu le 3 octobre 2017, M. BH BR, directeur de la communication au sein de la société AXA déclarait n’avoir jamais eu de contact direct avec Mme E (feuillet 439) et qu’il n’était pas illogique que M. Y ait pu être rémunéré au titre des levées de fonds (feuillet 441). En outre, le 31 octobre 2017, Mme BS BT, représentant la Fondation Orange, mentionnait que seule la convention conclue en 2016 avec l’association ECR avait été signée par Mme E, les précédentes l’ayant été par M. Y (feuillet 498) et que ce dernier exerçait un intense travail de lobbying au plus haut niveau du groupe ORANGE. Elle ajoutait ne pas avoir eu connaissance de l’existence d’un mandat de représentation spécifique consenti à M. Y ni de la démission de celui-ci officiellement intervenue le 31 décembre 2013 (feuillet 499). Enfin, il ressort de l’audition de Mme BU F, déléguée générale de la fondation du groupe M6, que celle-ci n’a jamais rencontré Mme E et que la démission de M. Y en date du 31 décembre 2013 n’est pas parvenue jusqu’à sa personne. L’intéressée a même ajouté que son groupe l’avait considéré comme étant le président de l’association ECR lequel avait pour habitude « d’essayer d’entrer en relation avec les plus hauts dirigeants du groupe ». Mme F a en outre précisé ne pas connaître la SARL ACDP et ne pas avoir été informée de l’existence d’une commission devant être versée à un intermédiaire (feuillet 536).

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2014 et 2015 avait été accompagnée de la production d’une copie des statuts établis en 2013, certifiés conformes le 6 mars 2013 et n’ayant donc pas pris en considération la démission de M. Y intervenue le 31 décembre suivant (feuillet 527).

2°) Les transferts de fonds observés entre l’association ECR et la société ACPD :

16 – L’exploitation des comptes bancaires et de la comptabilité de l’association ECR permettait en outre de constater que, entre le 1" janvier 2013 et le 31 décembre 2017, plus de 60 % des ressources de l’association provenant des contributions des donateurs avaient été transférées sur les comptes de la société ACDP dirigée par M. Y.

17 – La formalisation des relations contractuelles unissant l’association ECR et la société ACDP résultait de la conclusion de deux conventions successives :

+ une convention dite de «partenariat » signée le 18 avril 2013 aux temnnes de laquelle il était stipulé que la SARL AU CŒUR DES PRISONS s’engageâÂt à rechercher des concours financiers auprès de partenaires, à finaliser les accords de dons et contrôler leur versement ainsi qu’à assurer la promotion des concepts de l’association ECR et l’élaboration, la validation et la promotion de ces concepts auprès des décideurs publics (feuillet 256). La rémunération de la société ACDP consistait en un intéressement toutes taxes comprises (TTC) dont le montant était compris entre 50 et 60 % des sommes collectées. Ladite convention était signée par M. Y, président de la société AU CŒUR DES PRISONS et M. BM P, trésorier de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE (feuillet 257).

+ une convention datée du 11 janvier 2014 et signée par Mme AY-DK E et M. Y (scellé Y TROIS). Selon cet acte, la société ACDP était chargée de rechercher des aides et des donations permettant à l’association de porter ses projets et de négocier les contrats correspondants. Outre ces prestations d’apporteur de fonds et de partenariat, la SARL ACDP se voyait confier l’exécution de prestations dans le domaine de la communication et de la stratégie. S’agissant de la rémunération, il était stipulé que « pour sa participation au titre des concours financiers, la société recevra une commission de 30 % (trente) sur les sommes exactement données ou versées à l’association en conséquences directe des propres prestations de la société (…) au titre des partenariats et concours non financiers, la société se verra indemniser au DT l’euro de tous ses frais de représentation dûment justifiés et recevra en outre une commission de 10 % calculée sur le montant total desdits frais » (feuillet 234).

18 – Ces deux conventions sucqédaient à un contrat conclu le 22 mars 2011 entre la société N Y CRÉATION et l’association LES PRISONS DU CŒUR laquelle prévoyait une facturation au temps passé limitée à 120 jours par an.

19 – Poursuivant leurs investigations, les enquêteurs de la Brigade financière constataient des discordances entre les factures émises par l’association ECR, leur règlement et leurs enregistrements comptables. Ainsi, il était relevé une double facturation de prestations, une refacturation par la société ACDP de prestations pourtant directement prises en charge par l’association et la reprise non causée par l’association d’une facture prétendument adressée à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC).

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a) La surfacturation par la société ACDP :

20 – L’analyse de la comptabilité de l’association ECR conjuguée à celle de la société ACDP faisait suspecter une technique de surfacturation. Ainsi, il était établi qu’au cours de l’année 2013, la SARL ACDP avait œuvré pour la publication du supplément relatif à l’action de l’association LES PRISONS DU CŒUR publié dans le journal MÉTRO du 28 mars 2013. En 2013, trois factures se rapportaient à cette publication pour un montant total TTC de 233 548, 60 euros. Parmi elles, figurait la facture n° 2013-02-103 du 15 mars 2013 d’un montant TTC de 142 204, 40 euros initialement adressée à l’association LES PRISONS DU CŒUR et refacturée à hauteur de la somme de 71 012, 20 euros à l’association ECR au moyen de la facture n° 2013-04-04 du 8 avril 2013 en raison du partage par moitié de cette prestation du fait de la dissolution de l’association LES PRISONS DU CŒUR. Il était de plus observé que la facture du 15 mars 2013 demeurait due – dans son intégralité – dans le compte client de l’association LES PRISONS DU CŒUR dès lors que la SARL ACDP n’avait pas procédé à la rectification de la facturation initiale. S’agissant du règlement de cette facture du 15 mars 2013, des inexactitudes entre les règlements mentionnés sur celle- ci étaient décelées. Ces derniers s’élevaient à la somme de 74 000 euros alors que l’association LES PRISONS DU CŒUR n’avait versé que la somme de 64 845, 56 euros. En outre, les paiements intervenant dans le compte client LES PRISONS DU CŒUR figurant au sein de la comptabilité de la SARL ACDP en règlement de cette facture étaient identifiés au nom de l’association ECR, entre le 9 avril et le 10 décembre 2013, à hauteur de la somme de 58 716, 60 euros. Il en était donc déduit que ces règlements n’étaient pas comptabilisés de manière symétrique dans les écritures comptables de la SARL ACDP (compte client ECR) et dans celles de l’association ECR (compte fournisseur ACDP) (cf. note comptable (NC), page 14). Au total, en refacturant pour moitié l’association ECR à hauteur de la somme de 71 012, 20 euros, la SARL ACDP paraissait avoir fait peser sur elle des règlements indus puisque cette même prestation avait été réglée en partie à hauteur de 123 562, 16 euros par l’association LES PRISONS DU CŒUR (64 845, 56 euros) et l’association ECR (58 716, 60 euros). Il semblait par suite que l’association ECR avait supporté près du double du règlement de cette facture. En outre, en qualité d’annonceur, la SARL ACDP avait appliqué à l’association ECR une commission de 30 % sur la page 12 contenant une publicité de la société ORANGE. Cette page avait préalablement été facturée, le 18 février 2013, à FRANCE TELECOM pour un montant toutes taxes comprises de 20 332 euros. Le coût de cette page étant estimé par la SARL ACDP à la somme de 17 000 euros hors taxes (HT), la surfacturation appliquée pouvait être estimée à celle de 5100 euros HT (30 % de commission de 17 000 euros) soit 6099, 60 euros TTC. Ainsi, il était observé des règlements forfaitaires et irréguliers correspondant rarement aux factures émises ainsi qu’une absence de réciprocité des écritures et de concordance des soldes clients et fournisseurs des deux entités. Il apparaissait donc que la SARL ACDP avait surfacturé l’association ECR d’une somme de 58 716, 60 euros majorée de celle de 13 331, 28 euros du solde débiteur du compte client LES PRISONS DU CŒUR et de celle de 6099, 60 euros dans le cadre de la facturation du supplément MÉTRO de mars 2013, soit une somme de 78 147, 48 euros (cf. NC, page 15).

b) La surfacturation pratiquée à l’occasion de la réalisation de ts de presse promotionnels :

21 – Les investigations mettaient en exergue le fait que plusieurs factures émises dans le cadre d’opérations de publi-reportage (feuillets 867-869) avaient fait l’objet de surfacturations de telle sorte qu’il s’évinçait de ces faits que la société ACDP surfacturait à l’association ECR des prestations réalisées par d’autres et déjà facturées.

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Ainsi, la facture n° 2013-02-103 du 15 mars 2013 relative au supplément MÉTRO du 28 mars 2013 faisait état de « frais de conception réalisation graphisme » pour un montant de 47 500 euros HT. Dans les charges de la SARL ACDP, deux dépenses susceptibles de se rapporter à ce supplément étaient recensées :

+ le 11 janvier 2013, M. BH BV avait facturé à la SARL ACDP la somme de 2546, 60 euros TTC pour la création et la réalisation du n° 0 du magazine «LES PRISONS DU CŒUR», création de la charte graphique, maquette de 44 pages, adaptation déclinaison charte MÉTRO. Sa prestation avait été comptabilisée en charge dans le compte 622600 « honoraires » à hauteur de 2380 euros HT ;

+ la prestation de M. AX BW, auteur illustrateur indépendant, comptabilisée pour une somme de 700 euros hors taxes enregistrée le l" mars 2013 en compte 622900 « droits d’auteur ».

22 – Ainsi, le montant des frais de conception, réalisation et graphisme refacturés par la SARL ACDP apparaissait 95 fois supérieur au coût de cette prestation. Parallèlement, l’association ECR comptabilisait en charges, sur l’exercice clos en 2014, les prestations identifiées comme relevant de la conception-réalisation du supplément du journal MÉTRO dont le montant total s’élevait à la somme de 8088, 65 euros. Par suite, la SARL ACDP avait ainsi surfacturé, sans justification économique et à un double niveau, des frais de conception, réalisation et graphisme au tarif de 56 810 euros TTC qu’elle avait pris en charge pour un faible montant ainsi que des dépenses ayant directement pesé dans les comptes de l’association ECR à hauteur de 8088, 65 euros (cf. NC, pages 15 et 16).

23 – Une technique analogue était vérifiée s’agissant du supplément de l’hebdomadaire LE POINT du 20 juin 2013. Ainsi, la facture n° 2013-07-101 du 31 juillet 2013 relative à ce supplément faisait état de « frais de conception réalisation graphisme » pour un montant de 25 500 euros HT alors qu’aucuns frais de cette nature n’apparaissait au sein de la comptabilité de la SARL ACDP. Il était ainsi suspecté que cette demière eût surfacturé l’association ECR de frais jamais engagés pour un montant de 30 498 euros TTC alors que ces mêmes frais avaient été pris en charge directement par l’association ECR à hauteur de la somme de 9982, 23 euros HT.

24 – De même, la facture n° 2014-03-101 du 11 avril 2014 relative au supplément LE PARISIEN et AUJOURD’HUI EN FRANCE du 11 mars 2014 mentionnait des frais de conception réalisation graphisme pour un montant de 37 500 euros HT (45 000 euros TTC) alors que la page 11 de ce journal précisait pourtant que ledit supplément avait été réalisé par son propre service supplément.

. – C) La surfacturation des prestations de la SARL ACDP dans le cadre du projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de Fresnes

(94) :

25 – En 2014, la SARL ACDP avait œuvré, pour le compte de l’association ECR, en faveur de la réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de Fresnes (94). Comptablement, les prestations et achats de matériels relatifs à la réalisation de ce projet étaient enregistrés en compte 604100 « travaux Fresnes » pour un montant total de 202 915, 74 euros. Il ressortait des pièces du dossier que deux factures concernaient ce projet. Une première facture n° 2014-07-101 datée du 1" juillet 2014 et se rapportant à la «réalisation de la coordination, de la communication et conception/création du projet de réhabilitation du plateau sportif à la maison d’arrêt

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de Fresnes » et une seconde n° 2014-09-104 du 1°" septembre 2014 relative à la « réalisation de la coordination, de la communication et de la sous-traitance partielle pour les travaux de Fresnes ». Le montant total de cette opération s’élevait à la somme de 411 625, 95 euros.

26 – La facture précitée du 1" juillet 2014 mentionnait des honoraires de « conception et création du projet » d’un montant de 27 500 euros HT et des honoraires de mise en œuvre du projet à hauteur de 96 900 euros HT. Il était retrouvé dans la comptabilité de l’association ECR, au titre de l’exercice clos en 2015, trois factures des 30 septembre, 31 octobre et 30 novembre 2014 émises par M. BX BY et relatives à des missions de conseil et d’assistance ainsi qu’une note d’honoraires en date du 30 novembre 2014 établie par la société de recherches et d’études architecturales SA CQ ARCHITECTURE et concemant un contrat de maîtrise d’œuvre à hauteur de la somme de 23 500 euros TTC. Le montant total de ces factures était de 24 500, 36 euros.

27 – En outre, l’étude de la facture n° 2014-09-104 du 1" septembre 2014 permettait de comprendre que la SARL ACDP avait rétrocédé à l’association ECR le coût des fournisseurs qu’elle avait directement réglés. À ce montant, la SARL ACDP avait appliqué des honoraires de suivi de 7 % soit la somme de 14 300 euros HT (17 160 euros TTC). Cette commission relative à la refacturation de travaux et/ou d’achats de matériels n’avaient cependant pas fait l’objet d’une convention. Sur ladite facture, le montant total des travaux refacturés s’élevait à la somme de 204 321, 63 euros HT. Ainsi, le montant total des dépenses inscrites en compte 604100 « Zravaux Fresnes » était de 201 315, 74 euros HT soit une différence de 3005, 89 euros HT (3607, 07 euros TTC). d) La prise en charge d’une facture émise contre la CDC :

28 – Le 27 novembre 2014, l’association ECR décidait d’inscrire en charge ce qui était présenté comme une créance de la société ACDP sur la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC)Y’ pour un montant de 515 619, 52 euros relative au projet de Saint-Quentin-Fallavier (38) (feuillets 200 à 203). Ladite facture n° 2012-12-112 datée du 31 décembre 2012 était relative à des « prestations d’assistance et de conseil réalisés depuis 2010 pour le projet « Ensemble contre la Récidive » et plus particulièrement de mai 2012 à décembre 2012 avec l’adaptation du projet à la nouvelle politique de Mme la Garde des Sceaux » (feuillets 455-456). Ce projet concernait notamment la création d’établissements pénitentiaires expérimentaux. Au sein de la comptabilité de la SARL ACDP, l’exercice 2013 enregistrait le montant intégral de la facture dans le compte client CDC. En 2015, une écriture de vente figurant au crédit du compte client et correspondant à l’avoir n° 2015-01-01 du 5 janvier 2015 procédait à l’annulation de la prestation et au solde du compte CDC. Parallèlement, cette même prestation était refacturée à l’association ECR (facture n° 2015-01-02 du 5 janvier 2015 pour un montant de 517 344 euros TTC, la différence de montant entre les deux factures résultant de l’augmentation du taux de TVA de 19, 6 % à 20 % à compter du 1" janvier 2014). Ce changement de débiteur se fondait sur les

4 Créée par l’article 110 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances, la CDC est aujourd’hui un « établissement spécial chargé d’administrer les dépôts et les consignations, d’assurer les services relatifs aux caisses ou aux fonds dont la gestion lui a été confiée et d’exercer les autres attributions de même nature qui lui sont légalement déléguées. Elle est chargée de la protection de l’épargne populaire, du financement du logement social et de la gestion d’organismes de retraite. Elle contribue également au développement économique local et national, particulièrement dans les domaines de l’emploi, de la politique de la ville, de la lutte contre l’exclusion bancaire et financière, de la création d’entreprise et du développement durable (…) » (art. L 518-2 du code monétaire et financier).

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décisions de l’assemblée générale extraordinaire de l’association ECR en date du 27 novembre 2014. Il apparaissait dès lors que l’association ECR avait repris à sa charge une facture dont le règlement n’avait pas été honoré par le client de la SARL ACDP et ce dans le cadre d’une relation commerciale qui lui était étrangère. Il était de plus observé que la SARL ACDP n’avait accompli, durant deux années, aucune démarche de recouvrement auprès de la CDC ni passé de provisions pour créances irrécouvrables ou douteuses. Par ailleurs, la convention de dévolution du patrimoine entre l’association LES PRISONS DU CŒUR et l’association ECR du 18 juillet 2013 n’y faisait aucunement référence dès lors que cette prestation n’avait initialement pas incombé à l’association LES PRISONS DU CŒUR.

29 – L’analyse de la facture adressée à la CDC et refacturée à l’association ECR permettait d’estimer que celle-ci constituait un instrument de surfacturation de prestations que la société ACDP n’avait jamais pris en charge. Ainsi, la facture du 31 décembre 2012 mentionnait, parmi les prestations effectuées par la SARL ACDP, l’intervention du fournisseur SAMOP pour un « programme fonctionnel ». Or, cette entreprise – laquelle n’apparaissait pas dans les écritures comptables de la SARL ACDP – était un fournisseur de l’association LES PRISONS DU CŒUR. La convention précitée du 18 juillet 2013 stipulait ainsi que « ECR s’engage irrévocablement à apurer (…) la créance due à la SAMOP au 15-06-2013 : 33 500 euros ».

30 – De plus, en réponse à une réquisition judiciaire en date du 21 septembre 2017, la CDC déclarait que, hormis à travers trois conventions de mécénat signées avec l’association ECR, elle ne connaissait pas la SARL ACDP ou l’enseigne N Y CRÉATION en tant que fournisseur et n’avait jamais été destinataire de la facture considérée de 515 619, 62 euros TTC (feuillets 716-721). Au vu de ces éléments, il était avancé que ladite facture et son pendant du 5 janvier 2015 d’un montant de 517 344 euros TTC constituaient en réalité des instruments de surfacturation dépourvus de toute réalité économique. L’objectif eût été de faire supporter par l’association ECR une dépense fictive par l’établissement de factures de complaisance. Ce fait était corroboré par la circonstance que le compte-rendu de la réunion du 23 décembre 2014 relative au financement par la CDC de projets conduits par l’association ECR ne faisait état ni de la facture, ni de sa reprise ni du projet visé (feuillets 579-581 ; 587).

e) la prise en charge par l’association ECR de charges de la société ACDP :

31 – Ici, deux catégories doivent être évoquées : + les prestations exécutées par Mme AZ I pour le compte de la

société ACDP. Celle-ci réalisait des missions de secrétariat pour le compte de la société ACDP mais les facturait à l’association ECR (feuillet 211) ;

les notes de frais exposées par M. Y : il apparaissait en effet que l’intéressé s’était vu rembourser par l’association ECR des dépenses engagées au moyen des instruments de paiement de la société ACPD. Ainsi, entre mai 2013 et octobre 2014, les sommes de 3446, 85 euros, 1080, 73 euros, 546, 09 euros, 1386, 05 euros et 628, 14 euros étaient imputées dans les écritures de l’association ECR alors qu’elles avaient pourtant été acquittées grâce au moyen de paiement détenus par la société ACPD (ef. NC, pages 36 et 37).

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C) Les faits commis au préjudice de la société AU CŒUR DES PRISONS ACDP) :

32 – La société ACDP laquelle était précédemment dénommée N Y CRÉATION jusqu’au 4 janvier 2013, avait été immatriculée en 2006. Son capital était détenu par la société civile PAPI à hauteur de 7499 parts sociales, la société IKF HOLDING à hauteur de 2500 parts sociales et M. DE P à hauteur de la part sociale restante. Son objet social déclaré était les « études et conseils, création de mobilier, assistance et soutien marketing, prestations de services, prestations intellectuelles ayant trait à l’image et à l’écrit, et plus généralement toutes opérations favorisant son extension » (feuillet). M. Y était officiellement salarié de la SARL ACDP entre 2013 et 2016 et Mme BB BC DI DJ chargée de mission entre le 1" octobre et le 31 décembre 2016. Celle-ci apparaissait par ailleurs comme ayant été bénéficiaire de titres de transport à destination de Nice, Dubaï et Vienne à des dates ne correspondant pas à sa période d’engagement. Le montant total des salaires déclarés affichait la somme de 30 000 euros par an (feuillets 59-60 ; 68- 69 ; 75-76).

33 – Il ressort des pièces du dossier qu’une procédure de vérification fiscale relative aux impôts et taxes afférents aux exercices 2013 et 2014 a conduit à des rappels de TVA à hauteur de la somme de 156 301 euros et que l’administration fiscale a constaté l’existence de dépenses dépourvues de lien avec l’activité de la société ACDP (dépenses de restaurants, parfums et voyage aux Maldives dont a bénéficié Mme X-AY Y). Après avoir été réintégrées dans le résultat fiscal de la personne morale, ces dépenses ont été affectées aux revenus personnels de M. Y lequel a accepté la proposition de rectification (feuillets 65-66).

1°) La prise en charge des dé Ét ères à l’intérêt de la société ACDP : a) la prise en charge des dues par M. Y :

34 – L’analyse des comptes bancaires dont étaient titulaires la société ACDP permettait de constater que celle-ci avait réglé les pensions alimentaires dues par M. Y à ses deux filles. Sur ce point, il était établi que l’intéressé avait déclaré à l’administration fiscale le versement de pensions alimentaires au profit de Mmes B E et X-AY Y pour des montants de 20 738 euros et 21 482 euros, au titre des années 2014 et 2015. Ainsi, son revenu imposable avait été nul en 2014 et de 4770 euros en 2015. Les versements considérés opérés par la société ACDP avaient été de 29 665 euros en 2013, 57 521 euros en 2014, 57 264 euros en 2015 et 60 850 eu 2016 soit une somme de 205 300 euros. Réalisés par la société ACDP, ces paiements avaient été imputés sur le compte IKF HOLDING, circonstance qui n’avait pas dissuadé M. Y de les déduire de son revenu imposable (feuillets 9-10 ; 56- 59 ; 123-124). b) les dépenses afférentes à la villa HELEN ROC :

35 – L’examen des données comptables relatives aux exercices 2013 à 2016 permettait également de relever des dépenses concernant la villa HELEN ROC sise sur le territoire de la commune de Cannes (06) et appartenant à la SCI 3MIMI et prises en charge par la société ACDP pour un montant de 108 542, 47 euros TTC. Le lien entre ce bien consenti à usage exclusif d’habitation et la société ACDP ne pouvait être

5 Cette villa constituait l’unique actif de la SCI 3MIMI (feuillet 530). Page 22 / 82

établi. En outre, Mme CA G, ancienne compagne de M. Y, indiquait aux enquêteurs s’y être rendue avec lui dans un cadre privé de même que Mme BC DI DJ qui déclarait y avoir séjourné en présence de M. Y durant les fins de semaine et les vacances. Ainsi, par courriel du 7 mai 2017, celle-ci demandait au prévenu de bien vouloir transformer ce qu’elle nommait leur « suite » (feuillets 402-410 ; 673 ; ef. NC, pages 29-33).

36 – Les montants retenus, au titre des exercices 2013 à 2016, étaient ici de 19 377, 43 euros en 2013, 39 239, 68 euros en 2014, 32 034, 99 euros en 2015 et de 17 890, 37 euros en 2016 pour une somme de 108 542, 47 euros.

37 – Ici, M. Y invoquait l’existence d’une activité de la société ACDP exercée dans le Midi, à savoir la recherche de mécènes. Il admettait cependant que seule une quote-part aurait dû être inscrite en comptabilité et CC que ce bien immobilier était de nature patrimoniale et destiné à ses enfants.

c) les dépenses liées au logement de M. Y :

38 – Il apparaissait que le loyer correspondant au siège social de la société ACDP avait été pris en charge à hauteur de 50 % par la société ACDP et, s’agissant des 50 autres pour cent, sur le compte courant de la société IKF HOLDING. En outre, cette quote- part de 50 % se révélait appliquée sur une série de comptes de charge relative au logement principal de M. Y et à la villa HELEN ROC. En sus du paiement des charges fixes, les enquêteurs remarquaient des dépenses diverses de déménagements, de livraison d’un piano à queue, d’aménagement et de rénovation de cuisine, d’ameublement de salon alors que nul élément ne permettait de les rattacher à un élément de l’activité officielle de la société ACDP ou à une prestation facturée par celle-ci (feuillets 179-180 ; 254 ; 260 ; ef. NC. Pages 39-41). Le montant total de ces dépenses était fixé à la somme de 90 386, 06 euros se décomposant en celles de 82 931, 75 euros au titre des charges fixes ventilées au prorata de 50 % et de 7454, 31 euros au titre des charges exceptionnelles.

d) l’activité de phot hie O2B :

39 – Les investigations établissaient par ailleurs que M. Y avait exercé une activité de photographe, activité prise en charge par la société ACDP s’agissant de la rémunération des modèles et des éléments de mise en valeur de ceux-ci. À l’exception d’une unique vente réalisée en 2015, cette activité artistique n’avait fait l’objet d’aucune exploitation commerciale (feuillet 264 ; cf. NC, pages 26-28).

40 – M. Y déclarait que ladite activité était de nature sociale et que les travaux réalisés contribuaient à la constitution du capital de la société tout en reconnaissant toutefois qu’elle était incompatible avec « l’activité pour les prisons » (feuillets 1317- 1318). Quant à Mme G, ancienne compagne de M. Y ayant posé pour lui, elle décrivait, le 28 septembre 2017, cette activité comme un « passe-temps » (feuillet 407).

41 – Certaines dépenses relatives à cette dernière se révélaient reclassées en dépenses personnelles au titre de l’exercice 2014. Entre 2013 et 2016, il apparaissait que la société ACDP avait assumé, au titre de l’activité O2B, des dépenses à hauteur de 21 903, 06 euros en 2013, 37 583, 24 euros en 2014, 53 282, 21 euros en 2015 et 57 662, 80 euros en 2016 pour une somme de 170 431, 31 euros (NC, annexe VII).

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e) les indemnités kilométriques :

42 – Les investigations tendaient de plus à établir que M. Y avait demandé à la société ACDP le remboursement de frais de trajet en automobile dont le montant s’était élevé, entre 2013 et 2016, à la somme de 96 794, 87 euros (13 601, 86 euros en 2013, 43 704, 98 euros en 2014, 27 458, 40 euros en 2015, 12 029, 63 euros en 2016). S’agissant de l’exercice 2013, les indemnités de frais kilométriques étaient imputées au crédit du compte courant d’associé IKF (NC, page 35).

