Cour d'appel de Paris, 29 mars 2017, n° 15/08757

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 29 mars 2017, n° 15/08757
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/08757

Texte intégral

Dossier n°15/08757

Arrêt n° 4 Pièce à conviction : Consignation P.C. :

UR D’APPEL DE PARIS |

Pôle 2 – Ch.8 (55 pages)

Prononcé publiquement ie mercredi 29 mars 2017, par le Pôle 2 – Ch.8 des appels correctionnels,

Sur appel d’un jugement du tribunal de grande instance de Paris – chambre 31/2 – du 22 mai 2015, (P11041092084). PAR E E :

Préven

SAS F N° de SIREN : 493-542-344

[…]

EN

délivrée le

à le

[…]':

A 3 ou AT

N° de SIREN : […]

SAS E N° de SIREN : 312-826-191

[…]

ki

intimées, représentées par M Y, gérant, et assistées de Maître AJ AI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire PO119

Y M Né le […] à AIX LES BAINS, SAVOIE (073) Fils de Y Herman ct de KORNITZE Sarah

ño no 20 Le De nationalité française te […] président directeur général, m

AU

[…]

D cimé. comparant ct assisté de Maître AJ AI, avocat au barreau de À a PARIS, vestiaire R278

Libre f il \. LL – Ju ar drone (9 a Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 13/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 1

Ministère public appelant principal

[…]

[…], DE LA CONSOMMATION, DU TRAVAILILE DE délivrée le ND cu lp FRANCE

— […]

à Ve

représentée par Agnès MILAN, service contentieux

Gros, { Composition de la cour

+ he { dus lors des débats ct du délibéré : Enr L

Ç AR JL de résident : Gérard BURKEL,

conscillers : AP I AQ J),

Greffier L K aux débats et au prononcé, Ministère public

représenté aux débats et au prononcé de l’arrêt par Pierre DARBÉDA, avocat général,

LA PROCÉDURE :

La saisine du tribunal et la prévention

N° 11041092084

La SAS GACD a été poursuivie devant le tribunal, selon acte d’huissier délivré à personne habilitée, pour avoir à Paris, dans les régions Rhône-Alpes, Lorraine, Aquitaine ct Alsace, durant les années 2009, 2010 et 2011, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription,

1) étant une entreprise assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à un chirurgien dentiste des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, en l’espèce, en proposant divers avantages directs aux chirurgiens clients de GACD, notamment dans le cadre d’une opération leur ayant permis de gagner des séjours à New-York contre des commandes de faible montant, par l’inscrtion dans les facturations de nombreux cadeaux gratuits ou faiblement payants de type matériel Hi-fi, par l’octroi de produits gratuits aux assistants dentaires ou aux conjoints des chirurgiens dentistes, consistant ainsi en des avantages indirects pour ces derniers, et par la création d’un «programme privilège» pour les clients leur offrant de nombreux cadeaux,

faits prévus par les articles L. 4113-6 al.I, L. 4221-17, L. 1451-2, L. 1313-10 $ IL L. 1414-4 al.4, L. 5323-4 al. 8 du Code de la santé publique, 121-2 du Code pénal et réprimés par les articles L. 4163-2 al.5, L. 4223-4, L. 1452-1, L. 1312-4, L. 1419-I,

Cour d’Appel de Parts – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 15/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 2 (

L. 5451-4 du Code de la santé publique, 131-38, 131-39 2°, 3°, 4°, 5°, 9° du Code pénal,

2) dans le cadre d’une activité professionnelle, étant vendeur de produits ou prestations de services, établi une facture ne comportant pas le nom des parties, leur adresse, la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, le prix unitaire hors TVA des produits ou des services rendus, tous rabais remises ou ristournes chiffrables, les conditions d’escomptc applicables ou le taux des pénalités exigibles, en l’espèce notamment en ne mentionnant pas sur les factures les ristournes acquises à chaque commande de produits, ct en ne mentionnant pas non plus la dénomination précise d dées dans le cadre du «programme privilège» souscrit par les clients (article 121-2 et 131-8 du Code pénal)

Jaits prévus par les articles L. 441-5, L. 441-3 al. 3, al.4 du Code du commerce, 121-2 du Code pénal et réprimés par les articles L. 441-5, L. 441-4 du Code du commerce, 131-38, 131-39 5° du Code pénat.

«és

Y M a été poursuivi devant le tribunal, selon acte d’huissier délivré à personne habilitée, pour avoir à Paris, dans les régions Rhônc-Alpes, Lorraine, Aquitaine ct Alsace, durant Îcs années 2009, 2010 et 2011, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription,

1) dans le cadre d’une activité professionnelle, étant vendeur de produits ou prestations de services, établi une facture ne comportant pas le nom des parties, leur adresse, la datc de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, le prix unitaire hors TVA des produits ou des services rendus, tous rabais remises ou ristournes chiffrables, les conditions d’escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles, en l’espèce notamment en ne mentionnant pas sur les factures les ristournes acquises à chaque commande de produits, et en ne mentionnant pas non plus la dénomination précise des réd dées dans le cadre du «programme privilège» souscrit par les clients,

Jaits prévus par les articles L. 441-3 al.2, al.3, al.4 du Code du commerce et réprimés par les articles L. 441-4, L. 470-2 du Code du commerce,

qe toi Î

2) étant gérant d’unc entreprise assurant des prestations, produi t des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à un chirurgien dentiste des avantages cn nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, it, de 'une façon directe ou indirecte, en l’espèce, en proposant divers avantages directs aux chirurgiens clients de GACD, notamment dans le cadre d’une opération leur ayant permis de gagner des séjours à New-York contre des commandes de faible montant, par l’insertion dans les facturations de nombreux cadeaux gratuits ou faiblement payants de type matériel Hi-fi, par l’octroi de produits gratuits aux assistants dentaires ou aux conjoints des chirurgiens dentistes, consistant ainsi en des avantages indirects pour ces dernicrs, ct par la création d’un «programme privilège» pour les clients leur offrant de nombreux cadea

faits prévus par les articles L. 4113- 6 al. 1, 4221- 17, L. 1451-2, L. 1313-10 $ H, L. 1414-4 al.4, L. 5323-4 al.8 du Code de la santé publique et réprimés les articles L. 4163-2 al.5, L. 4223-4, L. 1452-1, L. 1312-4, L. 1419-1, L. 5451-4 du Code de la santé publique,

N° 11041092084 Y M a été poursuivi devant le tribunal, selon acte d’huissier délivré à personne habilitée, p

Cour d’Appel de Parls – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 15/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 3

1) pour avoir à Paris, de janvier 2010 à octobre 2013, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, étant dirigeant d’une entreprise, en l’espèce président de la société E, assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à des chirurgiens dentistes des avantages en naturc ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, en l’espèce, par la commercialisation d’offres promotionnelles accordant aux chirurgiens dentistes pour l’achat de certains lots de produits des cadeaux tels que des sacs à main téléphones portables ou vins ; par l’octroi, apparaissant sur la facturation, de nombreux cadeaux gratuits tels que des boutcilles de champagne ou des vins aux chirurgiens dentistes et à leurs assistantes ; par la mise en oeuvre d’un programme dénommé «promofidélité» ouvrant aux chirurgiens dentistes la possibilité de choisir des cadeaux tels que des montres, écran LED ou piscine en fonction du montant de leurs achats,

faits prévus par les articles L. 4113-6 al.1, L. 422-17 al.2, L. 1451-2 al.I, L. 1414-4 al. 4, L. 5323-4 al.6 du Code de la santé publique et réprimés par les articles L. 4163-2 al.4, al. 1, L. 4223-4, L. 1452-1, L. 1419-1, L. 5451-4 du Code de la santé

publique, 2) pour avoir à Tremblay en France, et sur le territoire national courant 2011 et depuis temps non couvert par la prescription, dans le cadre d’une activité professi Île, étant vendeur de produits ou prestations de service, établi des factures ne comportant pas les mentions obligatoires, en l’espèce en omettant de mentionner sur les factures délivrées par la SAS F à la SAS E pour un montant totale de 409 734,76 euros la dénomination précise des biens vendus, leur prix unitaire, les conditions d’escompte applicables et le taux des pénalités exigibles,

faits prévus par les articles L. 441-3 al.2, al. 3, al.4 du Code du commerce er réprimés par les articles L. 441-4, L. 470-2 du Code du commerce,

La SAS E a été poursuivie devant le tribunal, selon acte d’huissier délivré à personne habilitée pour avoir à Paris, de janvicr 2010 à octobre 2013, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, étant une entreprise assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par lcs régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à des chirurgiens dentistes des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, en l’espèce, par la commercialisation d’offres promotionnelles accordant aux chirurgiens dentistes pour l’achat de certains lots de roduits des cadeaux tels que des sacs à main téléphones portables ou vins ; par 'octroi, apparaissant sur la facturation, de nombreux cadeaux gratuits tels que des bouteilles de champagne ou des vins aux chirurgiens dentistes et à leurs assistantes : par la misc en oeuvre d’un programme dénommé «promofidélité» ouvrant aux chirurgiens dentistes la possibilité de choisir des cadcaux tels que des montres, écran LED ou piscine en fonction du montant de leurs achats, faits prévus par les articles L. 4113-6 al.1, L. 4221-17, L. 1451-2 al.1, L. 1313- 10 $I1, L. 1414-4 al.4, L. 5323-4 al.8 du Code de la santé publique, 121-2 du Code pénal et réprimés par les articles L. 4163-2 al.5, al. 1, L. 4223-4, L. 1452-1, L. 1312-4, L. 1419-1, L. 5451-4 du Code de la santé publique, 131-368, 313-39 2°, 3°, 4°, 5°, 9° du Code pénal.

La SAS F a été poursuivie devant le tribunal, selon acte d’huissier délivré à personne habilitée, pour avoir à 'l’remblay en France, ct sur le resie du territoire national, courant 2011 ct depuis temps non couvert par la prescription, dans le cadre d’une activité professionnelle, étant vendeur de produits ou prestations de service,

P

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 14/8787 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 4

établi des factures ne comportant pas les mentions obligations, en l’espèce en omettant de mentionner sur les factures délivrées la SAS F à la SAS E pour un montant total de 409 734,76 euros la dénomination précise des biens vendus, leur prix unitaire, les conditions d’escompte applicables ou

le taux des pénalités cxigibles, faits prévus par les articles L. 441-5, L. 441-3 al.3, al.4 du Code du commerce,

121-2 du Code pénal et réprimés par les articles L. 441-5, L. 441-4 du Code du commerce, 131-38, 131-39 5° du Code pénal.

Le jugement

Le tribunal de de instance de Paris – chambre 31/2 – par jugement contradictoire à l’encontre de la SAS F, de la SAS GACD), de la SAS E et de Y M, prévenus, ct à l’égard de DIRECTION RÉGIONALE DES ENTREPRISES, DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION, DU TRAVAIL ILE DE FRANCE, partie intervenante, en date du 22 mai 2015, a

Sur l’action publique,

— ordonné la jonction de la procédure référencée sous le n° 14141000707 à la procédure 11041092084,

— dit sans objet le moyen de nullité soulevé par la défense,

— dit n’y avoir lieu à donner suite à la demande de question préjudicielle,

— déclaré Ia SAS F non coupable et l’a relaxé des fins de La poursuite – déclaré Ia SAS GACD non coupable et l’a relaxé des fins de la poursuite

— déclaré ia SAS E non coupable et l’a relaxé des fins de la poursuite

— déclaré Y M non coupable et l’a relaxé des fins de la poursuite.

Les appels

Appel a été interjeté par Monsieur le procureur de la République, le 28 mai 2015, contre Y M, la SAS GACD, la SAS E et la SAS

F DÉROULEMENT DES DÉBATS :

À l’audience publique du 25 janvier 2017, le président a constaté l’identité d’ M Y, prévenu intimé, assisté de son conscil, qui a déposé des conclusions, lesquelles ont été visées par le président et le greffier, jointes au dossicr.

Le président a informé le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

Gérard BURKEL, président, a été entendu en son rapport. Le prévenu M Y a été interrogé et entendu en ses moyens de défense,

O

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 15/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 5 }

Les témoins, N G et O H, qui ont satisfait aux dispositions de l’article 445 du code de procédurc pénale et ont été entendus cn leur déposition orale, dans les formes prévues par l’article 444 du code de procédure pénale, après avoir prêté le serment prévu à l’article 446 du code de procédure pénale, de «dire toute la vérité, ricn que la vérité» ;

Ont été entendus : Le ministère public, en ses réquisitions,

Maître AI AJ, avocat du prévenu M Y, en sa plaidoirie, Le prévenu M Y qui a eu la parole en dernier.

Puis la cour a mis l’affaire en délibéré et le président a déclaré que l’arrêt serait rendu à l’audience publique du 29 mars 2017.

Et ce jour, en application des articles 485, 486 ct 512 du code de procédure pénale, et en présence du ministère public ct du greffier, Gérard BURKEL, président ayant assisté aux débats ct au délibéré, a donné lecture de l’arrêt.

DÉCISION :

La cour, après en avoir délibéré, conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l’arrêt suivant :

La cour est saisie de l’appel interjcté le 28 mai 2015 par lc procureur de la République de Paris à l’encontre du jugement du tribunal de grande instance de Paris (31ème chambre correctionnelle) en date du 22 mai 2015, qui a renvoyé des fins de la poursuite :

— la SAS GACD, prévenu d’avoir : 1°/ à Paris, dans les régions Rhône-Alpes, Lorraine, Aquitaine ct Alsacc, durant les

années 2009, 2010 ct 2011, en tout cas sur le territoire national ct depuis temps non couvert par la prescription, étant une entreprise assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à un chirurgien dentiste des avantages en nature ou en cspèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, en l’espèce, en proposant divers avantages directs aux chirurgiens clients de GACD, notamment dans le cadre d’une opération leur ayant permis de gagner des séjours à New-York contre des commandes de faible montant, par l’insertion dans les facturations de nombreux cadeaux gratuits ou faiblement payants de type matériel hi-fi, par l’octroi de produits gratuits aux assistants dentaires ou aux conjoints des chirurgiens dentistes, consistant ainsi en des avantages indirects pour ces derniers, ct par la création d’un «programme privilèges» pour les clients leur offrant de nombreux cadeaux.

2°/ à Paris, dans les régions Rhône-Alpes, Lorraine, X et Alsace, durant les annécs 2009, 2010 et 2011, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, dans Ic cadre d’une activité professionnelle, étant vendeur de produits ou prestations de services, établi une facture ne comportant pas le nom des parties, leur adresse, la datc de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, le prix unitaire hors TVA des produits ou des services rendus, tous rabais remises ou ristournes chiffrables, les conditions d’escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles, en l’espèce notamment en ne mentionnant pas sur les factures les ristournes acquises à chaque commande de produits, et en ne mentionnant 1 ©

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 15/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 6

pas non plus la dénomination précise des réductions accordées dans le cadre du «programme privilèges» souscrit par les clients. (A .

— M Y M, prévenu d’avoir :

1°/ à Paris, dans les régions Rhône-Alpes, Lorraine, Aquitaine et Alsace, durant les années 2009, 2010 ct 2011,en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par {a prescription, dans le cadre d’une activité professionnelle, étant vendeur de produits ou prestations de services, établi une facture ne comportant pas le nom des parties, leur adresse, la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, le prix unitaire hors TVA des produits ou des services rendus, tous rabais remises ou ristournes chiffrables, les conditions d’escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles, en l’espèce notamment en ne mentionnant pas sur les factures les ristournes acquises à chaque commande de produits, et en ne mentionnant pas non plus la dénomination précise des réductions accordées dans le cadre GU «programme privilèges» souscrit par les clients.

2°/ à Paris, dans les régions Rhône-Alpes, Lorraine, Aquitaine et Alsace, durant les années 2009, 2010 et 2011, en tout cas sur le territoire national ct depuis temps non couvert par la prescription, étant gérant d’une cntreprise assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à un chirurgien dentiste des avantages en nature ou cn espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, en l’espèce notamment en proposant divers avantages directs aux chirurgiens clients de GACD, notamment dans le cadre d’unc opération leur ayant permis de gagner des séjours à New-York contre des commandes de faible montant, par l’insertion dans les facturations de nombreux cadeaux gratuits ou faiblement payants de type matériel Hi-fi, par l’octroi de produits gratuits aux assistants dentaires ou aux conjoints des chirurgiens dentistes, consistant ainsi en des avantages indirects pour ces derniers, et par la création d’un «programme privilèges» pour les clients leur offrant de nombreux cadeaux.

