Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 27 mars 2019, n° 17/05107

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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Guillé Jérôme · Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

CA Paris, pôle 5, ch. 4, 27 mars 2019, n°17/05107 Ne constituent pas une immixtion fautive dans la gestion indépendante du franchisé la fourniture par le franchiseur de prix conseillés et l'obligation d'utiliser un logiciel de caisse […], l'obligation d'approvisionnement exclusif […]. Ne constituent pas une immixtion fautive dans la gestion indépendante du franchisé : la fourniture par le franchiseur de prix conseillés et l'obligation d'utiliser un logiciel de caisse dès lors que le franchisé est libre de modifier ses prix, l'obligation d'approvisionnement exclusif dès lors qu'elle a …

 

Gouache Avocats · 5 novembre 2019

La Cour d'appel de Paris effectue un rappel bienvenu concernant le principe d'indépendance du franchisé sur les questions de prix imposé et d'approvisionnement exclusif. Le franchisé, commerçant indépendant, doit être libre de déterminer les prix qu'ils fixent pour les ventes des produits ou la fourniture des services du contrat. Toutefois, cela ne doit pas empêcher le franchiseur de pouvoir imposer au franchisé le respect de normes d'exploitation du concept commercial et de contrôler leur respect par le franchisé afin de protéger l'image de marque du réseau. La question de l'indépendance …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 4, 27 mars 2019, n° 17/05107
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/05107
Décision précédente : Tribunal de commerce de Marseille, 30 janvier 2017, N° 2015F03042
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRÊT DU 27 MARS 2019

(n° , 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 17/05107 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B22ND (dossiers joints : RG n° 17/07648 et 17/07947)

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Janvier 2017 – Tribunal de Commerce de MARSEILLE
- RG n° 2015F03042

APPELANTS

- Monsieur G X

né le […] à […]

Demeurant : […]

[…]

Appelant dans les 3 dossiers

- Madame H Z ép. X

née le […] à […]

Demeurant : […]

[…]

Appelante dans les 3 dossiers

- SARL PROJECT HOLDING ACQUISITION, dont le sigle est PHA

Ayant son siège social : […]

[…]

[…]

N° SIRET : 514 896 604 (ANGERS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Appelante dans les 3 dossiers

- SARL NEW START

Ayant son siège social : […]

[…]

[…]

N° SIRET : 454 030 743 (ANGERS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Appelante dans les 3 dossiers

- SELARL AJ UP, prise en la personne de Me J K, ès qualités d’administrateur judiciaire de la SARL NEW START, désigné à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de ANGERS en date du 2 novembre 2016

Exerçant ses fonctions : […]

[…]

N° SIRET : 820 120 657 (CHAMBERY)

Appelante dans les dossiers 17/07648 et 17/07947

- SELARL AJ PARTENAIRES, prise en la personne de Me J K, ès qualités d’administrateur judiciaire de la SARL NEW START, désigné à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de ANGERS en date du 2 novembre 2016

[…]

[…]

Appelante dans le dossier 17/05107

- SELARL L A, ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL NEW START, désignée à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de ANGERS en date du 2 novembre 2016

Exerçant ses fonctions : […]

[…]

N° SIRET : 810 061 713 (ANGERS)

Appelante dans les 3 dossiers

Représentés par Me Martine LEBOUCQ BERNARD de la SCP HUVELIN & associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R285

Ayant pour avocat plaidant : Me Bertrand BRECHETEAU de la SARL AVOCONSEIL, avocat au barreau d’ANGERS

INTIMÉE

[…]

Ayant son siège social : […]

[…]

N° SIRET : 523 520 161 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Intimée dans les 3 dossiers

Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU – CICUREL – MEYNARD – GAUTHIER – MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Ayant pour avocat plaidant : Me Lionel LEFEBVRE du Cab. BENSOUSSAN, avocat au barreau de PARIS, toque : 272

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Février 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Monsieur Laurent BEDOUET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame P Q, Présidente de chambre

Monsieur Laurent BEDOUET, Conseiller, rédacteur,

Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame N O

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame P Q, président et par Madame N O, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Vu le contrat de franchise signé le 3 octobre 2013 entre la société King Memphis et la société New Start ayant pour associés G X, H Z épouse X et la société Project Holding Acquisition,

Vu la saisine du tribunal de commerce de Nîmes par la société New Start le 24 mars 2015 et le jugement du 15 octobre 2015 par lequel ce tribunal s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Marseille,

Vu l’ouverture d’une procédure de sauvegarde à l’égard de la société New Start le 11 mai 2016, la Selarl L A étant désignée en qualité de mandataire judiciaire,

Vu la conversion de la sauvegarde en redressement judiciaire le 2 novembre 2016, maintenant la Selarl L A en qualité de mandataire judiciaire et désignant la Selarl AJ Partenaires en qualité d’administrateur judiciaire de la société New Start;

Vu le jugement assorti de l’exécution provisoire rendu le 31 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Marseille qui a :