43 – Toutefois, les justifications supposées expliquer les frais considérés se révélaient hasardeuses et le montant de la prise en charge surévalué.

44 – Ainsi, M. Z déclarait que les frais relatifs aux déplacements de M. Y à Genève (Suisse) ne pouvaient refléter la réalité dès lors que leurs rencontres avaient principalement lieu à Paris (75) et que les rares visites genevoises de l’intéressé n’avaient impliqué que l’utilisation du train ou de l’avion. Il estimait, de manière générale, que le montant des frais remboursés par la société ACDP à M. Y était exorbitant (feuillet 965).

45 – M. Y répliquait que le système des indemnités kilométriques, qui lui avait été présenté par des « experts judiciaires » (M. H), était fondé sur l’utilisation de véhicules automobiles pour des déplacements professionnels mais admettait cependant l’existence d’une « négligence grave » ayant conduit à la surestimation des frais kilométriques (feuillet 1309-1311).

f) les séjours, voyages, loisirs, frais de restauration et d’esthétique :

46 – La poursuite des investigations permettait de mettre en évidence l’existence de frais assumés par la société ACDP et relatifs à des voyages et séjours à l’étranger (Londres, Amsterdam, Montréal, Vienne, Dubaï, les Seychelles et la Thaïlande). Les bénéficiaires des titres de transport se révélaient être des personnes voyageant en couple ou des proches de M. Y. Ces voyages ne pouvaient être rattachés à une prestation facturée par la société ACDP. De même, plusieurs trajets et séjours effectués dans la ville de Cannes (06) apparaissaient n’avoir satisfait que le seul agrément personnel de M. Y.

47 – Sur ce point, Mme BC DI DJ déclarait, le 26 janvier 2017, que les séjours à Montréal (Canada) et Dubaï avaient présenté un caractère professionnel tout en admettant ne pouvoir expliquer la prise en charge de son propre séjour et celui de sa fille (feuillet 666).

48 – En outre, de nombreuses autres dépenses qualifiées de « mission ou de réception», de «fournitures», de « cadeaux à la clientèle» et de « services bancaires » semblaient suspectes compte tenu de la nature même des achats effectués : matériel multimédia, fournisseur d’articles érotiques à l’enseigne DEMONIA, club d’effeuillage ZE CLUB et de l’identité de leurs bénéficiaires (la compagne de M. Y ou les membres de sa famille). Enfin, était également visée une facture concemant un traitement de cellules graisseuses par cryothérapie et dont le montant avait été pris en charge par la société ACDP en 2016 (feuillets 86-94 ; ef. NC pages 34-35 ; 37-38 ; 41-42).

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49 – Le montant de ces dépenses était ainsi estimé :

[…]

Fournitures administratives, Voyages et Mission, cadeaux faits à la déplacements réception et clientèle, frais Total . esthétique internet et services bancaires De 11 261, 17|De 7806, 94 De 20 062, 71 Exercice 2013 euros à 13 199, (euros à 11 789, | 994, 60 euros euros à 25 983, 08 euros 95 euros 63 euros De 52 370, 20 252, 60 De 7639, 69 euros De 80 262, 53 Exercice 2014 euros à 63 758,|euros à 35 711,1, l euros à 109 240, à 9771, 29 euros 33 euros 09 euros 71 euros De 21 236, 47|De 32 009, 76 De 6420. 93 euros De 59 667, 16 Exercice 2015 euros à 37 134, {euros à 50 010, |, l euros à 93 396, à 12 251, 32 euros 35 euros 78 euros 45 euros De 52 213, 15)De 33 765, 62|De 18 197, OljDe 105 175, 78 Exercice 2016 euros à 65 067, |euros à 44 881,|euros à 23 381, 15l1euros à 133 78 euros 57 euros euros 330, 50 euros (NC, annexe VII).

50 – Entendu sur ce point en garde à vue, M. Y CC que les voyages à l’étranger et la plupart des séjours cannois avaient présenté un caractère professionnel. Il indiquait que l’activité de relations publiques obéissait à des règles particulières lesquelles avaient pour effet d’estomper la frontière séparant l’aspect professionnel de l’aspect personnel. Concernant les dépenses réalisées au bénéfice de Mme BC DI DJ et notamment la prise en charge de ses frais de formation, il les qualifiait de « logiques » compte tenu de l’aide que lui avait apportée celle-ci dans le cadre de l’activité de la société ACDP (feuillets 1312-1314 ; 1320-1321).

51 – Le montant total des dépenses personnelles de M. Y prises en charge par la société ACDP était estimé, sur la période 2013-2016, à la somme de 1 315 286, 87 euros (seuil bas) et de 1 499 940, 81 euros (seuil haut) (cf. NC, annexe VII).

2°) L’imputation des dépenses étrangères à l’intérêt de la société ACDP sur les comptes courants d’CE IKF et PAPI :

52 – Il apparaissait que l’enregistrement comptable des dépenses personnelles effectuées par M. Y avait été réalisé, selon qu’elles étaient identifiées comme dépenses professionnelles ou personnelles, dans les charges de la société ACDP ou dans les comptes courants d’CE de la société IKF HOLDING ou de la société PAPI (cf. NC, pages 43-48).

53 – Il était d’ailleurs retrouvé au domicile de Mme AZ I un document numérique intitulé « Besoins en CC pour couvrir dépenses PB » lequel faisait état des modalités comptables d’imputation des dépenses personnelles de M. Y à hauteur de 147 900 euros pour l’année 2014. Apparaissait dès lors un projet de ventilation entre les comptes courants d’CE IKF HOLDING (65 000 euros) et PAPI (85 000 euros) avec un abondement prévisionnel de 100 000 euros pour l’année

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2015 (feuillet 293).

a) l’utilisation du compte courant d’associé IKF par M. Y :

54 – Les écritures figurant au débit de ce compte représentaient les dépenses personnelles de M. Y ou de Mme I alors que les écritures figurant au crédit représentaient presque intégralement des apports de l’associé IKF ou de son dirigeant M. Z. Il était toutefois relevé qu’en 2013, les notes de frais présentées par M. Y avaient été enregistrées comme avances au crédit du compte courant d’associé IKF.

55 – Mme I déclarait ici, le 12 mai 2017, avoir reçu de M. Y des pièces justificatives de frais au vu desquelles elle établissait des tableaux et CD que les versements opérés par la société IKF HOLDING représentaient en réalité des sommes prêtées à M. Y. Par suite, elle avait reclassé les dépenses lui ayant paru personnelles en les imputant sur le compte courant IKF HOLDING tout en précisant que ces reclassements avaient été marginaux (feuillets 210-219 ; 258-261 ; 859-865).

56 – De même, M. CB K, expert-comptable, CC pour sa part, le 10 mai 2017, que s’il se faisait communiquer des tableaux récapitulatifs par Mme I, il ne procédait cependant pas à un contrôle systématique des factures produites. M. J prétendait toutefois avoir attiré l’attention de M. Y sur le montant conséquent de ses frais de déplacements. Ainsi, une prise de notes relative à une conversation avec Mme I et saisie en perquisition évoquait une prise en charge à 50 % par la société et à 50 % par imputation sur le compte courant IKF HOLDING de frais personnels liés notamment au domicile de M. Y (feuillets 200-203 ; feuillet 254 ; feuillet 367).

57 – En outre, M. BM H, ancien expert-comptable de la société N Y CRÉATION jusqu’en 2010, déclarait que les modalités de l’enregistrement comptable des opérations répondait à l’objectif de faire échec aux saisies diligentées par le Trésor public s’agissant spécialement du paiement des pensions alimentaires. Pour ce faire, un compte courant accueillait les prêts et permettait le règlement des dépenses personnelles dont faisaient partie les pensions alimentaires. M. H indiquait que l’insuffisance de sa rémunération était compensée par des soutiens amicaux (feuillets 995-1004).

58 – Quant à M. Y, il déclarait, le 29 mai 2018, que la comptabilité de la société ACDP avait été assurée par l’expert-comptable auquel avaient été transmises les factures préalablement classées par Mme I. Cette dernière était par ailleurs en possession d’un projet de note dont l’objet était l’établissement d’un tableur destiné à l’expert-comptable. Concernant l’usage du compte courant d’associé IKF HOLDING, l’intéressé mentionnait que celui-ci était utilisé dans le cadre de l’enregistrement de prêts personnels consentis à son bénéfice par M. Z ou d’avances de trésorerie en faveur de la société ACDP. M. Y évoquera par la suite des « avances en compte courant » (feuillet 1268). Il CC par ailleurs que M. Z avait immédiatement accepté que les sommes versées à la personne morale fussent utilisées pour le paiement des pensions alimentaires dues à ses filles. Selon M. Y, ce système avait été élaboré par M. H et M. K auxquels il avait accordé une totale confiance en raison de leur qualité d’expert-comptable, lui- même ne disposant d’aucune compétence particulière en la matière. Concemant les dépenses à caractère personnel et non imputées sur le compte courant d’associé IKF HOLDING, l’intéressé CD qu’il s’agissait d’une simple erreur et indiquait

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n’avoir jamais demandé à un comptable de passer une dépense personnelle en dépense professionnelle. Il mentionnait également que Mme I procédait aux imputations comptables sur le compte IKF HOLDING et sur la base des éléments qu’il lui communiquait. De manière générale, M. Y CC s’en être remis aux comptables et invoquait le fait que, pour lui, le financement de ses dépenses personnelles avait été opéré au moyen de l’argent prêté par M. Z (feuillets 1265- 1273 ; 1307-1322 ; 1346-1347 ; 1395-1398). Un projet de courrier devant être adressé à l’administration fiscale par M. Y évoquait toutefois l’apport régulier d’argent à la société par l’actionnaire minoritaire IKF HOLDING pour lui permettre de poursuivre son activité (feuillet 316).

59 – Confirmant l’existence de prêts qu’il avait consentis à M. Y, M. Z précisait cependant, le 13 juin 2018, qu’il ne s’était agi pour lui que de soutenir son activité professionnelle et de régler des frais. Il reconnaissait en outre avoir eu connaissance de l’usage personnel des fonds prêtés en raison des contraintes fiscales pesant sur M. Y et ce dès lors que ce dernier lui en avait fait part. Selon lui, l’accord scellé avec son interlocuteur et relatif à l’usage du compte courant de la société IKF HOLDING n’avait pas eu pour objet de permettre le financement de ses dépenses personnelles. M. Z produisait, au cours de l’enquête préliminaire et par l’intermédiaire de son conseil, un ensemble de pièces comptables de la société IKF HOLDING ainsi qu’une note tendant à démontrer que les sommes prêtées par les sociétés anonymes de droit suisse à des particuliers n’étaient pas, par principe, interdites (feuillets 979-980). La lecture desdites pièces comptables permettait d’apercevoir une distinction entre les avances enregistrées au bénéfice de M. Y et celles enregistrées au bénéfice de la société ACDP. La grande majorité des dépenses étaient considérées comme personnelles. M. Z déclarait de plus avoir réalisé, « avec désarroi», l’importance des dépenses personnelles de M. Y lors d’une consultation des comptes préalable à l’audition devant les enquêteurs dès lors que l’établissement des éléments comptables avait été confié à un cabinet d’audit comptable. Selon M. Z, les prêts octroyés ne constituaient pas des donations déguisées (feuillet 1237) puisque les avances octroyées étaient garanties par la villa HELEN ROC et ce en dépit du fait que le patrimoine de la société ACDP était bénéficiaire de prêts sous la forme d’avances en compte courant et que la société PAPI était propriétaire des parts de la société des 3MIMI elle-même propriétaire de la villa HELEN ROC.

60 – Les dépenses personnelles exposées par M. Y pouvaient ainsi être évaluées :

Total des dépenses | Dépenses inscrites Dépenses personnelles prises | au débit du compte demeurant à la en charge par la courant d’associé | charge de la société société ACDP Exercice 2013 242 343, 48 euros 83 850, 69 (évaluation basse) (évaluation basse) 248 264, 40 euros! *** *** 7° 05 lg9 771, 61 euros (évaluation haute) (évaluation haute) Exercice 2014 319 192, 57 euros 144 050, 51 euros (évaluation basse) (évaluation basse) 429 041, 58 euros! !7° 14295 ©4105 [253 939, 52 euros (évaluation haute) (évaluation haute)

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Exercice 2015 – - |343 847, 77 euros 196 855, 74 euros (évaluation basse) l (évaluation basse) 383 577, 06 eurosl 45 9° us (235 585, 03 euros (évaluation haute) (évaluation haute)

Exercice 2016 409 903, 05 euros 211 544, 33 euros (évaluation basse) (évaluation basse) 439 057, 77 euros|!°* *** "2 (249 699, 05 euros (évaluation haute) (évaluation haute)

Total 2013-2016 1 315 286, 87 636 301, 27 (évaluation basse) . (évaluation basse) 1. 499 – 940, – 811978 985 60 (gg -- 945, – 21 (évaluation haute) (évaluation haute)

(ef. NC annexe VII).

b) le solde débiteur du compte IKF :

61 – A compter du 20 août 2014, le compte courant d’associé IKF avait présenté un solde débiteur lequel avait perduré jusqu’au 5 juillet 2016 à l’exception de l’enregistrement d’une écriture de compensation en date du 31 décembre 2014 et correspondant à celui d’une facture de la société IKF MANAGEMENT daté du 2 décembre 2014 et d’un montant de 97 000 euros (ef. NC, pages 44-46).

62 – Sur ce point, Mme I déclarait que ladite facture avait été rédigée par M. Y et confirmait qu’un projet de convention avait été établi pour répondre aux exigences du contrôle fiscal de 2016. Elle indiquait de plus ignorer si le document avait été effectivement produit (feuillets 293 et 862). M. K CD quant à lui que la facture litigieuse, dont il ne savait pas si elle correspondait à de réelles prestations de service, avait été mise en place en raison du compte courant d’associé débiteur IKF HOLDING (feuillets 375-376).

63 – M. Y évoquait ici à nouveau le rôle cardinal des experts et CC que la facture avait été présentée à M. Z. Il contestait de plus le caractère inauthentique de cette facture qui correspondait, selon lui, à des prestations véritablement exécutées (feuillets 1270-1272 ; 1281-1292 ; 1345-1347).

64 – S’agissant de M. Z, celui-ci invoquait la tolérance de la législation suisse en la matière et indiquait avoir appris de M. Y la position débitrice du compte ainsi qu’avoir été avisé par l’intéressé de la possibilité d’éditer une facture en vue de compenser le solde en question. Toutefois, il contestait formellement avoir établi ladite facture dont il disait ne pas connaître l’existence. M. Z précisait par ailleurs qu’il ne s’était jamais agi de facturer les rendez-vous mentionnés. Il faisait de plus remarquer que la prise en compte de son enregistrement comptable par ses commissaires aux comptes ne résultait que d’une comparaison entre ses comptes et ceux de la société ACDP et que celle-ci était enregistrée en tant que prêt. Son conseil adressait aux enquêteurs un courriel selon lequel le comptable de la société IKF HOLDING SA distinguait selon les bénéficiaires des sommes prêtées au moyen d’un rapprochement entre les comptabilités des sociétés IKF HOLDING et ACDP corrigé en fonction des mouvements ne figurant que dans la comptabilité de la société ACDP. Il était enfin soutenu que l’octroi de prêts à des tiers étrangers n’était pas prohibé par le droit suisse (feuillets 956-970 ; 978-981 ; 1234-1235).

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c) l’utilisation du compte courant d’associé PAPI par M. Y :

65 – Il apparaissait que ce compte présentait des anomalies comparables à celles relevées lors de l’examen du compte courant d’associé de la SA IKF HOLDING.

66 – Au titre de l’exercice 2014, la SC PAPI ne procédait à aucun apport en compte courant. Les sommes inscrites au crédit correspondaient à des avances de frais supportées par la SC PAPI pour le compte de la société ACDP (pensions alimentaires, restaurant, entretien d’une piscine, assurance, prévoyance, cotisations URSSAF, frais de voyages…). 19 622 euros trouvaient leur contrepartie au débit du compte courant de la SA IKF HOLDING. Au débit, il était constaté que, sur la somme de 54 261, 97 euros comptabilisée, 22 438, 04 euros avaient transité par le compte bancaire de la société ACDP en règlement de la SC PAPIL Il ressortait par ailleurs de l’identification des copies de chèques que celui de 5000 euros daté du 8 octobre 2014 avait été encaissé par le Trésor public et celui de 4000 euros en date du 25 novembre suivant par la concession NEUBAUER LAND CW située dans le 15e arrondissement de Paris. Les autres sommes présentes au débit du compte courant (22 823, 48 euros) étaient traduites en écritures d’opérations diverses : 19 843, 48 euros correspondaient au remboursement de l’association ECR encaissé par la SC PAPI et 2980 euros correspondaient au remboursement d’espèces avancées par la SC PAPI au profit de la SARL ACDP. Au 31 décembre 2014, le compte courant considéré présentait un solde débiteur de 28 843, 48 euros.

67 – Au titre de l’exercice 2015, au vu des écritures figurant au crédit du compte courant, les apports de la SC PAPI s’élevaient à la somme de 63 646, 38 euros étant précisé que 59 000 euros avaient été versés sous forme de remises de chèques et 4636, 48 euros au titre d’opérations diverses :

+ – la somme de 3211, 90 euros enregistrée en opérations diverses le 10 janvier 2015 était censée être apportée par la SC PAPI laquelle était effectivement remboursée de son avance par chèque d’un même montant daté du 22 janvier suivant. La contrepartie de cet apport était affectée au débit du compte courant de la société IKF HOLDING à hauteur de 2250 euros par imputation sur les avances effectuées et au débit du compte de charge 625100 « Voyages et déplacements » pour un montant de 961, 90 euros ;

+ – la somme de 1434, 48 euros versée le 22 mars 2015 concernait l’avance effectuée par la SC PAPI sur le fondement d’une note d’honoraires présentée par la SCP BP CE. La contrepartie de cet apport était pour sa part comptabilisée en charge au compte 622610 à hauteur de la somme hors taxes de 1195, 40 euros. Au vu des écritures comptables, la SC PAPI était remboursée de son avance par chèque d’un même montant, le 13 mai 2015. Il était toutefois observé que ladite note d’honoraires ne concernait pas la société ACDP sur laquelle la SC PAPI avait ainsi fait peser une charge indue.

68 – Au débit du compte courant, était comptabilisée une somme de 64 989, 86 euros constituée du report à nouveau débiteur de l’exercice 2014 (28 843, 48 euros) et des remboursements effectués au profit de l’associé (36 146, 38 euros). Il apparaissait cependant que ces remboursements n’étaient pas systématiquement réglés au profit de la SC PAPI dès lors que le chèque de 2500 euros daté du 12 février 2015 avait été encaissé par Mme CF A laquelle n’était plus associée de la SARL ACDP ni de la SC PAPI et que celui de 1434, 48 euros en date du 13 mai 2015 avait été endossé

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par le cabinet d’avocat « BP – ANOIN ». Au 31 décembre 2015, le compte présentait un solde débiteur de 1343, 48 euros.

69 – Au titre de l’exercice 2016, le compte courant de la SC PAPI devenait créditeur le 27 janvier à la suite de la remise d’un chèque de 4000 euros avant de retrouver une position débitrice entre le 6 juillet et le 2 novembre 2016 en raison de deux remboursements de 5000 et 2500 euros. La SC PAPI procédait ensuite à trois autres avances en compte courant :

+ – un apport financier de 82 800 euros le 2 novembre 2016 + – un apport financier de 37 120 euros le 2 novembre 2016

» une écriture d’opérations diverses de 2000 euros correspondant à l’avance d’une facturation de la société SIC

70 – Les sommes de 82 800 euros et 37 120 euros, lesquelles paraissaient répondre à la prise en charge de frais de dossier de la société 3MIMI et au remboursement de la dette fiscale de la SARL ACDP, n’étaient pas étayées par des pièces justificatives ou des écritures comptables se rapportant à leur objet. Il ressortait de ces éléments que les apports effectués au nom de la SC PAPI émanaient en réalité de M. Z qui avait procédé, le 30 octobre 2016, à un virement de 300 000 euros sur le compte bancaire de la SC PAPI laquelle, deux jours, plus tard, avait rétrocédé la somme de 82 800 euros à la SARL ACDP. Ainsi, en 2016, les remboursements en compte courant de la SC PAPI s’étaient élevés à la somme de 7500 euros alors que le montant total des apports de cette personne morale, sur cette même période, avait été de 123 920 euros. Au 31 décembre 2016, le compte courant présentait ainsi un solde créditeur de 117 076, 52 euros.

D) Les faits commis au préjudice de la SC PAPI :

71 – Les premières investigations réalisées à la suite du signalement précité opéré par la cellule TRACFIN le 6 septembre 2017 permettaient d’établir que la SC PAPI avait encaissé des chèques émis par l’association ECR et portant la signature de M. Y jusqu’en janvier 2014, ces versements ne correspondant à aucune prestation identifiée. Il était également constaté l’existence de dépenses personnelles réalisées au moyen des instruments de paiement dont était titulaire la SC PAPI (feuillets 145-146 ; 463-491).

1°) Les dépenses dépourvues de lien avec l’activité de la SC PAPI :

72 – L’analyse des dépenses effectuées au moyen de la carte bancaire de la SC PAPI permettait de relever l’existence de frais de restauration (notamment un repas au restaurant le Jules Verne à hauteur de 470 euros le 18 novembre 2014), de luxe auprès des enseignes HERMES (895 euros) et CG CH (230 euros) le même jour – lequel est celui de l’anniversaire de Mme CA G alors compagne de M. Y – et de voyage notamment à DUBAÏ, le 2 mai 2014 pour un montant de 2084 euros, Los Angeles en août de la même année (2327 euros) et dans la baie de Phangnga le 17 janvier 2015 (3319 euros).

73 – Au cours des années 2014 et 2015, le débit mensuel moyen de la carte bancaire de la SC PAPI était de 1500 euros pour atteindre la somme de 4200 euros en février 2015. Lesdits débits étaient compensés par des remises de chèques tirés sur le compte de la SARL ACDP de telle sorte que M. Y apparaissait financer ainsi les dépenses

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personnelles réalisées au moyen des fonds appartenant à la SC PAPI grâce à ceux de la société ACDP. Ainsi, les chèques émis par la société PAPI couvraient les dépenses engagées par M. Y au moyen de sa carte bancaire personnelle.

74 – En outre, des chèques étaient émis au bénéfice de la SARL ACDP pour un montant total de 69 000 euros, de la société CHOC’ELEC à hauteur de 30 000 euros et au profit de M. Y pour un montant total de 21 515 euros. Il était ainsi suspecté que, sur la période allant de juillet 2013 à mars 2016, les sommes portées au crédit et relatives à l’utilisation des cartes bancaires (13 214 euros) ainsi que les chèques et virements opérés au bénéfice de M. Y (21 515 euros), Mme X-CF Y (6050 euros), Mme X-AY Y (5000 euros) et Mme BB BC DI DJ (2100 euros) avaient présenté un caractère personnel et ne pouvaient dès lors être rattachées à l’activité de la SC PAPI et ce pour un montant total de 47 879 euros (feuillets 145-149, cote 12).

75 – Sur ce point, M. Y admettait ledit caractère personnel des dépenses engagées au moyen des fonds appartenant à la SC PAPI tout en estimant que ces derniers représentaient des prêts consentis par son ami M. Z. Il ne pouvait cependant expliquer la raison pour laquelle la SC PAPI avait procédé à l’encaissement de chèques émis par l’association ECR entre avril 2013 et mai 2014 (feuillets 1395- 1399).

2°) Le prêt consenti par M. Z à la SC PAPI :

76 – L’analyse des comptes bancaires de la SC PAPI, sur la période allant de la fin de l’année 2016 au premier semestre de l’année 2017 permettait de constater que les ressources étaient principalement constituées de versements réalisés par M. Z tandis qu’une somme de 548 000 euros était versée sur les comptes de la SARL ACDP. Les fonds mis à la disposition de cette dernière par la SC PAPI provenaient d’un prêt consenti, à titre personnel, par M. Z selon une convention datée du 26 octobre 2016 (feuillets 466-470) et prévoyant la remise d’une somme de 1 500 000 euros, une date de remboursement fixée au 30 avril 2018 et un taux d’intérêt de 0, 4 % l’an (feuillets 240-241 ; 463-465).

77 – Cet emprunt devait officiellement autoriser l’acquisition par la SC PAPI des parts sociales détenus par M. A dans la société 3MIMI, le remboursement du compte courant d’associé détenu par M. A au sein de la même personne morale, l’apurement du passif accumulé par cette dernière et la réalisation d’une avance de trésorerie au bénéfice de la SC PAPI afin de lui permettre de réaliser les travaux nécessaires à la conservation du bien (feuillets 466-470).

78 – Cette société 3MIMI avait été constituée entre M. A (52%) et la SC PAPI (42%) laquelle était elle-même détenue par M. Y à hauteur de 0, 05 % et de ses deux filles (99, 95 %) et ce pour les besoins de l’acquisition, le 27 mars 2003, de la villa HELEN ROC auprès d’une SCI familiale de M. Y laquelle en était propriétaire depuis le 3 juin 1991 et sous la menace d’une saisie par l’administration fiscale. Selon l’évaluation de FRANCE DOMAINES, la valeur de ce bien était de 4 920 000 euros pour un ensemble immobilier d’une surface de 231 m° habitables, une terrasse de 175 m° et un terrain de 2420 m° (feuillets 810 ; 852).

79 – Ladite villa avait été donnée à bail, dès l’origine, à la société BRAIN PLEASURE CREATION (BPC) appartenant à M. Y (ancienne dénomination de la SARL ACDP), les loyers perçus devant permettre le remboursement du prêt bancaire accordé à la SCI pour l’acquisition du bien. Toutefois, la société BPC ne s’était pas acquittée

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des sommes dues.

80 – Il était par ailleurs observé que les écritures comptables concemmant la SARL ACDP recelait une créance détenue sur la SCI 3MIMI alors qu’aux termes du bail considéré et des accords conclus en 2013 par MM. A et Y, le coût des travaux réalisés demeuraient à la charge de la société ACDP. Il ressortait de plus d’un courriel échangé en mars 2017 avec Mme I que M. Y entendait maintenir cette créance et l’enregistrer dans le comptabilité de la SCI 3MIMI dès qu’il en aurait retrouvé la direction.