3°/ à Paris ct sur Îc reste du territoire national, de janvier 2010 à octobre 2013, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription pénale, étant dirigeant d’une entreprise, en l’espèce président de la société E, assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à des chirurgiens dentistes des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’unc façon directe ou indirecte, cn l’espèce par lacommercialisation d’offres p ti Il dant aux chirurgiens dentistes pour l’achat de certains lots de produits des cadeaux tels que des sacs à main, téléphones portables ou vins; par l’octroi, apparaissant sur la facturation, de nombreux cadcaux gratuits tels que des boutcilles de champagne ou des vins aux chirurgiens dentistes et à leurs assistantes ; par la mise en œuvre d’un programme dénommé «promofidélité » ouvrant aux chirurgiens dentistes la possibilité de choisir des cadeaux tels que des montres, écran LED ou piscine en fonction du montant de leurs achats.

4°/ à Tremblay-en-France (93), et sur le territoire national courant 2011 et depuis temps non couvert par la prescription, dans le cadre d’une activité professionnelle, étant vendeur de produits ou prestations de service, établi des factures nc comportant pas les mentions obligatoires, en l’espèce en omettant de mentionner sur les factures délivrées par la SAS F à la SAS E pour un montant total de 409.734,76 curos la dénomination précise des bicns

vendus, leur prix unitaire, les conditions d’escompte applicables et le taux des pénalités exigibles.

— la SAS PR DEN’ E prévenue d’avoir à Paris et sur le territoire national, de janvier 2010 à octobre 2013, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription pénale, étant une entreprise assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou

(0

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 15/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 7

procuré à des chirurgiens dentistes des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, en l’espèce, par la commercialisation d’offres p dant aux chirurgiens dentistes pour l’achat de certains lots de produits des cadeaux tels que des sacs à main, téléphones portables ou vins; par l’octroi, apparaissant sur la facturation, de nombreux cadeaux gratuits tels que des bouteilles de champagne ou des vins aux chirurgiens dentistes et à leurs assistantes par la misc en œuvre d’un programme dénommé « promo fidélité » ouvrant aux chirurgiens dentistes la possibilité de choisir des cadeaux tels que des montres, écran LED ou piscine en fonction du montant de leurs achats.

— la SAS F prévenue d’avoir à Tremblay-en-France (93), ct sur le territoire national courant 2011 et depuis temps non couvert par la prescription, dans le cadre d’une activité professionnelle, étant vendeur de produits ou prestations de service, établi des factures ne comportant pas les mentions obligatoires, en l’espèce en omettant de mentionner sur les factures délivrées par la SAS F à la SAS E pour un montant total de 409 734,76 euros la dénomination précise des biens vendus, leur prix unitaire, les conditions d’escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles.

Ces appels, interjetés dans le respect des formes et délais prévus par le code de procédure pénale, sont recevables.

Exposé des faits et de la procédure :

Le dossier de poursuites dont est saisie la cour de céans se rapporte à deux procédures (n° P 1109410992084 et P 141410008707) initiées par la direction départementale de le protection des Pb (DDPP) de Paris à la suite de plusieurs plaintes de chir licité mensongère et escroquerie mettant en cause la SAS GACD, domiciliée 25, «rue Bleue à Paris ème, et plus particulièrement M STE MMER, fournisseur de produits dentaires, Drocédures qui ont fait l’objet d’une jonction, d’unc part, concernant des sociétés appartenant au même groupe ainsi que la même personne physique (M Y, docteur en chirurgie dentaire), d’autre part, portant sur des faits de même nature.

L laintes ipnalcments à l’origine des procédures de la DDPP de Paris

Le 17 janvier 2011, l’association française des fournisseurs d’orthodontie (AFFO) saisissait Ie commissaire aux comptes de la société par actions simplifiée GACD, dont le siège social est sis […] à Parix 9ème, et dont le président est M Y.

L’association reprochait à la société GACD de «soutenir son activité auprès des chirurgiens-dentistes par des offres continues de cadeaux d’importance significative et, de cc fait, de ne pas respecter les dispositions de la loi anti-cadeaux (art. L. 4113-6 et suivants du code de la santé publique». Elle donnait à titre d’exemple une offre diffusée auprès des chirurgiens-dentistes annonçant «un voyage à New-York pour deux personnes au départ de Paris avec trois nuits en hôtel 3 étoiles à Manhattan pour 2 000 euros d’achat sur le nouveau catalogue avant le 31 décembre 2010».

Le commissaire aux comptes saisissait à son tour le procureur de la République de Paris le 2 février 2011.

De leurs côtés, plusieurs chirurgiens-dentistes déposaient plainte n’ayant pas bénéficié de ce voyage bien qu’entrant, sclon eux, dans les conditions requises.

C’est ainsi que :

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rp 15/8787 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 8

«début janvier 2011, le docteur l’rançois VEYVET, chirurgien-dentiste cxcrçant à Cambo-les-Bains (64) adressait un courrier à la direction départementale de la protection des populations de Bordcaux dénonçant les pratiques de la société GACD, sise 25 ruc Bleuc à Paris, fournisseur de produits dentaires c1 s’adressant exclusivement aux professionnels, proposant des cadeaux en échange de couronnes (points) obtenues lors des commandes passées par les dentistes auprès de cette société, et notamment pour toute commande supéricure à 2 000 curos passée avant le 31 décembre 2010, un séjour de 3 nuits à New-York pour 2 personnes (vol aller/retour et 3 nuits d’hôtel).

Et le praticien d’écrire :

« La promesse est de m’offrir pour 2 000 euros de commande un voyage à New-York pour 2 personnes, vol compris, hôtel compris pendant trois jours, toutes taxes comprises. C’est très alléchant et de nombreux confrères se sont laissés abuser comme moi,

En fait, on m’explique par téléphone et sans confirmation écrite qu’il faut communiquer trois dates Je n’ai pas vraiment compris le processus qui est très complexe.

De plus les cadeaux sont interdits dans notre profession.

Je souhaite être remboursé, ou qu’on me propose quelque chose de clair, d’accessible

et compréhensible et qu’on me le confirme par écrit."

«le 20 mai 2011, les docteurs P Q ct AG AH-AR, chirurgiens dentistes à Lyon, adressaicnt un signalement au service de la répression des fraudes de Lyon, estimant avoir été victimes d’une vente forcée par unc publicité mensongère de la part de la GACD (groupement d’achat des chirurgiens dentistes), un des principaux fournisseurs de consommables et de matériels dentaires.

Ils exposaicnt avoir répondu fin 2010, à unc offre promotionnelle de la GACD, qui proposait un voyage à New-York pour 2 personnes cn contrepartie d’une commande de 2000 euros, que «fout était tombé à l’eau en avril 2011« , un imbroglio juridique semblant s’installer entre la GACD ct MIX MOMENTS, société d’événementiel à qui fut confié le dossier »New-York".

«le 6 juillet 2011, les docteurs R S et T U, chirurgiens-dentistes exerçant à […], avaient souscrit à une offre promotionnelle de la société GACD «Pour 2000 euros d’achats, un voyage à New-York offert (vol aller/retour pour 2 personnes + 3 nuits en hôtel 3 étoiles à Manhattan)», séduits par cette publicité.

11 leur avait été cependant annoncé courant avril que l’offre était « annulée », en raison d’un différend qui opposerait GACD au voyageur « MIX MOMENTS WORLDWIDE ». Les deux praticiens s’intcrrogeaicnt sur cette opération de vente pouvant être susceptible de constitucr une pratique commerciale trompeuse.

«le 10 août 2011, le docteur AS-AT AU, chirurgien-dentiste exerçant à Lunéville (54), déposait plainte auprès dc la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de Meurthe-et-Moselle, contre la société GACD, 25 rue bleue 781 1 Paris Cedex, dirigée par M. M Y – fournisseur de produits dentaires – pour tromperie, rappelant dans son courrier que la société GACD s’était engagée dans sa promotion à fournir un voyage à New-York contre une commande de 2000 euros, n’avait jamais rempli ses obligations en invoquant une défcction de son prestataire de voyage, estimant que de tels agissements constituaient une tromperie ct un abus de confiance car la société GACD était un fournisseur auquel il était fidèle depuis fin 2006.

Il demandait que sa plainte soit instruite, sachant que de nombreux dentistes en France avaient subi la même arnaque et avaient peut-être aussi porté plainte.

Parallélement, en septembre 2011, la DDPP de Paris était également saisie de plaintes de même nature concernant cette fois, la société E.

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Ra 1 de la réglementation cn vigueur La loi anti caux

L’article L. 41 13-6 du code de la santé publique, transposant l’article L. 365-1 du code de la santé publique, issu de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d’ordre sociale, dite loi anti-cadeaux, interdit aux professions médicales de recevoir des avantages directs ou indirects des entreprises assurant une prestation ou commercialisant un produit pris en charge par la sécurité sociale. Cet article a été modifié et complété à plusieurs reprises ct en dernier licu par la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011. Depuis la loi du 4 mars 2002, ces interdictions visent aussi les entreprises auxquelles il est interdit de proposer ou procurer ces avantages. La version applicable au litige est celle modifiée par la loi n° 2007-248 du 26 février 2007 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans Je domainc du médicament. Cet article dispose ainsi en sa rédaction issue de le loi du 26 février 2007 : « Est interdit le fait, pour les membres des professions médical tionnées au présent livre, de recevoir des avantages cn naturc ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Est également interdit le fait, pour ces entreprises, de proposer ou de procurer ces avantages. Toutefois, l’alinéa précédent ne s’applique pas aux avantages prévus par conventions passées entre les membres de ces professions médicales et des entreprises, dès lors que ces conventions ont pour objet explicite et but réel des activités de recherche ou d’évaluation scientifique, qu’elles sont, avant leur inisc en application, soumises pour avis au conseil départemental de l’ordre compétent ct notifiées, lorsque les activités de recherche ou d’évaluation sont effectuées, même partiellement, dans un établissement de santé au responsable de l’établissement, et que les rémunérations ne sont pas calculées de manière proportionnelle au nombre de prestations ou produits prescrits, commercialisés ou assurés. Il ne s’applique pas non plus à l’hospitalité offerte, de manière directe ou indirecte, lors de manifestations de promotion ou lors de manifestations à caractère exclusivement rofessionnel ct scicnüfique lorsqu’elle est prévue par convention passéc entre entreprise et le professionnel de santé et soumise pour avis au conseil départemental de l’ordre compétent avant sa mise en application, ct que cette hospitalité est d’un niveau raisonnable et limitée à l’objectif professionnel ct scientifique principal de la manifestation et n’est pas étendue à des personnes autres que les professionnels directement concernés. Les conventions mentionnées aux deuxième et troisième alinéas sont transmises aux ordres des profcssions médicales par l’entreprise. Lorsque leur champ d’application est interdépartemental ou national, elles sont soumises pour avis au conseil national compétent, au licu et place des instances départementales, avant leur mise en application. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de la transmission de ces conventions ainsi que les délais impartis aux ordres des professions médicales pour se prononcer. Si ceux-ci émettent un avis défavorable, l’entreprise transmet cet avis aux professionnels de santé, avant la mise en œuvre de la convention. A défaut de réponse des instances ordinales dans les délais impartis, l’avis est réputé favorable. Les dispositions du présent article ne sauraient ni soumettre à convention les relations normales de travail ni interdire le financement des actions de formation médicale continue. »

L’article L. 4113-6 comporte, d’une part, un volet passif interdisant aux professions médicales de percevoir des avantages, d’autre part, un volct actif interdisant aux entreprises du secteur des produits de santé de leur en proposer ou procurer.

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Les entreprises visées sont les laboratoires pharmaceutiques et, plus largement, toutes les entreprises assurant une prestation ou commercialisant un produit pris en charge par

la sécurité sociale.

Ces interdictions sont destinées à préserver l’indépendance des professions médicales ne devant être guidées que par des considérations d’ordre médical lorsqu’elles font le choix d’un médicament, d’un matériel ou d’une prestation.

L’article L. 4113-6 du code de la santé publique a été rendu applicable en outre aux pharmaciens, masseurs-kinésithérapeutcs, pédicures podologucs, infirmicrs, orthophonistes et orthoptistes par les articles I.. 4221-17, L. 4321-19, L4322-12, L. 4311-28 et L. 4343-1 du code de la santé publique mais également aux

chirurgiens-dentistes.

Deux catégories d’avantages échappent cependant à ces interdictions et relèvent d’une permission de la loi :

— les avantages prévus par des conventions passées cntre les professions médicales ct les entreprises sous réserve qu’elles aient pour objet explicite et but réel des activités de recherche ou d’évaluation scientifique, avec des garde-fous liés à leur soumission au conscil départemental de l’ordre concerné et, le cas échéant, au responsable de l’établissement de santé et à l’interdiction de rémunérations calculées de manière proportionnelle au nombre de prestations ou produits prescrits commercialisés ou

assurés. – l’hospitalité offerte de manière directe ou indirecte lors des manifestations de promotion ou à caractère exclusivement professionnel ct scientifique sous réserve qu’elle soit d’un niveau raisonnable, limité à l’objectif professionnel ct scientifique principal de la manifestation et non étendue à personnes autres que les professionnels directement concernés et qu’elle soit ise à l’avis du conseil départemental de l’ordre

concerné.

L’encadrement de ces avantages permet de contrôler les liens des professions médicales avec les entreprises.

La loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, qui entendait tirer les conséquences de l’affaire du Médiator, n’a pas modifié les interdictions é ées par l’article L. 4113-6 mais les a étendues sous certaines réserves aux étudiants se destinant aux professions médicales et aux associations représentant les membres des professions médicales. Elle a, par aïlleurs, aussi prévu des mesures destinées à assurer une transparence accruc auprès du public des relations entre les professionnels de santé et les entreprises. L’article L. 1453-1 du code de la santé publique a ainsi soumis ces dernières à des obligations de déclarations de publicité relatives aux conventions conclues et aux avantages consentis aux professionnels de santé, le décret n° 2013-414 du 22 mai 2013 ayant fixé ce seuil à 10 euros.

L’article L. 4163-2 du code de la santé publique ayant transposé l’article L. 365-1 du code de la santé publique est aussi issu de la loi du 27 janvier 1993 ct a été modifié à plusieurs reprises. Il sanctionne, la violation des interdictions énoncées par l’article L. 4113-6 ct dans sa version applicable au litige le fait :

« - pour les membres des professions médicales, de recevoir des avantages en naturc ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, procurés par des cntreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale

— pour ces cntreprises de proposer ou de procurer ces avantages aux membres des professions médicales (…)."

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I} prévoit des peines de deux ans d’emprisonnement ct de 75.000 euros d’amende ainsi que la possibilité pour les cours et tribunaux de prononcer une interdiction temporaire d’exercer la profession pendant une période de dix ans accessoirement à la peine principale et précise que ces dispositions ne s’appliquent pas aux avantages mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 4113-6.

La loi n° 2009-526 du 12 mai 2009, applicable à certains faits visés par la prévention, a ajouté que les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2 du code pénal, de l’infraction définie au présent article encouront, outre l’amende suivant les modalités prévues par l’article 131-38 du code pénal, les peines prévues par les 2° à 5° et 9° de l’article 131-39 du même code.

L’article L. 4163-2 a, comme l’article L. 4113-6, un périmètre d’application très large visant des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, sous réserve qu’ils nc correspondent pas à des avantages spécifiquement autorisés.

L’article R. 5124-65 du code de la santé publique sur la publicité et la promotion des produits pharmaceutiques prévoit :

« Article R. 5124-65 Sous réserve des dispositions prévues par les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 4113-6, et par les articles L. 4311-28, L. 4321-20 ct L. 4343-1, la publicité en faveur des entreprises et établissements ne peut comporter aucune offre de primes, objets, produits ou avantages matériels, procurés de manière directe ou indirecte, de quelque nature que ce soit, à moins qu’ils ne soient de valeur négligeable. »

article L. 1453-1 du code de la santé publique sur la transparence et la publication de convention prévoit : "L – Les entreprises produisant ou commercialisant des produits mentionnés au II de l’article L. 5311-1 ou assurant des prestations associées à ces produits sont tenues de rendre publique l’existence des conventions qu’elles concluent avec

1° Les professionnels de santé relevant de la quatrième partie du présent code ; 2° Les associations de professionnels de santé : 3° Les étudiants se destinant aux professions relevant de la quatrième partie du présent code ainsi que les associations et groupements les représentant ; 4° Les associations d’usagers du système de santé ; 5° Les établissements de santé relevant de la sixièmc partie du présent code ; 6° Les fondations, les sociétés savantes et les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans le secteur des produits ou prestations mentionnés au premier alinéa; 7° Les entreprises éditrices de presse, les éditeurs de services de radio ou de télévision et les éditeurs de services de communication au public en ligne ; 8° Les éditeurs de logiciels d’aide à la prescription et à la délivrance ; 9° Les personnes morales assurant la formation initiale des professionnels de santé mentionnés au 1° ou participant à cette formation. IT. – La même obligation s’applique, au-delà d’un seuil fixé par décret, à tous les avantages en nature ou en cspèces que les mêmes entreprises procurent, directement ou indirectement, aux personnes, associations, établissements, fondations, sociétés, organismes ct organes mentionnés au I. HI. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, la naturc des informations qui doivent être rendues publiques, notamment l’objet et la date des conventions mentionnées au I, ainsi que les délais et modalités de publication et d’actualisation de ces informations. Il précise également les modalités suivant lesquelles les ordres des professions de santé sont associés à cette publication"

Le délit de proposition ou fourniture d’avantage à un membre d’unc profession médicale

d’unc autorité sanitaire par personne morale dont les services ou produits sont pris en charge par la sécurité sociale, délit prévu ct réprimé par l’article I..4113-6 et 1..4163-2

a

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du code de la santé publique, reproché à la SAS GACD), la SAS E, dispose :

Article L 4163-2 : «Le fait, pour les membres des professions médicales mentionnées au présent livre et pour les étudiants sc destinant aux professions relevant de la quatrième partie du présent code ainsi que pour les associations et groupements les représentant, de recevoir des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale cst puni de deux ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende.

