Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 4, 9 novembre 2022, n° 20/12275

  • Couture·
  • Sociétés·
  • Liban·
  • Franchiseur·
  • Contrat de franchise·
  • Holding·
  • Luxembourg·
  • Redevance·
  • Pièces·
  • Contrats

Chronologie de l’affaire

Commentaire1

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Gouache Avocats · 9 mai 2023

La Cour d'appel de Paris rappelle le devoir du franchisé, en qualité de commerçant indépendant, de renseignement au cours de la phase précontractuelle et refuse l'annulation du contrat de franchise conclu en l'absence de transmission d'un DIP. La Cour d'appel de Paris dans une décision du 9 novembre 2022 interroge sur le rapport -potentiellement ambivalent - entre responsabilité du franchiseur, tête de réseau, et devoirs du franchisé, commerçant indépendant. En dépit de la reconnaissance de différents manquements du franchiseur, tant dans la phase précontractuelle qu'au cours de son …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 4, 9 nov. 2022, n° 20/12275
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/12275
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 2 février 2020
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 22 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRET DU 09 NOVEMBRE 2022

(n° 197 , 20 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/12275 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCJC2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS

Jugement de renvoi du 31 Octobre 2018 – Tribunal de commerce de PARIS – RG n°2018 000469

Jugement du 03 Février 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS

APPELANTE

S.A.R.L. D J COUTURE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

Société de droit Suisse

immatriculée au RCS de GENEVE sous le numéro 225 806 055

[Adresse 17]

[Localité 2] SUISSE

Représentée par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque B0936

INTIMEES

S.A.R.L. [D] [I] FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 440 251 429

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque D1119

S.A.R.L. [D] [I] LUXEMBOURG agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

Société de droit Luxembourgeois

immatriculée au RCS du LUXEMBOURG sous le numéro 169 124

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque D1119

SOCIETE [D] [I] HOLDING LIMITED agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

Société de droit Jersiais

immatriculée au RCS de JERSEY sous le numéro 104 207

[Adresse 11]

[Localité 13]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque D1119

SOCIETE SIM LICENSING LTD agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

Société de droit Chypriote

immatriculée au RCS de NICOSIE sous le numéro 167 067

[Adresse 8]

[Localité 4] – CHYPRE

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque D1119

SOCIETE ESG HOLDING SAL agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

Société de droit Libanais

immatriculée au RCS de [Localité 7] sous le numéro 190 007 8

[Adresse 16]

[Localité 7] – LIBAN

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque D1119

SOCIETE [D] [I] LIBAN SAL agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

Société de droit Libanais

immatriculée au RCS de BEYROUTH sous le numéro 100 543 7

[Adresse 10]

[Localité 7] – LIBAN

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque D1119

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Brigitte BRUN-LALLEMAND, Première Présidente de chambre, et Madame Sophie DEPELLEY, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BRUN-LALLEMAND, Première Présidente de chambre

Madame Sophie DEPELLEY, Conseillère,

Madame Camille LIGNIERES, Conseillère,

Greffière, lors des débats : Madame Mianta ANDRIANASOLONIARY

ARRÊT :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Brigitte BRUN-LALLEMAND, Première Présidente de chambre et par Claudia CHRISTOPHE, Greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [D] [I] est un styliste libanais présent dans la haute couture, le prêt-à-porter féminin et les accessoires. Il a ouvert différentes boutiques dans le monde ([Localité 7], [Localité 5], [Localité 14], [Localité 9], [Localité 12], [Localité 15], ') en gestion directe ou par franchise.

La société [D] [I] Holding Limited, dont le siège est à Jersey, est la holding principale de l’activité du couturier [D] [I], qui en détient 95% des parts.

La société ESG holding SAL, est une société de droit libanais dont le siège est à [Localité 7].

La société SARL Sim Licensing LTD, dont le siège est à Chypre, gère les droits de propriété intellectuelle. Elle est une filiale à 100% de la société [D] [I] Holding

La société SARL [D] [I] France, dont le siège est situé en France, exploite une boutique à [Localité 5].

La société SARL [D] [I] Luxembourg, dont le siège est situé à Luxembourg, exploite une boutique à [Localité 15].

La société [D] [I] Liban SAL dont le siège est à [Localité 7], exploite un atelier, une boutique et un showroom au Liban,

Le 8 mars 2012, la société Sim Licensing, réprésentée par MM. [M] et [N], a conclu un contrat de franchise avec la société Léoptica SA, représentée par Mme [U], pour une durée de cinq années, pour l’exploitation d’une boutique vendant des produits de la marque [D] [I] à [Localité 2], en Suisse. Ce contrat concédait l’exclusivité de la distribution de la marque [D] [I] sur tout le territoire de la Suisse romande et de l’Oberland bernois.

Le 9 mars 2012, par un avenant au contrat, la société DJ Couture représentée par Mme [U] s’est substituée à la société Léoptica en qualité de franchisé.

La boutique a officiellement ouvert à [Localité 2] le 29 novembre 2012, mais a rapidement rencontré des difficultés financières.

Le 13 août 2014, la société DJ Couture a adressé des courriels aux sociétés [D] [I] Liban Sal et [D] [I] France critiquant la politique de prix de vente, d’achats et de marges.

Les 17 et 20 septembre 2014, la représentante de la société DJ Couture a demandé au franchiseur de régler ces problèmes. Le 17 décembre 2014, le conseil de la société DJ Couture a mis le franchiseur en demeure de respecter ses obligations contractuelles avec un délai au 20 janvier 2015 pour s’exécuter. La société DJ Couture a rappelé au franchiseur l’importance de s’exécuter dans le délai imparti par mail du 15 janvier 2015.

Par courrier du 5 février 2015, le conseil de la société DJ Couture a notifié à la société SIM Licensing Ltd la résiliation du contrat de franchise pour manquements contractuels.

Les parties se sont rapprochées pour discuter des modalités de résiliation et s’accorder un délai pour mettre fin à leur accord.

Le groupe [D] [I] envisageant d’acquérir fin mai 2015 les sociétés Léoptica et DJ Couture, la société DJ Couture a continué à exploiter la boutique [D] [I].

L’acquisition n’ayant pas eu lieu dans le délai fixé par la société DJ Couture, celle-ci a confirmé la résiliation du contrat de franchise par courrier du 27 août 2015 « pour justes motifs ».

C’est dans ce contexte que par acte d’huissier du 12 octobre 2017, la société DJ Couture a assigné les sociétés Sim Licensing Ltd, [D] [I] Holding ltd, ESG Holding Sal, [D] [I] France, [D] [I] Liban sal et [D] [I] Luxembourg, devant le tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 31 octobre 2018, le tribunal a de commerce de Paris a :

— Joint les causes enregistrées sous les RG n°2015062764, RG n°2015074575 et RG n° 2016011871 sous le seul et même RG n°2018000469

— Débouté les sociétés défenderesses de leur demande en irrecevabilité ;

— Déclaré irrecevables les demandes de SARL de droit suisse DJ Couture à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding LT, ESG Holding Sal et [D] [I] Luxembourg SARL ;

— Dit que SARL de droit suisse DJ Couture est impuissante à prouver le dol et que la résolution du contrat ne peut être prononcée de ce chef au tort exclusif du franchiseur ;

— Prononcé la réouverture des débats,

— Renvoyé l’affaire devant M. Patrick Schoenahl, juge chargé d’instruire l’affaire, qui entendra les parties à son audience du 4 décembre 2018 à 10 heures sur convocations préalables et individuelles du greffe.

— Réservé les dépens.