— pris acte de l’intervention volontaire de la Selarl L A, ès-qualités, et de la Selarl AJ Partenaires, ès- qualités,

— reçu les attestations produites par la société King Memphis,

— déclaré M. G X, Mme H Z épouse X et la société Project Holding Acquisition irrecevables en leurs demandes,

— déclaré la société New Start irrecevable en sa demande de restitution de la somme de 1.013.606,36 euros correspondant au coût des travaux d’aménagement du restaurant payé à la société Memphis Concept,

— constaté la falsification des pièces numérotées 101,102 et 103 produites par la société New Start,

— débouté la société New Start de toutes ses demandes,

— ordonné à la société New Start de respecter ses obligations stipulées à l’article 32 du contrat de franchise, sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter du 10e jour suivant la signification du jugement pendant le délai d’un mois, sans qu’il y ait lieu de se réserver la liquidation de l’astreinte,

— vu les dispositions des articles L 622-21 et L 622-22 du code de commerce, fixé les créances de la société King Memphis au passif de la société New Start aux sommes suivantes :

* 46.462,06 euros TTC au titre des factures de redevance d’enseigne impayées, avec intérêts au taux contractuel et pénalités forfaitaires de retard à compter du 11 mai 2016,

* 17.725,25 euros TTC au titre des factures de redevance d’enseigne impayées pour la période du 11 mai 2016 au 19 octobre 2016,

* 80.000 euros au titre du préjudice né de la violation de l’obligation de confidentialité,

* 20.000 euros au titre du préjudice né du discrédit du programme de fidélité Memphis Coffee,

* 50.000 euros au titre du préjudice né des actes de déstabilisation,

— condamné M. X, Mme Z épouse X et la société Project Holding

Acqusition aux dépens et à payer, chacun, la somme de 5.000 eurosà la société King Memphis par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté toutes autres demandes des parties.

Vu les appels relevés par M. X, Mme Z épouse X, la société Project Holding Acquisition, la société New Start ainsi que la Selarl AJ Partenaires en sa qualité d’administrateur judiciaire de cette société, la société AJ UP et la Selarl L A en sa qualité de représentant des créanciers de cette société;

Vu la liquidation judiciaire de la société New Start prononcée le 7 juin 2017, la Selarl L A étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire;

Vu les dernières conclusions notifiées le 21 janvier 2019 par M. X, Mme Z épouse X, la société Project Holding Acquisition, la société New Start ainsi que la SELARL AJ UP, ès qualités, la Selarl AJ Partenaires, es qualités d’administrateur judiciaire de cette société, et la Selarl L A, ès-qualités de liquidateur judiciaire de cette société, qui demandent à la cour, au visa des article 1116 et 1147 du code civil, L 441-6 et L 442-5 du code de commerce , d’infirmer le jugement et :

1) par conséquent :

— débouter la société King Memphis de toutes ses demandes,

— dire que la société King Memphis a mis en oeuvre des manoeuvres dolosives pour obtenir le consentement de la société New Start et de ses associés à l’adhésion au réseau Memphis Coffee,

— constater que la société King Memphis a en outre porté une atteinte grave au droit de la concurrence,

2) à titre principal :

— prononcer l’annulation du contrat de franchise du 3 octobre 2013 et de tous les actes en découlant,

— condamner la société King Memphis à payer à Me A, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société New Start les sommes de :

* 46.644 euros en restitution des droits d’entrée versés,

* 1.013.606,36 euros en restitution des sommes payées pour les travaux de mise aux normes du restaurant nécessaires à la signature du contrat de franchise,

* 96.805,23 euros, à parfaire jusqu’à la date de l’annulation du contrat, en restitution des redevances d’exploitation versées,

* 258.880,10 euros, à titre de dommages-intérêts, correspondant à la différence entre le résultat annoncé et le résultat réel sur les deux premières années,

— condamner la société King Memphis à payer à chacun de M. X et de Mme Z épouse X la somme de 72.000 euros, à titre de « dommages-intérêts moraux » pour la rémunération espérée au regard du prévisionnel,

— condamner la société King Memphis à payer à M. X et à Mme Z épouse X la somme de 330.253 euros au titre des cautions personnelles appelées par le CIC Ouest,

— condamner la société King Memphis à payer à la société Project Holding Acquisition la somme de 330.253 euros, à titre de dommages-intérêts, en remboursement de son compte courant d’associé,

3) à titre subsidiaire, si la cour considérait le système de RFA valide, condamner la société King Memphis à payer à la liquidation judiciaire de la société New Start la somme de 11.372,44 euros HT, soit 13.646,93 euros TTC, au titre des RFA pour les commandes effectuées au titre de l’année 2015,

4) en tout état de cause, condamner la société King Memphis aux dépens de l’instance et à payer aux demandeurs la somme de 10.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions notifiées le 25 janvier 2019 par la société Memphis Kingqui demande à la cour, au visa des articles 1116, 1134, 1149 et 1184 du code civil (ancien), des articles L 441-6, L 442-5, L 622-22, L 622-13, L 622-17 du code de commerce et de l’article 31 du code de procédure civile, de :