En cas de condamnation, l’interdiction temporaire d’exercer la profession pendant une période de dix ans peut être prononcée par les cours ct tribunaux accessoirement à la peinc principale.

Toutelois, ces dispositions ne s’appliquent pas aux tag tionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 4113-6. Est puni des pcines mentionnées au premier alinéa le fait, pour les entreprises citées dans cet alinéa, de proposer ou de procurer ces avantages aux membres des professions médicales mentionnées au présent livre.

Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévucs par l’article 121-2 du code pénal, de l’infraction définie au présent article encourent, outrc l’amende suivant les modalités prévucs par l’article 131-38 du code pénal, les peines prévues par les 2° à 5° et 9° de l’article 131-39 du même code.

Les sanctions prononcées à ce titre sont portées à la connaissance du Comité économique des produits de santé prévu par l’article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale. "

b/ règles de facturation :

Le délit de vente ou achat par personne morale de produits ou prestation de service pour une activité professionnelle sans facturation, est prévu et réprimé par les articles L. 441-3, L. 441-4 et L. 441-5 du code de commerce, qui disposent :

Article L. 441-3 :

«Tout achat de produits ou toute prestation dc service pour unc activité professionnelle doivent faire l’objet d’unc facturation. Sous réserve des deuxième ct troisième alinéas du 3 du 1 de l’article 289 du code général des impôts, le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service. L’acheteur doit la réclamer. La facture doit être rédigéc en double exemplaire. Le vendeur et l’acheteur doivent en conserver chacun un exemplaire. Sous réserve du c du II de l’article 242 nonics A de l’annexe II au code général des impôts, dans sa version en vigueur au 26 avril 2013, la facture doit mentionner le nom des parties ainsi que leur adresse, la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, ct le prix unitaire hors TVA des produits vendus et des services rendus ainsi que toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou de la prestation de services et directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services, à l’exclusion des escomptes non prévus sur la facture. La facture mentionne également la date à laquelle le règlement doit intervenir. Elle précise les conditions d’escompte applicables en cas de paiement à une date antérieure à celle résultant de l’application des conditions générales de vente, le taux des pénalités exigibles le jour suivant la date de règlement inscrite sur la facture ainsi que lc montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancicr en cas de retard de paiement. Le règlement est réputé réalisé à la date à quelle les fonds sont mis, par le client, à la disposition du bénéficiaire ou de son subrogé. «

Article L 441-4 :

«Toutc infraction aux dispositions de l’article L. 441-3 est punie d’unc amende de 75 000

euros. l’amende peut être portée à 50 % de la somme facturée ou de celle qui aurait dû tre facturée.»

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Article L 441-5 :

«Les personnes morales déclarécs pénalement responsables de l’infraction prévue à l’article I. 441-4 encourent une peine d’exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus, en application du 5° de l’article 131-39 du code pénal."

C el 8

a/ s’agissant des agissements de la SAS GACD et d’M Y (procédure n° P 11041092084)

Les investigations des fonctionnaires de la direction départ tale de la protection des

populations de Paris révélaient :

La SAS GACD appartient à la famille Y, qui dispose d’autres sociétés dans le domaine dentaire pour assurer la vente par correspondance, la vente aux dentistes allemands, anglais, italiens, espagnols.

La consolidation du groupe s’opère au niveau de la holding : FS Holding (Siret: 449229 004) sise 25, ruc […].

Le groupe GACD compte 200 salariés et dispose également d’une usine à Sallanches employant 200 personnes pour la fabrication d’implants dentaires (premier fabricant).

La SAS GACD est une société commerciale qui vend par correspondance des consommables dentaires destinés aux dentistes français. Elle dispose de deux sites :

— le siège parisien qui regroupe la direction générale, les équipes marketing et commerciales,

— un site à Tremblay-en-France (93) où se trouvent les services supports informatiques, la comptabilité, les entrepôts.

Elle compte 35 salariés soit 30 commerciaux, 1 dentiste-conseil, 1 pour la direction, 1 pour la recherche et le développement, 1 personne pour le marketing, 1 pour l’accueil. Elle compte 18 000 clients actifs.

La clientèle de GACD est constituée pour l’essentiel de chirurgiens-dentistes libéraux et de quelques mutuelles.

Elle a réalisé en 2011, un chiffre d’affaires de 70 millions d’euros, en 2010, un chiffre d’affaires d’environ 67 millions d’euros, contre 64 millions d’euros en 2009 et 63 millions d’euros en 2008 et présente un résultat bénéficiaire (3.715.068 d’euros en 2011, 3.451. 192 d’euros en 2010 contre 3.451.912 d’euros en 2009 et 1648 335 d’euros en

2008).

La SAS GACD dispose d’une centrale d’achat «F» (Siret : 493 542 344), détenue à hauteur de 70 %, créée en 2007 et basée à Tremblay-en-France (93). La filiale F achète auprès de divers fournisseurs et revend à GACD et aux deux autres entreprises du groupe GACD (E et ITENA).

La société F est également « dépositaire pharmaceutique» pour les produits ancsthésiques. Elle a bénéficié d’un transfert d’autorisation le 2 décembre 2009, l’autorisation ayant été initialement accordée à la SAS GACD le 27 septembre 2009.

La filiale DIADENT assure la préparation matérielle de la commande du client.

La société GACD relève du statut de «fabricant» au sens de la norme ISO 9000/ 2000 (certification qualité) pour les produits sous sa marque (R&S …), ce qui lui permet d’utiliser la norme CE du fabricant effectif, Elle est autorisée à revendre Îles produits du dépositaire F. Jusqu’en 2009, la société GACD était directement dépositaire pharmaceutique, puis a laissé la place à sa filiale F. Elle possède dans sa gamme deux produits ancsthésiques avec autorisation de mise sur le marché (AMM).

02

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Elle distribuc aussi un médicament l’Alphacoïne N, inscrit sur la liste des médicaments agréés pour les collectivités (article L. 5123-2 du code de la santé publique).

Elle distribue à la fois des produits toutes marques ct des produits sous marques exclusives (R&S, Medibase, Clinix, Dento-Viractis). Les produits R&S sont fabriqués pour son compte n’importe où dans le monde, il s’agit donc de produits de «marque de distributeur ».

Elle se présente comme la première entreprise sur le marché de la fourniture dentaire et a commc principal concurrent la société SCIHEIN (V W France) qui vend du gros matériel pour l’installation de cabincts dentaires et emploie 430 salariés.

La société GACD dispose également d’unc filiale GACD EQUIPEMENT (Siret: 521 439 661), détenue à hauteur de 100 %, également domiciliéc 25 ruc […], ct qui assure l’équipement des cabinets dentaires. Elle n’est pas affiliée à un syndicat

professionnel.

Le «catalogue générab, édité pour l’année 2011-2012, comprenait une grande variété de produits commercialisés par la société GACD : matériel à empreintes, radiographie, anesthésie et pharmacie, hygiène ct stérilisation, usage unique, prévention et esthétique, fraises et polissage, endodontic, ciments, fonds de cavité et scellements, prothèses ct laboratoire, tenons et reconstitution coronaire, restauration, instruments, chirurgie ct implantologic, orthodontie, petit équipement, matériel, marques GACD.

Ces produits permettent la réalisation d’actes dentaires donnant lieu à une prise en charge par l’assurance maladie.

Compte tenu de son volume, ce catalogue général n’est édité que tous les 24 mois. En complément sont diffusés ]l t des supports de vente (flyers) comprenant des catalogues de promotion.

Les clients qui n’adhèrent pas au «programme privilèges » ne bénéficient pas de remises conditionnées à la réalisation d’un chiffre d’affaires. Les seules remises qui s’avèrent alors possibles sont celles des flyers.

Le système de fidélisation Les chirurgiens-dentistes peuvent sans conditions particulières adhérer au «Programme Privilèges », 8 000 en sont adhérents. Le formulaire d’adhésion ne comporte aucun engagement spécifique ct indique que ce programme «permet de bénéficier de multiples avantages». Dès leur adhésion, ce programme permet aux chirurgiens-dentistes de collecter et cumuler des points appelés «couronnes », convertibles en euros et, cn conséquence, s’analysant en des ristournes. Ces «couronnes» s’acquièrent lors des commandes, soit sur des produits au prix du catalogue général GACD ou dans le cadre d’unc offre promotionnelle ou sur des services facturés par le service technique. Elles sont créditées sur le compte commercial du client dès lors que le produit est facturé et sont comptabilisécs par le service client de GACD. Elles sont valables durant 24 mois à compter de la date d’émission dé la facture. Elles peuvent être échangées en «avoirs» valables sur tout le catalogue général GACD et sur e book du «Programme Privilèges» (téléviseurs, lecteurs DVD, consoles de jeux, chaînes hi-fi, PC, appareils photos, powerplate, électroménagers tel que réfrigérateur américain, lave-vaisselle, aspirateur … ). Le système de cumul de couronnes permet de dégager un «avoir», que le client peut utiliser librement, soit en bénéficiant des articles du «programme privilèges », soit en faisant baisser le prix d’achat du matéric] dentaire de sa prochaine facture. La société GACD considérait ne pas faire de cadeau aux chirurgicns-dentistes, ceux-ci « payant» eux-mêmes les articles choisis par le biais des avoirs accumulés dans leur «comptc-couronncs», ces produits étant csscnticllement «destinés à équiper leurs

cabincts dentaires ».

Dans ses déclarations du 26 juin 2012, M Y indiquait :

« Suite à un redressement fiscal, il y a une dizaine d’années, nous avons fait le choix d’une politique commerciale L à destination des praticiens. Soit une remise fin d’année qui est en fait une ristourne, payée en chèque en janvier, février de l’année To

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N+ 1. Cette ristourne peut être déduite des factures d’achat de produits dentaires et de produits d’équipement du cabinet.

Nous organisons fréquemment des opérations de vente par lots, qui consistent à lier des produits dentaires entre eux, avec exceptionnellement la possibilité d’offrir un produit de confort de cabinet (exemple un Ipad) avec des produits dentaires (gants, lingettes …). Concernant la facturation, nous sommes en train de mettre en place un système qui permet d’éditer des factures conformes au regard de nos conditions de vente (montant investis: 5 millions d’euros et 4 ans de travail). »

Séjour à New-York

Deux documents ont été successivement adressés aux chirurgiens-dentistes :

— Un premier qui proposait un séjour à New-York (2 personnes, vol aller/retour +3 nuits en hôtel 3 étoiles à Manhattan) dans le cadre d’une «commande de 2 000 euros d’achats dans lc nouveau cataloguc GACD (2011-2012) avant le 31/12/2010 ». Cette plaquette a été envoyée aux 18 000 chirurgicens-dentistes référencés par la société GACD et annonçait une validité immédiate dès le 2 novembre 2010. I] s’agit d’un avantage lié au lancement du nouveau catalogue 2011-2012. Ce mailing n’était nullement limité aux 8 000 adhérents du «Programme Privilèges».

— Le second nominativement aux 18 000 chirurgiens-dentistes adressé dès le 10 novembre 2010 était accompagné d’un «erratum» indiquant qu’une erreur s’était produite dans la communication « New-York est à vous », que le voyage proposé s’inscrivait dans le cadre du « Programme de Fidélité» et était destiné «à favoriser votre participation à un congrès professionnel aux États-Unis». Dans le nouveau document transmis : «Vos achats GACD vous emmènent à New-York» étaient remplacés par «Programme Privilèges vos couronnes vous emmènent à New-York». De même les mots « Pour 2 000 euros d’achats réalisés dans le nouveau catalogue GACD» étaient remplacés par «Pour 8700 couronnes, partez à New-York».

Cependant, malgré cette seconde communication en date du 10 novembre 2010, l’examen des factures de quelques clients et de celles des plaignants montraient que le voyage et lc séjour à New- York avaient bien été accordés dès que la commande de 2 000 euros de produits dans le nouveau cataloguc 2011-2012 était atteinte ct que la mention «gratuit» apparaissait bien sur la facture face à la mention « Bon de réservation voyage à New-York + 3 nuits»,

Par ailleurs, pour l’opération New-York, un achat de 2 000 euros de produits permettait d’obtenir 8 700 couronnes, ce qui était dérogatoire à la pratique habituclle annoncéc par GACD (1 curo d’achat = 1 couronne ou 2 couronnes pour les marques exclusives). Or, le fonctionnement normal de la grille de correspondance entre le cumul de couronnes et le système d’avoirs, aurait dû nécessiter des achats d’un montant global de 8 700 euros d’achat général ou de 4 350 euros d’achat de marques exclusives GACD pour bénéficier de l’avoir de 350 curos.

Cette opération New-York devait être réalisée par un fournisseur espagnol, la société Mix Moments, implantée à Barcelone, en passant par la filiale espagnole de GACD), la société DVD. Le coût du projet s’élevait à plus de 300.000 euros (300 euros/unité). Ce montant avait Cté réglé d’avance par la société GACD à l’entreprise MIX MOMENTS qui ne devait pas fournir les prestations.

En effet, sur 1 221 réservations, MIX MOMENTS refusait de réaliser 1 052 inscriptions. Compte tenu des difficultés avec son prestataire, la société GACD devait entrer à la fois dans un processus de contentieux avec celui-ci et de compensation financière des dentistes «lésés»'.

Dans un courrier du 6 avril 2011, M Y laissait aux praticiens le choix entre quatre options de dédommagement :

«  Un coffret Opendream Prune d’une valeur de 600 euros,

+ Un produit d’équipement dentaire,

+ Un bon d’achat FNAC ou DARTY d’une valeur de 600 euros pour équiper le cabinet, * Un avoir ou un chèque remboursable d’un montant de 600 euros».

O

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Les catalogucs «Programme Privilèges» Différents catalogues «programme privilèges» relatifs aux années 2009, 2010, 2011, étaient édités par la société GACD. Par ailleurs, des minibook thématiques étaient

édifiés plusieurs fois par an.

L’examen du minibook thématique (édition juin 2009 16 pages, valable jusqu’au 15 septembre 2009), intitulé «Votre fidélité récompensée : le top du multimédia pour équiper votre cabinet» permettait de constater qu’il proposait différents articles : ordinateurs portables, mini-PC, unités centrales, écrans, téléphones, imprimantes, appareils photos, GPS, consoles B. La valeur annoncéc du produit le plus coûteux s’élèvait à 19 000 couronnes, ce qui représentait un avoir de 1 400 euros. La valeur de ces articles était uniquement indiquée en «couronnes», qu’il convenait de

convertir cn «avoir».

Le catalogue 2009 de 52 pages du Programme Privilèges proposait divers produits : téléviseurs, lecteurs enregistreurs, chaînes .hi-fi, des Ï phone, ordinateurs portables, consoles, appareils photo, téléphones, GPS, cafetière Nespresso, micro-ondes, friteuscs, robot de cuisine multifonctions, réfrigérateur et congélateur, fer à repasser, lave-linge séchant, lave-vaisselle, aspirateur, tensiomètres, […], lampe d’ambiance, power plate personnel, coffrets cadeaux, fauteuil visiteur, simulateurs de l’aube, abonnements à divers magazines. L’échelle de valeur des couronnes s’étageait de 1 800 à 28 000 couronnes, ce qui représentait un avoir de 60 à 2 800 euros.

Le catalogue indiquait pour chaque produit présenté sa valeur monétaire.

En dernières pages du book sc trouvaient un «index par valeurs monétaires» (de 19 à 3 200 euros) et un «index par univers» (images ct son- multimédia, électroménager,

espace bien-être).