Par jugement du 3 février 2020, le tribunal de commerce de Paris, après renvoi, a :

— Condamné la société de droit chypriote SIM Licensing LTD à verser à la société de droit Suisse DJ Couture SARL la somme de 860.000 euros ;

— Condamné la société de droit Suisse DJ Couture SARL à payer les sommes de :

*820.431 euros à la société de droit libanais [D] [I] Liban SAL,

*589.097 euros à la SARL [D] [I] France,

*25.606 dollars à la société de droit libanais [D] [I] Liban SAL, ou sa contrevaleur en euros au jour du paiement,

Avec intérêts au taux légal à compter du 18 août 2015 et anatocisme ;

— Condamné la société de droit Suisse DJ Couture SARL à payer la somme de 67.583 dollars à la société de droit libanais [D] [I] Liban SAL, ou sa contrevaleur en euros au jour du paiement ;

— Condamné la société de droit Suisse DJ Couture SARL à payer la somme de 132.500 euros à la société de droit libanais [D] [I] Liban SAL ;

— Débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires ;

— Dit qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire ;

— Condamné la société de droit suisse DJ Couture SARL et n’importe laquelle des défenderesses à payer chacune par moitié les dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 266,77 euros dont 44,25 euros de TVA.

Par déclaration reçue au greffe le 20 août 2020, la société DJ Couture a interjeté appel des deux jugements, intimant les sociétés Sim Licensing Ltd, [D] [I] holding Ltd, ESG Holding Sal, [D] [I] France, [D] [I] Luxembourg, [D] [I] Luxembourg.

Vu les dernières conclusions de la société DJ Couture, déposées et notifiées le 16 septembre 2021 par lesquelles il est demandé à la Cour de :

Vu l’article 1103 et 1104 du code civil,

Vu l’article 127 du code de procédure civile

Vu l’article L 330-3 du code de commerce

Vus les articles 5 du code de procédure civile

Vu l’article 1690 ancien du code de procédure civile,

Vu l’article L 110-4 du code de commerce,

Dire et juger la société DJ COUTURE recevable et bien fondée son appel ;

Dire et juger que le Tribunal de commerce de Paris a statué hors les limites de sa saisine au mépris de l’article 5 du code de procédure civile pour avoir prononcé des condamnations au profit des sociétés [D] [I] France et [D] [I] LIBAN qui ne formulaient aucune demande et se limitaient à ne demander que leur mise hors de cause ;

Infirmer et modifier le jugement avant dire droit 31 octobre 2018 ainsi que le jugement en date du 3 février 2020 ;

En conséquence, statuant à nouveau,

Sur la responsabilité du franchiseur,

Dire et juger que la résiliation du contrat de franchise conclu le 8 mars 2012 et modifié par avenant le 9 mars 2012 est régulièrement intervenue aux torts et griefs du franchiseur, la société SIM LICENSING le 5 février 2015 du chef du manquement à son devoir de loyauté et à toutes ses obligations tant précontractuelles que contractuelles ;

Dire et juger les sociétés du GROUPE [D] [I] solidairement responsables de la rupture de l’accord du 3 mars 2015 notifiée le 27 août 2015 ;

Dès lors,

Condamner solidairement les Sociétés SIM LICENSING LTD, [D] [I] FRANCE SARL, [D] [I] LIBAN SAL, [D] [I] HOLDING, ESG HODING SAL, [D] [I] LUXEMBOURG à réparer l’entier préjudice en résultant,

Condamner solidairement les Sociétés SIM LICENSING LTD, [D] [I] FRANCE SARL, [D] [I] LIBAN SAL, [D] [I] HOLDING, ESG HODING SAL, [D] [I] LUXEMBOURG à payer à la Société DJ COUTURE SARL les sommes de :

—  1'400705 CHF surcoût des travaux

—  575'000 CHF salaires et loyer retoucheuses

—  995'000 CHF insuffisance de marge brut 2013 à 2015

—  835'000 CHF gains manques en 2015 suite à la rupture des accords

—  409'000 CHF revenus manqués en 2016 suite à la rupture des accords

—  5'540'000 CHF de perte de revenus futurs de 2017 à 2026

Condamner la société SIM LICENSING à régler à la société DJ COUTURE la somme de 150'000€ en remboursement du droit de franchise ;

Débouter la société SIM LICENSING de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Sur les demandes de SIM LICENSING

Donner acte à la société DJ COUTURE qu’elle maintient son accord pour régler les redevances, par compensation, demeurées dues à la société SIM LICENSING pour la période antérieur au 5 février 2015, date de la résiliation et débouter la société SIM LICENSING pour le surplus,

Dire et juger que les cessions de créances du 14 août 2015 dont se prévaut la société SIM LICENSING sont inopposables à la société DJ COUTURE pour ne pas lui avoir été signifiées ;

Confirmer le jugement dont appel de ce chef et débouter en conséquence SIM LICENSING de ses demandes tendant au paiement des factures émises par [D] [I] France et [D] [I] LIBAN pour un total de 1'409'528 euros outre 93'189 dollars,

Sur les demandes formulées à titre subsidiaire par les sociétés [D] [I] France et [D] [I] Liban,

Infirmer le jugement dont appel de ce chef,

Dire et juger les demandes de [D] [I] France et de [D] [I] LIBAN irrecevables comme étant nouvelles en cause d’appel, celles-ci s’étant limitées à solliciter leur mise hors de cause en première instance,

Dire et juger de plus fort les demandes des sociétés [D] [I] France et [D] [I] Liban irrecevables, leur action en recouvrement de factures se révélant prescrite puisque datant du 20 avril 2021 dans le corps des écritures prises en la présentes procédure et régularisant appel incident et à titre subsidiaire de ce chef,

En tout etat de cause :

Débouter les sociétés SIM LICENSING LTD, [D] [I] FRANCE SARL, [D] [I] LIBAN SAL, [D] [I] HOLDING, ESG HODING SAL, [D] [I] LUXEMBOURG de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Condamner solidairement les sociétés intimées à verser à la Société DJ Couture la somme de 80'000 € par application des dispositions de l’Article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamner solidairement la Société SIM LICENSING LTD et les Sociétés [D] [I] LIBAN SARL, [D] [I] FRANCE SARL, ESG HOLDING, [D] [I] HOLDING SAL, [D] [I] LIBAN SAL et [D] [I] LUXEMBOURG SARL aux entiers dépens de l’instance.

Vu les dernières conclusions des six sociétés intimées, déposées et notifiées le 19 avril 2022 par lesquelles il est demandé à la Cour de :

Vu les articles 1134, 1135, 1147, 1149, 1153, 1153-1 et 1154 du Code civil ;

Vu l’article 1202 du code civil ;

Vu le contrat de franchise du 8 mars 2012 tel que modifié par l’avenant du 9 mars 2012 ;

Vu les pièces versées aux débats et notamment les 2 cessions de créances (pièces 25 f et 25 g) ;

Vu les jugements du tribunal de commerce des 31 octobre 2018 et 3 février 2020,

Vu l’appel du 20 août 2020,

Déclarer les concluants recevables et bien fondés en leurs demandes ;

Statuant à nouveau

Débouter la société DJ COUTURE de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions ;

Juger que seule la société SIM LICENCING LT est liée contractuellement au franchisé, DJ COUTURE SARL ;

En conséquence,

Juger que les sociétés [D] [I] HOLDING LT, ESG HOLDING SAL, [D] [I] LUXEMBOURG SARL sont mises hors de cause ;

Au fond

Juger que le franchiseur SIM LICENSING LT n’a commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité ;

En conséquence

Débouter DJ COUTURE SARL de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Declarer les sociétés concluantes recevables et bien fondées en leur appel incident.

Infirmer le jugement rendu le 03 février 2020.