1) confirmer le jugement en ce qu’il a :

— reçu ses attestations,

— déclaré irrecevables en leurs demandes M. X, Mme Z épouse X et la société Project Holding Acquisition,

— déclaré la société New Start irrecevable en sa demande de restitution de la somme de 1.013.606,36 euros correspondant au prix des travaux d’aménagement du restaurant payé à la société Memphis Concept,

— constaté la falsification des pièces adverse numérotées 101,102 et 103 en première instance , maintenant numérotées 85,86 et 87 en appel,

— débouté la société New Start de toutes ses demandes,

— fixé ses créances au passif de la société New Start pour les sommes suivantes :

* 46.462,06 euros au titre des factures de redevance d’enseigne impayées, assortie des intérêts au taux contractuel et de la pénalité forfaitaire de retard pour la période antérieure au 11 mai 2016,

* 17.725,25 euros au titre des factures de redevance d’enseigne impayées pour la période du 11 mai 2016 au 19 octobre 2016,

* 20.000 euros au titre du préjudice né du discrédit du programme de fidélité Memphis Coffee,

* 50.000 euros au titre du préjudice né des actes de déstabilisation,

— condamné M. X, Mme Z X et la société Project Holding Acquisition aux dépens et à lui payer, chacun, la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,

2) infirmer le jugement pour le surplus, la recevoir en son appel incident et, statuant à

nouveau :

— ordonner à la Selarl L A, prise en la personne de ME A, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société New Start de respecter les obligations stipulées à l’article 32 « conséquences de la résiliation » du contrat de franchise, sous l’astreinte contractuelle de

1.500 euros par jour de retard à compter du 10e jour suivant la signification du jugement entrepris, cette astreinte courant jusqu’au jour de l’arrêt effectif de l’usage de tous les éléments de la

signalétique Memphis Coffee,

— fixer ses créances au passif de la société New Start aux sommes de :

* 308.274,48 euros en réparation du préjudice financier né de la résiliation du contrat de franchise,

* 150.000 euros au titre du préjudice né de la violation de l’obligation de confidentialité,

* 100.000 euros en réparation du préjudice né du déficit de réputation du réseau Memphis Coffee et de l’atteinte à son image,

3) en toute hypothèse :

— rejeter des débats la pièce adverse numérotée 128.4 faute d’être lisible,

— déclarer irrecevable la demande nouvelle formée en appel par M. et Mme X en paiement de la somme de 289.279,29 euros au titre de leurs engagements de cautions personnelles,

— déclarer irrecevable la demande nouvelle formée en appel par la Selarl L A, es qualités de liquidateur judiciaire de la société New Start, en réparation d’un préjudice né de prétendus frais démesurés imposés par le franchiseur pour respecter les standards Memphis Coffee,

— débouter M. X, Mme Z épouse X, la société Project Holding Acquisition, la société New Start et la selarl L A, en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, de toutes leurs demandes,

— les condamner aux dépens et à lui payer, chacun, la somme de 30.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile;

SUR CE LA COUR

Le 29 mars 2013, M. X a déposé un dossier de candidature aux fins d’exploiter un restaurant sous la franchise Memphis Coffee, en précisant qu’il avait déjà été franchisé sous les enseignes Autosur, Autovision, Dekra, B, Norisko et qu’il disposait de deux emplacement, dont un à Cholet 49300 zone Carrefour sur axe principal.

Le 3 avril 2013, la société King Memphis lui a adressé un document d’information précontractuelle « Memphis Coffee »; le 15 juin 2013, la société Avenir Plus a établi un prévisionnel d’exploitation pour deux années relatif à la création d’un restaurant Memphis Coffee à Cholet.

Le 3 octobre 2013 un contrat de franchise a été signé par lequel la société King Memphis a concédé à la société New Start, dont le gérant était M. X, le droit d’exploiter un restaurant lui appartenant situé à Cholet, […], sous l’enseigne « Memphis Coffee », pour une durée de 10 ans.

Après avoir fait effectuer des travaux d’aménagement dans son établissement par la société Memphis Concept et suivi la formation prévue au contrat, le franchisé a ouvert son restaurant le 14 février 2014.

Dans un courriel du 2 septembre 2014 envoyé à un autre franchisé, les époux X ont indiqué, qu’ils n’étaient pas convaincus à ce jour de poursuivre avec Memphis Coffee, qu’en effet suite à plusieurs incohérences de tout genre depuis le début ils n’arrivaient pas à trouver une attache forte avec cette franchise, et que pour l’instant ils restaient en réserve et en observation.

Le 24 mars 2015, la société New Start et ses trois associés ont introduit une procédure aux fins de voir annuler le contrat de franchise, constater une atteinte au droit de la concurrence et obtenir des dommages-intérêts ; en cours de procédure, la société New Start a bénéficié d’une procédure de sauvegarde, puis d’une mise en redressement judiciaire.

