Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 21 novembre 2013, n° 11/08188

  • Phonogramme·
  • Prescription·
  • Rémunération·
  • Gérant·
  • Sociétés·
  • Commerce·
  • Responsabilité·
  • Consorts·
  • Droits voisins·
  • Artiste interprète

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 1re ch. 1re sect., 21 nov. 2013, n° 11/08188
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 11/08188
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 19 octobre 2011, N° 10/04724
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 79B

1re chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 NOVEMBRE 2013

R.G. N° 11/08188

AFFAIRE :

B X

C/

Société SPRE – STE POUR LA PERCEPTION DE LA REMUNERATION E

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Octobre 2011 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 1

N° Section :

N° RG : 10/04724

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

— Me Pierre GUTTIN, avocat au barreau de VERSAILLES,

Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES -

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE TREIZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur B X

XXX

XXX

— Représentant : Me Pierre GUTTIN, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 – N° du dossier 11000929

Représentant : Me Charles-Henri HAMAMOUCHE, avocat plaidant au barreau du VAL DOISE, vestiaire : 90

Monsieur Z X

né le XXX À Taguemount-Oukerrouche (ALGERIE)

XXX

XXX

Représentant : Me Pierre GUTTIN, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 – N° du dossier 11000929

Représentant : Me Charles-Henri HAMAMOUCHE, avocat plaidant au barreau du VAL DOISE, vestiaire : 90

APPELANTS

****************

SOCIETE POUR LA PERCEPTION DE LA REMUNERATION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION DES PHONOGRAMMES du COMMERCE 'SPRE’ prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège XXX

XXX

inscrite au RCS de PARIS, sous le numéro D 334 784 865

Représentant : Me Franck LAFON, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20111101

— Représentant : Me Anthony GARCIA JACOBSEN, de la SELARL ARILLA, avocat plaidant au barreau de PARIS, vestiaire : L0289

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 24 Octobre 2013 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie Gabrielle MAGUEUR, président chargé du rapport, Madame Dominique LONNE, conseiller,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président,

Madame Dominique LONNE, Conseiller,

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,

Vu l’appel interjeté par B X et Z X du jugement rendu le 20 octobre 2011 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :

— déclaré recevable l’action de la Société civile pour la Perception de la Rémunération Equitable dite SPRE, – condamné in solidum B X et Z X à payer à la SPRE la somme de 18.268,39¿ avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2009, avec capitalisation à compter du 26 mars 2010, – condamné in solidum B X et Z X à payer à la SPRE la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 22 mai 2012 par lesquelles B X et Z X, poursuivant l’infirmation du jugement entrepris, demandent à la cour de :

— donner acte à B X qu’il reconnaît avoir géré la société Y du 4 avril 1991 au 20 janvier 2003, – mettre hors de cause Z X qui a été désigné en qualité de gérant de la société Y postérieurement à la cession du fonds de commerce de cette société, – constaté que la SPRE n’a émis aucune cotisation postérieurement au 20 janvier 2003, – à titre principal, dire que l’action en responsabilité personnelle dirigée à leur encontre est prescrite, tant sur le fondement des articles L.223-22 et L.223-23 du code de commerce que des articles 1382 et 2224 du code civil, – à titre subsidiaire, constater qu’ils n’ont commis aucune faute séparable de leurs fonctions, qu’ils n’ont commis aucune faute d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal de leurs fonctions de gérants responsabilité personnelle de dirigeants,

— débouter la SPRE de toutes ses prétentions, – dans tous les cas, condamner la SPRE à leur payer la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

Vu les dernières écritures signifiées le 22 mars 2012 aux termes desquelles la SPRE conclut à la confirmation partielle du jugement déféré et formant appel incident, prie la cour de condamner B X et Z X à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts complémentaires du fait du trouble causé à son fonctionnement et du préjudice moral subi par des ayants droit, celle de 4.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

Vu l’ordonnance de clôture prononcée le 5 septembre 2013 ;

SUR QUOI, LA COUR

Considérant que la SPRE, société civile de gestion collective constituée en application des articles L. 214-5 et L. 321-1 et suivants du CPI, a pour mission légale de percevoir la rémunération équitable due aux artistes interprètes et aux producteurs de phonogrammes en vertu de l’article L.214-1 alinéa 5 du même code ;