Statuant à nouveau

Juger que la société DJ COUTURE SARL a commis une faute en résiliant abusivement le contrat de franchise signé le 8 mars 2012 pour une durée de 5 ans ;

Juger que la société DJ COUTURE SARL a commis une faute quasi délictuelle en rompant brutalement et pour des motifs de circonstance l’accord trouvé en mars 2015 ;

En conséquence

Condamner la société DJ COUTURE SARL à payer à la société SIM LICENCING LDT la somme globale de 1.312.000 euros à titre de dédommagement pour le préjudice résultant du manque à gagner sur la vente des vêtements de la marque et le versement des royalties sur la durée du contrat restant à courir ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL à payer à la société SIM LICENCING LT la somme de 1.043.000 euros à titre de relocalisation dans le nouveau local que le franchiseur a dû chercher, trouver et est en cours d’aménagement pour correspondre à la marque [D] [I] ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL à payer à la société SIM LICENCING LT la somme de 91.000 euros à titre de remboursement des honoraires de conseil liés à la proposition d’acquisition du fonds de commerce du franchisé ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL à payer à la société SIM LICENCING LT la somme de 1.000.000 euros à titre de dédommagement en réparation de l’atteinte à l’image à la réputation et la perte d’emprise commerciale ;

Rappeler que l’article 1153-1 du code civil dispose qu’une condamnation judiciaire à payer une somme d’argent emporte de plein droit l’application d’un intérêt taux légal ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL à payer à la société SIM LICENCING LT les créances non honorées à savoir

' 820.431 euros ;

' 589.097 euros ;

' 25.606 dollars, ou sa contrevaleur eu euros au jour du paiement ;

' 67.583 dollars ou sa contrevaleur en euros au jour du paiement ;

Subsidiairement sur ces créances,

Condamner la société DJ COUTURE SARL à payer les sommes de :

* 820.431 euros à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL ;

* 589.097 euros à la Société [D] [I] France ;

* 25.606 dollars à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL, ou sa

contrevaleur eu euros au jour du paiement ;

* 67.583 dollars à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL ou sa

contrevaleur en euros au jour du paiement ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL à verser à la société SIM LINCENSING LT et/ou le cas échéant aux sociétés [D] [I] Liban et [D] [I] France, les intérêts de retard à compter du 18 août 2015, date de la première mise en demeure, sur le retard de paiement des sommes suivantes :

* 820.431 euros à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL ;

* 589.097 euros à la Société [D] [I] France ;

* 25.606 dollars à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL, ou sa

contrevaleur eu euros au jour du paiement ;

* 67.583 dollars à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL ou sa

contrevaleur en euros au jour du paiement ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL à verser à la société SIM LINCENSING LT et/ou le cas échéant aux sociétés [D] [I] Liban et [D] [I] France, des intérêts sur les intérêts de retard par application de l’article 1154 du code civil sur les sommes suivantes :

* 820.431 euros à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL ;

* 589.097 euros à la Société [D] [I] France ;

* 25.606 dollars à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL, ou sa

contrevaleur eu euros au jour du paiement ;

* 67.583 dollars à la Société de droit libanais [D] [I] LIBAN SAL ou sa

contrevaleur en euros au jour du paiement ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL à payer une somme de 30.000 euros par application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société DJ COUTURE SARL aux entiers dépens de l’instance.

******

L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 avril 2022.

A l’audience de plaidoirie du 25 mai 2022 l’affaire a été renvoyée à l’audience du 7 septembre 2022.

Une nouvelle clôture a été prononcée au 7 septembre 2022.

A l’audience du 7 septembre 2022 l’affaire a été mise en délibéré au 9 novembre 2022.

******

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur la demande de réouverture des débats faite en cours de délibéré

Par conclusions « de procédure afin de réouverture des débats » des sociétés intimées déposées sur RPVA le 8 octobre 2022, il est sollicité la réouverture des débats au motif qu’à l’audience du 25 mai 2022, l’affaire a fait l’objet d’un renvoi sans qu’aucun bulletin de renvoi n’ait été adressé à leur avocat et qu’en violation de l’article 6 de la CEDH, le dossier a été plaidé à l’audience du 7 septembre 2022, sans que les sociétés intimées aient été informées de cette date.

Par message RPVA du 23 septembre 2022, la Cour a rappelé la procédure et invité les parties à présenter leurs observations.

Sur ce,

Les parties ont été destinataires le 11 octobre 2021 d’un avis de fixation pour l’audience de plaidoirie du 25 mai 2022.

Par courrier du 10 mai 2022, le conseil de la société DJ Couture a sollicité un renvoi de l’audience de plaidoirie fixée au 25 mai 2022, demande à laquelle le conseil des sociétés Sim Licensing et autres sociétés intimées ne s’est pas opposé par courrier du 12 mai 2022 tout en demandant « un renvoi à une date proche ».

A l’audience du 25 mai 2022, en la seule présence du conseil de la société DJ Couture, la Cour a fait doit à cette demande de renvoi, et l’affaire a été renvoyée au 7 septembre 2022.

Si aucun bulletin d’avis de renvoi n’a été envoyé par le greffe, le feuilleton d’audience sur lequel est inscrit la date de renvoi était consultable auprès du greffe, de même que celui-ci était joignable par la partie qui ne s’est pas présentée à l’audience du 25 mai 2022 à laquelle elle était régulièrement convoquée et au cours de laquelle le renvoi a été décidé. Le conseil des sociétés intimées ne conteste pas que la date de renvoi figurait également sur l’interface RPVA auquel il a accès.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, et du caractère écrit de la procédure, la cour dit n’y avoir lieu à la réouverture des débats.

Sur les demandes formées par la société DJ Couture à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding Ltd, ESG Holding SAL, [D] [I] Luxembourg, [D] [I] Liban SAL et [D] [I] France

Au dispositif du jugement du 31 octobre 2018, le tribunal de commerce de Paris a déclaré irrecevables les demandes de la société DJ Couture à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding Ltd, ESG Holding Sal et [D] [I] Luxembourg Sarl.

Au dispositif du jugement du 3 février 2020, le tribunal a débouté la société DJ Couture de l’ensemble de ses demandes formulées à l’encontre des sociétés [D] [I] Liban et [D] [I] France, en ce qu’il a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

En appel, les sociétés intimées relèvent que les demandes de la société DJ Couture sont fondées sur le contrat de franchise conclu le 8 mars 2012 et modifié par avenant du 9 mars 2012 avec la société Sim Licensing Ltd et elle seule, en sorte que la société DJ Couture ne peut mettre en cause la responsabilité contractuelle des sociétés [D] [I] Holding Ltd, ESG Holding SAL, [D] [I] Luxembourg, [D] [I] Liban SAL et [D] [I] France et demandent en conséquence à la Cour :

— la mise hors de cause des sociétés [D] [I] Holding ltd, ESG Holding Sal et [D] [I] Luxembourg Sarl,

— de débouter la société DJ Couture de l’ensemble de ses demandes,

La société DJ Couture, à l’appui de son appel des jugements du tribunal de commerce, et au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, L330-3 et L110-4 du code de commerce, demande à la Cour :

Dire et juger que la résiliation du contrat de franchise conclu le 8 mars 2012 et modifié par avenant le 9 mars 2012 est régulièrement intervenue aux torts et griefs du franchiseur, la société SIM LICENSING le 5 février 2015 du chef du manquement à son devoir de loyauté et à toutes ses obligations tant précontractuelles que contractuelles ;

Dire et juger les sociétés du Groupe [D] [I] solidairement responsables de la rupture de l’accord du 3 mars 2015 notifiée le 27 août 2015 ;

Condamner solidairement les Sociétés Sim licensing ltd, [D] [I] France sarl, [D] [I] Liban sal, [D] [I] Holding, ESG Hoding Sal, [D] [I] Luxembourg à réparer l’entier préjudice en résultant, et à payer à la Société DJ Couture Sarl les sommes de :

—  1'400705 CHF surcoût des travaux

—  575'000 CHF salaires et loyer retoucheuses

—  995'000 CHF insuffisance de marge brut 2013 à 2015

—  835'000 CHF gains manques en 2015 suite à la rupture des accords

—  409'000 CHF revenus manqués en 2016 suite à la rupture des accords

—  5'540'000 CHF de perte de revenus futurs de 2017 à 2026

Cela étant exposé, l’ensemble des demandes de la société DJ Couture formulées à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding Ltd, ESG Holding SAL, [D] [I] Luxembourg, [D] [I] Liban SAL et [D] [I] France sont fondées sur l’inexécution du contrat de franchise auquel elles n’étaient pas parties.