81 – Un accord était conclu, en mai 2017, en vue du rachat par la SC PAPI des parts détenues dans le capital de la SCI 3MIMI par M. A ainsi que du remboursement du solde de son compte courant d’associé pour un montant de 499 000 euros (feuillets 530 ; 542-550 ; 562-565 ; 682-685 ; 899 ; 904). En contrepartie de ce prêt, un nantissement des parts sociales de la SCI 3MIMI déjà détenues par la SC PAPI et issues de l’acquisition des parts sociales de M. A était consenti au profit de M. Z. Toutefois, M. A, lors de son audition en date du 20 décembre 2017, signalait l’impossibilité de constituer un tel nantissement sans son accord (feuillet 549) et précisait avoir dû mandater M. DS-DT DU, expert-comptable de la société SAPÈC, afin de reprendre la comptabilité non tenue des exercices à compter de 2010 (feuillets 547 ; 562-578).

82 – Le 12 novembre 2016, un avenant signé entre les parties stipulait que les fonds pouvaient être utilisés pour procéder à un ou plusieurs apports au compte courant de la SARL ACDP. Le 29 janvier 2018, un second avenant portait extension de la durée du prêt (feuillets 982-983).

83 – Au total, sur la somme de 900 000 euros versée, 548 000 euros étaient reversés sur les comptes de la SARL ACDP entre novembre 2016 et juin 2017 et portés au crédit du compte courant d’associé que celle-ci détenait. Le 2 novembre 2016, un chèque d’un montant de 82 000 euros était émis par la SC PAPI à l’ordre de la SARL ACDP. Celui-ci était signé par M. Y dix jours avant la signature de l’avenant du 12 novembre 2016 précité.

84 – Entendu sur ce point, M. Z déclarait, le 21 novembre 2018, n’avoir consenti ce prêt que dans l’unique dessein de racheter les parts de la SC PAPI et précisait avoir lui-même dû préalablement obtenir pour ce faire un prêt de M. CI CJ. Indiquant n’avoir plus souvenir de l’avenant du 12 novembre 2016, M. Z CD s’être, ce jour-là, trouvé à l’aéroport de Nice (06) et avoir signé, dans l’empressement, cet acte « sur un coin de table» selon une pratique délibérée et largement utilisée par M. Y. M. Z estimait au total avoir accordé ainsi une confiance excessive à son ami (feuillet 1238-1240).

85 – S’agissant de M. Y, celui-ci mentionnait les versements de sommes à la mère de M. BJ A®, un remboursement partiel du compte courant de ce dernier et d’un acompte sur le rachat de ses parts. Déclarant ne se rappeler ni l’emploi du reliquat de 500 000 euros ni la date de l’avenant prévoyant la possibilité de reversement des fonds à la société ACDP, il indiquait que les parts de la SC PAPI constituaient la garantie de M. Z et faisait état de la valeur de garantie de deux appartements détenus par la personne morale dont il admettait la gérance de fait. M. Y reconnaissait également avoir établi l’avenant considéré du 12 novembre 2016 soumis à la signature de M. Z et ce afin d’utiliser les fonds à des fins

6 Entendu le 20 décembre 2017 (feuillets 542-550). Page 32 / 82

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personnelles. L’intéressé admettait enfin que l’objectif du prêt sollicité auprès de M. Z avait été le financement de son train de vie personnelle (feuillets 1282-1284 ; 1395-1401).

E) Les faits commis au préjudice de l’administration fiscale :

86 – Il apparaissait ici que l’imputation de charges indues dans la comptabilité de la SARL ACDP avait eu pour conséquence la diminution du résultat fiscal de la société ACDP tandis que les dépenses personnelles réalisées au moyen des fonds de la personne morale et du compte courant de la société IKF HOLDING avait eu pour effet de dissimuler à l’administration fiscale la réalité des revenus personnels de M. Y.

1°) La diminution du résultat fiscal de la SARL ACDP :

87 – La procédure de vérification diligentée au titre des exercices 2013 et 2014 à raison de défaillances déclaratives aboutissait à une proposition de rectification en date du 12 juillet 2016 portant sur l’impôt sur les sociétés dû au titre des exercices 2013 et 2014 et sur la taxe sur la valeur ajoutée exigée au titre des exercices 2013, 2014 et 2015.

88 – Il était de plus observé qu’une facture n° 2014-12-107 en date du 10 décembre 2014 avait fait l’objet d’une commission réduite de moitié à titre exceptionnel. Il résultait du contenu de courriels échangés le 9 décembre 2015 entre l’expert- comptable de la SARL ACDP et M. Y que cette remise avait été décidée en vue de la minoration du résultat comptable laquelle était, selon l’homme du chiffre, justifiée par des difficultés de trésorerie (feuillets 311-312 ; 375-376).

89 – Entendu sur ce point, M. Y estimait n’avoir fait que suivre les recommandations de l’expert-comptable et soutenait que Mme I était probablement l’auteur matériel de la facture dont s’agit (feuillets 1344-1345), ce que l’intéressée admettait tout en précisant qu’elle avait agi sur instructions de M. Y (feuillets 861-862).

90 – L’audition, le 5 novembre 2018, de l’agent vérificateur (M. AH AB) par les enquêteurs permettait d’apprendre que celui-ci avait constaté l’existence d’une insuffisance d’actifs et estimé que la prise en charge par la société de 50 % du montant du loyer personnel de M. Y était certes excessive mais qu’il avait toutefois considéré que l’axe le plus important était celui de la TVA. Il précisait également ne pas avoir examiné le fonctionnement du compte courant IKF HOLDING à l’exception de sa position débitrice corrigée par la facture IKF MANAGEMENT et déclarait avoir été, à ce sujet, en relation avec M. Z sans évocation toutefois de ladite facture dont il n’avait pu juger de l’inauthenticité. L’agent confirmait par ailleurs avoir proposé l’enregistrement des charges au titre de l’activité O2B en tant qu’actifs et mentionnait ne pas s’être interrogé outre mesure quant à l’éventuel caractère personnel de ses dépenses n’entrant pas dans l’objet social de la société même s’il avait pris connaissance des tableaux de CQ établis par Mme I laquelle avait classé ces frais parmi les dépenses personnelles de M. Y. Rappelant la validation de sa position de principe par son chef de service, le vérificateur déclarait de plus ne pas avoir soupçonné, s’agissant des indemnités kilométriques et sur la foi des pièces justificatives qui lui avaient été présentées, une quelconque fictivité des déplacements concernés. Désormais instruits des éléments de la procédure, il admettait toutefois avoir aujourd’hui une vision totalement différente de celle qui avait été la sienne à l’époque des opérations de vérification (feuillets 1196-1212).

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2°) La dissimulation de ses revenus par M. Y :

91 – Les enquêteurs découvraient une lettre datée du 20 juillet 2016 par laquelle M. Y faisait état auprès d’un huissier de justice, dans le cadre d’une affaire « Y AX CONTRE Y N» de l’existence d’une très importante dette fiscale (« une somme considérable aux impôts ») engendrant des saisies régulièrement effectuées sur son compte bancaire. Était annexé un état récapitulatif des sommes dues au titre des avis à tiers détenteur (5 212 361 euros) ainsi qu’un tableau de répartition des versements mensuels à hauteur de 593 euros. M. Y précisait que « son combat pour la lutte contre la récidive était totalement bénévole » (feuillets 898-899 ; 902-904).

92 – Au 13 juin 2018, le montant total de la dette fiscale accumulée par M. Y s’élevait, selon le comptable public, à la somme de 3 602 245, 67 euros (feuillet 977).

93 – S’agissant de cette fraude fiscale, M. Y déclarait ne pas avoir minoré son revenu imposable en se bornant à utiliser les fonds issus des prêts consentis par M. Z et admettait un train de vie mensuel à hauteur de 15 000 euros. Le mis en cause ne pouvait expliquer la faiblesse de sa rémunération perçue au sein de la SARL ACDP comparée au chiffre d’affaires de cette dernière et à son investissement. M. Y faisait également mention d’un accord conclu avec l’administration fiscale et portant sur les sommes dues au titre de condamnations judiciaires antérieures lequel avait empêché, depuis plus de vingt ans, la réalisation de saisies sur son compte (feuillets 1259 ; 1348-1349).

94 – Sur ce point, l’agent vérificateur pré cité CD ne pas avoir analysé la structure des revenus de M. Y après avoir estimé que la prise en charge des frais annexes à son activité justifiait la modestie de sa rémunération. Il indiquait de plus qu’un examen de la situation fiscale personnelle de M. Y avait été envisagé mais que celui-ci avait finalement été abandonné à défaut de perspectives favorables suffisamment solides (feuillets 1207 ; 1211-1212).

95 – Il ressortait de la note fiscale rédigée le 15 avril 2019 par l’assistante spécialisée de M. le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris que le revenu brut global réellement perçu par M. Y en considérant que celui-ci aurait dû être rémunéré à hauteur du montant des dépenses engagées par la SARL ACDP ou provenant du compte courant IKF HOLDING lui permettant d’assumer les dépenses afférentes à son niveau de vie était de :

+ – 229 903 à 235 903 euros en 2013

+ – 306 843 à 416 843 euros en 2014

+ – 330 830 à 370 830 euros en 2015

+ – 396 817 à 426 817 euros en 2016

96 – S’agissant du montant de l’impôt sur le revenu éludé, il était fixé à une somme comprise entre :

+ – 71 728 et 74 428 euros en 2013

+ – 107 117 et 159 917 euros en 2014

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« + – 118 605 et 137 805 euros en 2015 + – 150 254 et 164 654 euros en 2016

97 – Le montant total des sommes éludées au titre de l’impôt sur le revenu était par suite évalué par la Ministère public à la somme minimale de 447 704 euros et celui de ses revenus à celle de 1 264 393 euros.

98 – L’administration fiscale déposait, à l’audience, les propositions de rectification suite à l’examen de la situation fiscale personnelle de M. Y en date des 21 décembre 2018 et 20 décembre 2019 et relatives aux années 2015 à 2017.

99 – Les droits dus – après contrôle – au titre de l’impôt sur le revenu étaient de : + – 109 692 euros en 2015 (au lieu de 0 avant contrôle) + 96 604 euros en 2016 (au lieu de 0 avant contrôle) + 76 335 euros en 2017 (au lieu de 0 avant contrôle)

100 – Le montant total des impôts et majorations rappelés s’élevait, entre 2015 et 2017, à la somme de 534 103 euros.

II – SUR L’ACTION PUBLIQUE

A) Sur les délits d’abus de confiance commis au préjudice de l’association ECR, de la société IKF HOLDING et de la SC PAPI :

101 – L’article 314-1 du même code énonce : « L’abus de confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé. L’abus de confiance est puni de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende ».

102 – Il résulte des dispositions dont s’agit du code pénal qu’un individu se rend DL de l’infraction d’abus de confiance dès lors que, après s’être vu régulièrement remettre, à titre précaire, des fonds valeurs ou un bien quelconque, il commet un acte de détournement portant sur ces derniers et de nature à causer un préjudice au propriétaire ou possesseur de ceux-ci. Ledit détournement peut constituer en un acte de dissipation, en une absence ou un retard observé dans la restitution ou encore en un usage abusif de la chose détournée. L’intention délictuelle exigée tant par les dispositions de l’article 121-3 du code pénal que celles de l’article 314-1 du même code se déduit de la connaissance, par le prévenu, du caractère précaire de la détention du bien remis et de sa volonté concomitante de se comporter comme le véritable propriétaire de celui-ci.

1°) Sur les faits commis au préjudice de l’association ECR :

103 – Ceux-ci concernent les versements de fonds opérés par l’association ECR au bénéfice de la SARL ACDP (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) dont M. Y était l’unique gérant de droit à savoir le paiement du solde d’une facture initialement adressée à l’association LES PRISONS DU CŒUR le 15 mars 2013 (c), le règlement de notes de frais établie dans le cadre de l’activité de l’intéressé exercée au sein de ladite SARL ACDP (d), le règlement de frais de conception et de rédaction

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attribués à cette dernière personne morale (e) et enfin la prise en charge de la rémunération de Mme I (f). Il importera tout d’abord de définir le rôle véritable qui fut celui de M. Y au sein de l’association ECR (a) et de préciser les termes de la prévention le concernant (b).

a) en ce qui concerne la présidence de fait de l’association ECR :

104 – Déclarée en préfecture le 25 février 2013, l’association ECR a succédé à l’association LES PRISONS DU CŒUR créée en janvier 2010. Celle-ci avait pour objectif de « sensibiliser les décideurs, les médias et le grand public à la lutte contre la récidive ; imaginer, proposer et exploiter un ou plusieurs centres de lutte contre la récidive ; fédérer et rechercher tous les partenaires qu’ils soient privés ou publics en vue de lutter contre la récidive ; lutter contre la surpopulation carcérale sous toutes ses formes et agir en ce sens pour modifier l’univers carcéral ».

105 – Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que l’association LES PRISONS DU CŒUR devenue l’association ECR avait été présidée par M. Y jusqu’à sa démission intervenue le 31 décembre 2013, date à laquelle l’intéressé était officiellement devenu directeur général de la personne morale (feuillet 639). Toutefois, il a pu être objectivement constaté, au vu des copies de chèques tirés sur le compte Société générale de l’association, que M. Y avait signé ceux-ci jusqu’en avril 2014 (feuillet 224) soit postérieurement à la date de sa démission prétendue. Les investigations ont également démontré l’existence de courriels adressés régulièrement par l’intéressé à Mme AY-DK E et qui contenaient des instructions de paiement. Il résulte également de ces recherches électroniques que M. Y a adressé, au cours de l’année 2015, des directives de paiement à M. BM P (feuillet 330). De même, le 14 avril 2016, M. Y a informé sa fille X-CF, en mettant en copie l’ensemble des membres de l’association ECR, qu’il convenait de faire valider par Me C BP un devis réalisé par la société BSKOY : « Je ne suis pas du tout un expert juridique ce que je sais c’est que tout cela doit être plus carré que carré compte tenu aussi de financement public. Je ne souhaite pas être au courant de toutes ces manœuvres juridiques mais je donnerais le feu vert lorsque C et D me diront que tout est ok » (feuillet 327). !

106 – Le rôle effectif de M. Y au sein de l’association ECR postérieurement à sa démission datée du 31 décembre 2013 est de même caractérisé par la possession par l’intéressé, à son domicile, d’un livre de caisse manuscrit découvert, le 10 mai 2017, lors de l’exécution d’une mesure de perquisition (feuillet 180). L’étude du scellé Y-CINQ permet en outre de démontrer que ledit livre de caisse rempli de manière manuscrite comprenait les écritures afférentes à la période comprise entre le 6 juin 2013 et le 8 mai 2017. Ce constat est par ailleurs confirmé par la réalisation d’un recoupement avec les relevés bancaires du compte détenu par l’association dans les livres de la Société générale. L’analyse des mentions manuscrites a de surcroît permis d’établir tant l’existence d’opérations de crédit que d’opérations de débit ainsi que le fait que M. Y avait dès lors assuré un suivi précis et régulier de ce compte bancaire bien au-delà de sa période de présidence (feuillet 244). De même, la lecture des conventions de mécénat relatives aux années 2014 et 2015 et conclues entre l’association ECR et des fondations d’entreprises ou des partenaires publics a démontré que M. Y en était le signataire pour le compte de l’association ECR en qualité de « président-fondateur » (4 conventions conclues avec la fondation M6 entre 2014 et 2016 dont l’objet était le financement du projet de centre de probation expérimental situé de Saint-Quentin Fallavier (38) et de médiation équine à hauteur de

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102 000 euros). Il est de plus constant que trois d’entre elles ont été signées par Mme AY-DK E en sa qualité de présidente de l’association quand l’autre, datée du 27 octobre 2014, l’a été par M. Y en tant que « président fondateur dûment habilité ». Il s’agit en outre de conventions signées par la fondation ORANGE entre le 27 janvier 2013 et le 16 février 2016 et visant à soutenir le projet intitulé « les détenus ont du talent », l’achat de matériel informatique et le projet imprimante 3D de la maison d’arrêt de Versailles. Le total des dons recueillis est de 137 745 euros. Celle datée du 8 janvier 2014 a été signée par M. Y en sa qualité mentionnée de président de l’association ECR à l’instar de celle du 24 février 2015 laquelle fait état de la qualité de « Président fondateur, dûment habilité » reconnue officiellement à M. Y (feuillet 460). Les investigations ont par ailleurs établi que la signature des conventions conclues avec la fondation ORANGE en 2014 et 2015 avait été accompagnée de la production d’une copie des statuts établis en 2013, certifiés conformes le 6 mars 2013 et n’ayant donc pas pris en considération la démission de M. Y intervenue le 31 décembre suivant (feuillet 527).

107 – Il ressort également des déclarations de Mme CK M en date du 6 octobre 2017 que celle-ci, en sa qualité d’assistante de direction recrutée le 24 août 2015 par l’association ECR, recevait ses instructions de M. Y et ce chaque semaine par l’intermédiaire de courriels comportant la liste des taches devant être accomplies (feuillets 444-445 ; 450). Ayant quitté ses fonctions en novembre 2016, l’intéressée a déclaré que M. Y « donnait les grandes lignes et les projets » et qu’elle travaillait « énormément avec lui ». Elle a ajouté : « du fur et à mesure, il a commencé à se mettre en retrait. Avant que je ne parte, M. Y prenait les grandes décisions, AY-DK pilotait et L et moi étions dans l’opérationnel ». Mme M estimait ainsi que celui-ci exerçait de fait les fonctions de directeur général de l’association ECR et que si Mme E prenait, « vers la fin », « plus de décisions », elle le faisait toutefois « avec le feu vert de N » (feuillet 447).

108 – De même, M. D R, conseiller juridique et stratégique au sein de l’association LES PRISONS DU CŒUR, a-t-il déclaré, le 7 mars 2018, que « M. N Y, un peu comme dans ECR, faisait un peu tout. C’est un type hors norme, avec une volonté de faire. J’étais admiratif de voir qu’il avait ses entrées, à l’Élysée et ailleurs » (feuillet 749). Il a ajouté, relativement à la prise de décision au sein de l’association ECR : « Compte tenu de la personnalité de N, c’est lui qui a inspiré 95 % des décisions de l’association. Il avait un pouvoir effectif dans tout ça » (feuillet 756).

109 – Enfin, M. BM P, trésorier de l’association ECR, a précisé, le 25 janvier 2018, recevoir les instructions de M. Y et que, sur la période allant de 2013 à 2015, ce dernier prenait les décisions importantes en concertation cependant avec Mme E. Il a également indiqué que le prévenu « portait complètement le projet » et « avait tous les réseaux » (feuillets 640-641).

110 – Lors de l’audience du 2 mars 2020, M. Y a expliqué que la création de la société AU CŒUR DES PRISONS – laquelle avait succédé à la société N Y CRÉATION – avait procédé de la volonté, exprimée au cours d’une conférence de presse en janvier 2010, de Mme AU DV-X de lui confier une mission visant à la prévention et au traitement du choc carcéral. Pour des raisons de communication médiatique et de modification de l’objet social lequel devait dorénavant intégrer la question de la prévention de la commission des infractions à la loi pénale, l’association LES PRISONS DU CŒUR était devenue l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE (ECR). M. Y a reconnu qu’il « faisait tout », s’occupait du mécénat et influençait « beaucoup la philosophie » sans toutefois

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prendre de décision. Il a de plus mentionné ne pas avoir « prêté attention » à la signature des conventions précitées en qualité de « président-fondateur » (notes d’audience, page 6). Par conclusions régulièrement déposées à l’audience du 4 mars 2020, il conteste cependant formellement « qu’il puisse être considéré comme président de paille après novembre 2013 compte tenu de la présidence successive de M. O et de Mme E et de l’exercice effectif du pouvoir aux mains de Messieurs P, H et Q ». M. Y soutient de plus que les personnes dont il rappelle les identités et qui furent membres actifs du bureau et du conseil d’administration (pages 63 et 64) n’étaient pas susceptibles de recevoir des ordres de sa part compte tenu «de son bagage scolaire, intellectuel et professionnel » et de son passé judiciaire. Il ajoute que les conventions et mandats liant M. Y, directement ou indirectement, à l’association ECR ont été voulues et rédigées par MM. Q et P et que les tous les projets ont été adoptés par l’assemblée générale. Lui-même ne se définit que comme un « membre essentiel de l’association » (page 67) prêtant officiellement son image et devenant « ambassadeur et son porte-parole ». M. Y indique également que la mention «président-fondateur » n’est que purement honorifique et qu’il détenait une délégation de signature l’habilitant à contracter au nom de l’association. L’intéressé mentionne également que le contrat d’apporteur de fonds et de conseils ainsi que le mandat dont il disposait comportait une mission de suivi financier des actions entreprises

111 – En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et des débats que si M. CL O a effectivement été nommé président de l’association ECR par décision de l’assemblée générale datée du 31 décembre 2013 (feuillet 639) avant de démissionner le 6 mai 2014 en raison d’un désaccord avec M. Y, Mme E a toutefois affirmé avec précision, le 29 mai 2018, avoir pris ses fonctions de présidente « le 31 décembre 2013 à 11h30» et n’avoir été rémunérée « qu’à partir de mai 2014 » (feuillet 1429). Elle n’a pu – ou pas voulu – expliquer la raison pour laquelle il résultait du procès-verbal en date du 31 décembre 2013 que M. O avait été nommé lui aussi président de l’association ECR et M. Y directeur général de cette personne morale. Confrontée aux déclarations précitées de Mme M et de M. P, Mme E s’est par ailleurs montrée par trop laconique en se révélant incapable d’apporter aux enquêteurs une contradiction pertinente et circonstanciée.

112 – En deuxième lieu, le Tribunal estime que la question fondamentale ne se situe pas dans le caractère prétendument collectif du processus décisionnel au sein de l’association ECR et dans la formalisation de la collaboration de M. Y à la réalisation de l’objet social dès lors qu’il n’entend pas s’arrêter aux apparences mais au contraire consacrer la réalité des faits.

113 – En troisième et dernier lieu, il résulte de tout ce qui précède et notamment des déclarations claires et suffisamment précises de M. Q, M. P et de Mme M que M. Y a, au moins jusqu’en 2015, conservé la présidence de fait de l’association ECR soit postérieurement à sa démission officiellement intervenue le 31 décembre 2013. Le caractère intuitu personae de cette structure dont l’existence et le fonctionnement étaient indissociables de la personnalité marquante et de l’entregent puissant de son démiurge démontre la réalité de l’omniprésence et de l’omnipotence de M. Y manifestées au sein de

7 – Qui ne sera pas entendu par les enquêteurs au cours de l’enquête préliminaire.

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l’association ECR. La circonstance – au demeurant non discutée – que le prévenu ait été entouré, au sein de l’association ECR, par des hommes et des femmes cooptés pour leurs compétences et leur dévouement ne démontre nullement l’absence de pouvoir décisionnel final exercé par M. Y mais établit, au contraire, la construction minutieuse et élaborée par l’intéressé d’une structure dont il était convenu, dès l’origine, que celui-ci en assurät la totale maîtrise en raison de son équation personnelle et de la vaste étendue de son réseau d’influences. Mme E a d’ailleurs elle-même reconnu, devant les enquêteurs, que « beaucoup de choses » lui avaient échappé, que cela l’affectait « beaucoup» (feuillet 1479) et déclaré, de manière encore plus limpide : « Je ne sais pas comment le dire. J’ai pris conscience que je n’étais pas Présidente de l’association. J’étais Présidente de droit, mais je n’avais que le titre. Vu ce que vous m’avez montré, j’en ai pris conscience (…) Je ne veux pas être celle qui trahit N. J’ai fait cela en toute bonne foi, je n’ai tiré aucun bénéfice de cette histoire, que des emmerdes visiblement. Je pense que je n’avais pas conscience de toute cela. Je ne porterai pas plainte contre lui, je ne le ferai jamais, c’est le père de mes enfants » (feuillet 1480). Quant à M. Y, il a également admis, le 14 novembre 2018, qu’il prenait «la majeure partie des décisions importantes » et était à l’origine de « toutes les grandes orientations » (feuillets 1394- 1395).

b) les versements de fonds opérés par l’association ECR au bénéfice de la SARL ACÇDP (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) dont M. Y était l’unique gérant de droit :

114 – Il ressort du procès-verbal de convocation devant le tribunal assorti d’un contrôle judiciaire en date du 21 mai 2019 et concernant M. Y que, selon l’autorité de poursuites, le délit d’abus de confiance commis au préjudice de l’association ECR vise l’octroi à la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU COEUR DES PRISONS) de fonds représentant 54 à 61 % du produit des subventions reçues par l’association étant précisé que ces versements représenteraient le paiement de factures émises par la SARL AU CŒUR DES PRISONS et portant sur des prestations de service réalisées par M. Y au nom et pour le compte de l’association. La prévention vise ensuite, après un premier paragraphe à caractère introductif comportant, à ce titre, la mention « et notamment », quatre séries de fait.

c) le paiement du solde d’une facture initialement adressée à l’association LES PRISONS DU COEUR le 15 mars 2013 :

115 – Il ressort de l’analyse de la comptabilité de l’association ECR conjuguée à celle de la société ACPD qu’au cours de l’année 2013, la SARL ACDP a œuvré pour la publication du supplément relatif à l’action de l’association LES PRISONS DU CŒUR publié dans le journal MÉTRO du 28 mars 2013. En 2013, trois factures se sont ainsi rapportées à cette publication pour un montant total TTC de 233 548, 60 euros. Parmi elles, figure la facture n° 2013-02-103 du 15 mars 2013 d’un montant TTC de 142 204, 40 euros initialement adressée à l’association LES PRISONS DU CŒUR et refacturée à hauteur de la somme de 71 012, 20 euros à l’association ECR au moyen de la facture n° 2013-04-04 du 8 avril 2013 en raison du partage par moitié de cette prestation du fait de la dissolution de l’association LES PRISONS DU CŒUR. Il a de plus été observé que la facture du 15 mars 2013 demeurait due dans son intégralité dans le compte client de l’association LES PRISONS DU CŒUR dès lors que la SARL ACDP n’avait pas procédé à la rectification de la facturation initiale. S’agissant du règlement de cette facture du 15 mars 2013, des inexactitudes entre les règlements mentionnés sur celle-ci sont apparus. Ces derniers s’élevaient à la somme de 74 000 euros alors que l’association LES PRISONS DU CŒUR n’avait versé que la somme de 64 845, 56 euros. En outre, les paiements intervenant dans le compte

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client LES PRISONS DU CŒUR et figurant au sein de la comptabilité de la SARL ACDP en règlement de cette facture ont été identifiés au nom de l’association ECR, entre le 9 avril et le 10 décembre 2013, à hauteur de la somme de 58 716, 60 euros. Il en a donc déduit que ces règlements n’étaient pas comptabilisés de manière symétrique dans les écritures comptables de la SARL ACDP (compte client ECR) et dans celles de l’association ECR (compte fournisseur ACDP) (cf. NC, page 14). Au total, en refacturant pour moitié l’association ECR à hauteur de la somme de 71 012, 20 euros, la SARL ACDP est suspectée d’avoir fait peser sur elle des règlements indus puisque cette même prestation avait été réglée en partie à hauteur de 123 562, 16 euros par l’association LES PRISONS DU CŒUR (64 845, 56 euros) et l’association ECR (58 716, 60 euros). Il est par suite apparu que l’association ECR avait supporté près du double du règlement de cette facture. En outre, en qualité d’annonceur, la SARL ACDP a appliqué à l’association ECR une commission de 30 % sur la page 12 contenant une publicité de la société ORANGE. Cette page a préalablement été facturée le 18 février 2013 à FRANCE TELECOM pour un montant TTC de 20 332 euros. Le coût de cette page étant estimé par la SARL ACDP à 17 000 euros HT, la surfacturation appliquée a pu être estimée à la somme de 5100 euros HT (30 % de commission de 17 000 euros) soit 6099, 60 euros TTC. Ainsi, il a été constaté des règlements forfaitaires et irréguliers correspondant rarement aux factures émises ainsi qu’une absence de réciprocité des écritures et de concordance des soldes clients et fournisseurs des deux entités. Il est donc allégué par le Ministère public que la SARL ACDP a surfacturé de la sorte l’association ECR d’une somme de 58 716, 60 euros majorée de celle de 13 331, 28 euros représentant le solde débiteur du compte client LES PRISONS DU CŒUR et de celle de 6099, 60 euros dans le cadre de la facturation du supplément MÉTRO de mars 2013, soit une somme de 78 147, 48 euros (cf. NC, page 15).

