Cour d'appel de Paris, 21 octobre 2016, n° 15/17224

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Texte intégral

Grosses délivrées

REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRET DU 21 OCTOBRE 2016

(n°184, 17 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/17224

Décision déférée à la Cour :
jugement du 02 juillet 2015 – Tribunal de grande instance de PARIS
- 3e chambre 1re section – RG n°12/08204

APPELANTE

S.A.R.L. 3 DSOFT, agissant en la personne de son gérant domicilié XXXsiège socialXXX

XXX

XXX

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro B 394 064 679

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL
PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque L 0018

Assistée de Me Sylvain STAUB plaidant pour le Cabinet
STAUB & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque K 125

INTIMEES

S.A.S. TOYOTA FRANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié XXXcette qualitéXXX

XXX

XXX

Immatriculée au rcs de Nanterre sous le numéro B 712 034 040

Représentée par Me Christofer CLAUDE de la SELAS
CLAUDE & SARKOZY, avocat au barreau de PARIS, toque R 175

Société TOYOTA MOTOR EUROPE, société de droit belge, prise en la personne de son représentant légal domicilié XXX

XXX

B 1140 BRUXELLES

BELGIQUE

Représentée par Me Marc-Roger HIRSCH de la SELARL
HIRSCH & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque W 03

Assistée de Me Jean-Marc LEFRANCOIS plaidant pour la
SELARL HIRSCH & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque W 3

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l’affaire a été débattue le 28 septembre 2016, en audience publique, devant la
Cour composée de :

Mme X Y, Présidente

Mme Z A, Conseillère

Mme B C, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme D E

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la
Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme X Y, Présidente, et par Mme D E,
Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

La société 3DSoft, spécialisée dans la conception et la commercialisation de logiciels parmi lesquels un logiciel dénommé « MécaPlanning » dédié à la gestion des services après-vente automobiles et destiné, notamment, aux concessionnaires auprès desquels elle l’a commercialisé depuis novembre 2001, expose qu’elle l’a installé chez divers concessionnaires et réparateurs de la marque Toyota en décembre 2006, que la société Toyota France a souhaité son adaptation selon ses besoins à compter de juillet 2007, que des logiciels adaptés, dénommés « e-TSM/MecaPlanning », conçus à frais partagés ont été diffusés depuis juillet 2008, qu’elle a procédé à un dépôt probatoire à l’Agence pour la Protection des Programmes (APP) en 2008, qu’en dépit d’une absence de contrat la société Toyota a continué à l’utiliser en commandant chaque année les licences d’utilisation pour les sites Toyota et
Lexus, qu’en 2009, la société mère de droit belge
Toyota Motor Europe (ci-après TME) a eu des velléités de rachat du code source du logiciel mais y a renoncé, qu’un projet de déploiement en Italie a été suspendu à la même date, que le 09 mars 2009, elle a communiqué à la société Toyota
France, à sa demande, des éléments sur la base de données du logiciel « e-TSM/MecaPlanning » et qu’enfin, jusqu’en décembre 2011 elle a développé de nouvelles adaptations du logiciel dont elle a pris en charge une partie des coûts.

S’étant aperçue que la société Toyota n’émettait pas de bon de commande de licence d’utilisation pour l’année 2012 et qu’elle avait mis au point un logiciel dénommé « After Sale Workbench» (ASW) à partir, précise-t-elle, d’une reverse-engineering d’ « e-TSM/MecaPlanning », elle a d’abord fait procéder à des opérations de saisie-contrefaçon, dûment autorisées, chez deux concessionnaires
Toyota de Drancy les 16 avril et 03 mai 2012 puis a assigné les sociétés Toyota France et TME

(éditrice du logiciel « ASW ») en contrefaçon de droits d’auteur, concurrence déloyale et parasitisme, ceci par acte des 04 avril et 23 mai 2012, précisant que diverses procédures les opposaient alors, ayant notamment donné lieu au prononcé d’une décision en référé ordonnant à la société 3DSoft le respect d’un délai de préavis de 6 mois pour gérer la fin de leurs relations.

Le juge de la mise en état saisi a ordonné une expertise judiciaire et monsieur F
G, expert commis, a déposé son rapport le 12 novembre 2014 en concluant notamment, après avoir décrit et comparé des logiciels, que le logiciel «
ASW » est une « refonte » du logiciel « e-TSM/MecaPlanning ».

Par jugement contradictoire rendu le 02 juillet 2015, le tribunal de grande instance de Paris a, en substance et sans prononcer l’exécution provisoire, déclaré la société 3DSoft « irrecevable » en ses demandes sur le fondement du droit d’auteur (faute de démontrer l’originalité de son logiciel) et sur celui de la concurrence déloyale (du fait de l’identité des faits reprochés) en déboutant les parties de leurs demandes réciproques au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en laissant à la requérante la charge des dépens.

La société 3DSoft a relevé appel de cette décision et, par ordonnance rendue le 30 juin 2016, le conseiller de la mise en état, saisi par l’appelante d’un incident aux fins de communication de pièces détenues par un tiers (à savoir : la société de droit indien Infosys Ltd, prestataire technique ayant élaboré le logiciel « ASW »), a rejeté la demande.

Par dernières conclusions notifiées le 12 août 2016, la société à responsabilité limitée 3DSoftprie pour l’essentiel la cour, au visa des articles L 111-1 et suivants, L 112-2 et suivants, L 113-1 et suivants, L 122-6 et suivants, L 331-1 et suivants, L 335-3 et suivants du code de la propriété intellectuelle, de la directive communautaire 91/205/CE du 14 mai 1991, des articles 564 à 566 du code de procédure civile, 1382 et 2224 du code civil, de « confirmer » le jugement en ce qu’il a déclaré qu’elle est titulaire de droits patrimoniaux sur les logiciels « MecaPlanning » et « e-TSM/MecaPlanning », de l’infirmer pour le surplus et :

in limine litis, de constater la validité du rapport d’expertise précité,

principalement, de considérer que le logiciel « e-TSM/MecaPlanning » est une adaptation du logiciel « MecaPlanning », qu’elle en est l’auteur, qu’il s’agit d’oeuvres de l’esprit originales protégeables par le droit d’auteur et, au constat de pièces produites en cause d’appel par ses adversaires qui viennent corroborer l’avis de l’expert, de considérer qu’elles ont contrefait le logiciel « e-TSM/MecaPlanning » ; en conséquence, d’ordonner sous astreinte des mesures de destruction et d’interdiction de mise à disposition en les condamnant « solidairement » à lui verser la somme totale, sauf à parfaire, de 21.468.600 euros (soit 7.575.000 euros + 6.401.100 + 6.492.500 euros + 1.000.000 euros au titre, respectivement, de son manque à gagner en France, en Italie, du bénéfice indûment réalisé par celles-ci et de son préjudice moral),

subsidiairement, au constat de pièces produites en cause d’appel par ses adversaires qui viennent corroborer l’avis de l’expert, de considérer qu’elles ont commis des actes de parasitisme à son encontre en usurpant son travail et ses investissements sur le logiciel « e-TSM/MecaPlanning » en interdisant à leurs concessionnaires d’en poursuivre l’utilisation et de dire que ses préjudices sont directement causés par ces actes de parasitisme ; en conséquence, de les condamner solidairement au paiement de la somme totale, sauf à parfaire, de 16.310.440 euros (soit 82.500 euros + 1.251.840 euros HT + 7.575.000 euros + 6.401.000 euros + 1.000.000 euros au titre, respectivement, de la perte subie du fait de sa participation au coût de développement d’ «e-TSM/MecaPlanning », des pertes subies en raison de la facturation préférentielle accordée à Toyota, de son manque à gagner en
France, en Italie, et de son préjudice moral,

dans ces deux hypothèses, de débouter les sociétés Toyota intimées de toutes leurs prétentions,

d’ordonner une mesure de publication (par voie de presse et sur internet) en les condamnant solidairement à lui verser la somme de 140.000 euros au titre de ses frais non répétibles et à supporter les dépens,

plus subsidiairement, si la cour n’était pas suffisamment éclairée sur les pièces 45 à 50 communiquées par la société TME en appel, de désigner tout technicien qu’elle souhaitera avec mission de procéder à leur analyse.