Pour justifier ses demandes de condamnation « conjointe et solidaire » des sociétés intimées, la société DJ Couture évoque le fait que Mme [U] a été en relation avec MM. [N], [O], [C] ou Mme [J] du "Groupe [I]« , que la société Licensing n’était qu’une société filiale »exotique« du groupe et vraisemblablement non solvable et que le seul »centre de profit" du Groupe [D] [I] est la société Holding [D] [I] Sal et ESG Holding.

Au regard de ces éléments, certes la société DJ Couture avait un intérêt légitime à attraire ces sociétés du Groupe Elise [I] dans la cause, et en application de l’article 31 du code de procédure civile ses demandes sont recevables et les sociétés intimées n’ont pas à être mise hors de cause. Aussi, le jugement du 31 octobre 2018 sera infirmé en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes de la société DJ Couture à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding LT, ESG Holding SAL et [D] [I] Luxembourg Sarl.

En revanche sur le fond, non seulement la société DJ Couture n’évoque aucun élément de fait tangible de la part de ces sociétés susceptibles de caractériser une faute ayant contribué à l’inexécution du contrat de franchise dont la réparation des conséquences préjudiciables est réclamée, mais encore n’invoque aucun élément de droit de nature à engager la responsabilité contractuelle ou extra-contractuelle de ces sociétés.

En conséquence, la société DJ Couture sera déboutée de l’ensemble de ses demandes formulées à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding Ltd, ESG Holding SAL, [D] [I] Luxembourg, [D] [I] Liban SAL et [D] [I] France.

Sur les demandes d’indemnisation de la société DJ Couture formulées à l’encontre de la société Licensing Ltd, franchiseur

La société DJ Couture demande à la Cour de constater que la résiliation du contrat de franchise est intervenue aux torts et griefs du franchiseur et sollicite la condamnation de la société Sim Licencing de l’indemniser du préjudice en découlant à hauteur des sommes suivantes :

—  1'400705 CHF surcoût des travaux

—  575'000 CHF salaires et loyer retoucheuses

—  995'000 CHF insuffisance de marge brut 2013 à 2015

—  835'000 CHF gains manques en 2015 suite à la rupture des accords

—  409'000 CHF revenus manqués en 2016 suite à la rupture des accords

—  5'540'000 CHF de perte de revenus futurs de 2017 à 2026.

*Sur la réticence dolosive et les manquements pré-contractuels

Comme devant le tribunal de commerce, la société DJ Couture fait valoir une réticence dolosive ou à tout le moins une faute pré-contractuelle du franchiseur en s’abstenant de la renseigner en toute loyauté et transparence sur :

— le coût réel des travaux d’aménagement de la boutique

— le nombre requis de retoucheuses en l’état du chiffre d’affaires à réaliser et compte tenu de la spécificité des produits vendus.

La société Sim Licensing conteste toute réticence dolosive.

Réponse de la Cour,

Par des motifs pertinents que la cour adopte, reprenant l’ensemble des échanges pré-contractuels entre les parties et non utilement contestés à hauteur d’appel, le tribunal a retenu dans son jugement du 31 octobre 2018 que si le franchiseur n’avait effectivement pas fourni de document d’information précontractuelle (DIP) comme l’impose la loi française choisie par les parties au contrat de franchise à l’article L330-3 du code de commerce, la société DJ Couture ne démontre cependant pas en quoi l’absence de ce document avait vicié son consentement ni de la réalité d’une réticence dolosive du franchiseur ou de grossières erreurs de sa part lors la phase pré-contractuelle sans lesquelles la société DJ Couture n’aurait pas contracté et que la résolution du contrat ne peut être de ce chef prononcée aux torts exclusifs du franchiseur.

Il sera ajouté par la Cour les motifs suivants :

Comme l’a souligné le tribunal, il ressort des échanges sur la période 2008 puis du 6 juin 2011 au 8 mars 2012 entre Mme [U] et les interlocuteurs [D] [I] (notamment M. [N] signataire du contrat de franchise au nom de Sim Licensing) que la boutique Elise [I] ouverte par la société DJ Couture à [Localité 2] était la première sous contrat de franchise dans le Groupe [D] [I] et ce sous l’impulsion insistante de Mme [U] désireuse de se lancer dans cette activité.

S’agissant de l’information donnée sur le coût des travaux d’aménagement de la boutique spécifiques à la marque [D] [I], il est constant qu’aucun DIP au sens précis des articles L330-3 et R330-1 du code de commerce n’a été communiqué à Mme [U]. Néanmoins il est produit aux débats par les parties, un courriel du 7 juin 2011(pièce DJ n°57 et traduction libre – reproduit dans le jugement du 31 octobre 2018 pages 16 et 17) aux termes duquel un interlocuteur du groupe [D] [I], M. [N], a donné des informations « basiques » relatives au contrat de franchise et notamment quelques exigences sur la taille recommandée du magasin, ainsi que des informations sur les frais de design à la charge du franchiseur et que sur la base de leur expérience, le coût de la décoration et du mobilier de la boutique était approximativement de 2000 € par m2 (sur la base de prix libanais). A la suite d’un rendez-vous début juillet 2011 à [Localité 5], Mme [U] a demandé des précisions sur la franchise Elle écrit notamment « the price per square meter for décoration/furnishing that you have indicated seems very higt. Are your sure about this figure » (Le prix que vous m’avez indiqué pour le coût au mètre carré de la décoration/ameublement me paraît élevé ; êtes-vous sur cela '), ce à quoi il lui a été répondu : « Already provided in previous emails – bases on lebanon cost approx USS 2,500 sqr/m » (ce qui vous a été communiqué dans un mail précédent est fondé sur les coûts au Liban, approx USS 2,500/Sqr/m » (échange de courriels et traduction libre pièce n°59 [D] [I])

S’agissant du personnel nécessaire pour tenir la boutique, le même courriel du 7 juin 2011 (pièce DJ n°57) précisait qu’une boutique « typique » nécessitera le personnel suivant :

—  1 responsable de magasin ou responsable de la marque

—  1 assistant responsable de magasin ou styliste

—  2 vendeurs

—  1 couturier (pour les modifications) – autrement cette opération peut être externalisée au début jusqu’à ce que le volume soit déterminé

— du personnel supplémentaire sera nécessaire, comme un chauffeur, un assistant,etc… pour livrer les clients lorsque la collection doit être apportée au domicile du client.

A la suite de cet échange d’information et de rencontre entre les parties à [Localité 5], s’en est suivie courant octobre et novembre 2011 ( pièces [D] [I] n° 60 à 74) une négociation menée par Mme [U] elle-même sur les conditions financières du contrat de franchise (coûts pris en charge par le franchiseur, offre de consignement du stock, honoraire de franchise, royalties ). Il ne ressort pas de ces échanges pré-contractuels et des pièces versées par la société DJ Couture ( notamment n°93, 131, 132, 133, 11, 12, 89bis, 136, 62) de question précise, voir « d’injonction de communiquer », de la part de Mme [U] concernant l’aménagement/ décoration de la boutique, ou de demande particulière d’échange avec d’autres boutiques, telle que [Localité 5], pour en apprécier les conditions d’exploitation. Comme l’a souligné le tribunal, le bail du local a été signé en octobre 2011 soit bien avant la signature du contrat de franchise (8 mars 2012) mettant en mesure Mme [U] de procéder à un chiffrage des travaux nécessaires à la réalisation de la boutique, tant au niveau du gros-oeuvre que de l’aménagement intérieur et décoration de la boutique.