116 – Sur ce point, M. Y soutient que, « dans le cadre de la fermeture de l’association LES PRISONS DU CŒUR, Monsieur R a souhaité que la nouvelle association achète, pour prévenir tout contentieux juridique, le droit d’utiliser les travaux réalisés par la société AU CŒUR DES PRISONS et les droits détenus par celle-ci pour les suppléments de presse réalisés antérieurement dont les maquettes, les interviews, les photographies etc… Îl ressort des pièces du dossier que l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE a effectivement repris l’intégralité de la communication réalisée par AU CŒUR DES PRISONS pour les PRISONS DU COEUR pour le supplément MÉTRO de 2013 dans le cadre de la réalisation de son propre supplément presse LE PARISIEN de 2014, aucun « numéro 0 » n’ayant ainsi par exemple été facturé le 11 mars 2014 (voir facture 2014-03-101 au dossier) » (page 106 de ses conclusions).

117 – Toutefois, il doit être constaté que le rachat allégué ne figure nullement dans la convention de dévolution du patrimoine conclue le 18 juillet 2013 entre l’association LES PRISONS DU CŒUR et l’association ECR et qu’aucun élément du dossier ne justifie le fait que la SARL ACDP ait refacturé, dans les conditions susdécrites, l’association ECR laquelle a donc ainsi supporté une dette indue d’un montant de 78 147, 48 euros. Le Tribunal juge ainsi que le règlement de cette dette, à l’initiative de M. Y en sa qualité de dirigeant de l’association ECR et au bénéfice de sa propre société ACDP dont il était l’unique ayant droit économique, caractérise un usage abusif des fonds de l’association ECR dans l’intérêt exclusif du prévenu lequel doit donc être regardé comme s’étant comporté ainsi comme le véritable propriétaire des sommes considérées.

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118 – M. Y sera par suite déclaré DL du délit d’abus de confiance s’agissant du paiement de la facture dont s’agit du 15 mars 2013.

d) le règlement de notes de frais établie dans le cadre de l’activité de l’intéressé exercée au sein de ladite SARL ACDP :

119 – Il ressort des pièces du dossier et notamment de la note comptable en date du 9 janvier 2019 (pages 36 et 37) que certaines dépenses effectuées par M. Y au moyen de sa carte BF BG ont fait l’objet d’un double remboursement par la SARL ACDP et l’association ECR.

120 – Ainsi, il a été constaté l’existence de quatre notes de frais relatives à des dépenses exposées par M. Y, acquittées au moyen des instruments de paiements rattachés à la SARL ACDP et présentées à nouveau, pour remboursement, à l’association ECR (cf. NC, pages 36 et 37) :

» – note de frais du 23 mai 2013 à hauteur de la somme de 3446, 85 euros comprenant des dépenses de loisirs sportifs, de transports en avion et de location de véhicule comptabilisées respectivement en comptes 623400 « Cadeaux », 625100 « Foyages et déplacements» et 613510 «Location de véhicule » ;

+ – note de frais du 6 juin 2013 à hauteur de la somme de 1080, 73 euros comprenant des dépenses de location de véhicule, de transports en avion et des frais de bouche ;

: – note de frais du 31 juillet 2013 à hauteur de la somme de 546, 09 euros comprenant des dépenses de restaurant :

» – note de frais du 9 septembre 2013 à hauteur de la somme de 1386, 05 euros comprenant des frais transport ferroviaire et des dépenses de restaurant ;

+ – note de frais du 30 octobre 2013 à hauteur de la somme de 628, 14 euros comprenant des frais de bouche et des frais de transport en taxi.

Soit un montant total de 7087, 86 euros.

* * *

121 – M. Y n’a fourni aucune explication précise et cohérente s’agissant de cette double prise en charge. Enregistrées en tant que créances de M. Y dans la comptabilité de la SARL ACDP au titre des frais professionnels, ces dépenses ne pouvaient être remboursées à l’intéressé par l’association ECR sans vérification d’un acte de détournement opéré au préjudice de cette demière personne morale par son dirigeant légal lequel a, de la sorte, manifesté sa volonté de se comporter en qualité de propriétaire des fonds de l’association considérée.

122 – Le prévenu sera donc déclaré DL du délit susanalysé d’abus de

confiance s’agissant du règlement de notes de frais établies dans le cadre de l’activité de l’intéressé exercée au sein de ladite SARL ACDP.

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e) le règlement de frais de conception et de rédaction attribués à la SARL ACDP :

123 – Le Ministère public reproche ici à M. Y d’avoir fait supporter à l’association ECR qu’il dirigeait de fait des frais de conception et de rédaction prétendument supportés ou réalisés par la SARL AU CŒUR DES PRISONS devenue AU CENTRE DES PROJETS ainsi que des commissions alors que ces prestations de services étaient en réalité exécutées par des tiers directement rémunérés par l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE.

, a) les suppléments de presse parus dans les journaux METRO, LE POINT et AUJOURD’HUI EN FRANCE :

124 – Sont tout d’abord visées les factures suivantes concernant des suppléments de presse promotionnels.

125 – La facture n° 2013-02-103 du 15 mars 2013 relative au supplément MÉTRO du 28 mars 2013 fait état de «frais de conception réalisation graphisme » pour un montant de 47 500 euros HT. Dans les charges de la SARL ACDP, deux dépenses susceptibles de se rapporter à ce supplément ont été recensées :

+ – le 11 janvier 2013, M. BH BV a facturé à la SARL ACDP la somme de 2546, 60 euros TTC pour la création et la réalisation du n° 0 du magazine « LES PRISONS DU CŒUR », création de la charte graphique, maquette de 44 pages, adaptation déclinaison charte Métro (feuillets 1045-1046). Sa prestation a été comptabilisée en charge dans le compte 622600 « honoraires » à hauteur de 2380 euros HT ;

+ la prestation de M. AX BW, auteur illustrateur indépendant, comptabilisée pour une somme de 700 euros hors taxes enregistrée le l" mars 2013 en compte 622900 « droits d’auteur ».

126 – Le montant des frais de conception, réalisation et graphisme refacturés par la SARL ACDP est apparu 95 fois supérieur au coût de cette prestation. Parallèlement, l’association ECR a comptabilisé en charges, sur l’exercice clos en 2014, les prestations identifiées comme relevant de la conception-réalisation du supplément du journal MÉTRO dont le montant total s’est élevé à la somme de 8088, 65 euros. Par suite, la SARL ACDP a facturé des frais de conception, réalisation et graphisme au tarif de 56 810 euros TTC qu’elle avait pris en charge pour un faible montant ainsi que des dépenses ayant directement pesé dans les comptes de l’association ECR à hauteur de 8088, 65 euros (cf. NC, pages 15 et 16).

127 – Une technique analogue a été vérifiée s’agissant du supplément du Point du 20 juin 2013. Ainsi, la facture n° 2013-07-101 du 31 juillet 2013 relative à ce supplément fait état de « frais de conception réalisation graphisme » pour un montant de 25 500 euros HT alors qu’aucuns frais de cette nature n’est apparu au sein de la comptabilité de la SARL ACDP. Il était ainsi établi que cette dernière a facturé l’association ECR de frais jamais engagés pour un montant de 30 498 euros TTC alors que ces mêmes frais ont été pris en charge directement par l’association ECR à hauteur d’un montant de 9982, 23 euros HT.

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Pn

128 – De même, la facture n° 2014-03-101 du 11 avril 2014 relative au supplément LE PARISIEN et AUJOURD’HUI EN FRANCE du 11 mars 2014 mentionne des frais de conception réalisation graphisme pour un montant de 37 500 euros HT (45 000 euros TTC) alors que la page 11 de ce journal précise pourtant que ledit supplément a été réalisé par son propre service supplément.

129 – Le Ministère public estime donc que la SARL ACDP a, de la sorte, surfacturé à l’association ECR des frais de conception, réalisation et graphisme à hauteur de :

+ 56 810 euros TTC pour le supplément MÉTRO du 28 mars 2013 30 498 euros TTC pour le supplément LE POINT du 20 juin 2013 + 45 000 euros TTC pour le supplément LE PARISIEN du 11 mars 2014

130 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, M. Y conteste toute double facturation. Il rappelle que l’une des missions essentielles des associations LES PRISONS DU CŒUR et ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE était la communication sur les thèmes de l’incarcération et de la réinsertion et que le coût d’entrée du marché pour la publication d’une page en quadrichromie dans les journaux LE POINT, LES ÉCHOS, LE PARISIEN ou ELLE est respectivement de 41 900 euros, 73 000 euros, 75 500 euros et 43 300 euros (page 96). M. Y précise par ailleurs que le coût du marché pour un supplément de 12 pages dans l’une de ces publications nationales varie de 502 800 à 906 000 euros.

131 – Il explique en outre que, de 2013 à 2017, la SARL ACDP a été chargée par deux associations (LES PRISONS DU CŒUR et ECR) de leur obtenir plusieurs pages dans les publications à grande diffusion et ce à un coût inférieur à celui du marché. Il s’agissait de convaincre le directeur de la publication d’accepter l’insertion souhaitée à un prix modéré et ce après présentation d’une maquette dénommée « muméro 0 ou 00 » conçue par la société ACDP (page 97).

132 – Après avoir décrit l’intégralité de ce processus de négociation, le prévenu indique que la société ACDP facturait les associations précitées pour la réalisation de prestations auprès des groupes de presse, des entreprises mécènes et l’exécution des missions de conception et de réalisation des suppléments de presse (page 101).

133 – S’agissant des factures précitées des 28 mars, 11 avril et 31 juillet 2013, M. Y conteste le fait que les prestations de « conception, réalisation et graphisme » facturées par la société ACDP à l’association ECR aient été similaires à celles effectuées par le journal LE PARISIEN et par le prestataire ISEGORIA avant d’être facturées par ceux-ci à ladite association. Il indique avoir étudié, corrigé et complété les prestations considérées et produit des correspondances électroniques échangées avec M. S représentant la société ISEGORIA et qui s’entretenait régulièrement avec le représentant de la société ACDP. M. Y soutient de plus avoir réalisé seul toutes les prestations nécessaires à la réalisation des numéros 0. Il allègue par suite que doivent être distinguées les prestations réalisées en collaboration avec des tiers et celles exécutées seul (pages 102 et 103).

134 – M. Y avance de plus que, quelle que soit la facture invoquée, ses prestations ont toujours permis aux associations de publier des suppléments presse avec une économie substantielle de 50 % par rapport au prix du marché. Il rappelle que les prestations assurées par la société ACDP incluaient, outre celle de rédaction et de graphisme de ces prestataires, des prestations de création, de prospection et

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négociation en adéquation avec celle des agences de marketing et de communication. Il ajoute que la seule facture établie par la société ISEGORIA du 2 avril 2014 et d’un montant de 18 600 euros TTC (feuillet 1058) ne peut constituer un élément de référence incontestable compte tenu de la prestation réalisée (page 105).

135 – S’agissant des commissions versées sur la base des pages de publicité achetées par les sociétés AXA et ORANGE ainsi que des commissions sur des dons représentés pour des achats d’espace, M. Y estime qu’il ne s’agit pas des mêmes prestations et que ne saurait donc être vérifiée une double facturation (page 106).

Ed + k

136 – Le Tribunal juge ici, au vu de l’ensemble des éléments susanalysés, que la preuve de l’absence de réalisation effective de prestations de service par la SARL ACDP n’a pas été rapportée par le Ministère public au cours des débats lequel n’a pas répondu aux arguments sérieux avancés par la défense dans ses conclusions écrites. La juridiction ne peut ainsi écarter, au vu des pièces du dossier, la thèse du caractère réel et opérant des interventions de M. Y dans le cadre de la négociation, de la conception et de la diffusion des suppléments presse dont s’agit, ces prestations étant matériellement distinctes de celles exécutées par les tiers. À ce titre, les déclarations de M. CM CN en date du 29 juin 2018, représentant l’EURL ISEGORIA ne peuvent être considérées comme décisives en raison de leur caractère insuffisamment précis et circonstancié. Celui-ci n’a pu, en effet, préciser la durée d’exécution de sa mission – qu’il a largement estimée entre 3 et 8 semaines (feuillet 1053) – ni indiqué si M. S avait ou non rencontré M. Y (feuillet 1054). Enfin, le Tribunal ne peut exclure l’interprétation selon laquelle le libellé « conception, réalisation et graphisme» incluait un processus préalable de négociation conduit par la SARL ACDP et qui appelait une rémunération distincte de celle des autres prestataires. Il observe d’ailleurs que M. DS-DX DY, journaliste employé par le quotidien LE PARISIEN, a reconnu, au cours de son audition en date du 25 juin 2018, avoir été en relation avec Y et évoqué sa participation « aux discussions de départ, pour définir les angles » (feuillet 1029), De même, M. CO CP, ancien journaliste au POINT, a également fait état, le 11 juin 2018, de l’existence d’une « co-création » dès lors que M. Y disposait de son projet de dossier et lui avait adressé des instructions (feuillet 911).

137 – Par suite, M. Y sera, en l’absence de démonstration des éléments constitutifs de ce délit, EB EA du chef d’abus de confiance s’agissant des suppléments de presse publiés dans les journaux MÉTRO, LE POINT et le PARISIEN AUJOURD’HUI EN FRANCE.

B) le projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de Fresnes (94):

138 – Il ressort des pièces du dossier qu’en 2014, la SARL ACDP a œuvré, pour le compte de l’association ECR, en faveur de la réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de Fresnes (94). Comptablement, les prestations et achats de matériels relatifs à la réalisation de ce projet ont été enregistrés en compte 604100 « travaux Fresnes » pour un montant total de 202 915, 74 euros. Une première facture n° 2014- 07-101 datée du 1" juillet 2014 et se rapportant à la « réalisation de la coordination, de la communication et conception/création du projet de réhabilitation du plateau sportif à la maison d’arrêt de Fresnes» et une seconde n° 2014-09-104 du 1" septembre 2014 relative à la « réalisation de la coordination, de la communication et de la sous-traitance partielle pour les travaux de Fresnes » à hauteur de la somme de

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20 767, 07 euros TTC concermment ce projet. Le montant total de cette opération s’est élevé à la somme de 411 625, 95 euros.

139 – La facture précitée du 1" juillet 2014 mentionne des honoraires de « conception et création du projet » d’un montant de 27 500 euros HT et des honoraires de mise en œuvre du projet à hauteur de 96 900 euros HT. Il a été retrouvé dans la comptabilité de l’association ECR, au titre de l’exercice clos en 2015, trois factures des 30 septembre, 31 octobre et 30 novembre 2014 émises par M. BX BY relatives à des missions de conseil et d’assistance ainsi qu’une note d’honoraires en date du 30 novembre 2014 établie par la société de recherches et d’études architecturales SA CQ ARCHITECTURE et ayant trait à un contrat de maîtrise d’œuvre à hauteur de la somme de 23 500 euros TTC. Le montant total de ces factures est de 24 500, 36 euros.

140 – Le Ministère public soutient ici que les prestations de suivi de chantiers, de conception et de création facturées les 1« juillet et 1 » septembre 2014 par la SARL ACDP à l’association ECR avaient déjà été financièrement assumées par cette dernière et estime, par suite, qu’il y a eu là double facturation ayant appauvri l’association ECR et simultanément enrichi la SARL ACDP dirigée par M. Y.

141 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, celui-ci prétend qu’aucune pièce du dossier ne vient utilement contester l’existence des prestations énumérées et détaillées par les deux factures litigieuses et que celles-ci ne visent effectivement que la seule participation à la réunion de chantier à Fresnes (94), le 23 mai 2014. Il affirme en outre que la seule déposition de M. T ne peut démontrer l’insuffisance manifeste de son travail et est donc dépourvue de valeur probante (page 110). M. Y rappelle de plus le contenu des actions qu’il a réalisées dans le cadre de la conception et la mise en œuvre du projet de rénovation dont s’agit entre la présentation du projet à Mme la Garde des Sceaux intervenue le 5 mars 2013 et la signature du procès-verbal de réception de chantier dressé le 4 août 2014 (pages 110 et 111).

142 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, Mme E soutient, pour sa part, que la facture établie par le cabinet CQ ARCHITECTURE représenté par M. T et affichant un montant de 23 500 euros TTC ne correspond pas aux mêmes prestations que celles de conception et d’études de projet réalisées par la société ACDP (page 28). Concernant la seconde facture du 1" septembre 2014, elle estime qu’elle est également justifiée au titre du règlement de problèmes résiduels survenus entre juillet et septembre. Mme E ajoute que ni M. P, ni M. U ni M. V n’ont rien trouvé d’anormal s’agissant de ces facturations (page 30).

Ed * *

143 – Au cas présent, il convient de constater que le seul témoignage à charge invoqué par l’autorité de poursuites est celui de M. CR T (cf. NC, page 19). Force est toutefois de constater que celui-ci, entendu le 13 septembre 2018 par les enquêteurs, n’a toutefois pu faire montre de précision et de certitude. Il n’a notamment pas été à même, en sa qualité de maître d’œuvre, de déterminer le mode contractuel utilisé se bomant à penser « que ce chantier avait été validé avec la prison » (feuillet 1138) et que son cabinet bénéficiait de la confiance du directeur de l’établissement pénitentiaire et des services techniques de l’administration, circonstance qui eût, selon lui, rendu inutile tout octroi d’une autorisation administrative (feuillet 1140). L’intéressé a par ailleurs déclaré que M. Y avait « participé au programme en

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ce sens qu’il a eu l’idée de ce chantier et a participé à des réunions avec l’administration pénitentiaire pour le définir » et assisté à une réunion de chantier sur les quinze organisées entre le 14 mai et le 3 juillet 2014 (à savoir la 5e tenue le 23 mai 2014) (feuillet 1143).

144 – Le Tribunal juge par suite que la seule déposition de M. T ne saurait, à elle seule, démontrer ni l’absence de travail effectif accompli par M. Y telle que détaillée par la facture du 1" juillet 2014 ni la surfacturation de celui-ci. La juridiction de jugement ne peut donc affirmer, avec le degré de certitude requis, que les prestations facturées par la SARL ACDP à l’association ECR n’aient pas été effectivement réalisées par le prévenu lequel a déclaré avoir ainsi « tenu le crayon » de l’architecte (feuillet 1408). Elle constate notamment que M. Y n’a pas été confronté à M. T et que, par suite, aucune contestation pertinente de ses allégations ne lui a été soumise. En outre, le suivi de l’exécution du chantier n’a pas davantage été utilement démenti par le Ministère public, la SARL ACDP n’ayant facturé qu’une seule participation à une réunion dédiée. Il doit par ailleurs être observé que M. T a admis que des reprises postérieurement à la livraison du chantier était «une chose courante» (feuillet 1138). Enfin, l’absence d’audition de M. CS CT, alors directeur de la maison d’arrêt de Fresnes (94), au cours de l’enquête préliminaire préjudicie indéniablement à la manifestation de la vérité et à la démonstration de la culpabilité des prévenus.

145 – Par suite, M. Y et, par voie de conséquence, Mme E seront EB relaxés du chef d’abus de confiance s’agissant du projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de Fresnes (94).

f) la prise en charge de la rémunération de Mme I :

146 – Le Ministère public soutient que M. Y et Mme E ont fait supporter, en leur qualité respective de dirigeant de fait et de dirigeante de droit, à l’association ECR, entre mars 2013 et avril 2016, la rémunération de prestations réalisées au bénéfice de la SARL AU CENTRE DES PROJETS anciennement ACDP pour un montant minimum de 27 000 euros.

147 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, M. Y, tout en reconnaissant la réalité des prestations assurées par Mme I au profit de l’association ECR (établissement de pièces comptables, gestion administrative courante, relations avec l’expert-comptable et le commissaire aux comptes), avance que l’intéressée était « en droit d’offrir ses services à l’association ECR en échange d’une rémunération » et qu’il n’est pas responsable de l’erreur de facturation commise. Il indique en outre n’avoir ainsi pu augmenter les charges d’exploitation susceptibles de réduire le bénéfice imposable de la société ACDP (page 89)

148 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, Mme E confirme elle aussi le « rôle essentiel » de Mme I et son travail « sans relâche » au profit de la société ECR (page 32). Elle fait de plus état d’une pratique ancienne et bien établie entérinée, consciemment ou non, par tous et notamment le trésorier M. P.

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149 – Il ressort des pièces du dossier et notamment de l’audition de Mme I que celle-ci a déclaré, le 12 mai 2017, qu’elle facturait essentiellement l’association ECR y compris pour le règlement de prestations réalisées au bénéfice de la SARL ACDP, M. Y l’ayant sollicité en sa qualité de micro-entrepreneur sur la base d’un forfait mensuel de 1500 euros net (feuillet 211).

150 – Entendu le 19 septembre 2017, M. K a indiqué que cet état de fait pouvait s’expliquer par «l’historique des relations entre Mme W et M. Y » (feuillet 315) quand M. P a pour sa part protesté de sa parfaite ignorance (feuillet 650).

151 – Le Tribunal juge ici qu’aucune pratique, quelle que soit ancienneté et son acceptation commune, ne peut légalement justifier qu’une association assume financièrement les dépenses de gestion et de secrétariat exposées au bénéfice d’une société commerciale et ce en dépit de toute convention d’assistance administrative conclue entre les deux personnes morales. Ladite pratique caractérise l’existence d’un détournement commis délibérément par M. Y et Mme E lesquels ne peuvent utilement se retrancher ni derrière une prétendue erreur commise par Mme I ni derrière l’existence d’une tolérance traditionnelle lesquelles demeurent sans influence sur la parfaite caractérisation de l’infraction.

152 – Par suite, M. Y et Mme E seront chacun déclarés DL du délit d’abus de confiance qui leur est reproché s’agissant de la prise en charge de la rémunération de Mme I au préjudice de l’association ECR dont il assurait, de fait et de droit, la direction.

k * La

152/1 – Il sera précisé ici que le Tribunal n’a pas considéré que les mouvements de fonds susévoqués étaient répréhensibles pour le seul motif qu’ils représentaient 54 à 61% (ou 50 à 59 % selon les préventions) du produit des subventions reçues par l’association. Il a donc décidé de procéder à un examen casuistique après avoir jugé qu’une telle proportion n’étant pas, en elle-même, l’expression de la caractérisation du délit d’abus de confiance dans le milieu associatif, il convenait dès lors de procéder à une analyse structurelle de celle-ci. Par suite, la prévention concernant Mme E étant construite de telle manière que le paragraphe mentionnant les taux considérés ne revêt pas – à l’inverse de celui présent dans l’acte de poursuites concernant M. Y – un caractère introductif, celle-ci sera dès lors EB relaxée au titre de cette partie de la prévention la visant.

2°) Sur les faits commis au préjudice de la société IKF HOLDING :

153 – Le Ministère public estime que des dépenses personnellement exposées par M. Y ont été prises en charge par la société ACDP dont il était le représentant légal et ce à hauteur de la somme de 678 985, 60 euros au titre des exercices 2013 à 2016 (cf. supra $ 54 et suivants du présent jugement).

154 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience du 4 mars 2020, le prévenu soutient que la société IKF HOLDING a décidé de supporter sa filiale et le gérant de cette dernière en leur accordant des prêts sous la forme d’apports à son compte courant d’associé et ce afin de financer les dépenses personnelles et professionnelles de l’intéressé (page 129). Il ajoute que l’enquête préliminaire a confirmé l’accord de M. Z lequel n’a finalement que contesté les proportions excessives prises par l’utilisation personnelle des fonds de sa société (page 130). M. Y allègue au

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total que M. Z, en le laissant employer les fonds de la personne morale pour ses besoins personnels « sans jamais fixer de limites ou d’interdiction et ce alors même que Monsieur AA l’informait de cette utilisation » lui a laissé croire « qu’une telle utilisation était autorisée» (page 131). Il conclut dès lors à l’absence de caractérisation du délit d’abus de confiance en l’absence de démonstration de l’élément matériel et de l’élément intentionnel de cette infraction.