L’édition 2010 du catalogue « Programme Privilèges » intituléc «Vous gagnez à être fidèle» proposait les dernières nouveautés : téléviseurs, lecteurs-enregistreurs, chaînes hifi, des Iphone, consoles, apparcils photo, cafctière Nespresso, micro-ondes, réfrigérateur et congélateur, fer à repasser, lave-linge séchant, lave-vaisselle, aspirateur, robot de cuisine, coffrets cadeaux, simulateurs de l’aube, canapé, chaise longue.

La valeur du produit le plus coûteux s’élevait à 22.000 couronnes, ce qui représentait un avoir de 1 800 euros. Ce catalogue indiquait pour chaque produit présenté uniquement sa valeur en couronnes.

En dernières pages, se trouvait un index par ordre alphabétique et nombre de couronnes.

édition 2011 (deux catalogues : l’un de 74 pages, «Book Privilèges valable jusqu’au 30/03/2011» l’autre de 68 pages, de format plus grand «Book Privilèges valable jusqu’au 29/10/2011» intitulé « Vous gagnez à être fidèle») était divisée en plusieurs thématiques : luxe ct gastronomie, images et sons, multimédia, électroménager, bien-être et déco. Etaient proposés des montres Tissot et Lacoste, colliers Baccarat, valises Delsey, sacs ['ancel et Le Tanneur, coffrets de vins St-Joseph ct Crozes-lcrmitage et des champagnes millésimés (Bollinger, Ruinart, Mumm, Deutz), coffrets Hediard avec foie gras, téléviseurs Samsung, lecteurs-enregistreurs Philips, chaînes hi-fi, des 1 phone Apple, consoles B, PC portables Sony, appareils photo Canon ct Nikon, caméscope Samsung, cafetière Nespresso, micro-ondes Samsung, cave à vin Samsung, disque dur, tablette, imprimante photo Canon, électroménager : aspirateur, réfrigérateur américain Samsung, robot de cuisine, coffrets évasion, […], simulateurs de l’aube … Le produit le plus coûteux, la montre Baume et Z, d’une valeur de 28 000 couronnes, correspondant à 2800 euros d’avoir. Le catalogue indiquait, pour chaque produit présenté, uniquement sa valeur en

couronnes.

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Le cataloguc «Avantages Assistantes»

Le cataloguc intitulé «Spécial Fête des Assistantes» (édition 2011 en 16 pages) proposait de «tous nouveaux cadeaux que vous pourrez choisir à partir de 300 euros de commande ».

En bas de page, il était recommandé de «commander avant le 30 avril pour recevoir votre cadeau ».

Différents articles étaient proposés : sets de maquillage, trousse de manucure, coffret de 2 bouteilles de vin, montres Cacharel, cuiseur vapeur, aspirateur sans sac, baladeur MP 4, un pendentif en forme de cœur Swarovski. Les produits offerts étaient ventilés en fonction du montant des achats: de 300 à 3 500 euros d’achats.

Il était indiqué qu’il s’agit de célébrer «la motivation des assistantes qui passent les

commandes ».

Les autres offres D’autres offres promotionnelles, valables généralement un mois, étaient par ailleurs très

fréquentes.

Il s’agissait d’offres de lots de produits permettant d’obtenir des cadeaux. Dans Îc lot des produits, figuraicnt notamment des boites de fraises diamantées, des seringues, du

Suprafil R&S, des masques dentaires.

Le cataloguc général de 1285 pages proposait la commercialisation des anesthésiques (pages 146 à 155) et des films dc radiographie (pages 90 à 93).

Les cahiers spéciaux «Best-of 2010» et «Prix chocs avant l’été» offraient à la vente les ancsthésiques, respectivement en pages 74 à 76 et pages 64 et6

Ces offres promotionnelles comportaient des rabais (42% … ) ou l’attribution d’une boîte gratuite

La facturation non conforme Il ressortait de l’examen des factures elles-mêmes et des déclarations du directeur financier ct de la responsable comptabilité de la société GACD quc les factures émises dans le cadre du «Programme Privilèges» par cctte société ne faisaient pas apparaître les ristournes acquises, ni cn valeur monétaire, ni en couronnes, contrairemcnt aux dispositions de l’article L. 441-3 du code de commerce, et alors : – que les factures établies par la société GACD avaient un caractère certain et s’accumulaient à chaque commande de produits dentaires, – que les «Conditions Particulières du Programme Privilèges» précisaient que les couronnes étaient calculées dès l’enregistrement de l’adhésion et qu’elles devaient, en conséquence, apparaître dès que le premier palier du barème était atteint, ue le caractère inconditionnel des ristournes n’était pas contesiable, la simple sion au « Programme Privilèges » ouvrant droit aux paliers de ristournes sans autre condition, – qu’en outre, ces ristourncs '«correspondaient à des ristournes connues et certaines, un barème d d étant diffusé dans divers documents émis par

la société GACD».

Lors de son audition le 26 juin 2012 par les fonctionnaires de la DDPP de Paris, M Y indiquait que : – cette non conformité dans la facturation était provoquée par une impossibilités de

traitement par le système informatique – un investissement de 5 millions d’euros dans un nouveau logiciel de facturation avait été réalisé, devant permettre l’édition de factures conformes.

Si le directeur financier avait annoncé que ces manquements devaient être corrigés en q À £

2012, les dernières constatations opérées les 13 avril et 26 juin 2012 montraicnt que le mode de facturation n’avait pas été modifié.

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Était, par ailleurs, relevée l’absence de dénominations précises des réductions accordées.

Les ristournes liées au Programme Privilèges étaient seulement mentionnées sur les factures comme des «Remises de l’in d’Année» (RFA), quelle qu’en soit la date de paiement.

L’examen de la période d’attribution de ces RFA montrait que celles-ci pouvaient être accordées à tout moment de l’année, le dentiste décidant du moment de l’utilisation de l’avoir.

La dénomination des réductions accordées était donc imprécise.

Ces avantages représentaient dans leur globalité un montant très important :

—  262.992,84 euros au titre du compte cadeaux en 2010 et 646.239,84 euros en 2011, – 4.435.275,97 euros au titre du compte «rabais, remises et ristournes» pour l’année 2010, dont :

*achats chez DARTY : 991.639,94 euros,

* achats auprès de la FNAC : 244.653,49 euros,

* achats chez CHÂTEAUX ET LIÔTELS: 16.930,94 euros,

* achats chez LIBERTY GIFT : 84.844,39 euros,

et 4.559.966,17 euros pour 2011.

Les «avoirs à établir» et remises de fin d’année non encore utilisées représentaient un montant de 2.000.394 euros.

La DDPP de Paris estimait que les manquements à la législation sur la facturation n’apparaissaient pas comme le fruit d’une inattention particulière mais d’une intention clairc ct répétée de dissimuler des infractions à l’article L.4113-6 du code de la santé

publique.

b/ s’agissant des agissements de la SAS E et d’M Y (procédure n° P 1414000707)

Les investigations réalisées par les fonctionnaires de la DDPP de Paris révélaient :

La SAS E appartient à 100 % au groupe GACD.

Il s’agit d’une société commerciale vendant par correspondance des consommables dentaires destinés aux dentistes français, qui possède un site internet donnant accès au catalogue produits et au catalogue Promofidélité en ligne.

La commande du chirurgien dentiste ne s’effectuait pas directement par internet mais était réalisée par téléphone via un centre d’appel.

Elle ne dispose pas d’un catalogue général papier.

La SAS E dispose de deux sites :

— le siège administratif […] qui regroupe la direction

générale,

— un site à Tremblay-en-Krance (2 bis chemin du loup) où sc trouvent son siège social, les services supports informatiques, la comptabilité, les entrepôts.

Elle emploie 40 salariés, dont 15 personnes sur plateau d’appel et 8 commerciaux.

lle compte environ 10 000 clients actifs, sur 36 000 dentistes répartis sur le territoire rançais.

La clientèle de la société E est constituée pour l’essentiel de

chirurgiens-dentistes libéraux, de quelques mutuelles, et de centres de soins dentaires.

La société E est également présente dans les marchés publics.

Les sociétés GACD et E apparaissent pour les chirurgiens-dentistes

commc deux entreprises concurrentes.

La SAS E a réalisé un chiffre d’affaires de :

—  21.730.457 euros en 2010, p

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—  22.226.943 euros en 2011,

—  23.800.213 euros en 2012.

Elle présente un résultat bénéficiaire de 1.296.028 euros en 2010, 1.554.436 euros en 2011 et 1.199.682 euros en 2012).

La société PROMODENTAIRI: possède dans sa gamme d’articles offerts à la vente, des produits anesthésiques avec autorisation de misc sur le marché (AMM).

L’examen du «catalogue en ligne» édité (extrait du 31 janvier 2013) permettait de constater la variété des produits commercialisés par la société E : matéricl à empreintes, radiographie, anesthésie et pharmacic, hygiène et stérilisation, usage unique, prévention et csthétique, fraises et polissage, endodontie, ciments, fonds de cavité et scellements, prothèses et laboratoire, tenons et reconstitution coronaire, restauration, instruments, chirurgie et implantologie, orthodontie, petit équipement, matéricl.

Ces produits permettent la réalisation d’actes dentaires donnant lieu à une prise en charge par l’assurance maladie.

En complément, étaient diffusés régulièrement des supports de vente (tracts ou flyers) tdes catal d tion permettant aux clients de bénéficier de remises

2

ou primcs/cadeaux. |

Les chirurgiens-dentistes, qui achètent par le biais de la société E, adhérent de fait, sans bulletin d’inscription spécifique, au programme fidélité, dénommé

«Boutique Promo fidélité ».

Ce programme fidélité est mentionné dans le catalogue Promofidélité.

Une grille des avantag iaux liste la tranche de chiffre d’affaires et le montant de l’avoir correspondant. Par exemple, 1500 euros de chiffre d’affaires réalisé donne droit à un avoir de 60 euros.

Ainsi dès son premier achat, le client le des irs) sur son compte al Promofidélité.

Le seuil de déclenchement de l’avoir est fixé à 1 000 euros d’achat.

Le pourcentage de l’avoir augmente avec le chiffre d’affaires, ct atteint plus de 12 %

pour les tranches les plus importantes

Le calcul de l’avoir se fait donc automatiquement sans demande, ni engagement de 'acheteur.

Il n’y a pas d’engagement formel du chirurgien-dentiste de réaliser un chiffre d’affaires

«C’est ouvert à tous les clients».

Les «avoirs» sont crédités dès lors que le produit est facturé et sont comptabilisés par le service client de la société E.

Les «avoirs» sont valables jusqu’au 28 février de l’exercice suivant et permettent au chirurgien-dentiste d’accéder au book du «Programme Promofidélité» répertoriant les articles proposés (aspect high-tech, loisirs, cocooning, luxe) avec la fourniture de lecteurs DVD, consoles de jeux, chaînes hi-fi, PC, appareils photos, billards, scooters, piscines, électroménagers tels que réfrigérateur américain, lave-vaisselle, aspirateur, caves à vins, bagages, montres, AC, bouteilles de vin et de champagne, voyages d’agrément ct loisirs [..….].

Ils peuvent également être utilisés sur le catalogue E pour l’acquisition de produits dentaires.

Le pourcentage des ristournes accordées variait entre 3,5 % pour 1000 euros d’achats à 12,76 % pour 23.500 euros de chiffre d’affaires, une quinzaine de bons clients pouvant prétendre à la fourchette la plus élevée.

À l’instar de la société GACD), la société E considérait ne pas faire de cadeau aux chirurgiens-dentistes, ceux-ci «payant» cux-mêmes les articles

P

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Promofidélité choisis par le biais des avoirs ou ristournes accumulés tout au long de l’annéc, ces produits étant essenticllement «destinés à équiper leurs cabinets dentaires».

S’agissant du programme de fidélité E, Mme AA A, responsable de la comptabilité client, et M. AB D, directeur administratif et financier, déclaraient que plus le chiffre d’affaires augmente, plus le nombre de points (E) à échanger éventuellement contre des biens proposés par le catalogue «Promofidélité» (E) augmente.

Ils précisaient que pour échanger ces points :

— le praticien commandait, par téléphone en fonction de ses capacités, le produit souhaité,

— il n’y avait pas de bon de commande papier,

— il n’y a pas de traces écrites de ces commandes au service comptabilité.

— la remise de fin d’année du chirurgicn-dentistepouvait être demandée par le praticien à tout moment,

—  1e nombre de points «Promofidélité» n’apparaissait pas sur les factures d’achats des praticiens, cc en raison de notre système informatique actuel,

— pour connaître son solde de points ou lc montant éventuel de sa remise, le praticien devait faire la démarche auprès d’un consciller téléphonique. Ce n’était que sur écran que le conseiller pouvait renseigner le chirurgien-dentiste,

— le «cadcau assistante» sur la facture correspondait à des pctits cadeaux de valeur négligeable (parapluie, crayon, …) remis à l’assistante pour la «remercier» de la commande passée, cadeaux non liés au programme de fidélisation,

— des accords tarifaires n’étaient pas systématiquement passés avec le chirurgien-dentiste mais si des conditions spéciales étaient demandées par un centre hospitalicr, une mutuelle, un gros client préférant un pourcentage de réduction sur les commandes, un accord commercial était signé.

Ils ajoutaient qu’aucune convention unique n’était passée et signée par les praticiens-clients des 2 structures.

Ils indiquaient que dès 2012, avec le passage au logiciel GENERIX permettant un suivi pointu du programme de fidélité, les points acquis ayant une date de validité de 18 à 24 mois apparaîtront sur les factures.

Mme A produisait une facture émise par une agence de voyages VOYAGL PRIVE, datée du 19 novembre 2012, relative à un séjour à Pointe-à-Pitre de 12 jours, vol inclus au départ de Paris du 16 au 26 février 2013 dont avait bénéficié le chirurgien- dentiste SALAMA accompagné de sa mère, son épouse et ses trois enfants, pour un montant total de 6875,78 euros dont 4813 euros avait été réglée par la société E.

Dans ses déclarations du 26 juin 2012, M Y, président de la société E indiquait :

«Suite à un redressement fiscal il y a une dizaine d’années, nous avons fait le choix d’une politique commerciale L à destination des praticiens. Soit une remise fin d’année qui est en fait une ristourne, payée en chèque en janvier, février de l’année N+1. Cette ristourne peut être déduite des factures d’achat de produits dentaires et de produits d’équipement du cabinet.

Nous organisons fréquemment des opérations de vente par lots, qui consistent à lier des produits dentaires entre eux, avec exceptionnellement la possibilité d’offrir un produit de confort de cabinet (exemple un Ipad) avec des produits dentaires (gants, lingettes

…)» Comme la société GACD, la société E éditait chaque année un catalogue qui correspondait à des programmes de fidélité. Étaicnt par ailleurs édités des

catalogues «Spécial Assistante », annoncés sur la première page de couverture des catalogues «Boutique Promofidélité», disponibles sur Internet. À titre d’exemple, sur le

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catalogue de 2013, en fonction du niveau du chiffre d’affaires atteint, l’assistante avait droit à des bouteilles de «Petit Chablis» ou de Champagne Charles Lafitte.

L à uc «Boutique Promofidélité» (édition 2010, 70 pages) présentait quatre pôles 'intérêt :

— high-tech (pages 12 à 31) : l’article le moins cher étant un iPod Shuffle affiché 65 euros (page 16), le plus cher un écran Lcd 56 (page 31) à 4 400 euros.

— loisirs (pages 32 à 41) : l’article le moins cher étant un sac de sport d’une valeur de 45 euros (page 38), l’article le plus cher une piscine hors sol (page 41) d’une valeur de 6 600 euros.

— cocooning (pages 42 à 57) : l’article le moins cher étant un télémètre à ultrasons d’une valeur de 50 euros (page 50), le plus cher un réfrigérateur multi-média (page 57) d’une valeur de 2 640 euros.

— luxe (pages 58 à 69) : l’article le moins cher étant un porte-monnaie C d’une valeur de 45 euros (page 59), le plus cher une montre homme de marque T’aglicuer (page 65) d’une valeur de 4510 euros.

Le cataloguc « Boutique Promofidélité (édition 201 1, 1 11 pages) indiquait en page 2 en lettres majuscules et en grands caractères : «Plus vous commandez, plus votre fidélité est récompensée».

Les pages suivantes précisaient «C’est simple et gratuit», «Faites-vous plaisir ». Sur le bandeau de bas de pages, il était noté : «Utilisez vos avoirs pour vous offrir le produit de vos rêves».

La valeur de ces articles était directement indiquée cn euros.

Ce catalogue comportait quatre rubriques:

— high-tech (pages 13 à 49) : appareils de marque Bose pour la musique, Sony pour les multimédia, des GPS chez Tomtom et avertisseurs de radars chez Coyote, Samsung, B, Apple, User ordinateurs portables, mini-PC, unités centrales, écrans, téléphones, imprimantes, appareils photos, consoles B. Certains produits étaient signalés par un «coup de cœur».