Dès lors, il ne ressort nullement des échanges pré-contractuel entre les parties de manoeuvres dolosives de la part du franchiseur visant à dissimuler intentionnellement des informations, ni de déloyauté particulière pour la communication d’information dans un secteur très confidentiel de la haute-couture.

*Sur les manquements allégués relatifs à l’exécution des travaux d’aménagement de la boutique

La société DJ Couture fait valoir que le budget total de l’aménagement de la boutique a été d’environ 1 920 000 CHF, alors que le coût annoncé était de 520 000 CHF (sur la base de 2 000 €/m2) et sur la base duquel elle avait établi ses prévisionnels d’exploitation approuvés par le franchiseur, soit un dépassement d’environ 1 420 000 CHF avec en outre plus de trois mois de retard dans l’ouverture de la boutique. Elle attribue ce dérapage de budget d’une part aux critères d’aménagement incomplets et fluctuants imposés au franchisé et d’autre part aux manquements des deux architectes mandatés par [D] [I]. La société DJ Couture soutient qu’avec ce dérapage, au jour de l’ouverture, la boutique démarrait avec un déficit important mettant ses actionnaires dans l’obligation d’injecter des fonds supplémentaires pour permettre la poursuite de l’exploitation. Elle critique le jugement en ce qu’il a minimisé le préjudice en résultant et retenu que 50 % de la responsabilité à la charge de la société [D] [I].

La société Sim Licensing réplique que le surcoût des travaux et le retard pris dans l’ouverture de la boutique sont directement imputables à la mauvaise gestion du franchiseur.

Réponse de la Cour,

Par des motifs pertinents que la our adopte, le tribunal a retenu divers manquements de la part du franchiseur dans la définition préalable des travaux nécessaires à l’agencement de la boutique suivant les standards de l’enseigne ainsi que dans la conduite de ces travaux d’aménagement, et que ces manquements s’ils peuvent justifier l’indemnisation d’une part du préjudice de la société DJ Couture ne peuvent cependant constituer un motif de résiliation du contrat aux torts exclusifs du franchiseur plusieurs années après la réalisation de ces travaux et l’exploitation de la boutique.

Il sera ajouté par la cour les motifs suivants :

S’agissant du chiffrage des travaux, dans son prévisionnel communiqué par mail le 12 octobre 2011 à M. [N], et alors que le bail commercial de la boutique de [Localité 2] était signé, Mme [U] s’est bornée à évaluer le montant des travaux pour l’aménagement et décoration de la boutique à la somme de 530 000 CHF sur la base 2000 euros m2/250m2. Il a été observé dans les motifs qui précèdent, qu’au cours des échanges pré-contractuels, l’interlocueur [D] [I] a bien précisé que l’évaluation à 2000€/m2 était basé sur des prix libanais et qu’il était seulement évoqué de la décoration/ameublement entre les parties. Alors qu’il résulte de l’ensemble des pièces et explications des parties, que les travaux d’aménagement de la boutique n’ont pas constitué en une simple décoration/ ameublement, mais ont nécessité des travaux de gros-oeuvre, la société DJ Couture ne pouvait sérieusement se contenter pour son prévisionnel d’un chiffrage sur la base de 2000 euros du m2 à [Localité 2] sans charte graphique, plan et documentation sur les agencements souhaités par la franchiseur, étant observé qu’elle était informée de l’aménagement luxueux des boutiques [D] [I] pour s’être rendue à plusieurs reprises à [Localité 5] ou à [Localité 7]. Par ailleurs, la société DJ Couture ne donne aucune explication ou précision sur l’état dans lequel se trouvait le local loué ainsi que la nature et l’ampleur des travaux qui ont effectivement été réalisés.

S’agissant de l’exécution des travaux, le contrat de franchise signé en mars 2012 stipulait à l’article 6 Magasin que le franchisé était tenu « à ses propres frais, d’équiper, et de maintenir le Magasin tel que recommandé par le Franchiseur et selon les normes les plus élevées et de refaire à neuf ou aménager le Magasin conformément au Manuel d’utilisation et les mises à jour pertinentes du Manuel d’utilisation(…). Le Franchiseur assurera toute les conceptions, décoration intérieur ou plans du Magasin ». Ainsi, il n’est pas contesté par les parties que la société DJ Couture s’est engagée à respecter les plans, agencements et mobiliers attendus du franchiseur [D] [I]. Cependant, à cet effet, il résulte des différentes pièces versées aux débats par la société DJ Couture (notamment pièces DJ n° 9, 169, 170, et pièces n°7, 8,11 [D] [I]) que la coordination du chantier a été particulièrement laborieuse par le fait que les maître d’oeuvre et architecte du franchisé à [Localité 2] devaient collaborer à distance avec un cabinet libanais et architecte italien mandatés par le franchiseur, multipliant au fur et à mesure de l’avancement des travaux, des exigences et contradictions. Il est observé que les dysfonctionnements et manquements relevés par la société DJ Couture (pièce n°9) à l’égard du cabinet Richani représentant des concepts du franchiseur [D] [I] ne sont pas sérieusement contestés par la société Sim Licensing, même si elle verse aux débats diverses pièces (notamment n°7 à 9, 11 à 17) soulignant les difficultés également rencontrées par Mme [U] avec son entrepreneur qu’elle a ensuite révoqué et remplacé par un autre maître d’oeuvre et architecte en cours de chantier.

Il résulte de l’ensemble de ces constatations, que c’est à juste titre que la tribunal a retenu des manquements de la part du franchiseur Sim Licensing dans la définition préalable des travaux nécessaires à l’agencement de la boutique et dans le suivi de leur exécution, mais n’ayant contribué que pour une part dans la dérive des coûts des travaux d’aménagement de la boutique de la société DJ Couture et dans le retard pris pour l’ouverture de la boutique, et évalué à la somme de 1 720 000 euros non utilement contestée à hauteur d’appel suivant les différentes consultations versées aux débats ([L], [P], Sorgem). La cour retiendra également une part de 50% de ce surcoût à la charge de la société Sim Licensing, soit la somme de 860 000 euros et le jugement sera confirmé sur ce point.

*Sur les manquements allégués relatifs à l’exploitation de la boutique

La société DJ Couture invoque divers manquements du franchiseur lors de l’exécution du contrat, à savoir une marge convenue jamais atteinte, des retards systématiques de livraison, le sort des stocks, des pratiques discriminatoires, une rupture d’égalité entre distributeur et le non respect de l’exclusivité territoriale. Elle soutient ensuite que ces manquements sont à l’origine de l’exploitation déficitaire de la boutique pour l’avoir empêchée de réaliser la marge d’exploitation lui permettant d’équilibrer ses comptes et justifiant ainsi la résiliation aux torts du franchiseur tant en droit qu’en fait.

La société Sim Licensing conteste l’ensemble des manquements qui lui sont reprochés.

Réponse de la Cour,

Par des motifs pertinents non utilement contredits par la société appelante et que la cour adopte, le tribunal a retenu que l’ensemble des manquements allégués sur l’exécution déloyale du contrat par le franchiseur, à savoir le non-respect de la marge convenue et le mark-up de 2,8, les retards de livraison et l’imposition de périodes de soldes, l’inégalité de traitement entre distributeur, le traitement du stock du franchisé, le prix imposé en constante modification, la violation de l’exclusivité territoriale et de l’obligation d’assistance, n’étaient pas démontrés par la société DJ Couture.

Il sera ajouté par la cour sur la marge et la rentabilité de la boutique :

En premier lieu, il ne peut se déduire des pièces n°131 et 57, 93 que le prévisionnel sur 5 ans transmis par la société DJ Couture à son interlocuteur [D] [I] le 12 octobre 2011 a été discuté et avalisé par le franchiseur, ni même un accord réitéré en juillet 2012 (pièce n°83) après la signature du contrat de franchise.