Par dernières conclusions notifiées le 12 septembre 2016, la société par actions simplifiée
Toyota France demande en substance à la cour :

in limine litis et au visa des articles 16 et 237 du code de procédure civile, d’annuler le rapport d’expertise déposé par monsieur G et d’ordonner le remboursement à son profit de la consignation versée,

en tout état de cause, de déclarer l’appelante mal fondée en son appel, de confirmer le jugement sauf en ce qu’il a considéré que la société 3DSoft bénéficiait de la présomption instaurée par l’article L 113-1 du code de la propriété intellectuelle et de la déclarer bien-fondée en son appel incident de ce chef en jugeant irrecevable l’action de la société 3DSoft par application de l’article précité et des articles 31 et 32 du code de procédure civile,

subsidiairement, au visa de cet article 31, de juger irrecevable l’action de l’appelante visant à être déclarée auteur du logiciel « MecaPlanning » et tendant à voir juger qu’il s’agit d’une oeuvre de l’esprit originale protégeable par le droit d’auteur ; au visa, par ailleurs, de l’article 202 du même code, d’écarter des débats la pièce n° 37 produite par l’appelante,

sur le fond et au visa des articles L 113-2, L 331-1-3 (en sa version issue de la loi du 29 octobre 2007) du code de la propriété intellectuelle, de débouter l’appelante de l’intégralité de ses demandes en considérant qu’elle ne rapporte pas la preuve de l’état du logiciel « MecaPlanning » antérieurement au début de sa collaboration avec Toyota
France, que le logiciel « ASW » ne présente aucune identité ni similitude des spécifications internes tant avec le logiciel « MecaPlanning » qu’avec le logiciel « e-TSM » et, en toute hypothèse, que le logiciel « e-TSM » est une oeuvre de collaboration,

plus subsidiairement, si la cour venait à retenir l’existence d’une contrefaçon, au visa de l’ordonnance rendue le 19 janvier 2012 par le Président du tribunal de commerce de Paris et de l’arrêt rendu le 14 janvier 2016 par la cour d’appel de Versailles, de débouter la société 3DSoft de l’intégralité de ses demandes en considérant qu’ayant rompu la relation commerciale avec la société Toyota France, elle ne justifie d’aucun préjudice patrimonial ni d’un préjudice moral,

dans l’hypothèse d’une infirmation du jugement relativement à l’action fondée sur le parasitisme et au visa de l’article 1382 du code civil ainsi que des deux décisions précitées, de débouter l’appelante de l’intégralité de ses demandes en considérant qu’elle ne caractérise aucune faute à son encontre susceptible d’engager sa responsabilité, qu’ayant rompu sa relation commerciale avec Toyota France, elle ne justifie d’aucun lien de causalité et qu’elle ne démontre l’existence d’aucun préjudice,

subsidiairement, si la cour entrait en voie de condamnation, de limiter l’évaluation du préjudice à la somme de 12.369 euros, de lui accorder un délai de six mois à compter de la signification du « jugement » (sic) pour permettre à ses réparateurs agréés de trouver un autre logiciel et de rejeter la demande de publication,

en toute hypothèse, de condamner l’appelante à lui verser la somme de 30.000 euros au titre de ses frais non répétibles de première instance et d’appel et à supporter les entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 12 septembre 2016, la société de droit belge Toyota
Motor
Europe (TME) demande essentiellement à la cour, au visa des articles L 111-1 et suivants, L 331-1 et suivants, L 335-3 et suivants (dans la version issue de la loi du 29 octobre 2007) du code de la propriété intellectuelle, 1382 du code civil, 16 et 237 du code de procédure civile,

in limine litis, de constater le défaut de respect du contradictoire, durant les opérations d’expertise, résultant d’absences de transmission de documents qui lui font grief, le défaut de partialité et d’objectivité de l’expert dans l’accomplissement de sa mission et de prononcer, en conséquence, la nullité de ce rapport,

en tout état de cause, de débouter l’appelante de toutes ses demandes fondées sur la contrefaçon en considérant qu’elle ne caractérise aucunement le caractère protégeable par le droit d’auteur des éléments sur lesquels elle fonde ses prétentions, qu’en tout état de cause le logiciel « ASW » ne porte pas atteinte aux droits d’auteur allégués, qu’elle ne justifie pas de son préjudice et que la cour est incompétente pour connaître des demandes fondées sur les faits de contrefaçon qui auraient été commis en Italie,

subsidiairement, de débouter l’appelante de toutes ses demandes fondées sur le parasitisme comme « irrecevables et mal fondées » en considérant qu’elle n’a commis aucun acte de parasitisme à l’occasion de la diffusion du logiciel « ASW » et qu’en outre, la cour est incompétente pour connaître des demandes fondées sur les faits de contrefaçon qui auraient été commis en Italie,

en tout état de cause, de débouter l’appelante de ses demandes de publication,

plus subsidiairement, au cas où la cour estimerait devoir faire droit aux demandes adverses portant sur la cessation de mise à la disposition des réparateurs agréés Toyota et Lexus du logiciel « ASW » et de son utilisation, de dire que ces mesures ne prendront effet que dans un délai de trois mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, de condamner l’appelante à lui verser la somme de 100.000 euros au titre de ses frais non répétibles et à supporter les entiers dépens.

SUR CE,

Sur la validité du rapport d’expertise judiciaire déposé par monsieur G le 12 novembre 2014

Considérant que les deux sociétés intimées, observant que le tribunal a omis de statuer sur leur demande tendant à voir annuler ce rapport, en poursuivent in limine litis l’annulation au visa des articles 16 et 237 du code de procédure civile ;

Qu’elles soutiennent que le principe du contradictoire n’a pas été respecté par l’expert en invoquant, d’abord, le fait qu’en page 6 de son pré-rapport du 19 septembre 2014, au chapitre de ses diligences, l’expert fait état d’un courrier de monsieur Lipski (conseil technique de la société 3DSoft) établissant un taux de similitude entre « e-TSM » et «
MecaPlanning » de 97 à 98 % qui accompagnerait un dire du 24 avril 2014, alors qu’elles n’ont eu connaissance ni de l’un ni de l’autre si ce n’est lors du dépôt du rapport final, l’expert précisant alors dans une note en bas de page qu’une grande partie de ce courrier (lui étant parvenu avec la mention « confidentiel-expert ») ne pouvait être communiquée car contenant l’architecture détaillée des programmes, mais annexant audit rapport final la lettre elle-même et une partie du rapport de comparaison ; que la note de monsieur Lipski, estiment-elles, a influencé à la hausse l’expert dans son appréciation du taux de similitude ;