Ed Ed *

155 – En premier lieu, le Tribunal constate qu’aucune contestation pertinente n’a été opposée par la défense relativement au caractère personnel des dépenses engagées et au montant total de ces dernières tel que déterminé par l’autorité de poursuites au terme de ses investigations. Par suite, il valide ledit montant comme suit (NC, annexe 7) :

Total des dépenses personnelles prises en charge par la société

Dépenses inscrites au débit du compte courant d’associé IKF

Exercice 2013 242 – 343, 48 – euros (évaluation basse) 248 264, – 40 – euros (évaluation haute)

rExercice 2014 319 192, – 57 – euros (évaluation basse) 429 – 041, – 58 – euros (évaluation haute)

Exercice 2015 343 847, 77 – euros (évaluation basse) 383 577, – 06 – euros (évaluation haute)

Exercice 2016 409 – 903, – 05 – euros (évaluation basse) 439 – 057, – 77 – euros (évaluation haute)

Total 2013-2016 1 315 286, 87 (évaluation basse) 1 499 940, 81 (évaluation haute)

158 492, 79 euros

175 142, 06 euros

146 992, 03 euros

198 358, 72 euros

678 985, 60 euros

156 – En deuxième lieu, le Tribunal juge que le caractère personnel des dépenses précitées est établi par les pièces du dossier. En effet, outre les dépenses formellement reclassées comme étant personnelles et débitées ainsi du compte courant de l’associé IKF HOLDING, celles relatives aux pensions alimentaires versées aux filles de M. Y, les versements opérés au bénéfice de Mme CA G® et de Mme

8 – Entendue par les enquêteurs le 28 septembre 2017, Mme G a expliqué avoir été en couple avec M. Y de décembre 2012 à mai 2015 (feuillet 403). Elle a confirmé s’être rendue, « dès qu’il faisait beau», à la villa HELEN ROC en présence de M. Y lequel assumait toutes les dépenses liées à ce séjour (feuillet 405). Mme G a par ailleurs indiqué que l’intéressé lui avait remis une carte BF BG à son nom et confirmé l’activité photographique de M. Y (feuillets 407

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[…]

BB BC DI DJ, respectivement ex-compagne et compagne du prévenu, les retraits d’espèces, les dépenses réalisées au bénéfice de la villa HELEN ROC et du logement personnel de M. Y, les remboursements de frais BF BG (feuillets 95-96 et 348) ainsi que les dépenses consacrées à l’activité photographique de M. Y dont le caractère au moins EB pornographique ne peut être sérieusement discuté – et, à ce titre, évidemment et strictement incompatible avec l’activité déclarée de la SARL ACDP – ne peuvent nullement être considérées comme ayant été exposées conformément à l’intérêt de cette personne morale dont l’objet social déclaré était les « études et conseils, création de mobilier, assistance et soutien marketing, prestations de services, prestations intellectuelles ayant trait à l’image et à l’écrit, et plus généralement toutes opérations Javorisant son extension » (feuillet 779).

157 – En troisième lieu, il sera également jugé que l’utilisation de fonds présents sur le compte courant d’un associé par le dirigeant légal de la société commerciale considérée pour des motifs étrangers à l’intérêt de celle-ci constitue effectivement un acte de détournement, au sens des dispositions susrappelées de l’article 314-1 du code pénal, de biens qui avaient été remis, à titre précaire, à la société commerciale par le truchement de son dirigeant afin qu’il en fasse un usage déterminé, à savoir la valorisation économique et intellectuelle de la personne morale et ce conformément à son objet social déclaré.

158 – En quatrième et dernier lieu, la circonstance, à la supposer vérifiée, que M. Z ait, en parfaite connaissance de cause, consenti de la sorte, soit par l’intermédiaire du compte courant d’associé détenu par la société IKF HOLDING dont il était le dirigeant de droit au sein de la SARL ACDP, des prêts personnels à M. Y – ce que l’intéressé a d’ailleurs clairement contesté devant les enquêteurs en faisant mention des méthodes expéditives de son ami pour obtenir un soutien financier et en déclarant, le 13 juin 2018, n’avoir pas voulu « soutenir son train de vie personnelle » (feuillet 962) – n’est nullement de nature à justifier légalement le comportement du prévenu, un compte courant d’associé'* ne pouvant, en aucune

et 409).

9 – Lors de son audition en date du 21 novembre 2018, M. Z CU même M. Y de « bandit » (feuillet 1240).

10 Il sera rappelé ici qu’une société peut il est vrai bénéficier, de la part de ses CE ou actionnaires, de prêts ordinaires ou d’apports en compte courant dits comptes courants d’CE. Ces sommes mises à la disposition de la société ne constituent, en réalité, pas des apports au sens juridique du terme, mais un véritable crédit consenti par l’associé à la société, la créance de remboursement de ce crédit étant matérialisée par une écriture au crédit du compte ouvert entre la société et un ou plusieurs de ses CE. Il est d’ailleurs plus rigoureux de qualifier cet apport d’avance en compte courant. L’article L 312-2 du code monétaire et financier dispose, dans sa rédaction issue de l’article 76 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises : « Sont considérés comme fonds remboursables du public les fonds qu’une personne recueille d’un tiers, notamment sous la forme de dépôts, avec le droit d’en disposer pour son propre compte mais à charge pour elle de les restituer. Un décret en Conseil d’Etat précise les conditions et limites dans lesquelles les émissions de titres de créance sont assimilables au recueil de fonds remboursables du public, au regard notamment des caractéristiques de l’offre ou du montant nominal des titres. Toutefois, ne sont pas considérés comme fonds remboursables du public :1. Les fonds reçus ou laissés en compte par les CE en nom ou les commanditaires d’une société de personnes, les CE ou actionnaires, les administrateurs, les membres du directoire et du conseil de surveillance, les directeurs généraux et directeurs généraux délégués, les présidents de sociétés par actions simplifiées ou les gérants ainsi que les fonds provenant de prêts participatifs ;2. Les fonds qu’une entreprise reçoit de ses salariés sous réserve que leur montant n’excède pas 10 % de ses capitaux propres. Pour l’appréciation de ce seuil, il n’est pas tenu compte des fonds reçus

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circonstance, être utilisé, à titre habituel, pour financer les dépenses personnelles du dirigeant social et ce quand bien même la législation de la société autoriserait l’octroi de prêt à des personnes physiques. S’il est certes avéré que M. Z avait une connaissance partielle de l’emploi des sommes avancées par la société de droit suisse IKF HOLDING à la SARL ACDP, il n’en reste pas mois qu’aucun acte contractuel ne fait état d’une quelconque autorisation expressément consentie par M. Z à M. Y et tendant à l’utilisation des sommes litigieuses pour le financement des dépenses personnelles du second''. Il est de plus patent que cet emploi a mécaniquement réduit le montant de la créance détenue par la société IKF HOLDING sur la SARL ACDP et donc fait ainsi grief aux intérêts de celle-ci. Ce constat est corroboré par la circonstance que les prêts allégués ont été consentis à titre gratuit et sans prise d’une quelconque garantie. Ce faisant, le prévenu a clairement manifesté sa volonté de se comporter comme le véritable propriétaire des sommes considérées et d’utiliser le compte courant d’associé de la société IKF HOLDING comme un compte bancaire qui lui aurait été exclusivement dédié (feuillet 273). Un telle attitude n’a d’ailleurs pas laissé de porter atteinte au monopole bancaire précité consacré par les dispositions de l’article L 511-5 du code monétaire et financier (cf. note n° 2).

159 – Par suite, M. Y sera donc déclaré DL du délit d’abus de confiance commis au préjudice de la société IKF HOLDING, cette infraction étant caractérisée en tous ses éléments constitutifs.

3°) Sur les faits commis au préjudice de la SC PAPI :

160 – Le Ministère public indique ici que M. Y a reconnu avoir fait usage des moyens de paiement dont la SC PAPI était titulaire et ce à des fins personnelles. Il estime que la circonstance que les fonds utilisés aient provenu de M. Z est inopérante et que le prévenu a pratiqué, de manière systématique, une cavalerie de dépenses visant à assurer le financement de son train de vie personnel grâce à l’emploi direct ou indirect des instruments de paiement des sociétés PAPI et ACDP qu’il avait, en qualité de dirigeant, à disposition. Selon l’autorité de poursuites, l’usage des fonds ne pouvant être rattaché à l’activité ou l’intérêt de la société PAPI s’est établi, entre juillet 2013 et mars 2016, à la somme de 47 879 euros. De plus, elle fait valoir que plus de 500 000 euros issus d’un prêt consenti par M. Z à la SC PAPI ont été reversés à la SARL ACDP, M. Y en ayant par la suite fait une utilisation à des fins personnelles. Le Ministère public précise de plus que l’avenant au contrat de prêt initial autorisant l’affectation des sommes présentes au compte courant de l’associé SC PAPI a été obtenu de M. Z dans l’urgence et sans que celui-ci y accorde l’attention utile. Au total, il estime que l’opération consistant in fine à financer des dépenses personnelles du dirigeant par une succession de prêts et d’avances garanties par les actifs de la société constitue un usage abusif des biens de ladite personne morale et doit recevoir, s’agissant d’une société civile, la qualification d’abus de confiance.

des salariés en vertu de dispositions législatives particulières ». Avant cette réforme, les CE ou actionnaires devaient posséder au moins 5 % du capital social de la personne morale pour que soit admise cette exception au monopole bancaire de « réception de fonds remboursables du public » énoncé à l’article L 511-5 du même code. L’utilisation, dans des circonstances anormales, d’un compte courant d’associé porte ainsi atteinte audit monopole légal.

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Le 21 novembre 2018, M. Z a affirmé solennellement, « dans le blanc des yeux », ne pas avoir financé le train de vie personnelle de M. Y (feuillet 1236). Page 50 / 82

11°" Ch.]

161 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, M. Y rappelle que, le 27 septembre 2016, M. CI CJ a donné son accord pour avancer une somme de 1 500 000 euros à M. Z destinée à M. Y et la SC PAPI et que, le 26 octobre suivant, MM. Z et Y ont signé une convention aux termes de laquelle le premier s’engageait à prêter à la SC PAPI la somme de 1 500 000 euros aux fins de lui permettre de réaliser les opérations nécessaires au rachat de 51 % des parts sociales de la société 3MIMI et de faire procéder à tous les travaux nécessaires au sein de la villa HELEN ROC. Le prévenu mentionne également le fait que M. Z a finalement décidé de conserver la somme de 600 000 euros en raison de la mauvaise foi manifestée par le propriétaire et que lui-même a utilisé près de 500 000 euros afin de racheter le compte courant de l’associé détenant les 51 % précités, purger toutes les hypothèques et régler les dettes en cours de la SCI 3MIMIL. Il ajoute que M. Z ayant par la suite modifié les conditions du prêt accordé en stipulant que la somme considérée pouvait « être utilisée par la SC PAPI pour faire un ou plusieurs apports au compte courant d’associé de sa filiale ACDP », il a choisi d’affecter le reliquat non utilisé de la somme prêtée à la SARL ACDP dont la SC PAPI détenait plus de 50 % du capital et des droits (page 136). M. Y estime au total qu’à l’instar de la société IKF HOLDING, la SC PAPI a contribué, par ses apports enregistrés à son compte courant, au développement et à la réalisation des projets de sa filiale dans le cadre de l’intérêt social déjà défini et expliqué (page 137).

Ed * *

162 – Au cas présent, l’analyse des comptes bancaires de la SC PAPI, réalisée sur la période allant de la fin de l’année 2016 au premier semestre de l’année 2017 a permis d’établir que les ressources étaient principalement constituées de versements réalisés par M. Z tandis qu’une somme de 548 000 euros avait été versée sur les comptes de la SARL ACDP. Les fonds mis à la disposition de cette dernière par la SC PAPI provenaient d’un prêt consenti, à titre personnel, par M. Z selon une convention datée du 26 octobre 2016 et prévoyant la remise d’une somme de 1 500 000 euros, une date de remboursement fixée au 30 avril 2018 et un taux d’intérêt de 0, 4 % l’an (feuillets 463-465). Cet emprunt devait officiellement autoriser l’acquisition par la SC PAPI des parts sociales détenus par M. A dans la société 3MIMI, le remboursement du compte courant d’associé détenu par M. A au sein de la même personne morale, l’apurement du passif accumulé par cette dernière et l’octroi d’une avance de trésorerie au bénéfice de la SC PAPI afin de lui permettre de réaliser les travaux nécessaires à la conservation du bien (feuillets 466-470). Il sera rappelé ici que cette société 3MIMI a été constituée entre M. A (52%) et la SC PAPI (42%) laquelle était elle-même détenue par M. Y à hauteur de 0, 05 % et ses deux filles (99, 95 %) et ce pour les besoins de l’acquisition de la villa HELEN ROC auprès d’une SCI familiale de M. Y laquelle était sous la menace d’une saisie par l’administration fiscale.

163 – Ladite villa a été donné à bail, dès l’origine, à la société BRAIN PLEASURE CREATION (BPC) appartenant à M. Y (ancienne dénomination de la SARL ACDP), les loyers perçus devant permettre le remboursement du prêt bancaire accordé à la SCI pour l’acquisition du bien. Toutefois, la société BPC ne s’est pas acquittée des sommes dues. Il a par ailleurs été observé que les écritures comptables concernant la SARL ACDP recelaient une créance détenue sur la SCI 3MIMI alors qu’aux termes du bail considéré et des accords conclus en 2013 par MM. A et Y, le coût des travaux réalisés demeuraient à la charge de la société ACDP. Il ressort par ailleurs

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d’un courriel échangé en mars 2017 avec Mme I que M. Y entendait maintenir cette créance et l’enregistrer dans le comptabilité de la SCI 3MIMI dès qu’il en aurait retrouvé la direction.

164 – A la suite de la déchéance du prêt intervenu en 2015, un accord a été conclu, en mai 2017, en vue du rachat par la SC PAPI des parts détenues dans le capital de la SCI 3MIMI par M. A ainsi que du remboursement du solde de son compte courant d’associé pour un montant de 499 000 euros (feuillets 530 ; 542-550 ; 562-565 ; 682- 685 ; 899 ; 904). En contrepartie de ce prêt, un nantissement des parts sociales de la SCI 3MIMI déjà détenues par la SC PAPI et issues de l’acquisition des parts sociales de M. A a été consenti au profit de M. Z. Toutefois, M. A a protesté de l’impossibilité de constituer un tel nantissement sans son accord (feuillet 549).

165 – Le 12 novembre 2016, un avenant signé entre les parties a stipulé que les fonds pouvaient être utilisés pour procéder à un ou plusieurs apports au compte courant de la SARL ACDP. Le 29 janvier 2018, un second avenant a porté extension de la durée du prêt (feuillets 982-983).

166 – Au total, sur la somme de 900 000 euros versée, 548 000 euros ont été reversés sur les comptes de la SARL ACDP entre novembre 2016 et juin 2017 et portés au crédit du compte courant d’associé que celle-ci détenait. Le 2 novembre 2016, un chèque d’un montant de 82 000 euros a été émis par la SC PAPI à l’ordre de la SARL ACDP. Ce chèque a été signé par M. Y dix jours avant la signature de l’avenant du 12 novembre 2016 précité.

167 – En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l’analyse des dépenses effectuées au moyen de la carte bancaire de la SC PAPI a permis de relever l’existence de frais de restauration (notamment un repas au restaurant le Jules Veme à hauteur de 470 euros le 18 novembre 2014), de luxe auprès des enseignes HERMES (895 euros) et CG CH (230 euros) le même jour – lequel est celui de l’anniversaire de Mme CA G alors compagne de M. Y (feuillet 402) – et de voyage notamment à Dubaï, le 2 mai 2014 pour un montant de 2084 euros, Los Angeles en août de la même année (2327 euros) et dans la baie de Phangnga, le 17 janvier 2015 (3319 euros). Au cours des années 2014 et 2015, le débit mensuel moyen de la carte bancaire de la SC PAPI a été de 1500 euros pour atteindre la somme de 4200 euros en février 2015. Lesdits débits ont été compensés par des remises de chèques tirés sur le compte de la SARL ACDP de telle sorte que M. Y doit être considéré comme ayant ainsi financé les dépenses personnelles réalisées au moyen des fonds appartenant à la SC PAPI grâce à ceux de la société ACDP. Ainsi, les chèques émis par la société PAPI ont couvert les dépenses engagées par M. Y au moyen de sa carte bancaire personnelle. En outre, des chèques ont été émis au bénéfice de la SARL ACDP pour un montant total de 69 000 euros, de la société CHOC’ELEC à hauteur de 30 000 euros et au profit de M. Y pour un montant total de 21 515 euros. Il est donc établi que, sur la période allant de juillet 2013 à mars 2016, les sommes portées au crédit et relatives à l’utilisation des cartes bancaires (13 214 euros) ainsi que les chèques et virements opérés au bénéfice de M. Y (21 515 euros), Mme X- CF Y (6050 euros), Mme X-AY Y (5000 euros) et Mme BB BC DI DJ (2100 euros) ont présenté un caractère personnel et ne pouvaient dès lors être valablement rattachées à l’activité de la SC PAPL Le montant total de ces dépenses est de 47 879 euros (feuillets 145-149, cote 12).

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11e Ch,1

168 – Ici, M. Y a admis ledit caractère personnel des dépenses engagées au moyen des fonds appartenant à la SC PAPI tout en estimant que ces demiers représentaient des prêts consentis par son ami M. Z. Il n’a toutefois pu expliquer la raison pour laquelle la SC PAPI avait procédé à l’encaissement de chèques émis par l’association ECR entre avril 2013 et mai 2014 (feuillets 1395-1399).

169 – La seule utilisation, à des fins personnelles, par un dirigeant social des fonds appartenant à la personne morale dont il a la charge caractérise le délit d’abus de confiance prévu et réprimé par les dispositions susrappelées de l’article 314-1 du code pénal dès lors que l’intéressé ne peut, en une telle occurrence, qu’être regardé comme se comportant en tant que propriétaire de biens dont il n’a pas la libre disposition et qui ne peuvent être employés que conformément à l’objet social. La circonstance que M. Z ait avancé, fût-ce de manière parfaitement libre et éclairée et sous la forme de prêts formellement consentis à la SC PAPI laquelle détient 74, 99 % des parts sociales de la SARL ACDP, des sommes d’argent dont l’objet véritable eût été le financement du train de vie personnelle de M. Y est sans incidence aucune, en droit pénal français, sur la caractérisation du délit d’abus de confiance commis au préjudice de la SC PAPL.

170 – En second lieu, le Tribunal juge qu’il en va strictement de même relativement aux autres mouvements de fonds susanalysés. Qu’il s’agisse des virements opérés à hauteur de la somme de 550 000 euros, entre octobre 2016 et juin 2017, au bénéfice de la SARL ACDP dont il était le représentant légal ou de la souscription, le 26 octobre 2016 et auprès de M. Z, d’un emprunt contracté au nom de la SC PAPI en contrepartie du nantissement de parts sociales de la SCI 3MIMI détenues par la SC PAPI, il ne peut qu’être constaté que ces opérations n’ont été conduites que dans l’unique dessein de satisfaire les besoins personnels du prévenu.

171 – Il ressort par ailleurs des pièces du dossier et notamment de la note comptable précitée qu’au débit du compte courant 455 « SC PAPI » qu’au 31 décembre 2015, le compte présentait un solde débiteur de 1343, 48 euros. Débiteur entre 2014 et le 27 janvier 2016, celui-ci est à nouveau devenu débiteur entre le 6 juillet et le 2 novembre 2016 (cf. NC, page 47). Il n’a pas été utilement contesté que cette position débitrice ne pouvait s’expliquer que par le comportement dispendieux de M. Y lequel a ainsi délibérément choisi de faire usage de ce compte courant d’associé afin de satisfaire son intérêt personnel et ce au mépris de l’intégrité du patrimoine de la SC PAPL

172 – Par suite, il résulte de tout ce qui précède que M. Y doit être déclaré DL du chef d’abus de confiance commis au préjudice de la SC PAPI, le délit dont s’agit étant caractérisé à son encontre en tous ses éléments constitutifs.

B) Sur le délit d’abus de biens sociaux commis au préjudice de la SARL ACDP devenue la SARL AU CENTRE DES PROJETS :

173 – L’article L 241-3 du code de commerce dispose, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits : « Est puni d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 375 000 euros : (…) 4° Le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu’ils savent contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement (…) ».

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174 – L’article L 241-9 du même code ajoute : « Les dispositions des articles L. 241-2 à L. 241-6 sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, aura, en fait, exercé la gestion d’une société à responsabilité limitée sous le couvert ou au lieu et place de son gérant légal ».

175 – Le Ministère public estime que M. Y a commis le délit d’abus de biens sociaux au préjudice de la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU CŒUR DES PRISONS) selon 5 modes opératoires :

+ – par inscription au crédit du compte courant de l’associé IKF HOLDING, s’agissant de l’année 2013), ou en émettant des chèques et des virements aux fins de compenser des dépenses faites au moyen de sa carte BF BG personnelle, s’agissant des années 2013 à 2016. M. le procureur de la République vise ici la prise en charge de notes de frais supportant des informations volontairement erronées telles des indemnités kilométriques non justifiées pour un montant au moins égal à la somme de 96 916, 56 euros ;

+ – par utilisation des cartes bancaires de la société qu’il dirigeait, émission de chèques, virements et retraits d’espèces constituant autant de prélèvements sur les fonds de la SARL ACDP à fin de prise en charge de dépenses de loyers, de travaux, de consommation de gaz et/ou d’électricité relatives à la villa HELEN ROC et ce pour un montant total de 108 542, 47 euros au titre des exercices 2013 à 2016, de prise en charge de dépenses de voyage, hôtellerie de luxe, restauration, frais d’esthétique dépourvus de liens avec l’activité de la société à hauteur de la somme de 105 175, 78 euros et d’acquisition d’effets vestimentaires, lingerie, objets récréatifs pour adultes et rémunération des modèles utilisés dans le cadre de l’activité photographique de M. Y pour un montant total de 162 704, 04 euros;

+ – par constitution d’un solde débiteur au compte courant de l’associé IKF HOLDING entre le 20 août 2014 et le 4 juillet 2016 ;

+ – par inscription de ses dépenses personnelles au débit du compte courant de l’associé IKF HOLDING ;

+ – par inscription de ses dépenses personnelles au débit du compte courant de l’associé société civile PAPL.

176 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience du 4 mars 2020, M. Y soutient, en défense, que le logement cannois litigieux appartient indirectement à ses filles et à M. A et que leur venue, à une ou deux reprises chaque année, ne peut modifier le fait que ce logement était loué par la société ACDP pour son activité professionnelle. Il ajoute que ses compagnes ont déclaré que si elles vaquaient certes à leurs occupations personnelles, le prévenu se consacrait lui à son activité professionnelle. M. Y indique d’ailleurs qu’entre 2011 et 2016, la société ACDP a développé et suivi les chantiers de pharmacies sises à Nice (06) et Monaco (98) ainsi que l’ensemble des projets concernant les maisons d’arrêt de Grasse (06), l’opération UNE PALME POUR LA RÉCIDIVE, les chantiers de Saint- AN-sur-Suran (39) et ceux de Saint-Quentin-Fallavier (38) ainsi que les opérations sportives en collaboration avec l’Olympique Lyonnais (OL). Il précise en outre avoir souvent rendu visite à M. Z à son domicile tropézien et ce afin d’éviter le coût d’un déplacement en Suisse (page 124).

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177 – M. Y déclare par ailleurs que la facture de grosses réparations et d’entretien du logement cannois fait l’objet d’un contentieux civil né entre bailleur et locataire s’agissant de la nature de ces dépenses ayant porté sur la structure, la toiture, les canalisations et le réseau électrique. Il estime de plus que les pièces comptables examinées au cours de l’enquête préliminaire l’ont également été par M. AB, inspecteur des finances publiques, lors des opérations de vérifications que ce dernier a conduites entre mars et août 2016 (page 125). Le concluant avance que l’ensemble des dires du parquet concernant son train de vie, ses revenus, ses frais professionnels, ses dépenses personnelles, ses indemnités kilométriques, ses loyers et ses dépenses exposées au titre de son activité de photographe ne sont finalement que de nouvelles interprétations de normes fiscales contredites par M. AB lui-même (page 126).

178 – Le prévenu ajoute que ses frais étaient soumis au tri de Mme I et de M. K lesquels avaient reçu des instructions claires quant à leur incontestable imputation (page 126).

179 – M. Y rappelle par ailleurs que, dès 2007, l’associé IKF HOLDING « a voulu que son compte courant d’associé serve à ses besoins professionnels et personnels pour développer son projet « fantastique » de prison expérimentale et notamment « démarcher de sponsors, payer les frais (…) » « puisqu’il avait besoin de Jonds pour les approcher et les rencontrer et porter ainsi son projet de prison » (page 127). Il estime donc qu’il revenait, compte tenu de la faiblesse de son salaire mensuellement perçu (1600 euros), à la SARL ACDP de financer directement ses dépenses et affirme notamment que, « dans notre société du paraître et de la communication », il devait « incarner le modèle incontestable de réinsertion pour pouvoir promouvoir son projet et convaincre ». À ce titre, M. Y expose qu’il lui était par suite nécessaire, outre d’afficher une tenue vestimentaire irréprochable, « de prévenir toute mauvaise presse et éviter plus particulièrement tous les conflits familiaux et contentieux judiciaires pour absence de versement de prestations alimentaires » (page 128).

180 – Au total, le prévenu allègue que l’utilisation du compte courant de l’associé IKF HOLDING a permis de faire de lui, « ancien détenu cible de tous les médias et victime de 1992 à 2000 au moins de l’opprobre, non seulement le symbole de la réinsertion et de la lutte pour l’amélioration des conditions de détention mais aussi l’interlocuteur de trois présidents de la République, de cinq ministres de la Justice et de dizaines de responsables de l’administration pénitentiaire». Ce faisant, « grâce à l’image du personnage Y financée par le compte courant IKF », il a réussi à « développer des dizaines de projets uniques et campagnes inédites» et la SARL ACDP à développer le concept de prison expérimentale (page 128). M. Y qualifie d'« incontestable » la conformité à l’intérêt social de l’utilisation du compte courant IKF « par son utilité et son opportunité au regard de la société et de ses membres » (page 129).