Par le jugement déféré, le tribunal a rejeté toutes les prétentions des demandeurs et a fixé des créances de la société King Memphis au passif de la société New Start.

Il convient de préciser que la décision du 7 juin 2017 prononçant la liquidation judiciaire de la société New Start a mis fin aux fonctions d’administrateur de la Selarl AJ Partenaires .

La pièce des appelants numérotée 128-4, retranscrite en caractères d’imprimerie, est lisible; il n’y a donc pas lieu de l’écarter des débats.

Concernant les pièces des appelants numérotées 101,102 et 103 en première instance, désormais numérotées 85, 86 et 87 en appel, il apparaît que le franchisé a modifié la version originale des cartes Memphis Coffee pour supprimer la mention « Black Angus » relative à l’entrecôte et la remplacer par les mentions « origine fr » ou « française »; le tribunal a justement retenu leur falsification.

Sur les demandes des appelants

a) En premier lieu, les appelants demandent l’annulation du contrat de franchise sur le fondement de l’article 1116 du code civil, en invoquant des manoeuvres dolosives du franchiseur déterminantes du consentement de la société New Start.

— Ils soutiennent d’abord que l’aménagement du restaurant a été fait suivant les consignes du franchiseur et par la société Memphis Concept, autre société du groupe Memphis, qui lui a été imposée par le franchiseur, pour un coût exorbitant, soit 846.353,14 euros HT, qui ne correspondait pas aux frais annoncés dans le document d’information précontractuelle, mais était supérieur de plus de 60 %; ils ajoutent que la qualité des travaux réalisés n’est pas bonne, que des malfaçons persistent, et que le mobilier, fabriqué dans une usine créée par le franchiseur, ne correspond pas au mobilier importé des Etats Unis présenté dans son restaurant de référence de Nîmes.

La société King Memphis objecte à juste raison :

* que si conformément à l’article 7 du contrat de franchise les plans du restaurant devaient être établis par l’architecte référencé par elle, la société New Start restait cependant libre de faire exécuter les travaux d’agencement par un autre partenaire que la société Memphis Concep, possibilité qui a été utilisée par d’autres franchisés,

* que le document d’information précontractuelle annonçait un coût d’aménagement et d’agencement de 1950 euros HT par m² mais en excluant divers travaux notamment de gros oeuvre, bardage et aménagements extérieurs; or la société New Start a aménagé un restaurant de 400 m², ce qui aboutit à un coût de 780.000 euros HT et a sollicité des aménagements complémentaires en inox sur la façade, ce qui a généré un surcoût de 80.000 euros,

* que le prévisionnel d’exploitation remis au franchisé en juin 2013 évaluait les travaux d’aménagement et d’agencement du restaurant à la somme de 823.939 euros,

* que la société New Start ne démontre pas que le mobilier fabriqué en usine serait d’une qualité moindre que celui qu’elle a pu voir dans le restaurant de Nîmes et qui était fabriqué aux Etats Unis.

— Les appelants font ensuite valoir que la qualité des produits était un élément essentiel de la franchise, déterminant du consentement de la société New Start et de ses associés; ils reprochent au

franchiseur d’avoir promu, dans la présentation de son réseau, un concept de restauration avec des produits 100 % origine France alors qu’il a imposé la revente d’une entrecôte congelée en provenance d’Uruguay ainsi que de steaks congelés – gras – sans indication d’origine de la viande; ils lui font aussi grief d’imposer des fournisseurs pratiquant pour des produits de base de la cuisine américaine (le Cherry Coke en conditionnement de 24 bouteilles, le carton de 24 bouteilles de bière Bud, les steaks hachés épicés de 100 g x 48, les toastinettes cheddar et emmental et le Nutella) des prix supérieurs à d’autres fournisseurs alors qu’une centrale d’achat a pour but de négocier des prix intéressants; mettant en cause la qualité des produits, pourtant vantée par la société King Memphis, ils prétendent que la société New Start s’est vu imposer des produits qui ne correspondaient en rien à l’image qui l’avait séduite et déterminée à signer le contrat de franchise.

La société King Memphis fait justement valoir en réponse que les conditions d’approvisionnement doivent s’apprécier à partir d’une moyenne des prix et non du prix de quelques produits; elle justifie avoir obtenu des prix très compétitifs pour différents produits auprès de deux fournisseurs : la Compagnie des desserts et Brake.

Il apparaît que dans sa publicité, le franchiseur n’annonçait que 80% de produits frais et 20 % de produits congelés, des burgers composés de produits frais et du boeuf d’origine française.

Or M. C, directeur industriel de la société Socopa, atteste que les viandes utilisées dans les steaks hachés Memphis proviennent des abattoirs, ateliers de découpe et ateliers de fabrication utilisant exclusivement de la viande française, c’est à dire de bovins nés, élevés et abattus en France.