La valeur annoncéc du produit le moins cher s’élevait à 45 euros (pages 17 ct 26 étui Ipad) et le plus cher à 4400 euros (écran LED en page 47).

— loisirs (pages 50 à 67) : sacs de sport, coffrets-cadeaux Club Med d’une valeur de 4420 euros, coffrets Smartbox, guitare, vélo de ville, VI"!, vélo d’appartement, rameur, chariot de golf, […].

Aux pages 54 et 55 était indiqué : «Plein d’idées cadeaux ».

La valeur annoncée du produit le moins cher s’élevait à 25 euros (page 51 sac de tennis) et le plus cher à 11.439 euros (scooter en page 63).

— cocooning (pages 68 à 94) : pèse-personnes, balance de cuisine, robots de cuisine, aspirateur, outils, lave-linge, congélateur, plancha, micro-ondes, appareil à fondue, cave à vin, barbecue, ménagère, machines à café, ensemble de jardin, armoire à cigares. La valeur annoncée du produit le moins cher s’élevait à 35 euros (page 69 pèse personne Tefal) et le plus cher à 880 euros(percolateur avec broyeuse à café en page 90).

— luxe (pages 95 à 111) : AC-bille, portefcuille et […], C, AC AD, montres femme et hommes de marques […], whisky d’exception, […].

Le nombre de boutcilles de Champagne proposé allait d’une à 125 bouteilles. Hors vin, la valcur annoncée du produit le moins cher s’élevait à 35 euros (page 98 porte-cartc Longchamp) et du plus cher à 3355 euros (montre homme Montblanc avec bracelet en alligator en page 106) .

L’examen du catalogue «Boutique Promofidélité» (édition 2012, 112 pages) comportait

également quatre pôles d’intérêt : – high-tech (pages 13 à 47), l’article le moins cher étant un étui Ipad d’un montant de

45 euros (page 23), le plus cher correspondant à un écran Led Samsung (page 43) d’une valeur de 4.940 curos.

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— loisirs (pages 48 à 65), l’article le moins cher étant un sct de raquettes de ping-pong d’unc valeur de montant de 28 curos (page 49), le plus cher un scooter Peugcot (page 65) d’un montant de 4099 curos.

— cocooning (pages 66 à 92 ), l’article Ie moins cher étant un grille-pain d’un montant de 39 euros (page 71) Le plus cher un poëlc à bois (page 92) d’unc valeur de 3 575

euros. – luxe (pages 93 à 111), l’article le moins cher étant un porte-monnaie C d’une

valeur de 45 curos(page 96) et hors vins, l’article le plus cher une montre homme Baume et Mercicr (page 105) d’un montant de 2 815 euros.

Le catalogue 2012, contrairement aux précédents, contenait en page 7 des «conditions générales Promofidélité 2012», applicables à compter du 1er septembre 2011.

Ces conditions précisaicnt que le client E accédait à ce programme de fidélisation, dès le moment où il en faisait la demande.

Le cumul de ses commandes ouvrait droit à un avoir financier.

M. D, directeur administratif ct financier, affirmait qu’il n’y avait pas de bullctin d’adhésion et qu’il n’était pas nécessaire de s’engager sur la réalisation d’un chiffre d’affaire précis pour bénéficicr des avoirs ou ristoumes.

Enfin, la société AO AL se réservait le droit de modifier ses conditions générales de ventes, « soit pour faire bénéficier les nouveaux adhérents de nouveaux avantages, soit pour se conformer à de nouvelles dispositions légales qui rendraient illicites tout ou partie de ce programme. »

Des cadeaux pouvaient être également obtenus par le biais de ventes de lots dentaires spécifiques associés à un produit plaisir (non dentaire).

Différents tracts proposant ces ventes promotionnelles par lots étaient joints. Les offres ti Îles avaicnt souvent une duréc de vie d’un mois. Elles étaient très

fréquentes.

Au cours des investigations réalisées par la DDPP de Paris, sept fascicules relatifs aux offres de l’exercice 2010 étaient présentés. Ces offres étaient identifiées dans les facturations par un codage spécifique : «code offre ».

Il s’agissait d’une vente par lots combinant à la fois des produits dentaires nécessaires à la réalisation des soins dentaires (comme les gants, les compresses, les fraises, amalgames et en composites pour les obturations ct les restaurations, le silicone pour la prise d’empreintes, lingettes, matériel de nettoyage ct de désinfection pour les ustensiles, pièce à main pour fraises, lampe à photo-polymériser, aéropolisseur pour finir les détartrages, déposc-couronnes ct bridges, contre-angle, seringues ancsthésiq

cf à ) aies articles dits «plaisir» extérieurs au domaine dentaire (champagne, multi média … ).

Le signe égal reliait la combinaison entre les articles dentaires et non dentaires.

Les première et dernière de couverture des livrets promotionnels montraient systématiquement des «produits plaisir» non couplés à des lots dentaires (tablette Ipad, sac C, chaîne hi-fi ROSE, climatiseur, Iphone, Ipod … ) pour lesquels il fallait contacter la société E.

Ces produits étaient repris dans le catalogue «Promofidélité 2010 ».

La présentation, faite dans ces tracts, indiquait toujours «exemple d’utilisation de votre avoir ». Or les montants des offres d’achats combinées étaient toujours inférieurs au seuil d’ouverture de l’avoir du catalogue Promofidélité

Les produits dentaires concernés entraient soit dans la composition de l’acte dentaire remboursable (composites, amalgames pour les plombages; matériel à empreintes pour la réalisation de prothèses), soit utilisés pour la réalisation d’actes dentaires remboursables (lingettes, gants, matéricls, matériels de désinfection sans lesquels les soins dentaires ne pourraient être réalisés).

(

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Lors de son audition du 27 juin 2012, M Y, en tant que président notamment de la société AO AL, reconnaissait que ces produits «plaisir» étaient des «produits de confort du cabinet», « offerts avec des lots de produits dentaires».

L’avantage tarifaire direct procuré par l’achat d’un lot restait soit très faible (de 0,10 euro à 26 curos), soit nul. En revanche, la valeur du cadeau tait un montant conséquent au regard de la valeur du lot : de 65 à 120 euros par pour des achats allant de 187 euros à 307 euros. Le seul intérêt d’un achat par lot par rapport à un achat à l’unité résidait dans l’obtention du cadcau, cadeau apparaissant comme la scule dynamique de l’opération publicitaire.

Parmi les produits proposés accompagnant les lots dentaires figuraient notamment: vélo, barbecue, GPS, tireusc à bière, sac C, yaourtière, GPS, stylo Montblanc.

L’examen des comptes-clients mettait en évidence l’existence de nombreux «avoirs », prenant la forme soit d’avoirs classiques de retour de produits, soit de la mise en œuvre du «Programme Promofidélité ».

La facturation de la société F à la société E pour l’année 2011, permettait de relever les montants suivants :

Nom du fournisseur chez F Année 2011 DARTY 1.069.007 euros FNAC 793.579 euros DEB DISTRIBUTION 251.936 euros ACAD Distribution (vins) 176.609 euros APPLE SALES International 122.674 euros CRVC (Champagne de Calna) 108.768 euros SEB Fran 70.858 euros RUE DU COMMERCE 50.732 euros BOSE 43.357 euros LA CHABLISIENNE 40.570 euros DYSON 38.033 euros SMARTBOX 30.919 euros BUISSONNES (SANCERRE) 9.773 euros BLATT (Richwiller) 8.157 euros APPLEWOOD 6.412 euros Wine&CO 3.641 euros PIXMANIA 1.810 euros

Le budget des achats de vins et de champagne auprès des différents fournisseurs (Acad Distribution, Buissonnes, la Chablisienne, CRVC, Wine & Co) s’élevait en 2011 à 339 361 euros. Celui des coffrets-cadeaux (SMARTBOX) se chiffrait en 2011 à 30 919 euros.

M. D, directeur administratif et financier, précisait que la centrale d’achat F prenait une marge dans le cadre des actes de revente à E.

Cette marge était de 8 % sur le prix moyen pondéré pour couvrir les frais de gestion de la centrale d’achats.

1355 clients avaient bénéficié des «attentions» de E de manière complètement «graluite» et 958 clicnts avaient fait l’objet d’une pseudo-vente (mention « vendus ») par le biais du système de fidélité.

1784 clients avaient bénéficié de ces avantages pour un montant minimal de 297 021 euros (la valeur des gratuits n’était pas mentionnée), ce qui représente une valeur moyenne de l’avantage fourni de 166, 49 euros.

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Au cours de la même année 201 1, les chirurgiens-dentist evaient les produits

suivants : – Champagne Castelnau brut 5088 bouteilles 122 112 euros – Chablis Le Finage 2006 172 3440 euros – Sancerre blanc 60 724 euros – Dolce Gusto Circulo 3 519 euros – Etui Apple pour Ipad 49 2205 euros – Mix Party Tefal 56 3704 euros – Montre femme Gucci 7 2115 euros – Nespresso Citiz 1 200 euros – B DS 2 348 euros – Cadre photo numérique 35 3465 euros – Parapluie Longchamp 2 110 euros – Porte-cartes Longchamp 1 35 euros – Portefeuille cuir marron MB 1 189 euros – Pierrade Raclette 1 85 euros – Smartbox 3 135 euros – Sounddock 2 S50 euros – Stylo Montblanc plaqué or 1 185 euros – Wi Fit Plus et Balance Board 1 110 euros – Aspirateur Dyson 1 675 euros

Les gratuits représentaient une valeur de 140 906 euros.

Les chiffres d’affaires relatifs aux produits anesthésiques et aux films radiographiques réalisés par la société E pour les années 2010, 2011 et 2012 étaient les suivants :

Produits Année 2010 Année 2011 Année 2012 Anesthésiques en euros 420591 474164 514052 Films en euros 163269 153714 148546

Les films radiographiques sont des dispositifs médicaux. L’acte dentaire de réalisation d’une radiographic est directement remboursable.

Les articles du Programme Promofidélité sont présentés par la société E comme étant acquis par les chirurgiens-dentistes par l’intermédiaire du système "«d’avoirs cagnottés" en fonction de la progression du chiffre d’affaires. Or, d’une part, les produits Darty, Fnac, les vins … étaient intégralement payés par la société AO AL par le biais de sa centrale d’achat F et, d’autre part, aucun débours financier effectif n’était réalis

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par le dentiste dans le cadre de ce programme, les ristournes accumulées étant portées au débit du compte « Rabais Remises Ristournes » de la société E, puis au crédit du chirurgien-dentiste.

Il n’y avait donc pas d’achat avec débours financier par le dentiste, mais fourniture d’un avantage gratuit pour le dentiste.

Les seuls débours financiers étaient opérés par la société AO AL, à la fois pour régler les fournisseurs et pour financer les «avoirs-RIFA» qui créditaient le compte des chirurgiens-dentistes.

Il ressortait par ailleurs des investigations de la DDPP de Paris que ces avantages avaient représenté des montants très importants :

en 2010 : 74415 euros

en 2011 : 93 067 euros

en 2012 : 65 900 euros

du

Programme Promofidélité en 2010 : 923 837 euros en 2011 : 899 682 euros en 2012 : 1 077 397 euros

Enfin, toute la politique commerciale de E ne visait qu’à inciter les chirurgiens-dentistes à être clients sur la base des nombreux avantages

fournis.

L’examen de factures des fournisseurs (La « Chablaisienne », […], le groupe SEB, BP30, […], […], […], […] comme de factures de F à la société E, produites par la société E, s’agissant des factures

— n°2011 000011162 du 10 janvier 2011 d’un montant de 78.519, 25 euros

= D°-------163 du 11 janvier 2011 d’un montant de 60.554,12 euros

— n° -------174 du 26 janvier 2011 d’un montant de 69.586, 75 euros

— n°387 du 3 février 2011 d’un montant de 57.658,57 euros

— n° ---728 du 3 mars 2011 d’un montant de 68.468, 50 euros

— N°------ 729 du 4 mars 2011 d’un montant de 74.947,77 euros, soit un total de 409.734, 96 euros, permettait de constater :

La centrale d’achat F approvisionnait la société E ainsi que les autres sociétés du groupe cn produits de toute nature, comme le montrent les factures des fournisseurs de F (vins, champagne, électroménager, outillage, HI FI etc… ).

Or, les factures de vente de la société F à la société E ne reprenaïent aucune des mentions présentes sur les factures fournisseurs.

Ces factures rassemblaicnt des produits de toute nature, simplement regroupés en fonction de leur taux de TVA.

En l’absence d’individualisation des produits vendus et en l’absence de dénomination des produits objet de la transaction, ces factures ne permettaient pas de connaître la nature ct la quantité des produits vendus à E. > l’absen ix unitair

Aucun produit n’étant identifié, ni les quantités ni les prix de vente unitaires n’étaient mentionnés.

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Aucune des factures ne comportaient les conditions d’escompte applicables en cas de paiement à une date antérieure à celle résultant de l’application des conditions générales de ventc ainsi que le taux des pénalités exigibles le jour suivant la date de règlement inscrite sur la facture, la date précise du règlement n’était pas non plus mentionnée.

M Y, chirurgien dentiste, était le président de la société E. Il n’existait pas au sein de l’entreprise E de délégation de

pouvoir.

/ ition de À nd STE

Entendu sur procès-verbal le 28 février 2013 par les fonctionnaires de police, M Y, qui revendique être titulaire d’un doctorat en chirurgie dentaire, cxcrcer depuis 1980 les fonctions de président directeur général de la société SAS GACD qui compte 150 employés, au chiffre d’affaire de 70 millions d’euros, être marié, et père de trois enfants qui ne sont plus à charge, déclarait que :

— le programme de fidélisation sans conditions, ni engagements particuliers, mis en place depuis 4 à 5 ans, évoluant en fonction des lois et de la concurrence, et au regard des conscils prodigués par le cabinet AJ et associés, société d’avocats excrçant à Paris, permettait au chirurgien-dentiste y ayant adhéré, de cumuler des points appclés couronnes convertibles en euros,

— les couronnes s’acquéraient lors de commandes,

— Le barème des couronnes sc décomposait de la manière suivante : 1 euro d’achat TTC sur les marques nationales est égal à 1 couronne ou 1 euro d’achat TTC sur les marques exclusives est égal à 2 couronnes.

— les couronnes étaient créditées sur le compte commercial du client dès lors que le produit était facturé et comptabilisé par le service client de la société,

— les couronnes valables durant 24 mois à compter de la date d’émission de la facture pouvaient être échangées en avoirs sur tout le catalogue général de la société GACD ct sur le book du programme privilège,

— les produits non dentaires qui peuvent être obtenus par la fidélité (matériel hifi, multimédia, électroménager, coffrets cadeaux, vins, montres) étaient des produits utilisables dans les cabincts dentaires, et pouvaient constituer des cadcaux de fin d’année que le dentiste pouvait donner, par exemple, à son assistante ou au prothésiste,

— le dentiste disposait de trois options, soit un remboursement financier, soit un avoir en produits, soit un avoir en équipement pour son cabinet, la remise étant transformée d’un avoir financier en équipements pour le cabinet (télé, frigo, etc) – les points appelés « couronnes » convertibles en curo ne constituaient par une ristourne mais un avoir financier qui pouvait être converti en argent, en produits dentaires, ou en équipements pour le cabinet dentaire,

— les cadcaux distribués à ses clients pouvaient être évalués à plusieurs millions d’euros chaque année, et notamment deux millions d’euros pour l’année 2012,

— lc programme de fidélité en général et tous les cadeaux directs ou indirects qui s’y rattachaicnt, ne procédait pas d’un système détourné pour fournir des avantages à des membres d’une profession médicale, le dentiste pouvant bénéficier d’une remise financière,

— l’opération "séjour à New-York» était un voyage à but professionnel, à savoir la présence à un con dentaire dans la mesure où il y plus de cinquante congrès dentaires par an aux États-Unis, pour lesquels il était demandé aux dentistes de prendre des dates de séminaires, le voyage étant pour 2 personnes, soit le dentiste qui cmmenaïit avec lui qui il voulait,

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— au regard des plaintes d’une cinquantaine de chirurgiens-dentistes s’estimant trompés par la publicité et faisant état que le séjour de 3 nuits à New-York pour 2 personnes (vol A/R inclus) pour toute commande supérieure à 2000 euros passée avant le 31 décembre 2010 n’ayant finalement pas été fournie, il estimait que le prestataire (la société Mix Moments World Wide à Barcelone) avait fait défaut,

— figuraient dans le catalogue général de la société GACD, des articles dentaires donnant lieu à une prise en charge de l’assurance maladie (films radiologie et anesthésiques) mais n’ouvrant pas lieu à remise, avoirs et équipements pour le cabinet,

— le tarif proposé était le tarif officiel de tous ses fournisseurs et en fonction des couronnes ou des contrats, les clients négociant des remises, comme dans tout système commercial normal,

— la pratique commerciale misc en place visait à fidéliser les chirurgiens-dentistes sur la base des nombreux avantages fournis (programme privilèges, cadeaux assistantes, systèmc de promotion par le best-of et les offres festival), se trouvant en concurrence avec des gens qui avaient la même pratique,

— lc système informatique n’était pas au point, et alors que toute réduction de prix acquise au moment de la vente devait figurer sur la facture, les factures émises dans le cadre du "programme privilèges» ne faisaient pas apparaître les ristournes acquises, ni en valeur monétaire, ni en couronnes, alors que dans les « conditions particulières du programme privilège » il était précisé que les couronnes sont calculées dès l’enregistrement de l’adhésion,

— le client pouvait obtenir toutes les informations pour savoir où il en était avec son programme privilège, en appelant la société au 01.42.46.87.87,

— si courant novembre 2011, le directeur financier avait annoncé que ces manquements devaient être corrigés en 2012 et si par ailleurs, les dernières constatations opérées le 13 avril et 26 juin 2012 montraient que le mode de facturation n’avait pas été modifié à ces dates, c’était parce que le nouveau système était en cours d’installation, affirmant que désormais «tout marchait correctement et les factures étaient faites correctement."