Qu’il a encore été porté atteinte au respect du contradictoire, ajoutent-elles, du fait de la transmission, le 24 mars 2014 en « confidentiel-expert », des spécifications générales fonctionnelles d’ «
ASW » (contenant des captures d’écran), par la société 3DSoft qui n’avait pas vocation à les détenir et non par TME alors qu’aucun motif légitime ne justifiait que cette pièce, émanant de TME, soit tenue

secrète à leur égard et que l’expert aurait dû s’interroger sur cette transmission inappropriée ;

Qu’elles lui reprochent, de plus, d’avoir méconnu ses devoirs d’impartialité et d’objectivité en manquant d’équité ou en appliquant des critères méthodologiques distincts en fonction des parties, de n’avoir pas tiré de conséquences du défaut de remise des versions du logiciel antérieures à la collaboration avec Toyota en se contentant de captures d’écrans et d’avoir fait preuve – comme cela résulte, en particulier, de notes techniques critiques établies les 30 octobre 2014 et 02 avril 2015 par monsieur H I, expert en informatique, à la demande de la société TME (pièces 62 et 63) – d’insuffisance technique en divers points ; que sont cumulativement invoqués une datation erronée d’ « ASW », le caractère inopérant de la méthode exclusive de comparaison par capture d’écrans, l’erreur résultant de la comparaison avec des écrans issus d’un autre logiciel, le caractère inopérant de la comparaison des écrans des logiciels « e-TSM 2012 » et « ASW », l’absence d’explication des méthodologies techniques utilisées, l’ignorance de l’expert en matière de gestion des ateliers de réparation automobile permettant d’identifier les « besoins métiers » ou encore l’absence d’étude de l’ergonomie d’utilisation des logiciels ;

Considérant, ceci exposé, que ce moyen de défense doit être considéré comme recevable dans la mesure où la demande de nullité d’une expertise judiciaire, bien que ne constituant pas une exception de procédure mais une défense au fond, demeure soumise, en application de l’article 175 du code de procédure civile, aux dispositions qui régissent la nullité des actes de procédure et qu’il ressort des termes du jugement qu’elle était présentée en première instance avant toute défense au fond ;

Que, s’agissant de la méconnaissance du principe du contradictoire, force est de considérer que s’il est vrai que l’expert est tenu de soumettre aux parties les investigations techniques auxquelles il a procédé hors leur présence afin qu’elles puissent éventuellement être à même d’en débattre contradictoirement avant le dépôt de son rapport et que doit être prononcée la nullité de l’expertise judiciaire qui méconnait ce principe sans que la partie qui l’invoque n’ait à justifier d’un grief, seules deux violations précisément individualisées de ce principe sont imputées à faute à l’expert, au cas particulier, si bien qu’en toute hypothèse, le rapport ne saurait être annulé en son entier, la nullité pouvant n’être que partielle et ne porter que sur les seules opérations qui n’auraient pas été diligentées dans le respect de ce principe ;

Qu’il résulte de l’examen du pré-rapport, du rapport final, des dires et bordereaux de pièces les accompagnant versés aux débats par l’appelante ainsi que de l’argumentation des parties que les intimées ne peuvent sérieusement prétendre qu’elles ont « découvert l’existence (de la note technique
Lipski) par une brève mention dans le pré-rapport transmis aux parties le 30 octobre 2014 » dès lors qu’elles ont été informées, dès le 12 mars 2014, du fait que l’expert demandait à la société 3DSoft de lui communiquer des éléments sur les codes source de ses logiciels et, dès le 14 mai 2014, de cette transmission à l’occasion de la communication du dire n° 4 de la société 3DSoft auquel était annexé un bordereau de pièces visant, au paragraphe « pièces transmises en confidentiel-expert », la pièce
CE2 : rapport de Mr Lipski portant sur l’examen comparatif du logiciel MecaPlanning et du logiciel
MecaPlanning e-TSM, l’identification des répertoires et la comparaison des lignes de code de chacun d’eux à l’effet de mesurer le niveau de leur identité » ;

Que, plus précisément sur ce premier grief, la société Toyota France qui formulait des remarques dans son dire récapitulatif postérieur à l’envoi du pré-rapport reproche à l’expert une réponse faite au moyen d’une simple note n° 11 en bas de la page 7/106 du rapport destinée à compléter ses explications précédentes, à savoir : 24 avril 2014 :
courrier du 3DSoft d’accompagnement d’une note technique de monsieur Lipski, conseil technique de cette dernière, établissant selon lui (voir la méthode utilisée en annexe D) un taux de similitude entre e-TSM et MecaPlanning de 97 à 98 %.
Cette note, « confidentiel-expert » n’a pas été transmise aux parties car elle contient les sources de
MecaPlanning et d’e-TSM » ;

Que l’annotation n°11 est formulée comme suit:
« Dans son dire récapitulatif, Toyota France fait

observer que ce courrier n’a pas été produit de manière contradictoire. S’il est exact qu’une grande partie des annexes à ce courrier, qui contiennent l’architecture détaillée des programmes de
MecaPlanning et d’e-TSM ne pouvait être communiqué en raison de leur caractère confidentiel, la lettre elle-même et une partie du rapport de comparaison rédigé par monsieur Lipski auraient pu l’être. Nous les communiquons en annexe D. » et qu’il est reproché à l’expert de n’avoir point, ce faisant, invité les parties à prendre connaissance du volet non confidentiel de ce document et recueilli leurs remarques, les privant de leur droit à discussion en anticipant le dépôt du rapport ;

Que l’existence d’un grief n’étant pas requise pour sanctionner le défaut de respect du contradictoire qu’en vertu de l’article 16 du code de procédure civile le juge se doit de faire observer, c’est en vain que l’appelante se prévaut du fait que cette note Lipski n’a pas servi à l’élaboration du rapport de l’expert qui, pour conclure que le logiciel « e-TSM
MecaPlanning » est un dérivé du logiciel « MecaPlanning », est resté sur sa position d’un taux de recouvrement en expliquant (en page 15 de son rapport) qu’ « il n’y a pas lieu ici de rentrer dans le débat, classique en la matière, de savoir si une séquence d’instruction déplacée d’un fichier dans un autre doit être pris en compte ou non dans le taux de recouvrement, dans la mesure où, dans le cas présent, quel qu’il soit, le taux de recouvrement est particulièrement élevé » ;

Qu’au constat des conditions de transmission de la partie non confidentielle de cette note Lipski qui n’a pas été soumise en temps utile à la contradiction des sociétés Toyota alors qu’elle contenait pourtant une analyse des programmes en question et méritait qu’il soit laissé aux parties la faculté d’en débattre, il y a lieu, sur ce premier grief, de prononcer l’annulation de ce rapport d’expertise mais parcellaire en ce qu’elle atteint uniquement son annexe D (pages 97 à 106/106 du rapport) ;

Qu’évoquant une « méthode identique », les sociétés Toyota soutiennent en second lieu qu’elles n’ont jamais eu connaissance d’un prétendu cahier des charges de l'« ASW » communiqué par 3DSoft à titre confidentiel et n’ont pu en débattre, blâmant l’expert de ne pas les avoir invitées à s’expliquer sur un tel traitement et s’étonnant que cette pièce soit désignée comme étant un cahier des charges émanant de TME et non de 3DSoft ; qu’elles ajoutent que s’il s’agit bien d’un document de spécification édité par TME, 3DSoft ne justifie d’aucun motif légitime pour que cette pièce demeure secrète à l’égard des autres parties, a fortiori à l’égard de celle qui en est prétendument l’auteur et que l’expert aurait dû clairement interroger les parties sur cette transmission inappropriée, d’autant que
TME attirait son attention sur cette incohérence dans son dire récapitulatif ;