1°) Sur l’inscription au crédit du compte courant de l’associé IKF

HOLDING et l’émission de chèques et virements (indemnités kilométriques) :

181 – En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la note comptable en date du 9 janvier 2019 que M. Y détaillait sur un état de frais le nombre de kilomètres parcourus lequel était ensuite enregistré par la suite dans des tableurs intitulés «notes de frais: NDF». Ces documents récapitulaient mensuellement les dépenses litigieuses. Les remboursements étaient comptablement

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enregistrés en charge au compte 625200 « frais de péages, parking et essence » et leur contrepartie en compte courant 455000 « [KF HOLDING» en 2013 ou au compte 428610 «Frais P. Y» s’agissant des exercices 2014, 2015 et 2016. Concernant le véhicule CV CW, il était simplement indiqué l’usage d’une automobile dont la puissance fiscale était inférieure à 7 chevaux. Ainsi, mention n’était pas faite de la nécessité que le véhicule emprunté soit le véhicule personnel du dirigeant, l’application des taux figurant sur le barème publié et révisé annuellement par l’administration fiscale ainsi que la justification du kilométrage parcouru. De plus, il a été observé que M. Y était le seul salarié de la SARL ACDP à opérer ces déplacements et que celui-ci n’avait parcouru que la distance de 24 986 kilomètres en deux années avec le véhicule utilisé, à titre professionnel et personnel, ce dernier ayant été acquis neuf le 1" décembre 2014. De même, il doit être constaté que la personne morale possédait un scooter et en a acquis un second en juillet 2014 – le premier ayant été vendu en juillet 2015 – et que M. Y effectuait une grande partie de ses déplacements parisiens en usant de ce moyen de transport. Enfin, ces trajets routiers s’additionnent aux très nombreux voyages effectués par le prévenu en France ou à l’étranger, en taxi, train et avion outre diverses locations d’automobiles sur site.

182 – En deuxième lieu, le montant des indemnités kilométriques (à savoir les sommes concédées par la société à un salarié ayant utilisé son véhicule personnel dans l’exercice de ses fonctions) versées en 2014 à M. Y par la SARL ACDP a été supérieur de plus du triple de celui de l’exercice 2013 (cf. supra $ 42 et suivants du présent jugement). Il a été constaté et non utilement contesté par la défense que les mentions figurant sur les états de frais présentés étaient des plus lacunaires et ne précisaient que rarement l’objet de la mission.

183 – En troisième et dernier lieu, le Tribunal juge qu’aucun élément objectif du dossier ne permet par suite de rattacher les dépenses exposées par la SARL ACDP dont M. Y était le dirigeant de droit à l’activité officielle de cette personne morale., En raison notamment de l’incomplétude manifeste – et certainement intentionnelle – des notes de frais présentées, il n’a pas été possible de reconstituer précisément l’étendue des déplacements réellement professionnels de l’intéressé et de justifier ainsi les kilométrages allégués lesquels ne répondent à aucune logique sociale clairement établie.

184 – Par suite, M. Y doit donc être considéré comme ayant fait ainsi, de mauvaise foi, des biens de la SARL ACDP un usage qu’il savait contraire à l’intérêt de la personne morale dès lors que le caractère professionnel des déplacements considérés n’a nullement été démontré. Il sera donc retenu dans les liens de la prévention le concernant sur ce point à hauteur de la somme mentionnée de 96 916, 56 euros, les éventuelles erreurs de classification comptables imputées à Mme I et M. J par M. Y ainsi que la faible curiosité et la rigueur perfectible manifestées par M. AB, inspecteur des finances publiques lors des opérations de vérification fiscale (feuillets 1202 ; 1204-1212), étant parfaitement inopérantes au cas présent.

2°) Sur l’usage des cartes bancaires de la SARI ACDP, les retraits d’espèces, l’émission de chèques et de vi ts (prise en charge de dé

personnelles) :

185 – La prévention concemant M. Y vise ici la prise en charge de loyers, de travaux, de frais énergétiques afférents à la villa HELEN ROC sise à Cannes (06) pour un montant minimum de 108 542, 47 euros ainsi que des dépenses de même nature relative au logement personnel de l’intéressé à hauteur de la somme de 90 386 euros.

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4 J sr. Un.Î

En outre, elle incrimine la prise en charge, sur les fonds sociaux, de dépenses de voyage, d’hôtellerie de luxe, de restauration, d’esthétique pour un montant total de 105 175, 78 euros et des frais d’acquisition d’effets vestimentaires, de lingerie, d’objets récréatifs pour adultes – autrement dénommés par l’anglicisme « sex toys » – et de rémunération de modèles au titre d’une activité de loisirs photographiques à hauteur de la somme de 169 702, 04 euros.

186 – En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la note comptable en date du 9 janvier 2019 qu’un contrat de bail a été conclu, le 1" janvier 2006, entre la société BRAIN PLEASURE CREATION (BPC) et la SCI 3MIMI propriétaire de la villa HELEN ROC sise […] à Cannes (06). Cette convention a été signée par Mme BK BL, alors compagne de M. Y et gérante de la SCI 3MIMI (feuillets 544 ; 552-559). Le 25 juin 2013, ce bail a fait l’objet d’un avenant aux termes duquel, à compter du 1" juillet 2013, le montant du loyer était ramené à 6000 euros par an du fait de « la dégradation de l’immeuble et de son inoccupation pendant une grande partie de l’année ». Cette convention stipule par ailleurs expressément que «le présent bail est personnel au preneur et à son personnel, pour le destiner exclusivement à l’habitation avec la faculté d’y domicilier une entreprise sans toutefois exercer aucune activité commerciale, professionnelle ou industrielle ni constituer la résidence principale de l’occupant » (feuillets 552-553),

187 – En deuxième lieu, il a été objectivement constaté que la SARL ACDP déduisait l’intégralité des charges relatives à la villa HELEN ROC en comptabilité à hauteur de la somme de 108 542, 47 euros (cf. NC, pages 29-33).

188 – En troisième lieu, le Tribunal juge qu’il n’a aucunement été démontré ni au cours de l’enquête préliminaire ni lors de l’audience correctionnelle et n’est pas davantage établie par les écritures de M. Y que l’activité de la SARL ACDP et son fonctionnement eussent exigé la prise en charge des dépenses locatives et d’entretien de la villa HELEN ROC. D’une part, il ne saurait être acquis que ce bien immobilier ait pu constituer une domiciliation d’entreprise dès lors que nul élément n’atteste que les locaux aient régulièrement accueilli la réunion des organes chargés de la direction, de l’administration et de la surveillance de l’entreprise et l’installation des services nécessaires à la tenue, à la conservation et à la consultation des livres, registres et documents prescrits par les lois et règlements. Ne constituant, d’autre part, pas davantage un établissement secondaire puisque la personne morale n’en a déclaré aucun, la villa HELEN ROC a donc généré des dépenses de loyer et d’entretien prises en charge par la SARL ACDP et ne revêtant aucun caractère professionnel puisqu’il a été établi que ce bien immobilier n’avait bénéficié qu’à M. Y et à ses proches et ce à titre personnel. Nul élément du dossier n’a ainsi permis de prouver formellement que la conduite des projets méditerranéens et autres évoqués par le prévenu dans ses écritures et lors de l’audience correctionnelle aient eu pour support logistique nécessaire l’utilisation par la SARL ACDP de la villa HELEN ROC. À l’inverse, le comportement de M. Y tel que relaté par les membres de son premier cercle démontre que celui-ci a considéré ladite maison comme devant servir ses intérêts personnels et ceux de ses affidés. Le montant – particulièrement élevé (108 542, 47 euros) – des dépenses ainsi exposées entre 2013 et 2016 corrobore le caractère personnel de l’utilisation des lieux étant acquis, encore une fois, qu’aucun acte matériel d’exercice professionnel n’a pu être constaté. En outre, Mme CA G, ancienne compagne de M. Y, a indiqué aux enquêteurs, le 26 janvier 2017, s’y être rendue avec lui dans un cadre privé de même que Mme BC DI DJ qui a reconnu y avoir séjourné en présence de M. Y durant les fins de semaine et les vacances et qualifié ce bien de « résidence secondaire » de l’intéressé (feuillet 666). De plus, par courriel du 7 mai 2017, celle-ci

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a demandé au prévenu de bien vouloir transformer ce qu’elle nommait leur « suite » (feuillets 402-410 ; 673 ; ef. NC, pages 29-33). Enfin, l’aspect tout aussi personnel des liens existant entre la SARL ACDP et le SCI 3MIMI achève de démontrer ledit caractère, la seconde étant possédée à hauteur de 48 % du capital par la SC PAP] elle- même dirigée par M. Y lequel a d’ailleurs exercé la gérance de droit de la SCI 3MIMI de mars 2010 au 3 octobre 2014.

189 – En quatrième lieu, il est également établi par l’enquête préliminaire que la SARL ACDP a comptabilisé dans ses charges les loyers, charges locatives et autres dépenses afférents au logement principal de M. Y situé 12/[…] à Paris 17e lequel constituait par ailleurs le siège social de la personne morale (cf. NC, page 39). Afin de tenir compte du caractère mixte de l’utilisation de ce logement, une quote-part de répartition a été appliquée à hauteur de 50 % sur certaines charges (fourniture d’eau et énergie, charges locatives et de copropriété, téléphone fixe…). Le montant total des dépenses assumées par la SARL ACDP a par suite été fixé à la somme de 20 717, 64 euros en 2013, 21 538, 54 euros en 2014, 20 889, 88 en 2015 et 19 785, 75 euros soit 82 931, 81 euros au titre de ces quatre exercices. À cette dernière somme, il convient d’ajouter celle de 738 euros correspondant à une facture émise le 30 octobre 2014 par la société SOLFEGGIO et relative à la livraison et à la location d’un piano à queue de marque RITMUÛLLER sur la période allant du 16 au 17 octobre 2014, livraison effectuée au domicile personnel de M. Y. L’examen de la facture considérée ne permet nullement de rattacher cette dépense à l’activité de la SARL ACDP. De plus, il importe également de prendre en considération la somme de 4609, 48 euros exposée entre 2013 et 2015 en règlement de factures adressées à M. Y ou à la société N Y CRÉATION par le déménageur et garde-meubles CX CY. Le caractère personnel de ces dépenses est confirmé par une lettre en date du 11 janvier 2013 et par laquelle ladite société N Y CRÉATION indiquait à la société CX sa volonté de voir trier les conteneurs de Mme AY-DK E afin de préparer un envoi au […] à Cannes (06). En outre, il ressort également des pièces du dossier que la SARL ACDP a déduit en compte 604000, le 24 mars 2015, la facture émise par la société villeurbannaise RISPLI&BRUCE NATI à hauteur de la somme de 1942, 83 euros. Cette pièce est relative à des travaux de réfection réalisés à la suite d’un dégât des eaux survenu en un lieu indéterminé et ne présentant aucun lien avec l’activité de la SARL ACDP. Enfin, il doit être constaté qu’un chèque d’un montant de 164 euros et daté du 27 juin 2015 a été enregistré en compte 606300 « fourniture entretien et M équipement » au nom de Mme CZ DI. Celui-ci concerne de frais de pressing, de teinturerie et de dépenses alimentaires dont le caractère personnel doit, une fois de plus, être admis (cf. NC, pages 39-41). Le montant total de ces dépenses personnelles mais néanmoins comptabilisées dans les charges de la SARL ACDP dont M. Y était le représentant légal est donc de 90 386, 12 euros.

190 – En cinquième lieu, le Tribunal juge qu’aucun élément du dossier n’a pu légalement justifier, pour les mêmes raisons que celles évoquées supra, le fait que la SARL ACDP ait supporté la charge financière du logement personnel de M. Y à hauteur de la somme de 90 386 euros au titre des exercices 2013 à 2016. En effet, il a pu être constaté lors de l’exécution de la mesure de perquisition que le bureau destiné à l’activité de la société était situé dans une pièce de l’appartement d’une surface de 6m° représentant seulement 6 % de la superficie totale. De même et ainsi qu’il a été dit, les autres dépenses susanalysées également supportées par la personne morale considérée ne présentent aucun caractère professionnel mais doivent être regardées comme ayant été réalisées dans le seul intérêt personnel de M. Y.

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11e Cn.1

191 – En sixième et dernier lieu, il ressort également des pièces du dossier que M. Y a utilisé les instruments de paiement dont la SARL ACDP étaient titulaires afin de régler diverses dépenses dont le caractère personnel est établi par leur nature même et la production de documents justificatifs hautement imprécis (feuillets 253- 263). Ainsi, les dépenses alimentaires exposées auprès des enseignes INTERMARCHÉ, MONOPRIX ou encore GALERIES GOURMANDES, les livraisons de repas à domicile, les frais de restauration et d’hôtellerie réglés à Cannes (06) et dans ses environs mais également à l’étranger (Venise, Amsterdam, Londres, Vienne, Dubaï…) ou encore le coût des repas spectacle pris au club de strip-tease ZE CLUB sis […] à Paris 17e ainsi que les dépenses effectuées au sein de l’hôtel VICE VERSA situé 13 rue de la Croix-Nivert à Paris 15e ne présentent, à l’évidence, nulle coloration professionnelle (feuillets 1067-1071). Le moins que l’on puisse affirmer est que leur relation à la lutte contre la récidive et la surpopulation carcérale n’est rien moins que flagrant. Il en va de même des achats, effectués, sur les fonds sociaux, auprès de l’enseigne DEMONIA ou de la salle de spectacle CRAY HORSE ainsi que le règlement d’une facture enregistrée en compte 604000 et établie au nom de M. Y par la cryoclinique EFFILE sise […] à Paris 8e pour un montant de 2400 euros. Celle-ci concerne « le traitement de quatre zones par coolsculpting» réalisé le 30 mai 2016 et dont le caractère professionnel est également non établi. Enfin, ni les dépenses vestimentaires, de lingerie ou d’accessoires sexuels ne peuvent sérieusement témoigner de leur indéniable utilité professionnelle. Le Tribunal juge ici que ces frais s’inscrivent à l’inverse dans une activité strictement privée par nature et exclusive, à ce titre, de tout financement par les biens d’une société commerciale s’étant voulue le chantre de la lutte contre le choc carcéral et de la promotion de la réinsertion sociale (le montant retenu par l’autorité de poursuites et corroboré par les éléments du dossier est ici de 105 175, 78 euros entre 2013 et 2016). Quant à l’activité photographique (02B) de M. Y dont le caractère – au moins EB – pormmographique est patent de l’aveu même de son auteur qui a décrit à l’audience, avec « une passion (…) personnelle » certaine (feuillet 1318), ses ressorts présentés comme philosophiques et ses modalités pratiques, elle ne peut davantage, s’insérer raisonnablement dans l’activité déclarée de la SARL ACDP. Le coût de cette activité qualifiée d’artistique par le prévenu est de 170 431, 31 euros au vu des éléments comptables figurant à l’annexe VII de la note comptable. Toutefois, la prévention vise ici un montant très légèrement inférieur de 169 702, 04 euros lequel sera donc retenu par le Tribunal.

192 – Par suite, M. Y doit donc être considéré comme ayant fait ainsi, de mauvaise foi, des biens de la SARL ACDP un usage qu’il savait contraire à l’intérêt de la personne morale dès lors que le caractère professionnel de l’ensemble de ces dépenses susdécrites est indéniablement absent. Les éventuelles erreurs de classification comptable imputées à Mme I et M. K par M. Y ainsi que le degré de curiosité – aussi perfectible qu’étonnant – manifesté par M. AB, inspecteur des finances publiques, lors des opérations de vérification fiscale sont parfaitement inopérants au cas présent à l’instar des arguments de la défense tendant à la reconnaissance de l’aspect licite de ces dépenses établi, selon elle, par la nécessité de rendre M. Y éblouissant sur la forme et irrépréhensible sur le fond pour que sa crédibilité et sa force de conviction fussent ainsi optimisées.

193 – Il sera donc déclaré DL du chef d’abus de biens sociaux s’agissant de

cette partie de la prévention le concernant et ce à hauteur de la somme de 570 722, 85 euros.

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3°) Sur l’utilisation du compte courant de l’associé IKF HOLDING :

194 – Il ressort des pièces du dossier et notamment de la note comptable du 9 janvier 2019 qu’à compter du 20 août 2014, le compte courant de l’associé IKF a présenté un solde débiteur lequel a perduré jusqu’au 5 juillet 2016 à l’exception de l’enregistrement d’une écriture de compensation en date du 31 décembre 2014 et correspondant à celui d’une facture de la société IKF MANAGEMENT daté du 2 décembre 2014 et d’un montant de 97 000 euros (cf. NC, pages 44-46).

195 – Il est également établi qu’au 31 décembre 2015, le solde du compte 455 « JKF HOLDING » était débiteur de la somme de 105 682, 89 euros et qu’au 13 avril 2016, il le demeurait à hauteur de la somme de 170 743, 54 euros. La situation du compte n’est redevenue créditrice qu’en raison des importants apports consentis par M. Z pour un montant de 387 344, 25 euros, soit à litre personnel, soit par le truchement de sa société IKF MANAGEMENT ou sa société de droit luxembourgeois JED SA (virement d’un montant de 65 067, 41 euros le 27 juillet 2016). Au 31 décembre 2016, le compte courant dont s’agit a retrouvé une position créditrice à hauteur de la somme de 68 781, 83 euros (cf. NC, page 45).

196 – Ladite position débitrice, vérifiée entre le 20 août 2014 et le 5 juillet 2016, du compte courant d’associé précité doit s’analyser en un crédit accordé au titulaire dudit compte par le dirigeant de droit de la société commerciale et celui-ci ne peut être justifié que par l’intérêt de la personne morale. Or, en l’espèce, ainsi qu’il a déjà été dit, la position débitrice du compte courant de l’associé IKF HOLDING ne s’explique que par l’utilisation, à des fins personnelles, de ce dernier par M. Y. Une fois encore, la circonstance, à la supposer vérifiée, que M. Z ait, en parfaite connaissance de cause, consenti de la sorte, soit par le truchement du compte courant d’associé détenu par la société IKF HOLDING dont il était le dirigeant de droit au sein de la SARL ACDP, des prêts personnels à M. Y – ce que l’intéressé a d’ailleurs clairement contesté devant les enquêteurs en faisant mention des méthodes expéditives de son ami pour obtenir un soutien financier et en déclarant, le 13 juin 2018, n’avoir pas voulu « soutenir son train de vie personnelle » (feuillet 962) – n’est nullement de nature à justifier légalement le comportement du prévenu, un compte courant d’associé ne pouvant, en aucune circonstance, être utilisé, à titre habituel, pour financer les dépenses personnelles du dirigeant social et ce quand bien même la législation de la société autoriserait l’octroi de prêt à des personnes physiques. S’il est certes avéré que M. Z avait une connaissance partielle de l’emploi des sommes avancées par la société de droit suisse IKF HOLDING à la SARL ACDP, il n’en reste pas moins qu’aucun acte contractuel ne fait état d’une quelconque autorisation expressément consentie par M. Z à M. Y et tendant à l’utilisation des sommes litigieuses pour le financement des dépenses personnelles du second. Il est de plus patent que cet emploi a mécaniquement réduit le montant de la créance détenue par la société IKF HOLDING sur la SARL ACDP et fait donc ainsi grief aux intérêts de celle-ci. Ce constat est corroboré par la circonstance que les prêts allégués ont été accordés à litre gratuit et sans prise d’une quelconque garantie. Ce faisant, le prévenu a manifesté sa volonté de se comporter comme le véritable propriétaire des sommes considérées et d’utiliser le compte courant d’associé de la société IKF HOLDING comme un compte bancaire qui lui serait exclusivement dédié.

197 – Par suite, M. Y sera également déclaré DL du chef d’abus de biens sociaux s’agissant de cette partie de la prévention le concernant.

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[…] 4°) Sur l’utilisation du compte courant de l’associé SC PAPI :

198 – Il ressort des pièces du dossier et notamment de la note comptable précitée qu’au débit du compte courant 455 « SC PAPI », a été comptabilisée une somme de 64 989, 86 euros constituée du report à nouveau débiteur de l’exercice 2014 (28 843, 48 euros) et des remboursements effectués au profit de l’associé (36 146, 38 euros). Ces remboursements n’ont pas été systématiquement réglés au bénéfice de la SC PAPI dès lors que le chèque de 2500 euros daté du 12 février 2015 a été encaissé par Mme CF A laquelle n’était plus associée de la SARL ACDP ni de la SC PAPI et que celui de 1434, 48 euros en date du 13 mai 2015 avait été endossé par le cabinet d’avocat « BP ANOIN ». Au 31 décembre 2015, le compte présentait un solde débiteur de 1343, 48 euros. Débiteur entre 2014 et le 27 janvier 2016, celui-ci était à nouveau devenu débiteur entre le 6 juillet et le 2 novembre 2016 (cf. NC, page 47).

199 – L’usage par M. Y du compte courant de l’associé SC PAPI à des fins personnelles ayant été établi (cf. $ 170 et suivants du présent jugement), le même raisonnement que celui appliqué précédemment à l’utilisation du compte courant de l’associé IKF HOLDING sera ici retenu par le Tribunal pour déclarer le prévenu DL du chef d’abus de biens sociaux s’agissant de cette partie de la prévention le concernant.

C) Sur le délit d’ ie commis au préjudice de l’association ECR :

200 – L’article 313-1 du code pénal dispose : « L’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. L’escroquerie est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende ».

201 – Il résulte des dispositions précitées de l’article 313-1 du code pénal que l’infraction d’escroquerie est consommée par la vérification d’une remise appauvrissant soit-même ou autrui ou d’un acte opérant obligation ou décharge et procédant directement de l’usage d’un faux nom, d’une fausse qualité, de l’abus d’une qualité vraie ou de l’emploi de manœuvres frauduleuses. Un mensonge, même produit par écrit, ne peut toutefois constituer une manœuvre frauduleuse, au sens de l’article précité, s’il ne s’y joint aucun fait extérieur ou acte matériel ni aucune mise en scène ou intervention d’un tiers destinés à donner force et crédit à l’allégation mensongère du prévenu (Crim. 1" juin 2005, n° 04-87.757, bull. crim. n° 167 ; Crim. 11 juillet 2017, n° 16-84.828, bull. crim. n° 198).

202 – Le Ministère public estime que la facture n° 2012-12-122 en date du 31 décembre 2012 relative à des « prestations d’assistance et de conseil réalisées depuis 2010 pour le projet « Ensemble contre la Récidive » et plus particulièrement de mai 2012 à décembre 2012, avec adaptation du projet à la nouvelle politique de Mme la Garde des Sceaux » et présentée à l’assemblée générale de l’association ECR, le 27 novembre 2014, en vue de sa reprise par l’association ECR constitue un faux en écriture privée dès lors que ce document a été établie postérieurement à sa date d’édition officielle et que l’étude de la facturation de la société N Y CRÉATION à l’association LES PRISONS DU CŒUR au cours des années 2010 à 2012 a pennis de constater que les diverses prestations figurant sur la facture litigieuse avaient déjà fait l’objet de facturations horaires dans le cadre des relations entre les

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deux entités. Il ajoute que la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) a indiqué ne jamais avoir reçu une telle facture et que ses représentants ont précisé ne pas avoir été sollicités dans le sens d’une prise en charge du projet de centre de détention ouvert auquel elle faisait référence. L’autorité de poursuites allègue par suite que l’opération consistant à faire prendre en charge la facture par l’association a répondu à un objectif opportuniste de financement de la société ACDP et non à la réalité des rapports contractuels. Elle conclut en affirmant que les participants à l’assemblée générale du 27 novembre 2014 ont été trompés par la présence d’une facture falsifiée quant à la date et les prestations qu’elle mentionnait, facture corroborée par les fausses informations livrées par M. Y sur l’origine et le prétendu destin de ladite facture devant la CDC.

203 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, M. Y, après procédé à un rappel factuel – et interprétatif – des conditions d’acquisition par l’association ECR de la propriété de son projet de prison expérimentale (pages 71 à 87), soutient avoir créé et développé seul le projet considéré avec l’aide et le soutien de plusieurs types d’experts et entreprises et précise l’avoir vendu à l’association ECR au prix de 431 120 euros hors taxes (page 117). Il indique qu’en novembre 2014, M. H a contacté M. AC afin de lui faire part de la nécessité d’acquérir l’intégralité des droits relatifs au projet de expérimentale et ce afin de développer ses propres projets dont le centre de Saint- Quentin-Fallavier (38). M. H ayant su que le projet de prison expérimentale avait fait l’objet d’une facturation par la société N Y CRÉATION à la CDC, celui-ci a proposé à M. P de racheter le projet à cette institution si la facture avait été honorée ou de racheter la facture à la société N Y CRÉATION dans le cas contraire (page 118). Le prévenu affirme n’avoir jamais demandé à quiconque que l’association lui achète son projet ou rachète la facture établie pour ce projet à la CDC, ni présenté ladite facture, ni demandé à M. H ou à M. AC ou aux membres de l’assemblée générale de s’intéresser à l’achat de son projet ou au rachat de la facture litigieuse. S’il admet en outre avoir pu évoquer cette facture devant plusieurs personnes, M. Y déclare toutefois n’avoir jamais demandé ni suggéré à quiconque de racheter cette facture (page 119). Le prévenu conclut en indiquant qu’en tout état de cause, un mensonge écrit ne constitue pas une manœuvre frauduleuse au sens des dispositions de l’article 313-1 du code pénal dès lors qu’il n’est pas accompagné d’un acte extérieur ayant pour objectif de donner force et crédit audit mensonge (page 121).

* Ed Ed

204 – En premier lieu, le Tribunal constate que la facture litigieuse n° 2012-12-112 du 31 décembre 2012 adressée par la SARL N Y CRÉATION à la CDC pour un montant TTC de 515 619, 52 euros vise des prestations de conception, étude, adaptation avec les architectes, d’actions auprès des institutions, de contacts avec des entreprises de services et de réinsertion, de travail administratif, de recherches de financement et d’entreprises et de relations avec les associations et les avocats (feuillets 455-456).

205 – En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de l’audition de M. DS-DT DZ, conseiller auprès du directeur général de la CDC, réalisée le 12 février 2018, que ladite facture n’a nullement été adressée à la CDC (feuillets 579 et 719) et qu’aucun engagement formel de cette institution n’a pu dès lors être démontré (feuillet 718). La circonstance que M. Y, qui ne fait d’ailleurs état, lors de son interrogatoire en date du 13 novembre 2018, que de l’existence de « plusieurs engagements verbaux de l 'État » (feuillet 1368) et du fait que la facture en

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11e Ch.1

question « repose juste sur la parole du Garde des Sceaux et du Secrétaire général de 1 'Élysée » (feuillet 1370), ait entretenu des relations avec d’autres représentants de la CDC – malheureusement non entendus au cours de l’enquête préliminaire – si elle est certes probable, n’est toutefois nullement de nature à attester l’existence dudit engagement.

206 – En troisième lieu, il a été démontré que cette facture fait état d’une date erronée dès lors que le montant y figurant correspond à un décompte établi par Mme I et présent dans un courriel daté du 6 août 2013 (feuillet 454). Il était donc matériellement impossible de faire état dudit montant le 31 décembre 2012 alors que celui n’a été déterminé que le 6 août suivant.