En deuxième lieu, comme l’a relevé le tribunal, et contrairement à ce que soutient la société DJ Couture, il ne ressort ni des échanges pré-contractuels (notamment pièces DJ Couture n° 57et 131) ni du contrat de franchise, ni des échanges au cours de l’exécution du contrat (pièces DJ Couture n°12,14 et 15) que la société franchiseur s’est contractuellement engagée à un taux de marge commerciale de 65%, soit un coefficient de 2,85 entre le prix d’achat des vêtements par DJ Couture et le prix de vente avant remise (« full retail price ») tel que recommandé par le franchiseur.

En troisième lieu, s’agissant de l’exploitation déficitaire de la boutique (hors charge d’amortissement) :

Le rapport établi par Mme [L] le 9 mars 2017 pour le compte de la société DJ Couture, relève que l’écart entre les prévisions d’exploitation faites en 2012 sur 5 ans par le franchisé et les réalisations de 2013 à 2015 s’explique principalement par l’insuffisance de marge et les frais de personnel.

Il est constaté dans ce rapport que le volume des ventes est cohérent avec les prévisions établies en 2012, mais que les prix pratiqués et les conditions d’approvisionnement étaient décidés par la maison [D] [I], en sorte que si DJ Couture avait atteint ses objectifs de fréquentation les conditions imposées par [D] [I] n’ont pas permis d’atteindre la marge prévue de 62% (ou mark-up de 2,8). La société DJ Couture soutient que les prix imposés par le franchiseur et les retards de livraison ne lui ont pas permis de réaliser le taux de marge de 2,8 nécessaire pour la rentabilité de sa boutique. Il est en outre soutenu dans le rapport que l’atelier de couture explique à lui seul le dépassement des coûts de personnel, et que la société DJ Couture n’avait pas suffisamment été alertée par leur franchiseur quant aux exigences relatives à ce budget.

Cependant, les pièces versées aux débats par la société DJ Couture, essentiellement des courriels ou tableaux rédigés et réalisés par Mme [U] elle-même ou des factures non explicitées (notamment pièces n°12 à 23, 64 à 66, 69 à 77, 135 à 140), sont insuffisantes pour établir des manquements caractérisés et récurrents de la part du franchiseur tels que retards de livraison, discrimination ou inégalité de traitement entre distributeur ou politique de prix déloyale pouvant entraver la rentabilité de l’activité de la société DJ Couture. Par ailleurs, l’atteinte à l’exclusivité territoriale soulevée par la société DJ Couture concerne des faits courant 2015 qui n’ont pu avoir d’incidence sur une exploitation de la boutique depuis 2012.

En outre, le franchiseur soutient, sans être sérieusement contredit par la société DJ Couture (notamment aux termes du rapport [L] en réponse du 23 mai 2018), que le déficit d’exploitation était lié à la politique commerciale adoptée par le franchisé. Il fait observer que le mark-up de 2,8 ne pouvait être obtenu que sur le prix de vente avant remise (full retail price) ce dont Mme [U] avait été bien informée lors de l’établissement de ses prévisionnels (pièce n° 70,7/7). Or, le franchiseur relève après analyse de la politique des prix de la société DJ Couture à partir du serveur tiers ( rapport Sorgem pages 31 et suivantes pièce n°54) que celle-ci avait une stratégie commerciale basée sur une pratique élevée de remise détériorant mécaniquement sa marge commerciale. Il est en outre relevé que la société DJ Couture ne respectait pas les indications de prix fournis par le franchiseur en pratiquant de nombreuses remises, adoptant ainsi une stratégie de volume au détriment de la marge, ce qui avait un impact négatif sur la rentabilité de la boutique. Il est ajouté que cette stratégie contribuant à augmenter les pièces vendues sans que le chiffre d’affaires n’évolue dans les mêmes proportions en raison des remises, ont conduit mécaniquement à augmenter les retouches sur des pièces sophistiquées et donc du besoin en personnel de couturières contrairement aux prévisions initiales. (Rapport Sorgem pages 24 et 25). Le franchiseur justifie avoir alerté la société DJ Couture sur les effets négatifs de cette stratégie commerciale (pièces DJ Couture n°23). Enfin, ces constats ne sont pas utilement contredits par la société DJ Couture notamment au regard de la spécificité de l’activité et des habitudes de sa clientèle.

De l’ensemble de ces constatations, il en ressort que les griefs formulés par le conseil de la société DJ Couture dans son courrier de mise en demeure du 17 décembre 2014 et ayant donné lieu au premier courrier de notification de résiliation du contrat de franchise du 5 février 2015 par la société DJ Couture ne sont pas établis.

*Sur les manquements allégués relatifs à la négociation post-résiliation

La société DJ Couture fait valoir en substance qu’à la suite de son courrier du 5 février 2015, elle a accepté d’entrer en pourparlers transactionnels et qu’il avait été convenu que le contrat de franchise se poursuivait jusqu’à fin décembre 2015 pour une reprise de la boutique par [D] [I] par acquisition de DJ Couture et de Leoptica pour le bail commercial. Alors qu’un accord était en cours de finalisation en mars 2015, la société DJ Couture soutient que le groupe [D] [I] a diligenté une procédure de « due diligences »retardant la régularisation de la vente et au cours de laquelle elle n’a cessé d’être sollicitée pour transmettre de multiples pièces déjà en sa possession, dans le seul but en réalité d’endormir sa confiance, de l’asphyxier financièrement, et de gagner du temps pour permettre au franchiseur d’organiser le reprise en directe de l’activité à [Localité 2]. Elle explique avoir été victime d’une machination et d’une violation de l’exclusivité territoriale courant 2015, la conduisant à renoncer au projet d’acquisition pour sauver son activité.

La société Sim Licensing réplique pour l’essentiel que la société DJ Couture a violé ses obligations contractuelles en résiliant abusivement le contrat de franchise. Elle expose qu’à la suite des pourparlers entre les parties un accord pour une vente (et non une indemnisation) a été trouvé entre les parties avec une reprise globale du « commerce » et à la demande de Mme [U], la cession des deux sociétés (DJ Couture et Leoptica), dont l’une est titulaire du bail commercial. Elle précise que le contrat de bail (emplacement privilégié du magasin avec un loyer faible à l’échelle de [Localité 2]), les travaux déjà effectués ainsi que la clientèle étaient les actifs les plus importants et essentiels, en sorte que [D] [I] a accepté le principe d’une reprise du « commerce » par l’acquisition des deux sociétés sous la condition d’accomplir la procédure de « due diligence ». Cette procédure a cependant révélé plusieurs risques substantiels concernant les locaux et la fiscalité. La société Sim Licensing soutient qu’elle a eu toutes les difficultés à obtenir de la part de la société DJ Couture les pièces nécessaires pour lever les risques, et en particulier une attestation du bailleur et que devant cette situation, c’est la société DJ Couture qui a rompu les pourparlers sur un motif de pure circonstance de violation de l’exclusivité territoriale, mis fin à l’opération, fermé boutique et enlevé l’enseigne.

Réponse de la Cour,

Il ressort de l’ensemble des échanges entre les parties entre le 25 février 2015 et le 27 août 2015 (pièces [D] [I] 86 à 90, 30) que les parties étaient effectivement arrivées à un accord sur la vente des actions DJ Couture et Leoptica au groupe [D] [I] courant mars 2015. Au regard des actifs de la cession et du coût de cette procédure, la société DJ Couture ne peut sérieusement soutenir que la procédure de « due diligence » a été initiée à des fins purement dilatoires, étant observé que cette procédure a mis en lumière différents risques potentiels aux termes du rapport (pièce 30ter) : « En conclusion, notre examen a souligné plusieurs risques substantiels et/ou incertitudes relatifs à Leoptica ainsi qu’à DJC, visiblement en ce qui concerne les locaux de la boutique [D] [I], de même qu’en vertu de la loi fiscale.Veuillez noter que les garanties contractuelles pourraient constituer une sorte de confort quant à ces risques et incertitudes. Les garanties pourraient cependant ne pas être des mesures correctives suffisantes du préjudice ou dommage potentiel à la suite de l’acquisition envisagée ».