Une enquête de satisfaction du 12 août 2015 montre que 93 % des clients étaient satisfaits du goût et de la fraîcheur des plats ; des commentaires élogieux, en particulier sur les burgers, figurent sur le site internet Tripadvisor; les reproches formulés par les appelants ne sont donc pas démontrés.

— Les appelants prétendent encore que la société King Memphis n’a laissé aucune marge de manoeuvre à la société New Start pour exploiter son restaurant en tant que commerçant indépendant; ils en veulent pour preuve, d’une part que la société New Start ne pouvait apporter aucune modification aux menus et prix ni passer des commandes en dehors de la centrale d’achats, d’autre part que le franchiseur exerçait un contrôle à distance sur sa caisse et sur les chiffres d’affaire réalisés, ce qui constituait un moyen de contrainte pour empêcher toute initiative du franchisé ; ils allèguent que les initiatives prises par la société New Start, à savoir une page spécifique ajoutée à la carte pour prolonger les plats Tex Mex et l’ajout d’une écharpe sur l’étoile représentant la marque Memphis sur sa page Facebook à la période de D, lui ont valu des reproches immédiats et virulents de la société King Memphis, ce qui prouve l’absence de marge de manoeuvre.

L’article 4 du contrat de franchise, intitulé « Respect du concept Memphis Cofffee » impose au franchisé de respecter la carte des boissons et des plats, de présenter à la clientèle la liste des plats et menus types, sans en ajouter ni retrancher, à l’exception des suggestions telles qu’elles sont réglementées dans le cahier des normes techniques.

Dans sa lettre du 27 mars 2014, le franchiseur a rappelé ces stipulations à la société New Start en précisant que si pour faire plaisir à quelques clients l’adaptation de la composition des plats en fonction de leur goût était possible, cette situation devait demeurer exceptionnelle.

Il a également rappelé que le référencement d’un nouveau produit impliquait un processus de sélection rigoureux du fournisseur .

Il est toutefois constant que la société New Start a fait imprimer un supplément de carte salades et desserts en septembre 2015, qu’elle a proposé « un expresso accompagné de ses douceurs » qu’elle estimait moins cher et de meilleure qualité que celui du franchiseur et qu’elle a ajouté aux menus enfants des jouets cadeaux plus variés et moins chers selon elle .

Contrairement à ce qui est prétendu, la société New Start restait libre de pratiquer ses propres prix, ceux du franchiseur n’étant que des prix conseillés; d’autres franchisés du réseau implantés à Béziers, Orléans, Pau, Villeparisis attestent d’ailleurs avoir usé de la faculté de modifier les prix.

Par ailleurs, M. E, dirigeant de la société Pointex qui fournit le logiciel de caisse des restaurants du réseau Memphis Coffee, déclare que les restaurateurs peuvent intervenir directement sur leurs caisses pour modifier leurs prix de vente, qu’en aucun cas le paramétrage effectué par le franchisé n’est écrasé par la programmation arrivant du franchiseur et que s’il est prévu une remontée des chiffres d’affaire de vente vers King Mmemphis, cette dernière n’a accès à aucune autre donnée.

— Les appelants, au soutien de leur demande d’annulation du contrat de franchise, allèguent enfin que la société King Memphis a trompé sa cocontractante sur la rentabilité annoncée; ils exposent en ce sens :

* que le franchiseur imposait une ouverture du restaurant 7 jours sur 7 de midi à minuit, ce qui nécessitait l’emploi d’au moins 20 salariés et n’était pas adapté à la zone d’implantation du restaurant,

* que pour la première année d’exploitation, il était prévu un chiffre d’affaires de 1.635.135 euros avec un résultat de 32.947,98 euros alors que que la société New Start n’a réalisé qu’un chiffre d’affaires de 675.467 euros avec un résultat de 13.398 euros,

* que pour la deuxième année d’exploitation, il était prévu un chiffre d’affaires de 1.684.189 euros avec un résultat de 86.399 euros alors que la société New Start n’a réalisé qu’un chiffre d’affaires de 1.013.391 euros avec un résultat négatif de 152.931 euros,

* que le prévisionnel fourni à la demande du franchiseur par la société Avenir Plus, est volontairement faux,

* qu’il était annoncé dans les pièces numérotées 5 et 11 une rentabilité record avec une marge brute de 75 % , une rémunération de 60.000 euros pour un apport personnel de 190.000 euros et un investissement de 850.000 euros et qu’en contrepartie d’un tel investissement, les époux X n’ont pu se dégager aucune rémunération la première année d’exploitation et seulement 12.000 euros la deuxième année,

* que les associés de la société New Start ont dû réaliser des apports en compte courant considérables, la société Project Holding Acquisition apportant 360.121,09 euros, montant des économies des époux X, associés au sein de cette société.

Les appelants ne peuvent toutefois valablement se fonder, pour étayer leur thèse, sur leur pièce 5 qui n’est qu’un simple « Edito » appelant à rejoindre le concept Memphis Coffee, ni sur leur pièce 11 qui n’est qu’un article intitulé « Les franchises avec un apport personnel de 120.000 à 200.000 euros » publié sur internet le 27 janvier 2015, relatif à plusieurs franchises, dont Memphis Coffee, pour laquelle les chiffres annoncés de façon générale sans aucune précision ne peuvent avoir déterminé le consentement de la société New Start.