Qu’il peut être relevé qu’eu égard aux pièces versées aux débats et au grief tel qu’il est formulé, la société Toyota France ne peut valablement incriminer l’emploi, par l’expert, d’une « méthode identique » à celle observée dans le traitement de la note Lipski ;

Qu’à s’en tenir au compte-rendu de la réunion de cabinet du 12 mars 2014 (en pages 2 et 3 de ce document), monsieur G, reprenant les termes de sa mission (à savoir : « se faire remettre par
Toyota le logiciel ASW en date de février 2012 ainsi que tous éléments en relation avec le logiciel »), « indique avoir reçu la version d’ASW de février 2012. Toutefois, ayant remarqué que celle-ci porte le numéro de version « 4.16 », il demande à TME une copie des sources du logiciel dans ses versions 1, 2, 3.

3DSoft porte à la connaissance de l’expert que TME a rédigé un cahier des charges destiné à la réalisation d’ASW en juillet 2009.

> monsieur G demande à TME de lui faire parvenir en « confidentiel expert » ce cahier des charges avec ses différentes évolutions éventuelles.

> il demande à 3DSoft de lui faire parvenir la pièce dont elle a fait état. » ;

Qu’il échet de considérer que l’expert n’a fait que répondre aux termes de sa mission en se faisant

remettre les pièces lui permettant de l’accomplir et s’est borné à tenir compte des informations portées à sa connaissance qui étaient susceptibles de suppléer la carence de Toyota dans sa production spontanée de pièces ; qu’il leur a réservé un traitement identique, eu égard à leur contenu, en les faisant bénéficier de la confidentialité ;

Qu’étant relevé que les sociétés Toyota ne justifient d’aucune protestation ou réserve en temps réel quant à la pièce litigieuse évoquée par la société 3DSoft devant l’expert, il apparaît, à l’analyse du grief articulé à l’encontre de l’expert, que ce n’est pas tant la violation du principe du contradictoire, entendu ici comme un défaut d’information sur tous les éléments ayant servi à établir l’avis de l’expert, qui les heurte mais, à reprendre les écritures de TME, « la façon dont la société 3DSoft s’est procurée ce document » ; qu’à cet égard, il peut être également relevé qu’elles laissent sans réponse l’argument de leur adversaire selon lequel les travaux d’analyse de l’expert se réfèrent exclusivement au cahier des charges « ASW » (soit, en page 11 du rapport : « Nous avons également obtenu de
TME le cahier des charges qu’elle a rédigé en 2009 afin de sous-traiter l’écriture d’ASW à un prestataire extérieur, la société Infosys. La version qui nous a été transmise est datée du 22 juin 2009 ») ou encore le fait que la pièce litigieuse a fait l’objet d’une communication devant le conseiller de la mise en état le 24 mars 2016, si ce n’est pour en constater le caractère tardif ;

Que ces divers éléments ne permettent pas à la cour de considérer que l’expert n’a pas respecté le principe de la contradiction en cette circonstance et que son rapport encourt la nullité, comme le voudraient les sociétés intimées ;

Que, s’agissant du défaut d’impartialité, les éléments mis en avant par les sociétés Toyota afin de l’établir n’emportent pas la conviction de la cour, que ce soit à travers la formulation d’exigences quant aux datations ou à la production de pièces qui se justifiaient par leur contexte ou qu’il s’agisse de la formulation des réponses ; que, pour le surplus des griefs, il convient de rappeler que le juge n’est pas lié par l’avis de l’expert, qu’il est soumis à son appréciation ainsi qu’à la critique et à la discussion des parties et de dire que, tels que présentés, ces divers reproches ne justifient pas une annulation de l’expertise mais qu’il en sera débattu, s’il échet, dans l’examen au fond de l’action en contrefaçon dont la cour est saisie ;

Qu’il s’infère de tout ce qui précède que les intimées sont recevables en leur moyen mais que celui-ci n’est que très partiellement fondé, le rapport n’encourant la nullité qu’en ce qu’il inclut une annexe D (soit la partie non confidentielle de la note Lipski) sur laquelle les parties n’ont pas été invitées à débattre ;

Sur la mise à l’écart de la pièce n° 37 versée par l’appelante

Considérant que la société Toyota France demande que cette pièce, identifiée au bordereau de communication de pièces de son adversaire comme étant une attestation de monsieur J, soit écartée des débats en ce qu’elle ne se rapporte pas à des faits personnellement constatés par son auteur mais s’analyse en une « compilation de suppositions » émanant d’un de ses anciens employés qui lui a gardé rancune du fait des conditions de son départ ;

Mais considérant que cette argumentation vise à contester la valeur probante de ce document, laquelle ressort de l’examen du fond du litige et sera examinée avec celui-ci ; qu’il n’y a donc pas lieu d’accueillir cette demande de mise à l’écart pure et simple ;

Sur la titularité des droits d’auteur

Considérant qu’au visa des articles 31 et 32 du code de procédure civile, la société Toyota France poursuit, sur appel incident, l’infirmation du jugement en ce qu’il a considéré que la société 3DSoft pouvait se prévaloir de la présomption de titularité des droits patrimoniaux d’auteur dont bénéficie la personne morale en faisant principalement valoir qu’il ne s’agit pas d’une présomption irréfragable et

que dans une autre procédure où elle-même n’était pas partie, il est apparu que la société 3DSoft s’est adressée à une société tierce pour développer son middleware ; qu’en outre, la demande de l’appelante tendant à obtenir la protection par le droit d’auteur du logiciel « MecaPlanning » en sa première version, alors qu’elle n’a pas été en mesure de le produire, ne répond pas à l’exigence d’un intérêt né et actuel ;

Mais considérant que la société 3D Soft agit en l’espèce à l’encontre des sociétés Toyota recherchées en contrefaçon, ceci en l’absence de revendication du ou des auteurs au nom desquels la société
Toyota France n’a pas qualité à agir ; que, par conséquent, a vocation à trouver application cette présomption selon laquelle une personne morale qui commercialise sous son nom, de façon paisible et non équivoque, une oeuvre de l’esprit est présumée à l’égard des tiers recherchés en contrefaçon et en l’absence de revendication du ou des auteurs, détenir sur cette oeuvre les droits patrimoniaux de l’auteur ;

Que la société 3DSoft satisfait aux conditions d’application requises dans la mesure où elle justifie de la commercialisation de son logiciel « MecaPlanning » depuis novembre 2001, pour la première fois chez un concessionnaire Toyota en décembre 2006 (pièces 2, 36) outre du dépôt des versions sources et exécutables de celui-ci à l’APP en 2008 et que si ce logiciel a pu connaître des adaptations liées aux besoins de ses utilisateurs, il n’en demeure pas moins protégeable s’il conserve son identité d’origine malgré ces aménagements ;

Que tel est ici le cas, l’appelante ayant soumis à l’expert une version de son logiciel antérieure à sa collaboration avec la société Toyota, en juin 2007 (rapport de monsieur G, pages 9 et 10/26) et qu’il résulte, par ailleurs, des conclusions expertales (page 26/26) qu’ « entre 2008 et 2012,
MecaPlanning et e-TSM ont continué à évoluer. Dans certains cas à travers des fonctionnalités communes (par exemple gestion des réceptions), dans d’autres cas par des fonctionnalités dédiées à e-TSM (par exemple interfaçage avec le système d’information de Toyota) mais sans impact significatif sur le degré de similitude ci-dessus » ;