207 – En quatrième lieu, il résulte des déclarations faites le 7 mars 2018 par M. Q, trésorier de l’association LES PRISONS DU CŒUR, que la convention de dévolution de l’actif et du passif signée le 18 avril 2013 entre l’association précitée et l’association ECR n’a fait nullement état de l’existence de dettes contractées à l’égard de M. Y exception faite de « dettes résiduelles postérieures à la liquidation » et d’un montant estimé à la somme de 10 000 euros (feuillet 753).

208 – En cinquième lieu, le Tribunal juge que ces éléments suffisent à démontrer que la facture litigieuse du 31 décembre 2012 constitue un faux en écriture privée au sens des dispositions de l’article 441-1 du code pénal dès lors qu’elle comprend une altération frauduleuse de la vérité de nature à causer un préjudice à autrui et ce quand bien même, au vu de l’ensemble des pièces du dossier et notamment des écritures produites en défense, la juridiction ne peut il est vrai affirmer, avec le degré de certitude requis, que la totalité des prestations figurant sur la facture considérée du 31 décembre 2012 aient préalablement été facturées par M. Y à l’association LES PRISONS DU CŒUR au cours des années 2011 et 2012.

209 – En sixième et dernier lieu, il sera cependant jugé que la seule présentation, lors de l’assemblée générale extraordinaire de l’association ECR le 27 novembre 2014, de ladite facture dont le caractère inauthentique est donc établi, ne constitue pas une manœuvre frauduleuse au sens des dispositions susrappelées de l’article 313-1 du code pénal dès lors qu’il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment pas du procès- verbal de l’assemblée générale extraordinaire dont s’agit que la production de ce mensonge écrit ait été accompagné par un fait extérieur ou acte matériel, une mise en scène ou l’intervention consciente d’un tiers destinés à donner force et crédit à l’allégation mensongère du prévenu. Le Tribunal observe d’ailleurs ici que Mme E n’a pas été poursuivie, en sa qualité de présidente de l’association ECR, du chef de complicité d’escroquerie et que M. P a déclaré, le 25 janvier 2018, que le premier à avoir évoqué la facture dont s’agit devant lui fut M. AD lequel lui a demandé de la reprendre avant que M. Y et Mme E ne valident cette position (feuillet 645).

210 – Par suite et pour ce motif de droit, M. Y sera EB EA du chef d’escroquerie.

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D) Sur les délits de faux en écriture privée, complicité de ce délit et usage de faux en écriture privée :

211 – L’article 441-1 du code pénal dispose : « Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques. Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ».

212 – Il résulte de ces dispositions légales que le préjudice causé par la falsification d’un écrit peut résulter de la nature même de la pièce falsifiée.

1°) Sur la facture du 2 décembre 2014 :

213 – Au cas présent, le Ministère public estime que la facture n° IKF/12-2014/100 en date du 2 décembre 2014, d’un montant de 97 000 euros, adressée par la société IKF MANAGEMENT à la SARL ACDP et qui a été enregistrée au crédit du compte courant de la société IKF HOLDING a en réalité été établie en décembre 2015.

208 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, M. Y soutient, à l’inverse, que M. Z a reconnu avoir bien réalisé, en 2014, chacune des prestations figurant sur cette facture laquelle a été enregistrée dans la comptabilité des sociétés ACDP et IKF HOLDING. Il fait également état d’entretiens entre M. Z et M. AB d’une part et entre Mme I et M. Z d’autre part et relatifs aux opérations de vérification fiscale et à l’établissement d’une convention de prestations de service entre la société IKF HOLDING et la SARL ACDP (page 132).

214 – Il sera rappelé ici que Mme I a déclaré que ladite facture avait été rédigée par M. Y et confirmé qu’un projet de convention avait été établi pour répondre aux exigences du contrôle fiscal de 2016. Elle a de plus indiqué ignorer si le document avait été effectivement produit (feuillets 293 et 862). M. K a quant à lui expliqué que la facture litigieuse, dont il ne savait pas si elle correspondait à des prestations réelles, avait été mise en place en raison du compte courant d’associé débiteur IKF HOLDING (feuillets 375-376). S’agissant de M. Z, il a invoqué la tolérance de la législation suisse en la matière (feuillet 979) et indiqué avoir appris de M. Y la position débitrice du compte ainsi qu’avoir été avisé par l’intéressé de la possibilité d’éditer une facture en vue de compenser le solde en question. Il a toutefois nié avoir établi ledit document dont il a dit ignorer l’existence et qu’il a qualifié de « totalement faux » (feuillet 964). M. Z, qui a par ailleurs précisé qu’il ne s’était jamais agi de facturer les rendez-vous mentionnés, a fait de plus remarquer que la prise en compte de son enregistrement comptable par ses commissaires aux comptes ne résultait que d’une comparaison entre ses comptes et ceux de la société ACDP et que cette écriture était enregistrée en tant que prêt. Son conseil a en outre adressé aux enquêteurs un courriel selon lequel le comptable de la société IKF HOLDING SA distinguait selon les bénéficiaires des sommes prêtées au moyen d’un rapprochement entre les comptabilités des sociétés IKF HOLDING et ACDP corrigé en fonction des mouvements ne figurant que dans la comptabilité de la société ACDP (feuillets 956-970 ; 978-981 ; 1234-1235).

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7Ïème Ch «,

215 – Au vu de ces éléments et notamment des déclarations suffisamment claires de M. Z, le Tribunal juge que la facture litigieuse en date du 2 décembre 2014 comprend une altération frauduleuse de la vérité dès lors qu’il est établi que ce document, outre le fait qu’il n’a pas été réellement établi le 2 décembre 2014, n’a pas eu pour objet de facturer les prestations réalisées par l’intéressé. De plus, il résulte de l’audition de Mme I que cette facture a été éditée par M. Y et de celle de M. K que sa raison d’être n’avait été que de permettre l’enregistrement comptable de la diminution du solde débiteur du compte courant de l’associé IKF HOLDING.

216 – Par suite, le Tribunal juge que la facture considérée du 2 décembre 2014 constitue, au sens des dispositions susrappelées de l’article 441-1 du code pénal, un faux en écriture privée ayant causé un préjudice tant à la société IKF HOLDING qu’à la SARL ACDP et que M. Y en a sciemment fait usage dans le dessein susmentionné.

217 – Dès lors, il sera déclaré DL des délits de faux en écriture privée et usage qui lui sont reprochés.

2°) Sur la facture du 10 décembre 2014 :

218 – Le Ministère public allègue ici que la facture 2014-12-107 en date du 10 décembre 2014 émise par la SARL ACDP à l’encontre de l’association ECR et portant mention d’une remise à titre exceptionnel constitue également un faux en écriture privée en tant qu’il résulte d’échanges de courriels en date du 9 décembre 2015 entre M. K et M. Y que cette remise avait été décidée en vue de la minoration du résultat comptable de l’exercice 2014. Il ajoute que cette remise apparente n’était assortie d’aucune restitution à l’association ECR et que Mme I a reconnu en être l’auteur probable sur instructions de M. Y.

219 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, ce dernier reconnaît que, par courriel du 9 décembre 2015, M. K, expert-comptable de la SARL AU CENTRE DES PROJETS, a conseillé à la SARL AU CŒUR DES PRISONS d’accorder une remise exceptionnelle de 15 % sur la facture qu’elle avait adressée à l’association ECR en décembre 2014 mais qui n’avait pas encore été réglée (page 133). Il admet également avoir demandé à Mme I de suivre les conseils de M. K. Par suite, M. Y indique reconnaître la matérialité des faits mais conteste toutefois l’élément intentionnel de l’infraction.

* Ed &

220 – Au cas présent, il doit donc être constaté que la facture considérée en date du 10 décembre 2014 a été établie par Mme I sur instructions de M. Y un an après sa date apparente. En outre, il est également indubitable que le prévenu avait parfaitement saisi l’objectif de cette manœuvre, à savoir la minoration du résultat comptable de l’exercice 2014. Un tel dessein revêtant un caractère frauduleux pour tout esprit normalement éclairé, M. Y ne saurait par suite se retrancher derrière la croyance candide de la parfaite licéité des conseils prodigués par M. K pour se soustraire ainsi à sa responsabilité pénale. La rédaction de la facture litigieuse ne procédait à l’évidence pas d’une démarche commerciale mais d’une volonté de dissimuler à l’administration compétente le résultat fiscal véritable de la SARL AU CENTRE DES PROJETS.

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221 – Par suite, le Tribunal juge que la facture considérée du 10 décembre 2014 constitue, au sens des dispositions susrappelées de l’article 441-1 du code pénal, un faux en écriture privée ayant causé un préjudice à la SARL AU CENTRE DES PROJETS, à la SARL AU CŒUR DES PRISONS ainsi qu’à l’État et que M. Y s’est révélé complice par instigation de ce délit en ordonnant à Mme I de procéder à la rédaction du document litigieux. De plus, il est également établi que le prévenu a fait usage de ce document dans le dessein frauduleux susévoqué.

222 – Dès lors, M. Y sera déclaré DL des délits de complicité de faux en écriture privée et usage qui lui sont reprochés.

E) Sur le délit de blanchiment de fraude fiscale : 1°) Éléments fondamentaux du délit de blanchiment :

223 – L’article 324-1 du code pénal dispose : « Le blanchiment est le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect. Constitue également un blanchiment le fait d’apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit. Le blanchiment est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende ». L’article 324-2 du même code ajoute : « Le blanchiment est puni de dix ans d’emprisonnement et de 750 000 euros d’amende : 1° Lorsqu’il est commis de façon habituelle ou en utilisant les facilités que procure l’exercice d’une activité professionnelle ; 2° Lorsqu’il est commis en bande organisée ». L’article 1741 du code général des impôts énonce de plus, dans sa rédaction issue de l’article 9 de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière : « Sans préjudice des dispositions particulières relatées dans la présente codification, quiconque s’est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts visés dans la présente codification, soit qu’il ait volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu’il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l’impôt, soit qu’il ait organisé son insolvabilité ou mis obstacle par d’autres manœuvres au recouvrement de l’impôt, soit en agissant de toute autre manière frauduleuse, est passible, indépendamment des sanctions fiscales applicables, d’une amende de 500 000 € et d’un emprisonnement de cinq ans. Les peines sont portées à 2 000 000 € et sept ans d’emprisonnement lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou réalisés ou facilités au moyen : 1° Soit de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d’organismes établis à l’étranger ; 2° Soit de l’interposition de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable établis à l’étranger ; 3° Soit de l’usage d’une fausse identité ou de faux documents, au sens de l’article 441-1 du code pénal, ou de toute autre falsification ; 4° Soit d’une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l’étranger ; 5° Soit d’un acte fictif ou artificiel ou de l’interposition d’une entité fictive ou artificielle. Toutefois, cette disposition n’est applicable, en cas de dissimulation, que si celle-ci excède le dixième de la somme imposable ou le chiffre de 153 €. Toute personne condamnée en application des dispositions du présent article peut être privée des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues aux articles 131-26 et 131-26-1 du code pénal. La juridiction peut, en outre, ordonner l’affichage de la décision prononcée et la diffusion de celle-ci dans les conditions prévues aux articles 131-355 ou 131-39 du code pénal. La durée de la peine privative de liberté encourue par l’auteur ou le complice d’un des délits mentionnés au présent article est réduite de moitié si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, il a

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[…]

permis d’identifier les autres auteurs ou complices. Les poursuites sont engagées dans les conditions prévues aux articles L. 229 à L. 231 du livre des procédures fiscales ».

224 – Le délit de blanchiment a été introduit dans notre droit par l’article 1« de la loi n° 96-392 du 13 mai 1996 relative à la lutte contre le blanchiment et le trafic des stupéfiants et à la coopération internationale en matière de saisie et de confiscation des produits du crime. L’analyse des travaux préparatoires ayant conduit à l’adoption de ce texte législatif permet d’établir que ce dernier procède de la signature, le 5 juillet 1991, par le gouvernement français de la convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 ». L’article 6 de cette convention imposait en effet à chaque État partie d’adopter « les mesures législatives et autres qui se révèlent nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale (…) lorsque l’acte a été commis intentionnellement » à certains faits et notamment à « la conversion ou au transfert de biens dont celui qui s’y livre sait qu’ils constituent des produits, dans le but de dissimuler ou de déguiser l’origine illicite desdits biens ou d’aider toute personne qui est impliquée dans la commission de l’infraction principale à échapper aux conséquences juridiques de ses actes ainsi qu’à la dissimulation ou le déguisement de la nature, de l’origine, de l’emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété réels de biens ou de droits y relatifs, dont l’auteur sait que ces biens constituent des produits ». Le rapporteur du projet de loi devant la commission des lois au Sénat" a ainsi expliqué qu'« en l’état actuel du droit, le blanchiment ne constitue une infraction autonome que dans la mesure où il porte sur des fonds provenant du trafic de stupéfiants. C’est ce qui résulte de l’article 222-38 du nouveau code pénal dont le premier alinéa est ainsi rédigé :« Le fait de faciliter par tout moyen frauduleux, la justification mensongère de l’origine des ressources ou des biens de l’auteur (d’un trafic de stupéfiants) ou d’apporter sciemment son concours à toute opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit d’une infraction est puni de dix ans d’emprisonnement et de 1 000 000 F d’amende ». Or, l’article 6 de la convention impose l’incrimination du blanchiment de manière générale ».

225 – Il résulte des dispositions précitées de l’article 324-1 du code pénal que le législateur a prévu deux hypothèses de blanchiment : le blanchiment médiat caractérisé par le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect et le blanchiment immédiat constitué par le fait d’apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit.

226 – La notion de placement s’entend de tout acte d’administration ou de disposition quand celle de dissimulation doit être comprise comme incluant les actes matériels et juridiques d’un procédé frauduleux consistant à ne pas faire apparaître un revenu ou un bien. Quant à la notion de conversion, celle-ci désigne une opération réalisant pour une valeur équivalente un changement d’unité de compte ou d’instrument de paiement.

227 – La commission du délit de blanchiment est en droit conditionnée par la commission d’une autre infraction préalable. Supposant la commission d’une infraction initiale classiquement dénommée « infraction d’origine» ou encore « infraction

12 Cette convention a été ratifiée par la loi n° 96-730 du 21 février 1996 autorisant l’approbation d’une convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et publiée au Journal officiel de la République française par le décret n° 97-183 du 25 février 1997. 13 Cf. rapport n° 18 déposé le 11 octobre 1995 par M. DB DC, sénateur de l’Aisne. Page 67 / 82

principale », le délit de blanchiment doit être qualifié d’infraction de conséquence. Il incombe donc au juge correctionnel de caractériser l’infraction principale en tous ses éléments constitutifs, celle-ci devant seulement se révéler punissable. L’article 324-1 alinéa 2 du code pénal est par ailleurs applicable à l’auteur du blanchiment du produit d’une infraction qu’il a lui-même commise. Ces dispositions, rédigées en termes suffisamment clairs et précis pour permettre leur interprétation et leur sanction, qui entrent dans l’office du juge pénal, sans risque d’arbitraire, ne portent pas atteinte au principe constitutionnel de la légalité des délits et des peines consacré par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, l’article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et l’article 15 du Pacte international relatifs aux droits civils et politique adopté le 16 décembre 1966. En effet, l’article 324-1, alinéa 2, du code pénal, instituant une infraction générale et autonome de blanchiment, distincte, dans ses éléments matériel et intentionnel, du crime ou du délit ayant généré un produit, réprime, quel qu’en soit leur auteur, des agissements spécifiques de placement, dissimulation ou conversion de ce produit, de sorte que cette disposition est applicable à celui qui blanchit le produit d’une infraction qu’il a lui-même commise et ce sans porter nullement atteinte au principe ne bis in idem (Crim. 14 janvier 2004, pourvoi n° 03-81.165, Bull. crim. 2004, n° 12 ; Crim, 20 février 2008, pourvoi n° 07-82.977, Bull. crim. 2008, n° 43 ; Crim,, 9 décembre 2015, pourvoi n° 15-83.204, Bull. crim, 2015, n° 282 et, en dernier lieu, Crim., 17 janvier 2018, pourvoi n° 17- 80.152). .

228 – Il sera enfin rappelé ici que la poursuite du délit de blanchiment de fraude fiscale, infraction générale, distincte et autonome, n’est pas soumise aux dispositions de l’article L. 228 du Livre des procédures fiscales et n’exige donc pas de plainte préalable de l’administration fiscale (Crim, 20 février 2008, pourvoi n° 07-82.977, Bull. crim. 2008, n° 43 précité ; Crim,., 27 mars 2018, pourvoi n° 16-87,585, Bull. crim, 2018, n° 55).

2°) Sur le délit de blanchiment de fraude fiscale :

229 – Le Ministère public estime que les différentes opérations décrites ont conduit à minorer les revenus réels de M. Y et qu’ainsi, par dissimulation volontaire d’une part des sommes sujettes à l’impôt, celui-ci s’est frauduleusement soustrait à l’établissement et au paiement de l’impôt sur le revenu. Qu’ayant affecté le produit des impositions éludées au financement des dépenses courantes de la société et de sa vie personnelle, il a de la sorte réalisé diverses opérations de conversion du produit de délit de fraude fiscale à l’impôt sur les sociétés s’agissant de la SARL ACDP et sur le revenu s’agissant de sa propre personne.

230 – Par conclusions régulièrement déposées à l’audience le 4 mars 2020, le prévenu proteste de sa bonne foi tout en admettant que les opérations de vérification fiscale réalisées notamment en mars et juin 2016 ont certes abouti à la notification de propositions de rectification. Il observe cependant qu’aucune poursuite n’a été exercé contre lui et qu’à l’exception des frais relatifs à des déplacements encore indéterminés et de la facture n° 2014-12-2017, toutes les opérations de la société aujourd’hui critiquées étaient connues de M. AB. M. Y déclare avoir appliqué strictement, depuis 2007 au moins, un système comptable et financier dicté par M. H et organisé par M. Z et allègue avoir été légitimement convaincu de la parfaite légalité dudit système par les avis concordants des deux inspecteurs des finances publiques s’étant succédé pour vérifier les comptes et fonctionnement de la société et des revenus personnels à trois reprises, en 2010, 2012 et 2016.

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—  1e cp 4

« ile.

231 – Au cas présent, il résulte des développements précédents du présent jugement que M. Y a intentionnellement minoré le résultat fiscal de la SARL ACDP dont il était le représentant légal en lui faisant supporter le poids financier de ses dépenses personnelles et en dissimulant certains de ses produits par l’enregistrement de la facture précitée n° 2014-12-107 en date du 10 décembre 2014, émise par la SARL ACDP à l’encontre de l’association ECR et portant mention d’une remise à titre exceptionnel.

232 – Il n’est ainsi pas contestable que ces agissements ont abouti à la dissimulation délibérée de sommes sujettes à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés et que l’examen de la situation fiscale personnelle de M. Y et portant sur les années 2015, 2016 et 2017 a abouti à la notification à l’intéressé de deux propositions de rectification en date des 21 décembre 2018 et 20 décembre 2019. En outre, il est de même établi que la SARL AU CŒUR DES PRISONS a fait l’objet d’une vérification de comptabilité ayant porté sur les années 2013, 2014 et 2015 et donné lieu à la notification d’une proposition de rectification en date du 12 juillet 2016 (feuillets 64- 66). Quant à la SARL AU CENTRE DES PROJETS, elle a également fait l’objet d’une vérification de comptabilité au titre des exercices 2015, 2016 et 2017 ayant elle aussi donné lieu à la notification de deux propositions de rectification en date des 21 décembre 2018 et 20 décembre 2019 et concernant les exercices 2014, 2015, 2016 et 2017.

233 – Au vu de ces éléments, dès lors qu’il n’appartient au juge correctionnel que de caractériser l’infraction principale en tous ses éléments constitutifs, celle-ci devant seulement se révéler punissable, le Tribunal juge que M. Y a sciemment apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect du délit de fraude fiscale en utilisant d’une part, à des fins personnelles, les sommes ainsi éludées au titre de l’impôt sur le revenu et, d’autre part, en dissimulant ces dépenses en leur conférant l’apparence de frais engagés pour le compte de la SARL ACDP ou d’avances consenties par l’associée IKF HOLDING à cette personne morale. Le prévenu ne peut davantage utilement exciper ici, pour les motifs déjà évoqués, ni de sa bonne foi ni de l’existence d’une quelconque erreur de droit dont la reconnaissance constituerait une insulte à son intelligence. Ce dernier ne peut en effet sérieusement soutenir s’en être totalement remis à M. H, à M. P et à M. K dès lors qu’il ressort des pièces du dossier que le prévenu était au centre d’une stratégie décisionnelle reposant intégralement sur sa personne et que les précédentes condamnations pénales entourées d’une forte résonance médiatique dont il avait fait l’objet, pour des faits similaires, n’ont pu que l’instruire parfaitement, durant toutes ces années, des règles élémentaires disciplinant la vie des affaires. Quant aux surprenantes lacunes manifestées par l’administration fiscale lors de ses opérations de vérification, celles-ci ne sauraient atténuer, en aucune manière, la responsabilité pénale de M. Y lequel, quelle que soit l’insuffisance des agents auxquels il était confronté, connaissait lui précisément les arcanes du système qu’il avait personnellement conçu et mis en œuvre.

234 – Par suite, M. Y sera déclaré DL du délit de blanchiment de

fraude fiscale qui lui est reproché, celui-ci étant caractérisé en tous ses éléments constitutifs.

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235 – De manière générale, le Tribunal n’a donc pas fait sienne la ligne de défense tracée par M. Y et consistant en l’utilisation récurrente d’un argument d’autorité fondé sur l’aide, le conseil et l’assistance éblouissants d'« experts judiciaires» prétendument incontestables que lui avait recommandé un ancien magistrat instructeur (feuillet 1263). Quelle que soit la pertinence – au demeurant fort discutable à maints égards – des conseils de haut niveau ainsi prodigués par tel ou tel ou, au contraire, l’impéritie DL manifestée par certains, M. Y n’était nullement dispensé d’apprécier, en sa qualité de dirigeant social civilement et pénalement responsable, la portée juridique de chacun de ses agissements, l’excuse de la parfaite confiance accordée aux tiers ne pouvant caractériser un fait justificatif admis par la loi. La juridiction a relevé ici le recours quasi-systématique à une facilité de langage fondée sur l’invocation d’une sorte de délégation générale déresponsabilisante et devenue clause de style dont elle n’a pu que tenir compte lors de la fixation de la peine.

[…]

236 – L’article 132-1 du code pénal dispose : « (…) Toute peine prononcée par la juridiction doit être individualisée. Dans les limites fixées par la loi, la juridiction détermine la nature, le quantum et le régime des peines prononcées en fonction des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale, conformément aux finalités et fonctions de la peine énoncées à l’article 130-1 ».

237 – L’article 130-1 du code pénal énonce : « Afin d’assurer la protection de la société, de prévenir la commission de nouvelles infractions et de restaurer l’équilibre social, dans le respect des intérêts de la victime, la peine a pour fonctions : 1° De sanctionner l’auteur de l’infraction ; 2° De favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion ».

238 – Les infractions d’abus de confiance, d’abus de biens sociaux, de faux, usage et complicité de ce délit et de blanchiment de fraude fiscale dont les prévenus sont, chacun en ce qui le concerne, déclarés coupables ont non seulement gravement porté atteinte à l’ordre public économique en ce que leur commission, vérifiée sur plusieurs années, a privé l’État de la perception de sommes importantes qui lui étaient légalement dues au titre de l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés mais également livré une image déplorable de la politique partenariale de la puissance publique et ainsi préjudicié au crédit et à l’autorité de celle-ci. De tels faits d’enrichissement personnel – pénalement sanctionnés – sont d’autant plus intolérables au corps social qu’ils ont été commis par une personne fortement médiatisée et ayant usé d’un réseau d’influences particulièrement étendu pour incamer, à tort ou à raison, le légitime combat contre la surpopulation carcérale, le respect des droits des personnes privées de liberté et la prévention de la récidive. Ce significatif dommage occasionné à la confiance publique par un individu déjà condamné par le juge répressif et ayant lui-même connu l’incarcération, durant 602 jours, en raison de la commission de faits similaires (feuillet 1158) doit recevoir une réponse pénale particulièrement ferme et dissuasive.

A) M. N Y :

239 – Né le […] à […], M. Y vit actuellement en concubinage et est père de trois enfants majeures. N’exerçant aucune activité professionnelle stable, il déclare écrire des livres et vivre grâce aux fonds qui lui sont prêtées par ses amis à savoir une somme de 250 000 euros qu’il consomme progressivement depuis trois ans.

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11e CGh.1

Apparaissant encore débiteur de l’obligation alimentaire à l’égard de ses filles, l’intéressé assume les charges de la vie courante.

240 – M. Y a fait état d’une enfance marquée par la présence d’un père autoritaire et d’une mère soumise à ce dernier. Il a également mentionné un lourd événement survenu lorsqu’il était âgé d’une dizaine d’années et qu’il n’a pas souhaité préciser davantage ainsi qu’un très grave accident de moto lui ayant occasionné de profondes séquelles. Ayant initié sa vie professionnelle en marchant sur les brisées de son père dans le secteur de l’agencement de pharmacies, M. Y a indiqué avoir été « pris dans la course à l’argent et au pouvoir » et être devenu « un sale mec » que la justice avait « heureusement » arrêté. Il a estimé faire aujourd’hui « le mendiant » et s’est dit possesseur d’une villa à Cannes qu’il espère vendre au prix de 10 millions d’euros afin d’apurer ses dettes. L’intéressé a en outre déclaré être à un tournant de sa vie et que l’argent l’avait tué.

241 – Dans son rapport d’expertise psychiatrique et médico-psychologique déposé le 3 janvier 2019, le docteur CS DD, expert pres la Cour d’appel de Paris, relève l’existence d’un « propos clair, structuré, fin, ouvert à la réflexion » et d’un ton biphasique associant une « réflexion froide et pertinente» à une « émotion triste, envahissante, capable de le transporter dans des sanglots incoercibles et fulgurants accompagnés de larmes » (page 5). Il mentionne également un suivi psychiatrique depuis 21 ans réalisé à l’hôpital Saint-AY à Paris (75) et comprenant l’observation d’une efficience cognitive supérieure à la moyenne associée à une précarité émotionnelle avec une variabilité de l’humeur passant par des phases anxio- dépressives incluant des tentatives de suicide sur une personnalité comportant par moments des touches de théâtralisation et d’égocentrismne dont le sujet a parfois conscience, l’administration d’un traitement thymorégulateur et une notion de traumatisme dans l’enfance.