Les pièces versées aux débats par la société DJ Couture, notamment une attestation du bailleur (pièce n° 154), une attestation « d’analyse succincte des comptes » (pièce n°150) , une attestation fiscale pour l’année 2018 (pièce n° 158) et des échanges de courriels en juillet 2012 (pièces n°84 à 87) sont insuffisantes à établir l’absence de toutes difficultés sur le bail, la situation comptable, sociale et fiscale des sociétés DJ Couture et Léoptica en vue de leur acquisition, et ne permettent pas d’établir une procédure abusive et dilatoire de la part du groupe [D] [I] et du franchiseur en particulier dans le processus de l’opération de vente. Il ressort en outre des échanges courant août 2015 (pièce DJ Couture n°86, 41bis, 46,47) une réelle difficulté de la part du conseil [D] [I] d’obtenir pièces et informations précises sur la situation des deux sociétés objet du projet de cession.

Il s’ensuit que la société DJ Couture échoue à démontrer un comportement déloyal de la part du franchiseur dans les négociations entre février et août 2015.

Certes la société DJ Couture a pris l’initiative de la rupture des pourparlers par l’envoie du courrier du 27 août 2015 et le motif allégué du non respect de l’exclusivité territoriale, comme l’a retenu le tribunal, n’est pas sérieusement démontré en particulier dans le contexte de la négociation qui était en cours. Néanmoins, la société Sim Licensing, qui a pris l’initiative d’investigations complémentaires par la procédure de « due diligence », ne peut reprocher à la société DJ Couture de rompre les pourparlers estimant avoir produit les pièces nécessaires, l’abus n’étant pas démontré dans ce contexte.

*Sur la résiliation du contrat de franchise et les préjudices subséquents

Au regard de ce qui précède, la société DJCouture échoue à démontrer l’ensemble des griefs et manquements invoqués à l’appui de ses courriers de rupture du contrat de franchise.

Les seuls manquements de la société Sim Licensing relatifs au prévisionnel des travaux d’aménagement de la boutique et de leur exécution courant 2011/2012 ne peuvent trois années plus tard justifier une résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs du franchiseur.

En conséquence, les jugements seront confirmés en ce qu’ils ont débouté la société DJ Couture de sa demande de voir prononcer la résiliation du contrat de franchise le 5 février 2015 aux torts exclusifs de la société Sim Licensing.

Les jugements seront également confirmés en ce qu’ils ont débouté la société DJ Couture de ses autres demandes de dommages-intérêts au titre des salaires et loyer retoucheuses, insuffisance de marge brute 2013 à 2015, gains manqués en 2015, gains manqués en 2016 et perte de revenus futurs de 2017 à 2026, ainsi que le remboursement du droit d’entrée.

Sur les demandes de la société Sim Licensing au titre de la rupture du contrat de franchise

La société DJ Couture a rompu les négociations le 27 août 2015 puis a déposé l’enseigne et n’a plus commercialisé de vêtements de la marque [D] [I] à compter du 1er septembre 2015 (pièce [D] [I] n°40), sans justifier de manquements caractérisés de la part du franchiseur pour que cette résiliation du contrat soit prononcée à ses torts exclusifs.

En résiliant ainsi le contrat de franchise de manière anticipée, la société DJ Couture a engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard du franchiseur, la société Sim Licensing.

*Sur la demande de dommages-intérêts en réparation d’un préjudice résultant du manque à gagner sur la vente de vêtements et des redevances

A ce titre, la société Sim Licencing demande la condamnation de la société DJ Couture à lui payer la somme de 1 312 000 euros ventilée de la manière suivante :

—  1 250 000 euros pour le manque à gagner sur les ventes

—  62 000 euros au titre des redevances manquées

S’agissant du manque à gagner sur les ventes de vêtements, il ressort des pièces versées aux débats par la société Sim Licensing, notamment le rapport Sorgem, qu’elle évalue ce préjudice à partir des ventes réalisées par les sociétés [D] [I] Liban Sal (pièce n°44) et [D] [I] France (pièce n°46) à la société DJ Couture pour les années 2012 à 2014. Or comme le relève à juste titre la société DJ Couture, la société Sim Licencing, franchiseur, ne justifie pas lui avoir livré ou facturé de marchandises. Autrement dit, il n’est pas établi que le manque à gagner sur la vente de vêtements à la société DJ Couture à la suite de la rupture du contrat de franchise, soit directement supporté par la société Sim Licensing. Celle-ci ne justifie donc pas subir un préjudice à ce titre et sera déboutée de sa demande à hauteur de 1250 000 euros.

D’ailleurs, le tribunal, qui a évalué le préjudice lié au manque à gagner sur les ventes à la somme de 132 500 euros, a condamné la société DJ Couture à payer cette somme à la société [D] [I] Liban Sal. Comme le relève à juste titre la société DJ Couture, la société [D] [I] Liban ne formulait aucune demande à ce titre en première instance, ni même en appel.

Dès lors, il ya lieu d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société DJ Couture à payer à la société [D] [I] Liban la somme de 132 500 euros.

S’agissant du manque à gagner sur les redevances, il s’agit bien d’un préjudice directement subi par la société Sim Licensing, franchiseur, à la suite de la rupture anticipée du contrat de franchise qui avait été conclu pour une durée de cinq années, soit jusqu’à mars 2017. L’évaluation de ce manque à gagner à la somme de 62 000 euros (rapport Sorgem page 44 – redevances manquées à 3% d’août 2015 à mars 2017) n’est pas sérieusement contesté par la société DJ Couture qui sera condamnée à verser cette somme à la société Sim Licensing avec intérêts à compter du jugement.

*Sur la demande de dommages-intérêts au titre de relocalisation du franchiseur

La société Sim Licensing soutient qu’elle a été dans l’obligation de chercher un nouveau local commercial et réclame la somme de 1 043 000 euros évaluée de la manière suivante (rapport Sorgem page 45) :

— loyer depuis le 1er juin 2016

— coûts d’intermédiation

Les pièces produites (pièce 47, annexe 2 pièce 54 -bail commercial) ne démontrent ni que ces frais sont en lien direct avec la rupture du contrat de franchise, ni qu’ils ont été supportés par la société Sim Licensing (mais plutôt par la société [D] [I] Swiss SA signataire du bail).

Le jugement du 3 février 2020 sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Sim Licensing de sa demande de ce chef.

*Sur la demande de remboursement des honoraires de conseil

La société Sim Licensing fait valoir que la société DJ Couture a engagé sa responsabilité dans la rupture des pourparlers au regard de la chronologie des faits et réclame la somme de 91 000 euros en dédommagement des honoraires de conseil.

Non seulement, comme l’a relevé le tribunal, la société Sim Licensing ne démontre pas une faute de la société DJ Couture dans la rupture des pourparlers, mais encore ne justifie pas avoir directement supporté ces frais (annexe 8 rapport Sorgem, factures établies au nom de [D] [I] Swiss).

Le jugement du 3 février 2020 sera confirmé sur ce point.

*Sur la demande de dommages-intérêts au titre de l’atteinte à l’image et la réputation

A hauteur d’appel, la société Sim Licensing ne produit pas davantage d’élément qu’en première instance pour étayer l’existence d’un préjudice d’image, d’atteinte à la réputation ou à l’emprise commerciale sur [Localité 2], et son évaluation.