Il contestait :

— l’infraction de fourniture d’avantages à des membres d’une profession médicale par une entreprise dont les produits sont pris en charge par la sécurité sociale.

— la vente de produits ou de prestations de service pour une activité professionnelle sans facturation conforme car, d’une part, toutes les informations étaient disponibles et, d’autre part, sa société et lui-même avaient dû mettre en œuvre un système pour se mettre en conformité avec la loi.

Dans une note d’observations, il affirmait que le programme privilège mis en place n’avait pas pour finalité de contourner la loi anti-cadeaux mais de s’aligner sur la concurrence, soulignant que la concurrence ct notamment les sociétés MEGADENTAL et V AE, avaicnt recours au même procédé depuis des années, faisant cadeau d’un véhicule SMART pour un engagement de 50.000 euros.

ment d it

S’agissant de la procédure n° 1 1041092084 , par jugement en date du 16 mai 2014, la 31ème chambre du tribunal correctionnel de Paris a transmis à la Cour de cassation, chambre criminelle, une question prioritaire de constitutionnalité dans les termes suivants : « Les dispositions des articles L. 41 13-6 et L. 4163-2 du code dc la santé publique méconnaissent-elles le principe de légalité des délits et des peines en raison de Jour imprécision et le principe d’égalité et de libre concurrence en défavorisant les entreprises commercialisant des produits remboursés par la sécurité sociale ? ».

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Par arrêt du 6 août 2014, La Cour de cassation a dit n’y avoir lieu à renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité, ct a retenu dans ses motifs que la question, ne portant pas sur l’interprétation d’unc disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore cu l’occasion de faire application, n’était pas nouvelle, et nc présentait pas de caractère sérieux. Elle a rappelé que le texte de loi avait «pour objet, conformément à un objectif de santé publique, de préserver l’indépendance» des «professions» médicales «dans leurs relations avec les entreprises» commercialisant des produits pris en charge par la sécurité sociale.

Après avoir jugé sans objet le moyen de nullité soulevé par la défense, et dit n’y avoir lieu à donner suite à la demande de question préjudicielle, le tribunal a relaxé des fins de la poursuite l’ensemble des prévenus : la SAS GACD, M Y, et la SAS CADENSE, la SAS E, déclaré irrecevables les constitutions de partie civile de R AF, T U, AS-AT AU, P Q et AG AH- AR en adoptant la motivation qui suit : «Les exceptions de nullité Dans des conclusions écrites liminaires, la défense soulève la nullité de l’usage de certains des procès-verbaux de la direction départementale de la protection de la population. Elle fait en cffet valoir que la procédure menée par cc service portait sur des infractions aux dispositions de l’article L.4163-2 du code de la santé publique mais ue celle-ci aurait ensuite été utilisée pour caractériser une infraction à l’article 441-3 du code du commerce sans que les prévenus n’aient été informés de cette orientation nouvelle. Il ressort cependant de la procédure que les procès verbaux de la DDPP, qui ont été notifiés à un représentant de la société GACD mentionnent bien les infractions au code du commerce. Le moyen soulevé, à le supposer même pertinent, est donc

sans objet.

j judicielle à la cour de justice de l’union e nne La défense sollicite qu’une question préjudicielle soit posée à la cour de justice de l’union curo c.

Les dispositions des traités formant l’union européenne permettent effectivement au tribunal de saisir la cour de justice lorsque se pose une question d’interprétation d’une disposition communautaire.

En l’espèce, la défense ne sollicite pas l’interprétation d’unc disposition curopéenne mais souhaite, en réalité, que soit appréciéc la validité del’article L.4163-2 du code de la santé publique au regard de la législation communautaire. Unc telle appréciation ne relève de la procédure de la question préjudicielle.

Il n’y a donc pas lieu de donner suite à la demande de question préjudicielle.

Pour que cette législation soit applicable, il faut donc que trois éléments soient unis.

Il faut en premier lieu que l’avantage ou le bien nc présente pas une valeur négligcable, la réglementation ne définissant pas cette notion.

La défense soutient que les «cadeaux» mentionnés dans la procédure, dont elle ne conteste pas le caractère important en valeur, ne constitucraient pas des avantages. À la barre, M Y a même essayé de contester l’utilisation de terme «cadeaux» qui figure pourtant des ses catalogues.

En réalité, quelque soit le terme utilisé (cadeaux, avoir, acompte .), il s’agit bien d’un avantage accordé à l’acheteur et il ressort du dossier que ces avantages, qui prenaient plusieurs formes possibles (remboursements en espèces, à valoir sur de futurs achats, cadeaux …) présentaient une valeur non négligeable.

Il apparaît donc que la première condition cst parfaitement réunic.

Il faut en sccond lieu que cette pratique commerciale ne ressorte pas des relations normales de travail. En l’espèce, il ne peut être légitimement soutenu que de tels

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avantages rentrent dans une relation normale de travail. il s’agit en réalité, purement et simplement, d’une relation commerciale. 1l apparaît donc que la seconde condition est parfaitement réunie. Il faut, enfin, que les sociétés GACD et E soient considérées comme unc «entreprise assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris cn charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale». Lors de l’enquête, ces deux sociétés nc contestaicnt pas entrer dans cette catégoric. Au demeurant dans les conditions générales de vente (cote 28 A et 28 B) la société GACD mentionnait expressément que les chirurgiens dentistes ne pouvaient recevoir de cadeaux sur des produits remboursés per la sécurité sociale et que de ce fait aucun cadeau ne pouvait concerner lc film radiologie et les produits d’anesthésie. A l’audience, et dans les écritures déposées par la défense, les prévenus ont contesté toutefois ce point. L’article L.4113-6 du code de la santé publique ne précise pas, lui même, ce qu’est un produit pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale et ne renvoie pas non plus spécifiquement à d’autres textes légaux ou réglementaires. Dans la prévention, il n’est pas mentionné le ou les produits qui permetiraient de considérer que les deux sociétés produisent ou commercialisent des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Il ressort cependant des procès-verbaux dressés par la DDPP et des observations orales du ministère public, qu’il s’agit des anesthésiques et des films radiologiques, les deux produits d’ailleurs mentionnés dans les conditions générales de vente. L’article L.165-1 du code de la sécurité sociale précise que le remboursement par l’assurance maladic des dispositifs médicaux à usage individuel est subordonné à leur inscription sur une liste établie après avis d’une commission de la Haute Autorité de santé. ' Or, il ressort de l’extrait de la nomenclature générale des actes professionnels (pièce n°25) que les actes d’anesthésie locale ou loco-régionales pour les actes de soins chirurgicaux nc donnent pas lieu à cotation. De plus, la liste des produits et prestations remboursables ne fait pas mention de film radiologique et d’anesthésique. Les ancsthésiques et films radiologiques n’apparaissent donc pas comme étant, eux mêmes, pris en charge par la sécurité sociale. L’accusation soutient, s’appuyant sur un jugement du tribunal de commerce de Bobigny, que la notion de produit pris en charge doit être entendu dans une acccption large et doit permettre d’inclure tous les produits, même non direct t remboursés, dès lors qu’ils s’intègrent dans un forfait incluant les honoraires du praticien et les produits et donnant lieu, lui, à prise en charge.

loi pénale est, cependant, d’interprétation stricte, surtout lorsqu’il s’agit de déterminer l’étenduc exactc des faits incriminés. L’article L.4113-6 du code de la santé publique établit un lien direct entre le produit et sa prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. L’i tion suppose donc, pour exister, que l’entreprise mise cn cause produise ou ialise un produit lui même pris en charge et non seulement un produit entrant dans une prestation donnant lieu à prise en charge. Au demeurant toute autre interprétation aurait pour effet de faire entrer dans les dispositions de cet article l’ensemble des produits de toute nature utilisés par un praticien dès lors qu’ils sont intégrés dans le calcul des coûts. Il apparaît donc que l’infraction aux dispositions de l’article L.4113-6 du code de la santé publique reprochée aux prévenus n’est pas caractérisée et il convient de les relaxer de ce chef. Deux autres infractions, de nature commerciale, sont également reprochées aux différents prévenus. L’article L.441-3 du code du commerce dispose que «tout achat de produits ou toutc prestation de service pour une activité professionnelle doivent faire l’objet d’unc facturation» ct précise que «la facture doit mentionner le nom des partics ainsi que leur adresse, la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité,

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la dénomination précise, et le prix unitaire hors TVA des produits vendus et des services rendus ainsi que toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou de la prestation de services et directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services, à l’exclusion des escomptes non prévus sur la facture … ». Il est reproché à la société F d’avoir établi, dans ses relations avec les autres sociétés du groupe, la SAS F et la SAS AO AL, des factures ne comportant pas la dénomination précise des biens vendus, leur prix unitaire, les conditions d’escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles. Il ressort cependant du dossier que chacune des factures papiers était accompagnée de pièces jointes informatiques et que ces dernières comportaient l’ensemble des mentions cxigées par le législateur.

Le code de commerce n’exige pas que la facture doive nécessairement être sous forme papicr dans son intégralité. De plus l’existence même de l’ensemble des mentions exigées par la loi démontre la parfaite bonne foi de la SAS F ct l’absence totale de volonté délictueusc.

Il convient donc de relaxer la SAS F de l’unique chef de prévention qui pèse sur elle.

M Y et la société GACD sc voient également reprocher une facturation non conforme au motif que n’apparaîtraient pas sur les factures les ristournes acquises à chaque de de produits, eten ne mentionnant pas non plus la dénomination précise des réductions accordées dans le cadre du «programme privilèges» souscrit par les clients.

L’article L.441-3 du code du commerce exige que la facture mentionne «toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou de la prestation de services et directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services».

Or, en l’espèce, il ressort du dossier et des explications des prévenus que les avantages accordés, qui s’analysent effectivement au [mal comme une réduction de prix, n’étaient pas acquis à l’occasion de chaque achat dans la mesure où ils étaient conditionnels, variables dans leur montant et applicable rétroactivement à l’ensemble des achats effectués antérieurement.

Il apparaît donc que l’infraction reprochée n’est pas constituée et il convient de relaxer les prévenus de ce chef de prévention.

L’action civile

En l’absence de toute infraction, il convient de déclarer les parties civiles irrecevables. En tout état de cause, à supposer l’infraction à l’article L. 4113-6 du code de la santé publique caractérisée, les plaignants ne seraient dès lors plus victimes mais pourraient eux même faire l’objet de poursuites pénales."

RENSEIGNEMENTS :

M Y est né le […] à Aix-les-Bains (73).

De nationalité française, il est marié, père dc trois enfants et exerce la profession de président directeur général. Il est inscrit auprès de l’ordre des

chirurgiens-dentistes. Le bulletin n° 1 de son casier judiciaire ne mentionne aucune condamnation.

LA SAS GACOD a été immatriculée le 21 mars 2001 au registre du tribunal de commerce de Paris Son président est M Y. Son siège social est fixé 25, […]

Elle a pour objet social : l’achat, la vente, l’importation et la distribution de produits dentaires, appareils ct instruments dentaires en France ct à l’étranger. Le bulletin n° 1 du casier judiciaire de la société ne mentionne aucune condamnation.

LA SAS E a été immatriculée au registre du tribunal de commerce de Bobigny.

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Son président est M Y. Son siège social est fixé 2 B, chemin du Loup à Tremblay-en-France ([…]

Elle a pour objet social : l’achat, la vente, l’importation et la distribution de produits dentaires, appareils et instruments dentaires en France et à l’étranger. Le bulletin n° 1 du casier judiciaire de la société ne mentionne aucune

condamnation.

LA SAS F a été immatriculée au registre du tribunal de commerce de Bobigny.

Son président est M Y. Son siège social est fixé 2 B, chemin du Loup à Tremblay-en-France ([…]

Elle a pour objet social : l’achat, la vente, l’importation et la distribution de produits dentaires, appareils ct instruments dentaires en France et à l’étranger. Le bulletin n° 1 du casier judiciaire de la société ne mentionne aucune

condamnation. DEVANT LA COUR :

M Y, prévenu intimé, cité devant la cour par acte d’huissier de justice du 29 décembre 2016 délivré à étude, est présent, assisté de Me AI AJ, avocat au barreau de Paris. L’arrêt sera contradictoire à son encontre.

La SAS F, personne morale prévenuc intimée, citée devant la cour par acte d’huissier de justice du 8 novembre 2016, à personne habilitée, est représentée par son président M Y, et assistée de Me AI AJ, avocat au barreau de Paris. Il sera statué à son encontre par arrêt contradictoire.

La SAS GACD, personne morale prévenue intimée, citée devant la cour par acte d’huissier de justice du 29 décembre 2016, à personne habilitée, est représentée par son président M Y, et assistée de Me AI AJ, avocat au barreau de Paris. Il sera statué à son encontre par arrêt contradictoire.

La SAS E, personne morale prévenue intimée, citée devant la cour par acte d’huissier de justice du 8 novembre 2016, est représentée par son président M Y, et assistée de Me AI LEV Y, avocat au barreau de Paris. Il sera statué à son encontre par arrêt contradictoire,

Me AI AJ, conseil de M Y, la SAS F, la SAS

GACD et la SAS E, dépose des conclusions écrites, par

lesquelles il demande à la cour de :

« Vu l’article 6 du CESDH, l’article L. 450-2 du code de commerce,

Dire et juger que la SAS F n’a pas bénéficié des garanties minimales en

matière de droit de la défense,

Prononcer la nullité de la citation visant la SAS F, et partant, par ce seul

motif, sa relaxe.

AUFOND:

Vu les articles L.4113-6 et L.4163-2 du CSP, 111-4 et 121-3 du Code pénal et L.

441-3 du code de commerce, ch i 'av.

Confirmant le jugement entrepris

Donner acte de ce que les anesthésiques et les films radiologiques ne sont pas «

pris en charge par la sécurité sociail » comme l’indique la nomenclature générales

des actes profcssionnels; .

Dire et juger que les articles L.4113-6, et L.4163-2 du code de la santé publique,

interprétés tant à la lumière de la Directive 2001/83 que de de l’articic 111-4 du

code pénal, sont inapplicables aux Sociétés GACD et E qui

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ne commercialisent aucun produit pris en charge par les régimes obligatoires de la sécurité sociale; .

Subsidiairement et en toute hypothèse, infirmant le jugement sur ce point

Dire et juger que les offres des Sociétés GACD et AO 'AL ne sont pas des cadeaux mais des remises ou ristournes convertibles permettant d’acheter un produit ou demander remboursement;

Dire et juger que les seuls « gratuits » ont une valeur inférieure à celle admise par l’ordre des médecins,

Dire et juger que ces Sociétés n’ont pas consenti d'«avantage» prohibé sclon l’article L.4113-6 du code de la santé publiqu

Relaxer dés lors les Sociétés GACD et AK AL et Monsieur Y des chefs de la poursuite

Sur lc chef de facturation non conforme :

Confirmant le jugement entrepris

Dire et juger que le système de facturation intergroupes assorti d’un fichier informatique annexé aux factures de synthèse précisant la dénomination du produit, les quantités en cause et le PMPU, mis en place par la SAS F est en conformité avec l’article L. 441-3 du code de Commerce.