Le compte d’exploitation prévisionnel, établi par la société d’expertise comptable Avenir Plus, qui était l’expert-comptable du réseau, n’a pas valeur d’engagement contractuel.

L’existence d’un écart entre les prévisions fournies à titre indicatif et les résultats effectifs de l’exploitation ne constitue pas en tant que tel la preuve du défaut de sincérité ou de l’irréalisme manifeste de ces prévisions.

La société King Memphis rappelle à juste titre que l’exercice comptable de la société New Start débutait le 1er juin de chaque année pour se terminer le 31 mai de l’année suivante; il ressort de la

pièce 114 des appelants que la société New Start, qui a ouvert son restaurant mi-février 2014, a réalisé un chiffre d’affaires de 675.467 euros pour l’exercice clos le 31 mai 2014, soit pendant 3 mois et demi, puis un chiffre d’affaires de 1.013.391 euros pour l’exercice du 1er juin 2014 au 31 mai 2015, soit un total de 1.688.858 euros pour 15, 5 mois, ce qui rapporté à 12 mois, donne la somme de 1.307.503 euros.

Les chiffres d’affaires annoncés dans le prévisionnel, certes un peu supérieurs, ne présentent cependant pas un caractère irréaliste, leur montant et la rentabilité attendue pouvant ne pas être atteints en raison de l’aléa tenant à l’exploitant et au contexte local.

Au regard de l’ensemble des éléments qui précédent, la preuve de manoeuvres dolosives ayant déterminé le consentement de la société New Start n’est pas rapportée. En conséquence, la demande tendant à l’annulation du contrat de franchise doit être rejetée.

b) En second lieu, les appelants invoquent l’absence d’indépendance du franchisé portant atteinte au droit de la concurrence en raison des prix imposés, de l’obligation d’approvisionnement exclusif, de la politique des remises de fin d’année et de l’abus de dépendance économique.

— Concernant les prix, ils se fondent sur l’article L 442-5 du code de commerce qui sanctionne le fait par toute personne d’imposer, directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d’un produit ou d’un bien, au prix d’une prestation de service ou à une marge commerciale et font valoir :

* que la société King Memphis impose les prix de revente des plats, en préparant les cartes et en maîtrisant à distance la caisse des franchisés,

* que l’article 14 du contrat de franchise stipule que le franchisé permet au franchiseur d’avoir accès, grâce notamment à des remontées informatiques, aux mises à jour des cartes-menus, tarifs, rations et chiffres d’affaires afin que le franchiseur puisse veiller en temps réel au respect de son savoir-faire,

* que l’article 9.2.3 du contrat précise qu’afin de préserver l’harmonisation du réseau, le franchisé s’engage à se conformer aux produits indiqués sur les cartes menus, . que le fonctionnement du logiciel caisse écrase toute modification faite par un franchisé.

Mais il n’est pas démontré que la société King Memphis aurait, dans les faits, imposé un caractère minimal au prix de revente des produits; il a déjà été énoncé plus haut que le franchisé pouvait modifier les prix, qu’il pouvait le faire à partir de sa caisse enregistreuse et que par cette caisse le franchiseur n’avait pas accès à d’autres données que les chiffres d’affaires.

— Concernant l’obligation d’approvisionnement exclusif, les appelants soutiennent qu’elle est contraire au droit de la concurrence dans la mesure où les produits imposés par le franchiseur sont des produits courants qui ne lui sont pas spécifiques et où les prix pratiqués par la centrale d’achat ainsi que par les fournisseurs agréés sont excessifs ; ils ajoutent que les travaux d’aménagement du restaurant ont été réalisés sous le contrôle exclusif de la société Memphis Concept et que le Conseil de la concurrence sanctionne la clause d’aménagement exclusif des magasins franchisés par laquelle le franchiseur impose, au nom de l’unité du réseau, les entreprises intervenantes.

Toutefois la cour a déjà dit plus haut qu’aucune clause n’imposait à la société New Start de s’adresser à la société Memphis Concept pour la réalisation des travaux dans son restaurant.

Le fait d’imposer du mobilier d’aménagement spécifique et de prévoir un approvisionnement exclusif pour la préparation des menus et recettes est justifié, pour les meubles, recettes ou produits spécifiquement fabriqués pour le franchiseur afin de préserver l’identité de son réseau et, pour les autres produits, afin de garantir leur qualité et la sécurité alimentaire et de préserver ainsi la

réputation de son réseau.