Considérant que, dans un subsidiaire, la société Toyota France se prévaut de la titularité de droits patrimoniaux d’auteur partagés sur le logiciel « e-TSM », s’agissant, soutient-elle, d’une oeuvre de collaboration entre la société 3DSoft et elle-même ;

Qu’évoquant des codes sources qui reflètent « nécessairement » les modifications et choix qu’elle-même a définis et exprimés, elle en veut pour preuve, ensemble, les propres affirmations de son adversaire sur son site internet et sur une plaquette commerciale faisant état d’une collaboration avec la société Toyota, les termes d’un projet de contrat entre leurs deux sociétés, la participation active de l’un de ses propres salariés qui, « bien qu’il n’ait pas écrit une seule ligne de code du logiciel e-TSM » a exprimé les besoins précis de la société Toyota et analysé les résultats, la différence substantielle entre le montant des redevances perçues pour le logiciel « MecaPlanning » et pour le logiciel « e-TSM », révélatrice d’un accord entre les parties, ou encore l’absence de commercialisation du logiciel « e-TSM » après la rupture de leur relations, révélatrice, quant à elle, du fait qu’implicitement, la société 3DSoft ne se considère pas titulaire de l’ensemble des droits ;

Que force est, toutefois, de considérer que la société Toyota ne peut être suivie en ce moyen, ceci en fait comme en droit ;

Qu’en fait, il ressort du dire récapitulatif de la société 3DSoft citant, en page 19, la description qu’en fit la société Toyota France dans ses conclusions d’incident devant le juge de la mise en état que le « TSM classique », créé en 1999 pour un volume d’activité ne pouvant concerner qu’un nombre maximum de six techniciens, était un outil-papier et manuel se présentait comme suit :

« pour la partie atelier, le TSM prend notamment la forme, en pratique, d’un tableau spécifique permettant de placer et déplacer (par exemple par des aimants) des rendez-vous et interventions

techniques, de classer des documents dans des casiers (la fiche tour du véhicule, l’ordre des réparations, les clés du véhicule, etc …) »

et que la société Toyota France ne peut raisonnablement prétendre avoir apporté, en 2007, le savoir-faire en résultant pour concourir à la création d’un logiciel ;

Qu’en outre, la société Toyota France qui joue, dans son argumentation, de la polysémie du terme « collaboration » employé, avec d’autres, dans la communication de la société 3DSoft pour n’évoquer que des relations commerciales, doit se voir opposer l’analyse de l’expert exposant que si la société
Toyota a présenté des demandes et précisé des détails au cours de réunions en finançant partiellement les adaptations sollicitées, « il n’en demeure pas moins que, d’un point de vue informatique, les travaux d’analyse complémentaires et les développements ont été effectués par les informaticiens de 3DSoft » (page 17/106 du rapport
G) et qu’enfin, elle ne saurait efficacement tirer argument d’éléments révélateurs qui ne résultent que de suppositions ou d’une convention non finalisée ;

Qu’en droit, surtout, il résulte des dispositions de l’article L 113-2 du code de la propriété intellectuelle invoqué par l’appelante que l’oeuvre de collaboration ne peut concerner que des personnes physiques et que tel n’est pas le cas en l’espèce ;

Qu’il résulte de tout ce qui précède que les sociétés Toyota ne sont pas fondées à contester la recevabilité de l’action de la société 3DSoft tendant à voir réparer l’atteinte portée à ses droits patrimoniaux d’auteur, comme en a décidé (dans les seuls motifs du jugement) le tribunal ;

Sur l’éligibilité de l'« e-TSM-MecaPlanning » à la protection du droit spécial d’auteur sur un logiciel

Considérant que la société 3DSoft appelante poursuit l’infirmation du jugement qui l’a déclarée « irrecevable à agir » faute de démonstration de son originalité et se fonde tout à la fois sur les dispositions des articles L 112-2 (13°) du code de la propriété intellectuelle selon lequel sont protégés comme oeuvres de l’esprit « les logiciels y compris le matériel préparatoire », L 112-1 du même code, 1.3 de la directive 91/250/CEE [lequel est repris ne varietur par la directive 2009/24/CE concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur (version codifiée)] définissant de la façon suivante l’objet de la protection : « un programme d’ordinateur est protégé s’il est original, en ce sens qu’il est la création intellectuelle propre à son auteur. Aucun autre critère ne s’applique pour déterminer s’il peut bénéficier de la protection » ainsi que sur la jurisprudence venue préciser la notion d’originalité en ce domaine ;

Qu’elle se prévaut, en particulier, des enseignements de la juridiction communautaire (CJUE, 02 mai 2012, SAS Institute Inc/World Programming Ltd) disant pour droit qu’est seule protégeable la forme d’expression d’un programme d’ordinateur ' ce qui exclut du champ de la protection les fonctionnalités, le langage de programmation et le format des fichiers ; qu’elle ajoute que seul le codage permet de connaître les choix précis qui ont présidé à la mise en forme de l’interface
Homme/Machine et entend démontrer que le logiciel « e-TSM / MecaPlanning » dont elle est l’auteur satisfait à cette exigence en s’appuyant sur une analyse de son code source amiablement réalisée à sa demande le 03 août 2016 par monsieur K L (pièce 73) ;

Qu’à partir de l’étude des séquences de codes sources qui constituent des enchainements d’instructions se traduisant à l’écran d’ « e-TSM /
MecaPlanning », expose-t-elle, par des choix en termes de structure, de construction, d’architecture et d’ergonomie, elle présente comme suit les caractéristiques lui permettant de se prévaloir d’une écriture originale du logiciel en cause qui se traduit par :

> un écran principal de gestion du planning de l’atelier

rendant possible la création et le positionnement sur le planning horaire de l’atelier des interventions et de celle des mécaniciens, permettant, de plus, d’afficher la première ligne de rendez-vous avec le nom du client sur fond blanc, le statut d’avancement du rendez-vous au moyen d’un code couleurs et la situation du client, physiquement présent ou hors concession, grâce à des icônes,

permettant la représentation synthétique du taux de charge de l’atelier selon trois catégories d’informations, heures disponibles, taux d’occupation de l’atelier et nombre de véhicules disponibles ou un tableau de bord des disponibilités journalières globales de l’atelier,

permettant en outre, sur la même interface, l’affichage d’informations relatives aux rendez-vous non affectés,

> un écran principal de gestion du planning de prêts de véhicules de courtoisie divisant la journée en trois parties et affichant leur disponibilité selon des codes couleurs outre une information sur l’identité de l’emprunteur reliée à un rendez-vous planifié dans le logiciel ;

Qu’au terme d’une présentation détaillée de ces caractéristiques, elle soutient que ces codes sources, composés à partir de choix qui auraient pu être tout autres, ont été conçus et développés selon une construction, une structure, une architecture et une ergonomie qui sont propres à ce logiciel et qui se retrouvent dans chacun des écrans analysés ; qu’ils doivent, à son sens, être tenus pour originaux en ce qu’ils révèlent l’apport intellectuel des développeurs de 3DSoft ;