242 – L’expert n’a cependant pas relevé de pathologie psychiatrique de type aliénant ni de trouble psychique ou neuro-psychique ayant, au moment des faits, aboli ou altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes. Ne constatant pas l’existence d’une dépression manifeste, le praticien a cependant vérifié l’existence d’une douleur morale « si dense sur une personnalité si émotionnellement introvertie dans ses dimensions affectives que le doute existe sur la dimension de son élan suicidaire ». Il est par ailleurs observé que « l’anamnèse reflète un long suivi psychiatrique dans un parcours clinique émaillé d’accès anxio-dépressifs avec au moins une tentative de suicide grave sur une personnalité d’aspect narcissique, avec un charisme impressionnant, masquant une hypersensibilité en lien avec une éducation émotionnellement compliquée et un traumatisme psychoaffectif durant son enfance ».

243 – Le médecin psychiatre constate par ailleurs que, « derrière une épaisse carapace relationnelle propre à se confronter à l’impossible, le sujet a réussi en grande partie à prendre conscience de ses dérives sociales passées mais pas assez de l’impact des dommages émotionnels rencontrés durant son enfance et que reflète le silence lourd régnant autour de l’événement subi dans la période prépubère ». Il notait également que, «comme il est habituel de le retrouver chez les sujets avec des failles narcissiques de cette ampleur, des éléments de perversion sont retrouvés mais aucun signe patent de perversité n’a été constaté. Au contraire, le sujet fait part d’une sensibilité louable au travers de ses actions envers les personnes incarcérées ».

244 – Au total, le praticien recommande un suivi psychothérapique.

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245 – A l’audience, M. Y a évoqué le rôle destructeur de l’argent ainsi que «l’immense souffrance, la solitude de l’homme, la violence » engendrées par l’incarcération passée.

246 – Le bulletin n°1 du casier judiciaire de l’intéressé porte trace de 5 condamnations :

+ une condamnation prononcée le 10 janvier 1996 par la Cour d’appel de Lyon à une peine principale de 5 ans d’emprisonnement dont 18 mois assortis d’un sursis simple et au paiement d’une amende délictuelle de 2 000 000 francs des chefs de banqueroute par détournement d’actifs, abus de biens sociaux, abus de confiance, faux en écriture privée, usage et recel (condamnation réhabilitée de plein droit). Dans son arrêt, la Cour relève notamment : « Attendu que N Y, à partir d’une base industrielle et commerciale existante, a conçu, avec l’aide de tiers, un montage de sociétés, qui lui a permis, par l’utilisation de prêts bancaires et par une facturation fictive systématique, de se constituer un patrimoine immobilier important, de mener un train de vie fastueux et d’entretenir des relations dans les milieux politiques et médiatiques qu’il aimait fréquenter ; que l’appauvrissement de ces entreprises, déjà fragiles économiquement, évalué à 24 396 165 francs leur a occasionné de graves difficultés financières qui les ont amenées soit à cesser leurs activités, soit à déposer le bilan, s’agissant de la société BOISSON ; qu’en ED, ce système n’a eu pour but que de multiplier artificiellement les produits, ceci afin de satisfaire en priorité l’intérêt personnel de N Y et celui de ses proches » (page 66). Dans le cadre de cette condamnation, M. Y a été placé en libération conditionnelle le 12 avril 1997 ;

+ une condamnation prononcée le 14 janvier 1997 par la Cour d’appel d’Aix-en- Provence du chef d’exécution de travaux non autorisés par un permis de construire au paiement d’une amende délictuelle de 1 750 000 francs et à la démolition des ouvrages irrégulièrement bâtis (condamnation réhabilitée de plein droit) ;

+ une condamnation prononcée le 2 octobre 1997 par le tribunal correctionnel de Lyon à une peine de 18 mois d’emprisonnement assortie d’un sursis simple du chef de recel (condamnation réhabilitée de plein droit) ;

+ une condamnation prononcée le 26 février 1999 par le tribunal correctionnel de Lyon à une peine de 2 ans d’emprisonnement assortie d’un sursis simple et au paiement d’une amende délictuelle de 100 000 francs du chef de fraude fiscale (condamnation réhabilitée de plein droit) ;

+ une condamnation prononcée le 14 novembre 2003 par le tribunal correctionnel de Lyon à une peine de 18 mois d’emprisonnement assortie d’un sursis simple et au paiement d’une amende délictuelle de 15 000 euros (condamnation réhabilitée de plein droit) du chef de recel.

247 – Le 22 décembre 2000, la Cour d’appel de Lyon a ordonné le relèvement des interdictions de gérer une entreprise commerciale et une personne morale ayant frappé M. Y en exécution de l’arrêt précité rendu le 10 janvier 1996.

248 – Eu égard à l’ensemble des éléments susanalysés et au rôle prépondérant assumé par l’intéressé dans la mise en œuvre de détournements de fonds massifs s’insérant dans une stratégie délibérée de confusion de son patrimoine personnel et des

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4 4e

patrimoines sociaux auxquels il avait accès du fait de ses fonctions de direction et dont l’unique dessein était la satisfaction de l’intérêt personnel de M. Y et de ses proches, celui-ci sera condamné à une peine de 5 ans d’emprisonnement. La gravité des infractions commises et la personnalité de leur auteur lequel n’a, de manière assez déconcertante, tiré aucune des conséquences qui s’imposaient – avec la force de l’évidence – à un individu déjà lourdement sanctionné pour le même type de faits rendent cette peine nécessaire et toute autre sanction pénale manifestement inadéquate. La longueur du temps écoulé entre les condamnations précitées et la commission des faits objet du présent jugement témoigne de la confondante résolution de M. Y à enfreindre, quel que soit le risque pénal encouru et en dépit du déshonneur enduré par le passé, la loi répressive dès lors que cette violation est susceptible de faire croître son patrimoine personnel et de servir ses intérêts propres. Cette détermination est d’autant plus répréhensible que M. Y est, ainsi qu’il l’a lui-même écrit à la page 128 de ses conclusions, un « ancien détenu cible de tous les médias et victime de 1992 à 2000 au moins de l’opprobre, non seulement le symbole de la réinsertion et de la lutte pour l’amélioration des conditions de détention mais aussi l’interlocuteur de trois présidents de la République, de cinq ministres de la Justice et de dizaines de responsables de l’administration pénitentiaire ».

249 – Compte tenu des éléments de personnalité dont s’agit, de la lourdeur de la peine correctionnelle prononcée, de l’indéniable enracinement de M. Y dans une délinquance fortement rémunératrice, de l’absence de l’intéressé lors de l’audience de délibéré et de la circonstance qu’il ne saurait être exclu que celui-ci soit incité à se soustraire, autrement que par l’exercice des voies de recours légalement prévues et au bénéfice de divers soutiens, à l’application de la sanction pénale prononcée, il y a lieu pour le Tribunal d’assortir cette dernière de la délivrance d’un mandat d’arrêt sur le fondement des dispositions de l’article 465 du code de procédure pénale.

250 – Au regard de ses ressources et charges précitées de M. Y, ce dernier sera en outre condamné au paiement d’une amende délictuelle de 150 000 euros.

251 – Afin de conjurer le risque de renouvellement des faits, le Tribunal fait en outre interdiction à M. Y, de manière ED, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale ainsi que d’exercer la fonction de dirigeant de droit ou de fait d’une association et ce en application des dispositions de l’article L 249-1 du code de commerce.

252 – Les éléments ci-dessus analysés établissent que la somme saisie en numéraires de 2040 euros au domicile de M. Y et celle de 10 000 euros saisie dans le coffre détenu par celui-ci dans les locaux de l’agence de la Société générale Gouvion Saint Cyr à Paris 17e (feuillets 193 et 238) ne représentent qu’une partie du profit illégalement tiré par M. Y de la commission du délit de blanchiment de fraude fiscale. La mesure de confiscation ainsi ordonnée par le Tribunal à son encontre sur le fondement de l’article 131-21 alinéa 9 du code pénal est non seulement proportionnée au vu du montant très important des sommes issues des délits poursuivis mais nécessaire à l’effectivité de la loi pénale et à la cessation d’une situation gravement attentatoire aux intérêts de l’État. En conséquence, la demande en restitution des scellés considérée sera rejetée.

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B) Mme AY-DK E :

253 – AÂgée de 55 ans, Mme E est divorcée de M. Y depuis le 23 septembre 2004 (feuillets 676-680 ; 1426). Mère de deux enfants, elle exerce actuellement la profession de responsable administrative de gestion au sein de la SAS ACTIF SIGNAL et ce depuis le 2 juin 2008. Mme E fait état d’un cumul imposable, au titre de l’année 2019, à hauteur de la somme de 30 454, 62 euros soit 2537, 88 euros par mois et de charges fixes mensuelles pour un montant de 1348, 31 euros. L’intéressée a par ailleurs mentionné le désintérêt manifesté par son père AX E – lequel a choisi de privilégier totalement sa carrière politique au détriment de ses obligations familiales – et la souffrance endurée du fait de ce constant délaissement.

254 – Le bulletin n° 1 de son casier judiciaire ne porte trace d’aucune condamnation.

255 – Compte tenu de l’ensemble des éléments susanalysés et notamment de l’ascendant psychologique et affectif pris par M. Y sur une femme déjà fortement éprouvée par un contexte familial et conjugal particulièrement douloureux mais également de la nature des fonctions alors exercées par l’intéressée et la durée de ses agissements délictueux, Mme E sera condamnée à une peine de 15 mois d’emprisonnement intégralement assortie d’un sursis simple.

256 – Afin de conjurer le risque de renouvellement des faits, le Tribunal fait en outre interdiction ED à Mme E de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale ainsi que d’exercer la fonction de dirigeant de droit ou de fait d’une association en application des dispositions des articles 314-10 2° et 131-27 du code pénal.

IV – SUR L’ACTION CIVILE

257 – L’article 2 du code de procédure pénale dispose : « L’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ».

258 – L’article 3 du code de procédure pénale dispose : « L’action civile peut être exercée en même temps que l’action publique et devant la même juridiction. Elle sera recevable pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux, qui découleront des faits objets de la poursuite ».

259 – L’article 464 du même code énonce : « Si le tribunal estime que le fait constitue un délit, il prononce la peine. Il statue, s’il y a lieu, sur l’action civile, et peut ordonner le versement provisoire, en tout ou partie, des dommages-intérêts alloués ».

260 – L’article 475-1 du code de procédure pénale dispose – « Le tribunal condamne l’auteur de l’infraction ou la personne condamnée civilement en application de l’article 470-1 à payer à la partie civile la somme qu’il détermine, au titre des frais non payés par l’État et exposés par celle-ci. Le tribunal tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. Les dispositions du présent article sont également applicables aux organismes tiers payeurs intervenant à l’instance ».

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[…]

261 – L’article 480-1 dudit code ajoute : « Les personnes condamnées pour un même délit sont tenues solidairement des restitutions et des dommages-intérêts (…) ».

262 – L’article 1382 du code civil devenu l’article 1240 du même code énonce : « Tout Jait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

263 – En premier lieu, le Tribunal rappelle que les juridictions répressives ne sont compétentes pour connaître de l’action civile en réparation du dommage né d’une infraction qu’accessoirement à l’action publique et qu’il en résulte que ces juridictions ne peuvent se prononcer sur l’action civile que dans les limites de l’action publique.

264 – En second lieu, il sera également mentionné que la solidarité édictée pour le paiement des dommages-intérêts par les dispositions susrappelées de l’article 480-1 du code de procédure pénale s’applique aux auteurs de délits connexes. À l’inverse, ladite solidarité n’est pas applicable au paiement des frais non recouvrables lesquels ne peuvent donner lieu qu’à une condamnation in solidum. La solidarité a pour effet de rendre chacune des personnes condamnées débitrice de la totalité de la réparation du dommage sans que le juge ait la possibilité de tenir compte de la part personnelle de chacun des coauteurs et de limiter le quantum de la condamnation civile à une somme déterminée. Il en résulte que tous les prévenus sont solidairement tenus, dans les limites des conclusions des parties civiles, des dommages dus à ces dernières quand bien même est-il impossible d’individualiser les actes commis par chacun, le principe de la personnalisation des peines ne valant que pour l’application de la loi pénale et non pour la réparation civile qui découle de l’article 480-1 du code de procédure pénale. Il sera également rappelé que le prévenu disposant toujours, devant la juridiction civile, d’une action contre les autres responsables du dommage – laquelle suffit à préserver ses intérêts – les dispositions de l’article 480-1, qui ne prévoient pas la possibilité pour le prévenu de mettre en mouvement l’action publique contre d’autres personnes impliquées et, sur l’action civile, d’obtenir leur condamnation solidaire au paiement de dommages et intérêts à la victime et d’exercer contre elles, ultérieurement, une action récursoire fondée sur un recours subrogatoire, ne méconnaissent pas le droit d’exercer un recours juridictionnel.

A) Sur les conclusions de l’État :

265 – Il doit être ici rappelé que la dissimulation des biens et des droits éludés engendre obligatoirement des dommages financiers importants, compte tenu de l’ancienneté, de l’habitude et de l’importance de la fraude, entraînant nécessairement pour l’État la mise en œuvre de procédures judiciaires pour faire valoir ses droits et recouvrer ses créances, indépendamment du préjudice économique et budgétaire déjà actuel, caractérisé par l’absence de rentrée des recettes fiscales dues, spécialement en cette période d’importants déficits budgétaires au plan national.

266 – Dès lors, la constitution de partie civile de l’État est recevable sur le fondement des articles précités du code de procédure pénale. Eu égard aux éléments de l’espèce susanalysés et notamment à l’importante période des préventions, M. Y sera condamné à verser à l’État la somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice matériel et ce sans qu’il y ait lieu à application des dispositions de l’article L 51 du Livre des procédures fiscales dès lors qu’a été vérifiée l’existence d’agissements frauduleux au sens du 3° de ce texte.

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267 – Il sera également condamné à lui verser également la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

B) Sur les conclusions de la SC PAPI représentée par son mandataire ad hoc :

268 – En application des principes fondamentaux susrappelés et après avoir vérifié l’existence d’un lien de causalité direct entre le délit d’abus de confiance dont M. Y a été déclaré DL et le préjudice matériel subi par la SC PAPI régulièrement représentée par son mandataire ad hoc, il y a lieu de condamner l’intéressé à verser à ladite personne morale la somme demandée de 947 879 euros composée de celle de 900 000 euros correspondant au montant du prêt accordé à la SC PAPI par M. Z et celle de 47 879 euros représentant le montant total visé par la prévention des dépenses personnelles de M. Y assumées par la SC PAPL.

269 – Il sera également condamné à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

C) Sur les conclusions de la SARL AU CENTRE DES PROJETS représentée par son mandataire ad hoc :

270 – En application des principes fondamentaux susrappelés et après avoir vérifié l’existence d’un lien de causalité direct entre le délit d’abus de biens sociaux dont M. Y a été déclaré DL et le préjudice matériel subi par la SARL ACDP régulièrement représentée par son mandataire ad hoc selon ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris en date du 19 juin 2019, il y a lieu de condamner l’intéressé à verser à ladite personne morale la somme demandée de 776 022, 85 euros composée de celles de 96 916, 56 euros, 108 542, 47 euros, 90 386 euros, 105 175, 78 euros, 169 702, 04 euros et 205 300 euros (cf. $ 34 du présent jugement) représentant le montant total visé par la prévention des dépenses personnelles de M. Y assumées directement ou indirectement par la SARL ACDP.

271 – Il sera également condamné à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

D) Sur les lusi de l’association ECR ésentée par son datai ad hoc :

272 – En application des principes fondamentaux susrappelés, après avoir vérifié l’existence d’un lien de causalité direct entre le délit d’abus de confiance dont M. Y a été déclaré DL et le préjudice matériel subi par la l’association ECR régulièrement représentée par son mandataire ad hoc selon ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris en date du 4 juin 2019 et en conséquence des relaxes partielles prononcées, il y a lieu de condamner l’intéressé à verser à ladite personne morale la somme 78 147, 48 euros représentant le montant de la facture du 15 mars 2013 indûment assumé par l’association ECR (cf. supra $ 117 du présent jugement) et celle de 7087, 86 euros représentant le montant des notes de frais supportées indûment par l’association dont s’agit (cf. supra & 119 et suivants du présent jugement). En outre M. Y et Mme E seront condamnés à verser à la personne morale la somme de 27 000 euros représentant la facturation des frais de secrétariat par Mme I et également supportée de manière indue par la demanderesse (cf. supra $ 146 et suivants du présent jugement). L’association ECR sera par suite déboutée du surplus de ses conclusions, les autres préjudices matériels invoqués n’étant établis ni dans leur principe ni dans leur montant. Le Tribunal constate ici que le prononcé de la mesure de solidarité précitée n’a pas été

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4 1e Ch.]

âne »

demandée par l’association ECR.

273 – Mme E et M. Y seront enfin chacun condamnés à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

274 – Il n’y a toutefois pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’ordonner l’exécution provisoire des présentes dispositions civiles sur le fondement des dispositions de l’article 464 du code de procédure pénale et 515 du code de procédure civile.

275 – Le Tribunal rappelle de plus que ces condamnations civiles emportent intérêts au taux légal et que ceux-ci courent à compter du prononcé du présent jugement en application des dispositions de l’article 1231-7 alinéa 1" du code civil issu de l’article 2 de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et par – par JUGEMENT CONTRADICTOIRE à l’égard de: Y N et de E AY-DK, l’ETAT, l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE représentée par son mandataire ad hoc, parties civiles, – - PAR JUGEMENT CONTRADICTOIRE A SIGNIFIER à l’égard de la SC PAPI représentée par son mandataire ad hoc; la SARL AU CENTRE DES PROJETS représentée par son mandataire ad hoc, parties civiles :

I – SUR L’ACTION PUBLIQUE 1- Y N EA EB Y N des faits de :

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription:

— s’agissant des suppléments de presse publiés dans les journaux MÉTRO, LE POINT, LE PARISIEN et AUJOURD’HUI EN FRANCE ;

— s’agissant du projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de FRESNES.

: – ESCROQUERIE commis au préjudice de l’association _ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE le 27 novembre 2014 à Paris en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

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DÉCLARE Y N DL des faits de :

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription :

— s’agissant du paiement de la facture du 15 mars 2013 ;

— s’agissant des notes de frais établies dans le cadre de l’activité de l’intéressé au sein de ladite SARL ACDP ;

— s’agissant de la prise en charge de la rémunération de Madame AZ I. !

Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de la société IKF HOLDING au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de la société civile PAPI au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal

: – ABUS, PAR UN GÉRANT DE SARL, DE SES POUVOIRS OU DE SES VOIX, A DES FINS PERSONNELLES commis au préjudice de la SARL AU CENTRE DES PROJETS, anciennement AU COEUR DES PRISONS et ce à hauteur de 570 722,85 euros, au cours des années 2013 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

: – ABUS DES BIENS OU DU CRÉDIT D’UNE SARL PAR UN GÉRANT A DES FINS PERSONNELLES commis au préjudice de la SARL _ AU CENTRE DES PROJETS, anciennement AU COEUR DES PRISONS, et ce à hauteur de 570 722,85 euros, _ au cours des années 2013 à 2017 à PARIS Faits prévus et réprimés par les articles L241-3, L249 et L249-1 du code de commerce.

: – FAUX : ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VÉRITÉ DANS UN ÉCRIT commis au cours du mois de décembre 2015 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Faits prévus et réprimés par les articles 441-1, 441-9, 441-10 et 441-12 du code pénal

. – USAGE DE FAUX EN ÉCRITURE commis au cours du mois de décembre 2015 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Faits prévus et réprimés par les articles 441-1, 441-9, 441-10 et 441-12 du code pénal

+ COMPLICITÉ DE FAUX : ALTÉRATION FRAUDULEUSE DE LA VÉRITÉ DANS UN ÉCRIT commis au cours du mois de décembre 2015 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Faits prévus et réprimés par les articles 121-7,441-1, 441-9, 441-10 et 441-12 du code pénal

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| , ine Ch.«.

— - USAGE DE FAUX EN ÉCRITURE commis en décembre 2015 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Faits prévus et réprimés par les articles 441-1, 441-9, 441-10 et 441-12 du code pénal

: BLANCHIMENT : CONCOURS A UNE OPÉRATION DE PLACEMENT, DISSIMULATION OU CONVERSION DU PRODUIT D’UN DÉLIT PUNI D’UNE PEINE N’EXCÉDANT PAS 5 ANS commis entre les années 2014 et 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription.

Faits prévus et réprimés par les articles 324-1, 324-1-1, 324-2, 324-7, 324-8 du code pénal, 1741 et 1743 du code général des impôts

CONDAMNE Y N à un emprisonnement délictuel de CINQ ANS ;

Vu l’article 465 du code de procédure pénale : DÉCERNE mandat d’arrêt à l’encontre de Y N ;

CONDAMNE Y N au paiement d’une amende délictuelle de 150 000 euros (CENT CINQUANTE MILLE EUROS) ;

À TITRE COMPLÉMENTAIRE,

PRONONCE à l’encontre de Y N EC ED de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale.

PRONONCE à l’encontre de Y N EC ED d’exercer la fonction de dirigeant de droit ou de fait d’une association en application des dispositions de l’article L 249-1 du code de commerce.

ORDONNE la confiscation de la somme saisie en numéraires de 2040 euros au domicile de M. Y et celle de 10 000 euros saisie dans le coffre détenu par celui-ci dans les locaux de l’agence de la Société générale Gouvion Saint Cyr à Paris l 7e et ce sur le fondement des dispositions de l’article 131-21 alinéa 9 du code pénal ;

REJETTE par suite la demande en restitution de scellés présentée par M. Y ;

En application de l’article 1018 A du code général des impôts, la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 127 euros dont est redevable Y N ;

Par la présente décision, le condamné est informé qu’en cas de paiement du droit fixe de procédure dans le délai d’un mois à compter de la date du jugement, il bénéficie d’une diminution de 20% de la somme à payer. Cette réduction est également applicable au montant de l’amende prononcée.

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2 – E Annec-DK EA EB E AY-DK des faits de :

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE au cours des années 2014 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription

— s’agissant du projet de réhabilitation du plateau sportif de la maison d’arrêt de FRESNES ;

— s’agissant de l’octroi à la SARL AU CENTRE DES PROJETS (anciennement AU COEUR DES PRISONS) dont N Y était unique gérant et bénéficiaire économique, de fonds à hauteur de 50 à 59% du produit des subventions reçues par ladite association.

DECLARE E AY-DK DL des faits de :

: – ABUS DE CONFIANCE commis au préjudice de l’association ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE au cours des années 2014 à 2017 à PARIS en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription :

— s’agissant de la prise en charge de la rémunération de Madame AZ I. Faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-10 du code pénal

CONDAMNE E AY-DK à un emprisonnement délictuel de QUINZE MOIS ;

Vu l’article 132-31 al.1 du code pénal ; DIT que cette peine sera intégralement assortie d’un sursis simple ;

En raison de l’absence de E AY-DK à l’audience du délibéré, l’avertissement prévu à l’article 132-29 du code pénal n’a pu être donné par le président..

À TITRE COMPLÉMENTAIRE,

PRONONCE à l’encontre de E AY-DK – EC ED de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale.

En application de l’article 1018 A du code général des impôts, la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 127 euros dont est redevable E AY- DK ;

Par la présente décision, la condamnée est informée qu’en cas de paiement du droit fixe

de procédure dans le délai d’un mois à compter de la date du jugement, elle bénéficie d’une diminution de 20% de la somme à payer.

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11e Ch, 1 II – SUR L’ACTION CIVILE : 1- L’ÉTAT REÇOIT L’ÉTAT en sa constitution de partie civile ;

CONDAMNE Y N à verser à L’ÉTAT, partie civile, les sommes suivantes

— - 150.000 euros au titre du préjudice matériel ;

— - 1.500 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

[…] représentée par son mandataire ad hoc

REÇOIT la SC PAPI représentée par son mandataire ad hoc en sa constitution de partie civile ;

CONDAMNE Y N à verser à la SC PAPI représentée par son mandataire ad hoc, partie civile, les sommes suivantes :

—  947.879 euros (se décomposant ainsi : 900 000 euros correspondant au montant du prêt accordé à la SC PAPI par M. Z et 47 879 euros représentant le montant total visé par la prévention des dépenses personnelles de Y N assumées par la SC PAPI) ;

— - 1.500 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

3 – LA SARL AU CENTRE DES PROJETS (ACDP) représentée par son

mandataire ad hoc

RECOIT la SARL AU CENTRE DES PROJETS representee par son mandataire ad hoc en sa constitution de partie civile ; '

CONDAMNE Y N à verser à la SARL AU CENTRE DES PROJETS (ACDP) représentée par son mandataire ad hoc, partie civile, les sommes suivantes :

—  776.022,85 euros représentant le montant total visé par la prévention des dépenses personnelles de Y N assumées directement ou indirectement par la SARL ACDP ;

— - 1.500 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

[…]

REÇOIT L’ASSOCIATION ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE en sa constitution de partie civile ;

CONDAMNE Y N à verser à L’ASSOCIATION ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE, partie civile, les sommes suivantes :

—  78.147, 48 euros (représentant le montant de la facture du 15 mars 2013 indûment assumé par l’association ECR et celle de 7087, 86 euros représentant le montant des notes de frais supportées indûment par

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l’association.

CONDAMNE Y Pier:re et E AY-DK à verser à L’ASSOCIATION ENSEMBLE CONTRE LA RECIDIVE, partie civile, la sommes suivante :

—  27.000 euros (représentant la facturation des frais de secrétariat par Mme I et également supportée de manière indue par l’association). CONDAMNE Y N et E AY-DK à verser chacun à L’ASSOCIATION ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE, partie civile, la somme suivante :

— - 1.500 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

DÉBOUTE L’ASSOCIATION ENSEMBLE CONTRE LA RÉCIDIVE du surplus de ses conclusions ;

DIT n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire des présentes dispositions civiles. et le présent jugement ayant été signé par le président et

LA GREFFIÈRE

Copie certifiée conforme à la minute Le greffier

2020-1113

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Tribunal correctionnel de Paris, 2 juin 2020, n° 16347000195