Que la société Y, créée en avril 1999, exploitait un fonds de commerce de discothèque à Bouafle (Yvelines) sous l’enseigne «Le PEOPLE» ; qu’elle a été gérée par B X du 1er avril 1999 au 20 janvier 2003, date de la cession du fonds de commerce à la société D E, puis par Z X ;

Que faisant valoir que les demandes réitérées adressées à la société Y et les procédures engagées à son encontre, avec le concours de l’administration fiscale puis en référé, en vue du paiement de la rémunération équitable sont restées infructueuses, la SPRE a, par acte des 19 janvier et 26 mars 2010, assigné ses gérants successifs devant le tribunal de grande instance de Nanterre pour les voir condamner au règlement de ces droits voisins ;

Qu’il a été fait droit à sa demande ;

Sur la prescription

Considérant que les appelants soulèvent, en premier lieu, la prescription de l’action engagée par la SPRE, au visa des articles L. 223-22 et L.223-23 du code de commerce ; qu’ils soutiennent, à cet effet, que la responsabilité du gérant se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou, s’il a été dissimulé à compter de sa révélation, que la créance de la SPRE est impayée pour la période du 28 avril 1999 au 31 décembre 2002 et que la prescription a commencé à courir à compter de la date à laquelle la SPRE a eu connaissance du fait que la société Y n’avait pas réglé la rémunération équitable, soit le 18 février 2004, date de l’opposition au prix de vente et au plus tard, le 4 mai 2004, date de l’ordonnance de référé et que l’action était prescrite à compter du 18 février 2006 et au plus tard le 4 mars 2007 ;

Que la SPRE répond que la prescription triennale édictée par l’article L.223-23 du code de commerce n’a pas vocation à s’appliquer dès lors que les consorts X ne sont pas poursuivis en leur qualité de dirigeants d’une société commerciale pour les cas limitativement énumérés aux articles L.223-19 et L.223-22 du code de commerce, mais en leurs noms personnels sur le fondement de l’article 1382 du code civil pour avoir engagé leur responsabilité délictuelle en diffusant des phonogrammes dans leur établissement tout en refusant de régler la redevance correspondante ; qu’elle ajoute que les consorts X sont des professionnels, qu’ils ont persisté dans le défaut de communications des éléments nécessaires au calcul de la rémunération, qu’ils ont été mis personnellement en demeure de régler cette redevance ; que Z X a organisé l’insolvabilité de la société Y ;

Considérant que l’article L.223-22 du code de commerce, invoqué par les appelants, concerne la mise en jeu de la responsabilité individuelle ou solidaire des gérants, envers la société ou envers les tiers, soit pour des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit pour des violations des statuts, soit pour des fautes commises dans leur gestion ;

Qu’en l’espèce, la responsabilité des gérants est recherchée par la SPRE sur le fondement de l’article 1382 du code civil, pour avoir commis une faute détachable de leurs fonctions de nature à engager leur responsabilité délictuelle, en décidant de diffuser des phonogrammes dans l’établissement dont ils assurent la gestion sans s’acquitter de la rémunération équitable ; que la SPRE fait valoir, à juste titre, que le défaut de versement de la rémunération due à l’artiste interprète et au producteur de phonogrammes constitue un délit, prévu par l’article L.335-4 alinéa 3 du CPI, en sorte qu’il caractérise également une faute de nature civile susceptible de mettre en jeu la responsabilité personnelle des gérants ;

Que les dispositions de l’article L.223-19 du code de commerce ne sont donc pas applicables ; que par voie de conséquence, la fin de non recevoir tirée de la prescription triennale sera rejetée ;

Considérant que les consorts X invoquent, en second lieu, la prescription quinquennale tirée de l’article 2224 du code civil faisant valoir que la SPRE a engagé l’action en responsabilité personnelle à leur encontre, 6 ans après la cession du fonds de commerce et 5 ans après l’ordonnance de référé ;

Que la SPRE réplique qu’aucune prescription n’était acquise en vertu de la loi ancienne qui prévoyait une prescription trentenaire, que lorsque la loi du 17 juin 2008 sur la prescription civile est entrée en vigueur, le 19 juin 2008, la dette civile dont elle poursuit le paiement n’était pas encore prescrite, que les consorts X n’ayant pas communiqué leurs justificatifs comptables et fiscaux , elle se trouvait dans l’ignorance de l’étendue de son droit et qu’en tout état de cause, le délai de cinq ans doit être décompté à partir du 19 juin 2008 et expirait le 19 juin 2013 ;