Considérant, ceci rappelé, que pour dénier l’originalité de ce logiciel, la société Toyota
France fait vainement valoir qu’elle ne peut vérifier les multitudes de représentations de codes présentés comme appartenant à la société 3DSoft du fait qu’ils ne sont pas versés aux débats, que la méthodologie adoptée pour les présenter est en outre viciée car elle est opportunément silencieuse sur la date des codes sources reproduits à chaque paragraphe ou qu’à les supposer sincères, ils sont issus de la collaboration de la société 3DSoft avec elle-même ;

Qu’en effet, monsieur L, analysant des éléments à caractère confidentiel (comme admis par la société TME en page 51/103 de ses conclusions), a soin d’expliciter sa méthodologie et de préciser (en pages 6 et 7/14 de sa note technique) qu’il a analysé le code source du logiciel « MecaPlanning » déposé à l’APP le 13/11/2008 et le code source du logiciel « e-TSM / MecaPlanning pour Toyota) » déposé à l’APP le 24/02/2012 en observant que le second est constitué à 100% du code source du logiciel « MecaPlanning » développé par la société 3DSoft depuis 1998 et à 10% de codes sources correspondant à des développements spécifiques développés par 3DSoft pour Toyota France, déterminés par l’expert judiciaire (page 26/106 de ce rapport) ; qu’aucune ambiguïté ne peut persister sur l’objet précis de son analyse à la lecture de son paragraphe de synthèse puisqu’il écrit : « Nous avons analysé les codes sources (issus du dépôt réalisé par 3DSoft le 13 novembre 2008 (') permettant l’affichage des écrans du logiciel « e-TSM » (…) » ;

Que tout aussi vainement cette intimée affirme que la société 3DSoft ne démontre pas avoir fait des choix personnels distincts de ses concurrents alors qu’il est évident, poursuit-elle, que d’autres logiciels et progiciels visant à répondre à des besoins équivalents existent sur le marché et n’ont pas été comparés par l’appelante ; que, déniant l’existence d’un apport intellectuel propre en regard d’autres produits du même type, ceci en réponse à une démonstration portant sur l’originalité du logiciel en cause, il lui appartient en effet d’établir l’existence d’oeuvres antérieures reprenant dans une même combinaison, apte à donner prise au droit d’auteur, les caractéristiques revendiquées ;

Qu’au surplus, l’appelante rappelle que les intimées ont soumis à l’expert judiciaire trois autres logiciels de gestion de planning atelier automobile (pages 22 à 25 du rapport), le logiciel Automaster développé par la société ADP, le logiciel de la société Toyota au Japon et celui qui est utilisé dans les ateliers Renault et que monsieur G a considéré qu’ils se différenciaient des logiciels en question ;

Que, par ailleurs, l’argumentation de la société
TME tenant à la reprise, par une simple transposition en un format informatique, du savoir-faire propre à la société Toyota au cours de leurs relations commerciales ne peut davantage prospérer puisque s’il n’est pas contesté que cette dernière a donné des instructions de travail sur les aménagements à réaliser puis validé les modifications opérées, formalisant ainsi des exigences commerciales attestées par des courriels versés aux débats, elle ne démontre pas avoir pris part à l’évolution technique et fonctionnelle du logiciel, comme précédemment énoncé sur les prétendus droits patrimoniaux d’auteur partagés ;

Qu’il en va de même de ce qu’elle désigne comme un « stratagème » de l’appelante en ce que cette dernière, évoquant une « traduction », relierait l’originalité à ce qui se voit sur l’écran au lieu de caractériser l’originalité des codes sources puisque s’il est vrai que l’interface graphique n’a pas vocation à être protégée par le droit spécial des programmes d’ordinateur, telle n’est pas l’exacte revendication de la société 3DSoft qui entend voir protéger, à s’en tenir aux caractéristiques revendiquées, une oeuvre contenant des instructions données à une machine ;

Qu’en revanche, les intimées objectent à juste titre que l’originalité ne peut se déduire du simple choix entre plusieurs alternatives évoqué par l’appelante dans la présentation desdites caractéristiques, compte tenu des termes de l’article 3 de la directive 2009/24/CE à la lumière de laquelle doit être interprété le droit national et qui est repris ci-avant ;

Que, cela étant, force est de considérer que la société 3DSoft ne se borne pas à déduire l’activité créative dont elle se prévaut du seul choix entre plusieurs formes possibles pas plus qu’elle ne caractérise l’apport intellectuel qui lui est propre en la seule contemplation de la finalité du logiciel en cause, à savoir : la gestion d’un atelier de mécanique automobile ;

Que, dans le domaine en cause où peu de place est laissée à l’expression d’une personnalité, l’appelante met justement en avant, ceci par delà les impératifs métier dont fait état la société TME, les choix qu’elle a opérés et combinés en les formalisant dans son écriture du code source pour créer un logiciel ayant une approche dynamique, synthétique et néanmoins précise et détaillée d’un atelier automobile ;

Qu’eu égard à la forme d’expression particulière qu’elle a donnée à son oeuvre, elle peut se prévaloir d’un choix d’agencements témoignant d’une formalisation personnelle, d’un apport intellectuel qui lui est propre et, partant, de l’éligibilité du logiciel revendiqué à la protection du droit d’auteur portant sur les programmes d’ordinateur ;

Que le jugement qui en dispose autrement doit, par conséquent, être infirmé ;

Sur l’action en contrefaçon

Considérant qu’invoquant les dispositions des articles L 335-3 et L 122-6 du code de la propriété intellectuelle relatifs à la contrefaçon de logiciel et la jurisprudence européenne précitée, la société 3DSoft entend rappeler que la contrefaçon est constituée par la reproduction servile mais aussi en cas d’adaptation, de traduction ou de décompilation si cette dernière sert à mettre au point, produire ou commercialiser un programme d’ordinateur dont l’expression est fondamentalement similaire ;

Qu’elle évoque, liminairement, les conditions particulièrement troubles du développement d’ « ASW », rappelant, à cet égard, la réticence des intimées dans la délivrance d’informations et de documents au cours des opérations d’expertise, puis leur tardive communication de pièces en cause d’appel – lesquelles ont pourtant permis d’établir que, début 2010, grâce à la récupération de versions de démonstration du logiciel « e-TSM / MecaPlanning » par la société TME et d’opérations d’ingénierie inverse, cette dernière a pu reconstituer le matériel de conception préparatoire du logiciel « e-TSM » ensuite exploité par la société indienne Infosys en vue du développement de l'« ASW » – ou encore leurs contradictions quant aux dates de début et fin de celui-ci alors qu’il s’est déroulé à

une rapidité qui ne peut s’expliquer que par une utilisation de la technique du « reverse-engineering » ;

Que, détaillant les diverses ressemblances entre ces deux logiciels, elle fait état de « l’impression d’ensemble » qui se dégage des similitudes sur l’interface Homme/Machine : ergonomie similaire de l’écran de gestion du planning de l’atelier, de l’écran de planning de prêts de véhicules, du planning de réception, de la liste des rendez-vous ou d’autres (positionnement des interventions, pictogrammes, lignes rouges, zones de pause déjeuner, boutons de navigation, fenêtres) se retrouvant notamment sur l’écran du planning atelier ;