Le jugement du 3 février 2020 sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes relatives aux factures et arriérés de redevances

*Sur la demande de la société Sim Licensing au titre de l’arriéré de redevance

La société Sim Licensing demande la condamnation de la société DJ Couture à lui verser la somme de 67 583 dollars soit 60 388 euros au titre de l’arriéré des redevances que le franchisé a cessé de régler à compter du 28 novembre 2014.

La société DJ Couture relève d’une part que le jugement l’a condamnée à verser à la société [D] [I] Liban la société de 67 583 USD alors que cette société n’a nullement qualité pour percevoir les redevances. D’autre part, elle soutient qu’elle n’est redevable de l’arriéré de redevances que jusqu’au 5 février 2015, postérieurement à cette date il n’avait été convenu de maintenir le contrat de franchise que pour les besoins du projet de rachat prolongé de manière dilatoire par [D] [I].

Réponse de la Cour,

Il ressort des pièces versées aux débats par la société Sim Licensing (pièces n°25d ) que la société DJ Couture est redevable de la somme de 60 388 euros représentant les redevances restées impayées du 4ème trimestre 2014 au 3ème trimestre 2015. Au cours des échanges entre les parties lors du projet de rachat de la société DJ Couture, il ressort que le contrat de franchise se poursuivait dans les mêmes conditions sans qu’il soit établi de dispense de paiement des redevances pour la société DJ Couture.

Seule la société Sim Licensing, franchiseur, a qualité pour percevoir cet arriéré de redevances.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la société DJ Couture à verser à la société [D] [I] Liban la somme de 67 583 dollars ou sa contrevaleur en euros au titre des redevances, et débouté la société Sim Licensing de sa demande à ce titre.

La société DJ Couture sera condamnée à verser à la société Sim Licensing la somme de

60 388 euros au titre des redevances impayées du 4ème trimestre 2014 au 3ème trimestre 2015.

*Sur les demandes au titre des factures impayées de marchandises

Le tribunal dans son jugement du 3 février 2020, a condamné la société DJ Couture au titre des factures de marchandises restées impayées à verser les sommes de :

—  820 431 euros à la société [D] [I] Liban Sal,

—  589 097 euros à la société [D] [I] France,

—  25 606 dollars à la société [D] [I] Liban Sal,

A hauteur d’appel, la société Sim Licensing soutient que la société [D] [I] Liban a cédé ses créances à l’égard de la société société DJ Couture à hauteur de 831 190 euros et de 25 605 dollars soit 22 877 euros à la société Sim Licensing, cession qui a été notifiée au franchisé. De même elle soutient que la société [D] [I] France a cédé sa créance à l’égard de la société DJ Couture à la société Sim Licensing à hauteur de 586 722 euros qui a été dûment notifiée au franchisé.

Elle sollicite la condamnation de la société DJ Couture à payer ces sommes entre les mains de la société Sim Licensing avec intérêts à compter de la première mise en demeure du 18 août 2015.

Dans leurs dernières conclusions, il est demandé à titre subsidiaire la condamnation de la société DJ Couture à payer ces sommes respectivement aux sociétés [D] [I] France et [D] [I] Liban.

La société DJ Couture demande l’infirmation du jugement en ce qu’elle a été condamnée à payer ces sommes aux sociétés [D] [I] Liban et [D] [I] France qui ne formulaient en première instance aucune demande à ce titre. ada hauteur d’appel, elle relève que non seulement la société Sim Licensing ne justifie d’aucune cession de créances de ces sociétés notifiées suivant la procédure de l’ancien article 1690 du code civil qui lui soit opposable, mais encore que les sociétés [D] [I] Liban et [D] [I] France sont irrecevables à formuler en appel des demandes nouvelles qui en toutes hypothèses sont prescrites.

Réponse de la Cour,

Il est constant qu’en première instance, seule la société Sim Licensing formulait une demande de condamnation de la société DJ Couture en paiement de la somme de 1 432 000 euros au titre des achats de marchandises commandées et livrées et que les sociétés [D] [I] France et [D] [I] Liban ne formulaient aucune demande autre que leur mise hors de cause.

La société Sim Licensing produit aux débats des pièces (pièces 25a, 25b,25c, 42, 53 et pièce DJ n°24) justifiant que la société DJ Couture ne contestait pas devoir au titre de la marchandise commandée et livrée au 31 août 2015 les sommes de 820 431 euros à la société [D] [I] Liban, de 589 097 euros à [D] [I] France et 22 877 euros à [D] [I] Liban, soit la somme totale de 1 432 405 euros.

La société Sim Licensing produit des actes de cession de ces créances datées du 14 août 2015 (pièces n° 25g et 25h). La société DJ Couture, produit un acte d’huissier, constatant la notification de ces cessions de créance par courrier reçu le 5 septembre 2016.

Cette notification outre la mention de cette cession dans les conclusions de la société Sim Licensing et la production de la copie de ces actes de cession de créance dans la présente instance, comportant les informations nécessaires permettant d’identifier la nature et le montant du transport des créances, sont équivalentes à une signification au débiteur auquel la cession est dès lors opposable au sens des articles 1689 et 1690 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Par ailleurs, les moyens de la société DJ Couture relatifs à la comptabilité des différentes sociétés ne sont pas de nature à remettre en cause la validité de ces cessions de créance.

Dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la société DJ Couture à payer ces sommes aux sociétés [D] [I] France et [D] [I] Liban et la société DJ Couture sera condamnée à payer ces sommes à la société Sim Licensing avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation desdits intérêts.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé sur le partage des dépens de première instance et le débouté des demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société DJ Couture, succombant pour l’essentiel en son appel, sera condamnée aux dépens.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, la société DJ Couture sera déboutée de sa demande et condamnée à payer aux sociétés intimées la somme globale de 15 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Dit n’y avoir lieu à réouverture des débats.

Confirme le jugement du 31 octobre 2018 en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes de la société DJ Couture à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding LT, ESG Holding SAL et [D] [I] Luxembourg Sarl ;

Confirme le jugement du 3 février 2020 en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu’il a :

— condamné la société DJ Couture à payer à la société [D] [I] Liban la somme de 132 500 euros,

— condamné la société DJ Couture à verser à la société [D] [I] Liban la somme de 67 583 dollars ou sa contrevaleur en euros au titre des redevances, et débouté la société Sim Licensing de sa demande à ce titre,

— condamné la société DJ Couture au titre des factures de marchandises à payer les sommes de 820 431 euros à la société [D] [I] Liban Sal, 589 097 euros à la société [D] [I] France, 25 606 dollars à la société [D] [I] Liban Sal, et débouté la société Sim Licensing de sa demande à ce titre,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute la société DJ Couture de l’ensemble de ses demandes formulées à l’encontre des sociétés [D] [I] Holding LT, ESG Holding SAL et [D] [I] Luxembourg Sarl, [D] [I] France et [D] [I] Liban sal ;

Condamne la société DJ Couture à verser à la société Sim Licensing la somme de 62 000 euros au titre du manque à gagner sur les redevances d’août 2015 à mars 2017 ;

Déboute la société Sim Licensing de sa demande de dommages-intérêts en réparation d’un préjudice résultant d’un manque à gagner sur la vente de vêtements ;

Condamne la société DJ Couture à verser à la société Sim Licensing la somme de 60 388 euros au titre des redevances impayées du 4ème trimestre 2014 au 3ème trimestre 2015 ;

Condamne la société DJ Couture à verser à la société Sim Licensing la somme de 1 432 405 euros au titre des factures impayées au 31 août 2015 avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation desdits intérêts ;

Condamne la société DJ Couture aux dépens d’appel ;

Condamne la société DJ Couture à payer la somme globale de 15 000 euros aux sociétés intimées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 4, 9 novembre 2022, n° 20/12275