Mais considérant que selon l’article 26 de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, les dispositions de la loi qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi, soit le 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ;

Considérant que la rémunération due aux artistes interprètes et aux producteurs de phonogrammes au titre des droits voisins, en vertu de l’article L.214-1 du CPI, en contrepartie de l’utilisation des phonogrammes dans un lieu public constitue une créance civile qui n’a pas la nature de créance à terme périodique de l’article 2267 ancien du code civile ; que sous l’empire de la loi ancienne, l’action en paiement de la rémunération équitable était donc soumise à la prescription trentenaire de droit commun prévue par l’article 2262 du code civil ; qu’à la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle, le délai de trente ans n’était pas entièrement écoulé de sorte que la prescription de l’action en paiement de la SPRE n’était pas acquise ;

Que le nouveau délai de 5 ans décompté à partir du 19 juin 2008 est venu à expiration le 19 juin 2013 en sorte que les assignations délivrées les 10 janvier et 26 mars 2010 ont valablement interrompu la prescription ;

Que la fin de non recevoir tirée de l’article 2224 du code civil doit donc être écartée ;

Sur le fond

Considérant que les consorts X contestent avoir commis une faute personnelle détachable des fonctions de gérant qui soit intentionnelle et relèvent que le non paiement de la créance de la SPRE résulte de la liquidation judiciaire de la société D E ;

Que la SPRE répond qu’en décidant de diffuser des phonogrammes dans leur établissement sans régler la rémunération équitable, ils ont engagé leur responsabilité à concurrence de la rémunération impayée ;

Considérant que la SPRE justifie avoir adressé, le 16 juillet 2009, à B X et à Z X, des mises en demeure de payer les sommes mises à leur charge par l’ordonnance de référé du 4 mai 2004 et de lui communiquer les éléments de calcul de la rémunération équitable ; que c’est donc en toute connaissance de cause que les appelants successivement gérants de la société Y n’ont ni produit les justificatifs de calcul des droits voisins, ni régler la provision mise à leur charge par l’ordonnance de référé ; que la rémunération dont le règlement est poursuivi s’étend au-delà de la cession du fonds de commerce à la société D E, dont Z X était le gérant dès lors que les droits éludés portent sur la période du 1er avril 1999 au 28 février 2003 ; que pour justifier le défaut de paiement de la rémunération due à la SPRE, les consorts X invoquent en vain l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société D E, le 28 septembre 2006, convertie en liquidation judiciaire, le 20 septembre 2007, alors qu’ils ont été défaillants dès la création de la société Y en avril 1999 ; que dans ces circonstances, leur abstention délibérée caractérise une faute personnelle détachable de leurs fonctions de gérants ;

Qu’il s’ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu’il a condamné in solidum B X et Z X à payer à la SPRE la somme de 18.268,39 €, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2009, et ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil ;

Considérant que la SPRE sollicite l’allocation de dommages-intérêts complémentaires en invoquant le préjudice matériel correspondant au coût pré-contentieux et contentieux internes et un préjudice moral résultant de l’atteinte à son activité et à sa mission légale du fait de l’infraction commise par les appelants en toute connaissance de cause ;

Considérant que la résistance des consorts X à produire les éléments comptables nécessaires au calcul de la créance a contraint la SPRE à s’adresser à l’administration fiscale, à engager des procédures d’exécution restées infructueuses ; que le trouble ainsi occasionné dans son fonctionnement, source d’un préjudice matériel, auquel s’ajoute le préjudice moral résultant de l’atteinte portée aux droits des artistes-interprètes et producteurs de phonogrammes dont elle assure la gestion, justifient l’allocation d’une indemnité complémentaire de 1.000 € à titre de dommages-intérêts ;

Considérant que les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile doivent bénéficier à la SPRE ; qu’il lui sera alloué à ce titre la somme complémentaire de 4.000 € ;

PAR CES MOTIFS

Le cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Condamne in solidum B X et Z X à payer à la SPRE la somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts,

Condamne in solidum B X et Z X à payer à la SPRE la somme complémentaire de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum B X et Z X aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile .

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 21 novembre 2013, n° 11/08188