Qu’elle recense d’autres similitudes en matière de choix techniques et conceptuels, tels la reproduction servile du découpage horaire dans les plannings de l’atelier et de réception, la reprise du bouton « rafraîchir l’affichage », le calcul du taux de charge journalier et le planning des travaux, les règles de gestion non contraignantes, le prêt d’un véhicule de courtoisie, se prévalant également d’une identité du périmètre fonctionnel et qu’en réplique aux sociétés Toyota, elle affirme que ces similitudes ne peuvent pas être justifiées par des contraintes-métier ;

Considérant, ceci étant exposé, qu’il convient de rappeler que si, effectivement, la contrefaçon s’apprécie par les ressemblances et non, comme le font les intimées, par les différences, l’impression d’ensemble est une notion étrangère au droit d’auteur ;

Que la contrefaçon étant constituée lorsque sont reprises, dans la même combinaison, les caractéristiques de l’oeuvre donnant prise au droit d’auteur, il y a lieu de rappeler que le logiciel « e-TSM/ MecaPlanning » bénéficie de la protection juridique des programmes d’ordinateur en raison de la forme d’expression donnée à son codage, autrement dit à l’écriture des instructions du logiciel ;

Que les différentes similitudes ci-avant recensées par la société 3DSoft ' laquelle, selon monsieur
H I, rédacteur de notes techniques pour le compte de la société TME (pièces 32 et 33) emploie le terme « ergonomie » dans une acception restrictive en ce qu’elle ne touche que l’ « ergonomie de surface » de l’application, autrement dit ce que voit l’utilisateur – ne concernent que l’interface utilisateur graphique qui ne constitue qu’un élément du programme au moyen duquel celui-ci exploite ses fonctionnalités ;

Que cette interface, qui pourrait éventuellement être protégée par le droit commun d’auteur, est exclue du champ de la protection du droit d’auteur portant sur les logiciels, comme d’ailleurs rappelé dans le considérant 16 de la directive 2009/24/CE selon lequel « il convient de préciser que seule l’expression d’un programme d’ordinateur est protégée et que les idées et principes qui sont à la base des différents éléments d’un programme, y compris ceux qui sont à la base de ses interfaces, ne sont pas protégés par le droit d’auteur en vertu de la présente directive » ;

Que par voie de conséquence, est dénuée de portée juridique l’argumentation de la société 3DSoft relative à la réalisation, dans le cadre d’un projet dénommé « e-24/7 », d’une rétro-ingénierie destinée à reconstituer le matériel préparatoire du logiciel « e-TSM / MecaPlanning» en ce qu’il portait sur ses interfaces, décrivant le déroulement des écrans du logiciel, l’analyse de leur composition afin d’en déduire les spécifications fonctionnelles et l’aspect visuel ;

Que, par ailleurs et s’agissant de la transmission des codes sources avec la structure de la base de données du logiciel « e-TSM / MecaPlanning », la société TME conteste en avoir reçu l’intégralité et fait observer que son adversaire n’en rapporte pas la preuve ;
qu’elle ne reconnait que la réception d’une version de démonstration et met en avant l’analyse de monsieur I selon lequel « sur le plan technique, il est incontestable qu’un programme exécutable ne contient pas le code source qui a servi à la création du programme » (pièce 57, page 17/18) ;

Qu’en toute hypothèse, c’est à juste titre que la société TME se prévaut de la concordance des conclusions de l’expert judiciaire et de monsieur I, le premier relevant (page 18 du rapport ) que « le terme de reverse-engineering est sans doute excessif ici, car il ne semble pas que le fonctionnement interne ait pu être étudié à partir de la version client de l’e-TSM », le second qu’en raison de l’environnement différent des deux logiciels « aucune possibilité de reprise de code ni même d’architecture d’applications ou de données n’était possible depuis « e-TSM « ou « MecaPlanning » pour concevoir et réaliser «
ASW » ; que cette intimée ajoute tout aussi pertinemment qu’une décompilation vise à reconstituer des codes sources et que tel n’est pas le cas en l’espèce, l’expert judiciaire concluant (page 21 du rapport) :
« Nous n’avons trouvé aucune ressemblance au niveau des spécifications internes, les structures de programme également, le langage de programmation n’est pas le même » ;

Qu’eu égard, par conséquent, à l’objet des emprunts précisément incriminés, la société 3DSoft ne peut se prévaloir d’une reprise des éléments du logiciel dont elle est l’auteur bénéficiant de la protection du droit d’auteur portant sur les logiciels et qu’échouant en son action en contrefaçon à l’encontre des deux sociétés intimées, elle en sera déboutée comme en ses demandes subséquentes ;

Sur l’action fondée sur le parasitisme

Considérant qu’agissant subsidiairement sur le terrain de la responsabilité civile délictuelle, la société 3DSoft fait valoir que le fait qu’une société conçoive et mette au point un logiciel en reprenant le travail de recherche d’une société tierce et en réalisant ainsi d’importantes économies caractérise un comportement parasitaire et que tel est le cas en l’espèce ;

Qu’elle fait état du travail et des investissements « considérables » réalisés de 1998 à 2011 et notamment de ceux qu’elle a engagés pour les évolutions et l’optimisation sur les logiciels « MecaPlanning » et « e-TMS / MecaPlanning », avec un coût de développement qui se compte en millions, pour en faire un produit-phare procurant un véritable avantage concurrentiel à ceux qui en disposent ; qu’elle cite, à cet égard, l’amélioration de la productivité et de l’efficacité dans l’atelier des concessionnaires, l’amélioration de la relation-client et l’apport novateur de son logiciel pour la gestion des ateliers automobiles ;

Que les sociétés Toyota ont profité d’une relation commerciale qui a duré cinq années, poursuit-elle, pour acquérir une connaissance de son logiciel et de son adaptation leur permettant ensuite de faire développer très rapidement et à moindre coût un logiciel très similaire ; qu’elle évoque la mise à disposition de ses bases de données et leur détournement, la copie servile des interfaces du logiciel « e-TSM / MecaPlanning » dans les spécifications fonctionnelles générales de l’ « ASW » préparées par la société TME, la reproduction servile des fonctionnalités d’ « e-TSM /MecaPlanning» dans « ASW », l’économie réalisée par la société TME dans son investissement que ne viennent pas contredire, en toute hypothèse, ses assertions selon lesquelles elle a consacré un budget d'1,5 million d’euros au développement, par la société Infosys, de l’ « ASW » ;

Qu’elle tire enfin argument de l’interdiction désormais faite aux concessionnaires du réseau Toyota, auxquels elle avait consacré du temps pour installer le logiciel « e-TMS / MecaPlanning », d’utiliser une alternative au logiciel « ASW » alors que dans une situation de concurrence loyale le choix aurait dû leur être laissé ; que 98 % d’entre eux utilisent l’ « ASW » avec une facturation incluse au sein d’une tarification globale pour plusieurs logiciels ;

Considérant, ceci étant rappelé, que la société 3DSoft, ne pouvant bénéficier sur les interfaces et, plus généralement, sur les fonctionnalités d’un logiciel – entendues comme la mise en oeuvre de la capacité de celui-ci à effectuer une tâche précise ou à obtenir un résultat déterminé ' qu’elle a créées de la protection propre aux logiciels en impute à faute l’appropriation aux sociétés Toyota en agissant sur le fondement du parasitisme ;

Que si les principes de la liberté du commerce et de l’industrie et de la libre concurrence permettent de reproduire ou imiter une création non appropriée, quand bien celle-ci serait le fruit d’efforts financiers et humains, encore faut-il que cela procède d’un comportement respectueux des usages honnêtes et loyaux du commerce ;