En conséquence, relaxer la SAS F et Monsieur Y des chefs de la poursuite,

Dire et juger que les réductions conditionnelles accordés par la SAS GACD n’ayant pas à figurer sur les factures tant qu’elles n’étaient pas acquises, il n’y a pas infraction à l’article L.441-3 du code de commerce

En conséquence, relaxer la SAS GACD et Monsieur Y des chefs de la

poursuite».

Après avoir notifié à M Y, en tant que personne physi prévenue ct en tant que représentant des sociétés GACD, PROMODENTAIRI: et F, prévenues, sitions de l’article 406 du code de procédure pénale aux termes duquel il est libre de faire une déclaration à la cour, de répondre à ses questions ou de sc taire, Gérard BURKEL, président a fait rapport.

M Y déclare un revenu annuel de 200.000 euros et précise que ses trois cnfants majeurs ne sont plus à sa charge.

Il conteste les infractions qui sont reprochées tant aux sociétés dont il est le représentant légal, lui-même. Il estime n’avoir commis aucune infraction à la loi anti-cadeaux, qu’il accorde des avantages aux chirurgiens-dentistes, qui donnent lieu selon le choix de ces derniers, à une réduction ou remise sur des commandes ultérieures, ou à la contrepartie en objects divers au choix de ses clients. S’agissant du séjour à New-York, il soutient avoir été victime d’un voyagiste, ct avoir remboursé ses clicnts qui n’avaient pas pu bénéficier de ce voyage d’un chèque d’indemnisation de 600 euros. Il affirme être victime des agissements d’une cinquantaine de chirurgicns-dentistes qui n’avaient pas accepté cette proposition d’indemnisation, que ses concurrents directs, notamment la société américaine SCHIIN, accordent également des avantages à leurs clients. Aussi, renoncer à cette politique commerciale, lui ferait perdre de nombreux marchés ct menacerait l’équilibre financier de son groupe.

La cour a ensuite entendu Mme G, inspecteur-expert à la DDPP dc Paris, ct M. H), également inspecteur à la DDPP de Paris, en qualité de témoins, après avoir reçu leur serment.

Mmc G s’est attachée à présenter les deux procédures contentieuses initiées par son administration à l’encontre des sociétés GACD et E pour manquement au dispositif de la loi anti-cadeaux.

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M. H s’est, quant à lui, attaché à présenter les manquements commis par le prévenu M Y et la SAS F ct relevé les infractions

aux règles de facturation.

Monsieur l’avocat général, après avoir repris les termes du rapport écrit du parquet de Paris du 10 novembre 2015, joint au dossier d’appel, requiert l’infirmation de la décision des premicrs juges et la condamnation des prévenus conformément aux réquisitions du ministère public lors de l’audience du tribunal. Il précise ne pas solliciter toutefois la peine complémentaire d’affichage du jugement.

Me AI AJ, conseil des prévenus, sollicite la relaxe des prévenus. Développant ses conclusions écrites, il expose notamment que la citation délivrée à la société F pour facturation est nulle aux motifs que cetic société n’a pas bénéficié des garanties minimales en matière de droit de la défense.

Et l’auxiliaire de justice d’exposer que les procédures diligentées par la DDPP de Paris, ne visent nullement la SAS F, qui n’a pas été davantage informée de l’existence d’une enquête à son encontre conformément aux disposition de l’article L.. 450-2 du code de commerce, ou du périmètre de cette cnquêtc. Dans ces conditions, cette société n’a pas bénéficié des garanties minimales en matière dc droit de la défense, et ce en violation de l’article 6 de la Convention des droits de l’homme.

— les sociétés SAS GACD et SAS E n’ont fourni aucun avantage illicite, affirmant que les prévenues, tant au regard de l’article L. 5122-10 alinéa 5 du code de la santé publique, ensemble l’article L.4113-6 du même code, interprété conformément à là directive 2001/83 qui requiert l’offre d’un avantage dans le cadre de la promotion d’un médicament, qu’au regard du principe d’interprétation stricte de la loi pénale, aucun produit pris en charge n’étant ni vendu ni fabriqué au sens de l’article L. 4113-6 du même code, qui ne fabriquent ni nc commercialisent aucun produit pris en charge par la sécurité sociale ct n’offrent aucun avantage dans le cadre de la promotion de médicaments. L’auxiliaire de justice affirme également que les prévenus n’ont consenti d’avantages à leurs clients dans le cadre de leur activité commerciales.

— tant la SAS GACD que la SAS F ont bien respecté les mentions obligatoires prévues par l’article L 441-3 du code de commerce.

Il demande, en co uence, à la cour de confirmer la décision de relaxe dont ont bénéficié ses clients de la part de la juridiction du premier degré.

M Y, qui a eu la parole en dernier, déclare ne rien avoir à ajouter.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré. Le président a annoncé que l’arrêt seraït rendu à l’audience du 29 mars 2017 à 13h30.

O UR : r ulpabili les poursuites engagées à l’e e de la socié

Considérant que le conseil de la société F conclut à la nullité des poursuites cngagées à l’encontre de sa cliente du chef de vente ou d’achat par une personne morale de produit ou prestation dc service pour une activité professionnelle sans facturation, et de la citation délivrée à cette dernière aux motifs que les procès-verbaux dressés par la direction départementale de la protection des populations de Paris, d’une part, le 13 novembre 2012, à l’encontre d’M Y et de la SAS GACD pour vente de produits ou de prestations de service pour une activité professionnelle sans facturation conforme,

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fourniture d’avantages à des bres d’une profession médicalc par une entreprise dont les produits sont pris en charge par la sécurité sociale, d’autre part, le 18 février 2014, à l’encontre de M Y et de la SAS E pour fourniture d’avantages à des bres d’une profession médicale par une entreprise dont les produits sont pris en charge par la sécurité sociale et achat de produits pour unc activité professionnelle sans facturation conforme, ne concernaïent pas la société F, et n’ont pas été notifiés à

cette dernière ;

Considérant qu’aucun acte de procédure n’a été effectué au siège social et dans les locaux de la société F, ni dirigé contre celle-ci par les agents de la DDPP de Paris ;

Considérant qu’il résulte des deux procédures des sociétés GACD et E, que AB AM, directeur administratif et financier du groupe GACD et Mme AA A, responsable dc la comptabilité client du groupe GACD, ont remis spontanément aux agents de la DDPP de Paris différentes pièces parmi lesquelles figurent des factures établies au nom des sociétés GACD et E par la société F, faisant ressortir, à l’encontre de cette dernière, des manquements aux règles de la facturation ;

Que dans l’exercice de son pouvoir d’opportunité des poursuites, le parquet, au vu de la procédure, des documents recueillis ainsi que de l’audition d’M AN, enregistrée par les services de police, a pu décider de l’exercice de poursuites également à l’encontre de la société F, du chef de vente ou achat par personne morale de produits ou prestation de service pour activité professionnelle sans facturation conforme ;

Considérant que la société F nc saurait sérieusement alléguer exercer les droits de la défense, alors que son président M ST également président des sociétés GACD et E a eu connaissance des pièces recucillies dans le cadre des procédures diligentées par la DDPP de Paris, ct a pu faire valoir, au cours de ses auditions tant devant la DDPP de Paris que devant les services de police, ses observations ;

Que d’ailleurs, M Y a remis aux fonctionnaires de la DDPP une note d’observations sur la procédure diligentée à son encontre et à l’encontre des sociétés GACD et E ;

Considérant encore, qu’avant les audiences tant du tribunal correctionnel que de la cour, M Y, en sa qualité de représentant légal de la société F, citée devant le tribunal pour vente ou achat, par personne morale, de produit ou prestation de service pour une activité professionnelle sans facturation conforme, a eu à nouveau la possibilité d’accéder à la procédure pour définir avec son avocat sa stratégie de défense ;

Considérant que les poursuites engagées par le parquet de Paris contre la société F du chef de facturation non conforme sont totalement régulières et ne justifie aucunement ni l’annulation des poursuites engagées à l’encontre de cette dernière, ni celle de la citation délivrée à cette fin, et encore moins, la mise hors de cause de la société F ;

r la non-conformité -6 du code de té jque et di Considérant que pour les sociétés GACD ct E, M

Y contestent l’extension de l’interdiction à l’ensemble des produits y compris aux produits non remboursables alors que les dispositions des articles 94

n’AVOir pu

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et 95 de la directive 2001/83/CE ne prohibait seulement que les avantages pour la commercialisation d’un médicament ;

Considérant qu’il convient de rappeler, préliminairement, la teneur des articles 94 et 95 de la directive 2001/83/CE :

Article 94 : "1. Dans le cadre de la promotion des médicaments auprès des personnes

habilitées à les prescrire ou à les délivrer, il est interdit d’octroyer, d’offrir ou de promettre à ces personnes une prime, un avantage pécuniaire ou un avantage en naturc à moins que ceux-ci ne soient de valeur négligeable et n’aient trait à l’exercice de la médecine ou de la pharmacie.

2. L’hospitalité offerte, lors de manifestations de promotion de médicaments, doit toujours être d’un niveau raisonnable et rester accessoire par rapport à l’objectif principal de la réunion; elle ne doit pas être étendue à des personnes autres que les

rofessionnels de la santé.

. Les personnes habilitées à prescrire ou à délivrer des médicaments ne peuvent solliciter ou accepter aucune des incitations interdites en vertu $ 1 ou contraires aux dispositions du 62.

4, Les mesures ou les pratiques commerciales existant dans des États membres en matière de prix, de marges et de remises ne sont pas affectées par les $1, 2 et 3".

Article 95 :

« Les dispositions de l’article 94, $1, ne font pas obstacle à l’hospitalité offerte, de manière directe ou indirecte, lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel et scientifique ; cette hospitalité doit toujours être d’un niveau raisonnable et rester accessoire par rapport à l’objectif scientifique principal de la réunion ; elle ne doit pas étre étendue à des personnes autres que les professionnels de la santé",

Considérant que selon le conseil des prévenus, l’article L. 4113-6 du code de la santé publique ne respecterait pas rigoureusement les dispositions de l’article 94 de la directive 2001/83/CE relative aux médicaments, dans la mesure où son dispositif serait plus strict que la transposition effectuée en droit national à l’article L. 5122-10 de ce même code, qui limite les interdictions aux promotions des médicaments effectuées auprès des personnes «habilitées à les prescrire ou à les délivrer», il en résulterait que la promotion d’un produit qui n’est pas défini comme un médicament nécessitant d’être prescrit ne serait pas interdite ;

Que l’auxiliaire de justice soutient encore :

— que l’article L 4113-6 du code de sa santé publique et la circulaire d’application de juillet 1993 qui interdit la fourniture d’avantages aux professionnels de santé par «les entreprises qui produisent ou commercialisent des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale» seraient obsolètes ct ne seraient pas conformes à Ja directive et au code communautaire relatif aux médicaments à e humain,

— que l’interdiction de la fourniture d’avantages devrait, du fait de l’obligation d’une harmonisation complète, être limitée à la promotion des seuls médicaments prescrits, la définition du médicament étant elle-même codifiée, l’interdiction de la fourniture d’avantages ne pouvant s’appliquer et donc s’élargir à la promotion de produits non définis comme des médicaments susceptibles de prescription,

— que l’interdiction des avantages s’appliquerait donc exclusivement aux médicaments, stricto sensu ;

Considérant qu’à la suite de diverses affaires ayant terni l’image des professions médicales : remise de cadcaux, organisation de congrès pseudo-scientifiques, attribution de remises sur l’achat de prothèses ou d’implants oculaires, ou encorc l'«achat de prescriptions», a été adoptée une loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 dite

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anti-cadeaux (ancien article L 365-1 du code de santé publique, devenu art L. 4113-6) pour veiller au maintien des principes de moralité, probité, indispensables à l’excrcicc des professions médicales ;

Quc cette loi a été votée en application d’une directive taire (Dir. Cons. CLE n° 92/28 du 31 mars 1992, JOCE 30 avril, 1992 concernant la publicité faite à l’égard des médicaments à usage humain) transcrite par la directive CE n° 200 1/83 du parlement et du conseil ;

Considérant que l’article L. 5122-10 du code de la santé publique (anciennement L 551-8) a, pour sa part, été créé par la loi © 94-43 du 18 janvier 1994 ;

Considérant que ces deux dispositions anciennes, prises en 1993 et 1994 ont été modifiées dans le sens d’un durcissement significatif ;

Considérant que contrairement aux affirmations de la défense, il n’existe pas de contradiction entre l’interdiction édictée par l’art 94 de la directive, reprise dans l’article L. 5122-10 du code de la santé publique et l’article L 4113-6 du même code, dans la mesure où leur champ d’application n’est pas identique, mais complémentaire ;

Qu’en effet, l’article 94 de la directive concerne la publicité des médicaments (intégrée dans la 5ème partie Produits de santé /Livre 1 et titre II médicaments à usage humain, chapitre Publicité) tandis que les dispositions de l’article L. 4113-6 du code de la santé publique concement l’ensemble des relations laboratoires/professionnels de santé (intégré dans la 4ème partie: Professions de Santé/ Livre 1 Professions médicalcs/ Chapitre III Règles communes d’exercice de la profession) ;

Considérant, par ailleurs, que le dispositif réglementant les relations entre les professionnels de santé et les entreprises phaï tiq rtcumulativement de ces deux textes : article L. 4113-6 (dispositions à caractère général) ct L. 5122-10 du code de la santé publique (dispositions spécifiques aux échantillons de médicaments) ; que ces deux dispositifs définissent les limites que l’industrie pharmaceutique ne peut franchir dans l’octroi d’avantages aux professionnels de santé ; qu’ils sont tous deux la transposition des articles 94, 95, 96 de ia directive 2001/83/CE dans des champs différents ;

Considérant, encore, que l’alinéa 1° de l’art 94 de la directive 2001/83/CE est transposé dans l’article L. 5122-10 du code de la santé publique qui prévoit dans son alinéa premier que des échantillons gratuits ne peuvent être remis aux prescripteurs et aux pharmaciens que sur leur demande ; que le dernier alinéa de ce même article prévoit que la promotion des médicaments auprès des personnes habilitées à les prescrire ou à fes délivrer ne peut plus prendre Ja forme «d’une prime, un avantage pécuniaire ou un avantagc en nature, à moins que ceux-ci ne soient de valeur négligeable et ne soient relatifs à l’exercice de la médecine ou de la pharmacie» ;

Que l’alinéa 2 de l’article 94 et l’article 95 de de la directive 2001/83/CE sont transposés dans l’article L. 4113-6 du code de la santé publique qui disposent que l’hospitalité doit être «strictement limitée à l’objectif principal de la manifestation pour des réunions à caractère professionnel ct scientifique», le législateur ayant conservé la notion d’hospitalité d’un «niveau raisonnable et restant accessoire», qui correspond à l’ancienne rédaction de la directive, qui a préféré dans sa dernière mouture la notion de «strictement limitée», ce qui est plus sévère ;

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Considérant qu’il apparaît, également, utile de rappeler que de nombreuses autres dispositions du codc de la santé publique français visent également à accroître l’impartialité des praticiens et la transparence des liens d’intérêts entre les professionnels de santé et les entreprises du secteur ;

Qu''ainsi l’article L.1453-1 du code de la santé publique prévoit la publication des conventions lucs avec les professionnels dc santé par les entreprises ainsi que tous les avantages en naturc ou en espèces ; que cette disposition, crééc par la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011, relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, est intégrée dans le titre relatif aux «règles déontologiques et expertise sanitaire» et dans le chapitre relatif aux «avantages consentis par les entreprises» ;

Que de même l’article L. 4113-8 du code la santé publique, anciennement article L.549, (créé par unc ordonnance n° 92-1070 du 1° octobre 1992) interdit aux praticicns «de recevoir, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, des intérêts ou ristournes proportionnels ou non au nombre des unités prescrites ou vendues, qu’il s’agisse de médicaments, d’apparcils orthopédiques ou autres, de quelque nature qu’ils soient», l’alinéa 2 de ce même article interdisant la création dc sociétés ayant le même but ;

Considérant que s’agissant de la nature des produits concernés, il ne s’agit pas uniquement des médicaments stricto sensu, mais aussi des dispositifs médicaux qui sont pris en charge par l’assurance maladie ;

Qu’en cffet les articles L. 165-1, L. 165-11 et L. 162-17 du code de la sécurité sociale précisent les conditions de prise en charge respectivement des dispositifs médicaux ct des médicaments couverts par l’assurance maladie ;

Qu’ après passage auprès de la Haute Autorité de Santé et du Comité Économique des Produits de santé, le ministère de la santé prend la décision de prise en charge et établit la liste des médicaments et dispositifs remboursables ;

Que les dispositifs médicaux inscrits sur la liste de remboursement définie à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale sont visés par les dispositions de l’article L. 4113-6 du code de la santé publique ;