— Concernant les remises de fin d’année (RFA), les appelants se fondant sur les dispositions de l’article L 441-7 du code de commerce soutiennent que les remises de fin d’année doivent être stipulées au moment de la conclusion d’un contrat cadre de vente entre le fournisseur et le distributeur, que seule la société New Start peut être qualifiée de « distributeur » puisqu’elle revend les produits acquis auprès des fournisseurs dans les plats confectionnés et qu’il n’existe aucun accord entre le fournisseur et elles; ils en déduisent le caractère illicite des remises de fin d’année accordées par la société King Memphis et allèguent que celles-ci ont permis au franchiseur de gonfler artificiellement le bilan d’un restaurant témoin afin de les tromper quant à la rentabilité du réseau comme attesté par M. F ; à titre subsidiaire, si la cour estime le système des RFA valide, le liquidateur de la société New Start demande la condamnation de la société King Memphis à lui payer, ès-qualités, la somme de 13.646,93 euros TTC pour les commandes passées au titre de l’année 2005.

Mais l’attestation délivrée par M. F, produite par les appelants, est dépourvue de force probante, son auteur ayant déclaré par la suite être animé d’un esprit de vengeance envers le franchiseur; les remises de fin d’année ont été négociées entre la société King Memphis, centrale de référencement, et ses fournisseurs ; en raison du secret des affaires et des clauses de confidentialité, il ne peut être fait obligation à la société King Memphis de révéler la teneur de ses négociations, mais seulement d’en faire connaître l’issue au franchisé; or le 5 février 2016, le franchiseur a informé la société New Start du montant des remises accordées par chacun des fournisseurs sur l’année 2015 et dont le montant total s’élevait à13.646,93 euros TTC.

La société New Start ne payant plus ses redevances dues au franchiseur depuis juillet 2015, la demande en paiement des RFA doit être rejetée.

— Concernant l’abus de dépendance économique, les appelants prétendent que le franchiseur s’est immiscé de façon abusive dans la gestion de la société New Start, la privant de toute autonomie dans les campagnes publicitaires, les aménagements du local, la politique des prix, et la gestion des stocks, lui déniant tout droit sur le fichier client et la soumettant à un contrôle de sa comptabilité.

Mais les appelants n’apportent aucune preuve de leurs allégations et ne démontrent en aucune façon une immixtion du franchiseur dans la gestion même de la société New Start.

En l’absence de manoeuvres dolosives du franchiseur et d’atteinte au droit de la concurrence, toutes les demandes des appelants doivent être rejetées, étant observé que l’action délictuelle des trois associés est subordonnée à la preuve d’un préjudice personnel, distinct du préjudice de la collectivité des créanciers de la société New Start et à la preuve d’un lien de causalité entre les fautes invoquées et le préjudice subi, preuves qui ne sont aucunement rapportées.

Sur les demandes de la société King Memphis

Par jugement du 19 octobre 2016, le tribunal de commerce d’Angers a prononcé la résiliation du contrat de franchise par application de l’article L 622-13-IV du code de commerce, ordonné à la société New Start de cesser d’utiliser les attributs du concept Memphis Coffee sur tous supports et en tous lieux et réservé au tribunal de commerce de Marseille l’analyse des conséquences financières de cette résiliation.

La société King Memphis ne verse aux débats aucune pièce de nature à démontrer que la Selarl A, ès-qualités de liquidateur de la société New Start , ne respecterait pas les obligations stipulées à l’article 32 du contrat relatives à la cessation du contrat de franchise; il convient en conséquence de la débouter de sa demande formée à ce titre.

La société King Memphis fait valoir que la résiliation du contrat de franchise est totalement imputable à la société New Start en raison des ses fautes graves et réitérées : violation de la clause d’approvisionnement, non respect des normes, violation des obligations financières, violation de l’obligation « visite bilan-Hygiène-contrôle », violation de l’obligation de confidentialité, manque de loyauté du franchisé et actes de déstabilisation.

Dans le cadre de la procédure collective de la société New Start, la société King Memphis a procédé aux déclarations de créances suivantes :

— le 29 juin 2016, pour les sommes de :

* 46.462,06 euros au titre des redevances d’enseigne impayées, assortie des intérêts au taux contractuel jusqu’au 11 mai 2016 ( 446,87 euros) et des pénalités forfaitaires de retard (440 euros) au titre de la période antérieure à l’ouverture de la procédure de sauvegarde de la société New Start,

* 150.000 euros au titre du préjudice né de la violation de l’obligation de confidentialité,

* 20.000 euros au titre du préjudice né du discrédit du programme de fidélité,

— le 4 juillet 2016, pour les sommes de :

* 323.042,12 euros en réparation du préjudice financier né de la résiliation du contrat de franchise, calculée sur la base d’une redevance mensuelle de 3.691,91 euros HT multipliée par le nombre de mois restant à courir entre le 19 octobre 2016, date de la résiliation du contrat, et son échéance le 3 octobre 2023,

* 100.000 euros en réparation du préjudice né du déficit de réputation du réseau Memphis Coffee et de l’atteinte à son image,

— le 9 novembre 2016, pour les sommes de :

* 17.725,25 euros au titre des redevances dues pour la période du 11 mai 2016 au 19 octobre 2016,

* 50.000 euros pour préjudice né des actes de déstabilisation .