Qu’en l’espèce, il ressort en particulier de la synthèse de la note établie par monsieur L le 09 mars 2016 (pièce 73), que dans le cadre de relations commerciales qui se sont poursuivies durant plusieurs années les intimées ont pu disposer d’une version de démonstration du logiciel « e-TSM /
MecaPlanning » au cours des mois qui ont précédé la finalisation, en juin 2009, de 262 pages de spécifications fonctionnelles établies par la société TME reproduisant formellement les écrans issus de ce logiciel en décrivant notamment les informations traitées, leur représentation à l’écran, le séquencement des écrans, les liens entre les informations
- citant, notamment, 229 fois le nom d’ « e-TSM / MecaPlanning » ; que les pièces 45 à 50 produites par la société TME conduisent monsieur L à écrire que la société de droit indien Infosys a établi, début 2010, des spécifications fonctionnelles détaillées en reprenant ces spécifications fonctionnelles générales pour développer un nouveau logiciel dénommé « ASW » dont les écrans ainsi que leur contenu, leur composition, leur séquencement présentent de larges ressemblances avec ceux issus du logiciel « e-TSM » ;

Que l’expert judiciaire a conclu dans le même sens dans son rapport déposé le 12 novembre 2014, indiquant, en réponse au dire récapitulatif de la société Toyota : « Nous maintenons donc que les ressemblances qui apparaissent entre e-TSM et ASW ne peuvent s’expliquer par des contraintes métiers, mais trouvent leurs origines dans les nombreuses captures d’écran d’e-TSM présentes dans le cahier des charges rédigé par Toyota. Disposant d’un tel document le prestataire qui a développé
ASW ne pouvait, même en utilisant un langage et une architecture différents, que réaliser un produit ayant une interface utilisateur très proche de celle d’e-TSM » ;

Que force est de considérer que cette appropriation du savoir-faire de la société 3DSoft, ainsi réalisée dans un contexte d’abus de la confiance d’un partenaire commercial, a permis aux sociétés Toyota d’épargner une partie des investissements qu’elles ont consacrés à l’élaboration du logiciel « ATW » (quand bien même la société TME qualifierait-elle de « considérable » la somme de 1.442.242 euros
TTC investie) et d’éviter, de plus, tâtonnements, pertes de temps et risque économique puisque les concessionnaires du réseau Toyota disposent désormais, incidemment au préjudice de la société 3DSoft, d’un nouveau logiciel ne les dépaysant pas de celui qu’ils utilisaient précédemment ;

Que les intimées ne peuvent valablement dénier les efforts humains et financiers que la société 3DSoft a déployés pour mettre au point un logiciel qui, par ses performances, a pu séduire la société
Toyota France en 2007 au point d’entrer en relation avec elle et de s’acquitter de redevances d’utilisation trimestrielles durant plusieurs années, en en envisageant même l’acquisition, ni se pévaloir, comme il a été dit, de la « collaboration » de la société Toyota dans le processus d’amélioration du logiciel, ni davantage lui opposer les conditions de la rupture de leur relation commerciale pour affirmer qu’elle ne peut revendiquer l’indemnisation d’un préjudice ;

Qu’il s’en infère que la société 3DSoft qui peut se prévaloir d’un comportement fautif imputable aux intimées qui lui cause préjudice est, par conséquent, fondée en son action au titre du parastisme et que le jugement doit être infirmé de ce chef ;

Considérant, s’agissant de sa réparation, que la demande de remboursement de la somme de 82.500 euros correspondant, pour 78.580 euros, au coût des développements d’ « e-TSM / MecaPlanning » selon quatre cahiers des charges établis entre décembre 2007 et juillet 2008 et, pour le reste en des travaux annexes, ne saurait être déclarée irrecevable comme nouvelle en cause d’appel ou prescrite, ainsi que soutenu par la société Toyota France, ceci par application des articles 565 et 566 du code de procédure civile ;

Qu’elle doit être considérée comme fondée puisque les sociétés Toyota se sont approprié le fruit de

cet investissement représentant une valeur économique dès lors qu’il a notamment permis à leurs concessionnaires de disposer, à compter de 2008, d’un outil plus performant dans leur secteur d’activité ;

Qu’en revanche, ne peut prospérer le surplus de sa demande indemnitaire présentée selon la grille d’évaluation du préjudice résultant de la contrefaçon (pertes subies, gains manqués, préjudice moral) ou ressortant de la relation contractuelle rompue dès lors que l’action fondée sur le parasitisme a vocation à indemniser le préjudice résultant du pillage illicite d’investissements et de savoir-faire, tels des frais de conception, de mise au point, de communication ou encore la perte de l’avantage concurrentiel procuré par ces investissements ;

Qu’à cet égard, force est de considérer que si l’appelante fait état de recherches et développement sur ce produit depuis quatorze ans, elle s’abstient de justifier des investissements qui y ont été consacrés ;

Que tout au plus peut-il être tenu compte de la perte de l’avantage concurrentiel de son logiciel, conquis grâce à son savoir-faire, par l’apparition du logiciel « ATW » qui l’a supplanté chez les concessionnaires de la marque au moyen de procédés déloyaux et, par ailleurs, de l’atteinte à l’image qu’elle avait pu donner en raison de ce même savoir-faire, de sorte que la somme de 82.500 euros précédemment retenue sera portée à celle 125.000 euros indemnisant la totalité de son préjudice ;

Qu’au titre des réparations en nature sollicitées, il n’y a pas lieu d’ordonner la mesure de publication réclamée, la réparation par équivalent ci-dessus allouée réparant à suffisance le préjudice subi ;

Sur les autres demandes

Considérant que l’équité conduit à condamner les sociétés Toyota, tenues in solidum, à verser à la société 3DSoft la somme de 25.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Que, déboutée de ce dernier chef de demande, les intimées supporteront les dépens de première instance et d’appel ainsi que la charge finale des frais d’expertise judiciaire ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau ;

Déclare la société Toyota France SAS et la société de droit belge Toyota Motor Europe ' TME recevables mais mal fondées en leur moyen tendant à voir prononcer l’annulation de l’entier rapport déposé le 12 novembre 2014 par monsieur F G, expert judiciaire commis par le tribunal ;

Dit que l’annulation de ce rapport doit être limitée à son annexe D (pages 97 à 106/106) ;

Rejette la demande de la société Toyota France tendant à voir écarter des débats la pièce n° 37 produite par la société 3DSoft SARL;

Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société 3DSoft SARL en contrefaçon des droits patrimoniaux d’auteur sur le logiciel revendiqué ;

Déboute la société 3DSoft de son action en contrefaçon de droits d’auteur portant sur le logiciel dénommé « e-TSM / MecaPlanning » à l’encontre de la société Toyota France SAS et de la société de droit belge Toyota Motor Europe ' TME ainsi qu’en toutes ses demandes subséquentes ;

Condamne la société Toyota France SAS et la société de droit belge Toyota Motor Europe ' TME tenues in solidum à verser à la société 3DSoft SARL une somme de 125.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des actes de parasitisme commis à son préjudice ;

Déboute la société 3DSoft de sa demande de publication de la présente décision ;

Condamne la société Toyota France SAS et la société de droit belge Toyota Motor Europe ' TME tenues in solidum à verser à la société 3DSoft SARL la somme de 25.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d’appel en ce compris les frais d’expertise judiciaire avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

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Cour d'appel de Paris, 21 octobre 2016, n° 15/17224