Les sommes dues au titre des redevances d’enseigne ne sont pas contestées; le non paiement des redevances dues par le franchisé à compter du 31 juillet 2015 constitue un manquement grave à ses obligations justifiant la résiliation du contrat de franchise à ses torts.

Cette résiliation prive le franchiseur de la possibilité de percevoir des redevances si le contrat s’était poursuivi jusqu’à son terme, soit en octobre 2013 ; s’agissant d’une perte de chance certaine, il convient de fixer le montant des dommages-intérêts à la somme de 100.000 euros.

En affirmant faussement aux clients du réseau Memphis Coffee que le programme de fidélité aurait été annulé ou qu’il fonctionnerait mal, la société New Start a jeté le discrédit sur le franchiseur et son réseau, lui occasionnant ainsi un préjudice qui sera réparé par la somme de 20.000 euros.

A l’article 31 du contrat de franchise, le franchisé s’est engagé à ne pas communiquer, divulguer ou exploiter pour le bénéfice d’un tiers toute information, connaissance ou savoir-faire confidentiels concernant les méthodes de la franchise Memphis Coffee qui pourraient lui être communiquées ou dont il aurait eu connaissance en raison du contrat ; or, il apparaît :

— que le 18 août 2015, la société New Start a fait publier une annonce sur Internet concernant la vente de son restaurant à thème américain « Chez Arnold’s », actuellement sous enseigne Memphis, en précisant : « activité actuelle en dessous du potentiel à cause d’une offre et des produits pas en relation avec les attentes des clients »,

— que par acte sous seing privé signé le 1er septembre 2015, sous l’égide du cabinet immobilier Groupe immo invest, M. X, désigné comme vendeur du restaurant, avait prévu la vente sous conditions suspensives de son restaurant à la société Chez Arnolds, l’acquéreur déclarant avoir visité le fonds de commerce et confirmant le prendre avec la matériel en l’état,

— que de plus, dans un courriel du 26 mars 2015, la société New Start a dévoilé à d’autres restaurateurs, ceux de l’enseigne La Boucherie, sous le prétexte de les comparer, les conditions d’approvisionnement du réseau Memphis Coffee.

En réparation de ces manquements à l’obligation de confidentialité, qui ont porté préjudice à la société King Memphis, le tribunal lui a justement alloué la somme de 80.000 euros.

Par ailleurs, la société New Start a commis des actes de déstabilisation au préjudice de la société King Memphis, notamment :

— par un courriel adressé le 20 juin 2014 aux franchisés, critiquant la politique de son dirigeant, envisageant de quitter le réseau si cette politique ne changeait pas et précisant : « ce n’est qu’une indemnité, deux étoiles à mettre au grenier et de la vaisselle à racheter »,

— par la mention relative à l’activité du restaurant figurant sur l’annonce publiée le 18 août 2015 sur Internet,

— par le détournement du logo de l’enseigne et en usant de la dénomination « restaurant américain » ou « Diner Memphis Cholet »,

— en affirmant dans un courriel adressé à un client le 8 février 2016 que le système de fidélité avait un fonctionnement aléatoire et en informant celui-ci de la mise en place dans son restaurant d’une « carte privilège ».

Le tribunal a justement alloué à la société King Memphis la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice résultant du déficit de ces actes de déstabilisation.

La société King Memphis qui fait état de l’ouverture de nombreux autres restaurants sous l’enseigne Memphis Coffee après celui exploité par la société New Start, ne justifie pas de l’existence d’un préjudice qui résulterait d’un déficit de réputation de son réseau, ni d’une atteinte à son image; sa demande de fixation d’une créance de 100.000 euros à ce titre sera rejetée.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Les appelants qui succombent en leurs prétentions doivent supporter les dépens.

Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, il y a lieu de rejeter la demande des appelants de ce chef et de condamner la selarl A, ès-qualités de liquidateur de la société New Sart, M. X, Mme Z épouse X et la société Project Holding Acquisition à payer, chacun, la somme supplémentaire de 5.000 euros à la société King Memphis.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONSTATE que la décision du 7 juin 2017 prononçant la liquidation judiciaire de la société New

Start a mis fin à la mission d’administrateur judiciaire qui avait été confiée à la Selarl AJ Partenaires,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de la société King Memphis tendant à la fixation de sa créance au passif de la société New Start pour préjudice né de la résiliation du contrat de franchise,

Statuant à nouveau,

FIXE à 100.000 euros la créance de la société King Memphis au passif de la société New Start au titre du préjudice né de la résiliation du contrat de franchise,

Ajoutant au jugement,

CONDAMNE la Selarl A prise en la personne de Me A, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société New Start, M. X, Mme Z épouse X et la société Project Holding Acquisition à payer, chacun, la somme de 5.000 euros à la société King Memphis, par application de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes,

CONDAMNE les appelants aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

N O P Q

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 27 mars 2019, n° 17/05107