Considérant que s’agissant de la nature des entreprises visées et le fait que le . Critère déterminant pour rendre les dispositions de la loi anti-cadeaux applicable soit celui de la «prise en charge par les régimes obligatoires de la sécurité sociale» d’un produit ou d’un service dans le portefeuille de l’entreprise, il importe peu que l’entreprise commercialise un seul produit ou un seul service remboursable par la sécurité sociale ; que la raison en est qu’il faut éviter qu’unc entreprise, dont le portefeuille contient à la fois des produits remboursés ct des produits non remboursés, accorde des avantages en rapport avec des produits ou services non remboursés en vue d’inciter les professionnels de santé à prescrire des produits ou services remboursés ; Que le dispositif de la «loi anti-cadeaux» assure que les professionnels de santé, dans le choix qu’ils font d’un médicament, d’un matériel ou d’unc prestation pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, ne soicnt guidés que par des considérations d’ordre exclusivement médical ; Que ce principe éthique est exprimé dcpuis longtemps dans les codes de déontologie ;

Considérant que la différence de traitement opéré par le législateur cntre les entreprises suivant qu’elles commercialisent ou non un produit remboursable, différence qui n’existe plus à la suite de l’ordonnance n° 2017-49 du 19 janvier 2017 relative aux avantages offerts par Iles personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé qui a étendu le champ des cntreprises concernées par l’interdiction d’offrir des avantages aux professionnels de la santé, prévue à l’article I. 4113-6 du code de la santé publique, était justifiée, en son temps, pour préserver l’indépendance des

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professions médicales dans leur relations avec ces entreprises et gérer le risque selon la nature des produits en cause aux fins de modifier ces relations maïs également d’impacter celles relatives à des produits remboursables ;

Considérant, enfin et à titre subsidiaire, que les directives européennes, contrairement aux règlements, ne sont pas directement applicables en droit national, leur transposition ressort du pouvoir législatif ;

Considérant ainsi que les dispositions des articles L.4113-6 et L. 5122-10 du code de la santé publique ne sont ni contraires ni largement dépassées par les directives 92/28/CÉE puis 2001/83/CEE ;

Sur les infractions à la la anti-cadeaux reprochées à M Y, à la SAS GACD et à la SAS E

Considérant qu’aux termes des citations délivrées à M Y, les sociétés GACD ct E, il leur est reproché d’avoir fourni des avantages à des membres d’une profession médicale, des chirurgiens-dentistes, par une entreprise dont les produits sont pris en charge par la sécurité sociale, en l’espèce, pour avoir à Paris, dans les régions Rhône-Alpes, Lorraine, Aquitaine et Alsace, durant les années 2009, 2010 et 2011 (et jusqu’en octobre 2013 pour M Y et la société E), en tout cas sur le territoire national ct depuis temps non couvert par la prescription, étant gérant d’une entreprise assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, proposé ou procuré à un chirurgien-dentiste des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou directe, en l’espèce, notamment cn proposant divers avantages directs au chirurgien-dentiste client de GACD, notamment dans le cadre d’une opération leur ayant permis de gagner des séjours à New-York contre des commandes de faible montant, par l’insertion dans les facturations de nombreux cadeaux gratuits ou faiblement payants de type matériel Hifi, par l’octroi de produits gratuits aux assistants dentaires ou aux conjoints des chirurgiens-dentistes, consistant ainsi en des avantages indirects pour ces derniers, et par la création d’ «un programme privilèges» pour les clients leur offrant de nombreux cadeaux ;

Considérant, d’une part, que l’extrait du grand livre de la société GACD permet de quantificr les rabais, remises ct ristournes accordés lesquels s’élèvent au cours de l’année 2010 à 4.435.275, 97 euros, au cours de l’année 2011 à 4.559.966,17 euros, soit une hausse de 124.690, 20 euros ;

Considérant, d’autre part, que l’extrait du grand livre de la société E permet de quantifier les rabais, remises et ristournes accordés lesquels s’élèvent au cours de l’année 2010 à 923.837 euros, au cours de l’année 2011 à 899.682 euros et au cours de l’année 2012 à 1.077.397 euros, soit une progression significative de 153.560 euros entre 2010 et 2012 ;

Considérant que s’agissant des principes, toutes les professions médicales, parmi lesquels figurent les chirurgiens dentistes, sont soumises à l’interdiction générale édictée par l’article L. 4113-6 du code de la santé publique «de recevoir des avantages en naturc ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’unc façon directe ou indirecte, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par Îles régimes obligatoires de sécurité sociale» et qu’il est, par ailleurs, interdit aux entreprises de proposer ou procurer des avantages, l’objectif de la législation anti-cadeaux étant de garantir que les professionnels de la santé soient exclusivement guidés

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par des considérations médicales dans leur choix de médicaments, matériels ou prestations et ce, dans un objectif de maîtrise des coûts de santé ;

Considérant que l’article L.4113-8 du code de la santé publique interdit aux praticiens, parmi lesquels figurent les chirurgiens dentistes, de «recevoir, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, des intérêts ou ristournes proportionnels ou non au nombre des unités prescrites ou vendues, qu’il 8 'egissc c de médicaments, d’appareils orthopédiques ou autres, de quelque nature qu’ils soient »»;

Considérant que s’agissant des modalités d’application, les avantages qui ne peuvent être perçus de manière «directe ou indirecte» ainsi que la notion d’avantages «en nature ou en espèces» s’entendent de façon large, recouvrant notamment les cadeaux divers ou libéralités, prise en charge de frais ou de voyages, mise à disposition gratuite de matériel, avantages en numéraire, remises ou ristournes sur l’achat de matériel ;

Que l’ d tdeces t associe, par ailleurs, les ordres professionnels, notamment ceux des médecins, s, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes, ceux-ci devant s’assurer du caractère raisonnable, justifié et accessoire de l’avantage consenti, les modalités de transmission des projets de entre les membres des professions médicales et les entreprises, mentionnées à l’article L. 4113-6 du code de la santé publique, étant fixées par les articles R. 4113-104 à R. 4113-108 du même code ;

Considérant encore que l’article L.5122-10, dernier alinéa, du code de la santé publique dispose que «dans le cadre de la promotion des médicaments auprès des personnes habilitées à les prescrire ou à les délivrer, il est interdit d’octroyer, d’offrir ou de promettre à ces personnes une prime, un avantage pécuniaire ou un avantage en nature, à moins que ceux-ci soicnt de valeur négligeable» ;

Considérant enfin que l’article L. 1453-1 du code de le s santé publique et le décret n°2013414 du 21 mai 2013, relatifs à la transp tages accordés par les entreprises produisant ou commercialisant des produits à finalité sanitaire destinés à l’homme, prévoient la publication par les entreprises des conventions conclues entre les professionnels de santé et les entreprises ainsi que tous les avantages cn nature ou en cspèces qu’elles leur procurent directement ou indirectement ; que l’obligation de rendre publics les avantages consentis par les entreprises est fixée À un montant égal ou supérieur à 10 curos TTC,étant précisé que cette obligation ne s’applique pas aux conventions régies par les dispositions des articles L 441-3 et L. 441-7 du code de commerce, (relatives à la

LE tion conforme et co tion écrite) qui ont pour objet l’achat

transparen de biens ou de services entre ces mêmes entreprises et ces personnes ;

Considérant que la direction générale de la concurrence, de la consommation et dce la répression des fraudes (DGCCRE) a été saisie par le commissaire aux comptes de la société GACD, lui-même saisi par l’association française des fournisseurs d’orthodontie sur les offres continues de cadeaux d’importance significative susceptibles d’enfreindre les dispositions du code de la santé publique, et notamment en son article I.. 4113-6 ;

Qu’il était notamment produit à cette occasion des publicités de « séjour à New-York pour 2 » (Vol Air et 3 nuit d’hôtel) offert par la société GACD pour toute commande de matéricl dentaire supérieure à 2000 euros passée avant le 31 décembre 2010 ;

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Que la DDPP de Paris devait également être destinataire de nombreuses plaintes de chirurgiens-dentistes en raison de la non-réalisation de voyage alors même que ceux-ci avaient acquis pour plus de 2 000 euros de produits dentaires, conformément à l’annonce de la société GACD ;

Considérant que les investigations menées à la suite de ce signalement et plaintes reçues par la DDPP de Paris mettaient en lumière les agissements des sociétés GACD et E, sociétés censées être rentes, et de la société F, centrale d’achat du groupe, les trois sociétés étant dirigées par la même personne : M Y, titulaire du diplôme de chirurgien-dentiste, n’excrçant plus en cette qualité, tout en restant inscrit à l’ordre des chirurgiens-dentistes ;

Considérant que les sociétés GACD et E ont pour objet social la fourniture de matériel et de consommables dentaires, et commercialisent leurs produits par correspondance à destination de 18.000 chirurgiens-dentistes, la moitié de l’effectif français des chirurgiens-dentistes étant clients de la société GACD ;

Considérant que la société GACD a été dépositaire pharmaceutique Ie 27 septembre 2007, autorisation transférée le 2 décembre 2009 à la société F, sa filiale à 100 % pour les produits anesthésiques, dont deux sont soumis à une autorisation de mise sur le marché ;

Considérant que la société GACD) est une entreprise très performante, dont le chiffre d’affaires s’élève à 70 millions d’euros en 2011, chiffre en progression

constante ; Considérant que la société E est de dimension plus modeste ;

Considérant que la société F est la centrale d’achat commune à tout le groupe GACD ;

Considérant que les sociétés GACD et PRIOMODENTAIRE diffusent chacune un cataloguc (uniquement informatique pour E) regroupant l’ensemble des matériels nécessaires à l’exercice de l’art dentaire ;

Considérant qu’il convient de distingucr deux catégories de produits :

— d’une part, les accessoires et outils permettant la réalisation des soins (matériel à empreintes, hygiène et stérilisation, ustensiles à usage unique, prévention et esthétique, fraises et polissage, endodontie, et plus généralement tous les instruments chirurgicaux)

— d’autre part, les produits composant directement le soin (amalgames, anesthésiant, ciments, pansements etc) ;

Que les premiers font partic de l’équipement du cabinet, les seconds, individualisables par patient, sont partic intégrante du soin ct sont donc pris en

charge par l’assurance maladie lorsque le soin est remboursé ;

Considérant que les sociétés GACD ct E commercialisent ainsi des produits pris en charge par le régime obligatoire de la sécurité sociale, ce qui ne conduit pas du tout à cstimer que sont concernés « l’ensemble des produits de toute nature utilisés par le praticien dès lors qu’ils sont intégrés dans lc calcul des coûts» comme l’a retenu Îe jugement de première instance ;

Considérant que les politiques commerciales des sociétés GACD et

E sont organisées autour d’un système de fidélisation de la clientèle par la remise de cadeaux ;

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Considérant que 8 000 praticiens sont adhérents du programme Privilèges ; que ce système permet lors de chaque achat, de collecter des points, appelés « couronnes » qui sont convertibles cn euros et qui peuvent être échangécs en produits proposés sur un book (consoles de jeux, appareil électroménager, montres, bijoux …) ;

Que par exemple pour 3000 euros d’achats cumulés, grâce au système de fidélisation mis en place, il est possible pour le praticien de recevoir un réfrigérateur ;

Que le séjour à New-York de 2010 pour 1200 praticiens, qui n’aura pas lieu, du fait de la défcction du prestataire étranger chargé d’organiser le voyage, sera dédommagé au cours de l’année 2011 par la remise de chèques ou des coffrets cadeaux d’unc valeur de 600 euros ;

Considérant enfin que la société GACD dispose d’un compte-cadeaux de plus de 600. 000 euros en 201 1 qui intègre outre des cadeaux individualisés d’hospitalités, le « dédommagement» relatif au voyage à New-York ;

Considérant, et ainsi que Ic rappelle lc tribunal dans sa motivation, pour que la législation anti-cadcaux soit applicable et que l’élément matériel de l’infraction soit caractérisé, il convient de réunir trois conditions cumulatives :

— l’avantage ou le bien ne présente pas une valeur négligeable,

— la pratique excède le cadre des relations normales de travail,

— [es entreprises incriminées «soient considérées comme assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par des régimes obligatoires de sécurité sociale";

Considérant que lc voyage à New-York qui n’est pas un produit vendu par l’entreprise GACD, laquelle n’a pas de licence d’agence de voyage, l’erratum publié incluant cette offre dans lc Programme Privilèges avec comme but officiel de

«favoriser la participation à un congrès professionnel aux États Unis», n’est qu’un artifice pour dissimulcr le fait qu’il s’agissait bien d’un cadeau lié au volume d’achat (2000 curos) ;

Considérant que la consultation du catalogue Privilèges sur la période de la prévention démontre que les articles proposés ne sont pas de petits articles de valeur négligeable ;

Considérant que le budget consacré par la société GACD à l’achat de ces divers avantages est très important, M Y reconnaissant lui-même dans son audition du 25 février 2013 «plusieurs millions d’euros chaque année. Il s’agit pour l’année dernière de deux millions d’euro», déclaration confirmée devant la cour ;

Considérant que ces avantages représentent un montant globalisé très important : – 262.992,84 euros au titre du compte cadeaux en 2010 et 646.239,84 curos cn 2011, -4.435.275,97 euros au titre du compte «rabais, remises et ristournes» pour l’année 2010, dont :

* achats chez DARTY : 991.639,94 euros,

* achats auprès de la FNAC : 244.653,49 euros,

* achats chez CHÂTEAUX ET HÔTELS: 16.930,94 euros,

* achats chez LIBERTY GIFT : 84.844,39 euros,

ct 4.559.966,17 euros pour 2011 ;

Que les «avoirs à établir» ct remises de fin d’année non encore utilisées représentent un montant de 2.000.394 euros ;

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Considérant que la consultation du barème de conversion entre les couronnes et les avoirs « cagnottés » montre que l’ouverture du droit s’opère à 60 euros et que le palier maximal est de 2 800 euros ;

Que les différents avoirs « cagnottés » peuvent cependant se cumuler et qu’ainsi la montre homme Timewalker Montblanc est proposée à un montant de 3 390 euros dans le catalogue Privilèges 2011 ;

Considérant que Ic budget consacré par la société E à ces divers avantages est important ;

Que les montants des ristournes, rabais et remises (RRR) accordés par la société E se sont élevés à :

—  924.796,13 euros en 2010,

—  899.682,13 euros en 2011,

—  1.072.009,49 euros en 2012 ;

Considérant ainsi que les avantages ou biens remis aux chirurgiens-dentistes, comme à leur personnel, ne représentent pas une valeur négligeable et ne sont pas proposés pour une finalité d’utilisation dans le cabinet dentaire, mais pour la satisfaction personnelle du praticien ou de ses proches ;

Considérant, et ainsi que le rappelle le tribunal, les avantages accordés par les fournisseurs (sociétés GACD et AO AL) à l’initiative de M Y, président des deux SAS, ne ressortent pas de relation normale de travail, mais s’inscrivent purement et simplement dans le cadre d’une relation

commerciale ;

Considérant, enfin, que les entreprises ont contesté devant le tribunal l’application du dispositif de la loi anti-cadeaux au motif qu’elles nc commercialisent aucun produit pris en charge par l’assurance maladic et ont été suivies dans leur argumentaire par le tribunal ; '

Considérant d’abord, qu’il est observé que les conditions générales de vente de la société GACD intégrées dans son cataloguc général mentionnent au point «cadeaux» : Œn vertu de l’article L. 365-1 du code de la santé publique, il est interdit aux chirurgiens-dentistes de recevoir des cadeaux sur des produits remboursés par la sécurité sociale. De ce fait, le film radiologie ainsi que les produits d’anesthésie et leurs chiffres d’affaires ne donnent lieu à aucun cadeau» ;

Que malgré ces réserves inscrites dans ses propres conditions générales de vente, la société conteste la prise en charge par l’assurance maladie des anesthésiques et des films radiologiques qu’elle commercialise ;

si LL. Snlaz 1 eont d LA: 4

Considérant que les ] , lesq soumis à autorisation de mise sur Je marché, entrent bien dans les forfaits d’actes

pris cn charge par l’assurance maladie (exemples : extraction dentaire et plombage), même s’ils n’apparaissent pas individuellement dans la liste de l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale : qu’il s’agit de médicaments nécessitant la présence d’un pharmacien dans les effectifs de la société ainsi qu’un statut de dépositaire pharmaceutique ; qu’en outre, les actes d’anesthésie peuvent donner lieu depuis le 31 juillet 2012 à des cotations spécifiques d’un montant de 36 curos (acte LBGA007 ablation d’implants, si agénésic dentaires multiples liées à une maladic rare) le montant étant variable en fonction du nombre d’implants (57,51 à 125,40 euros) ;

Considérant, par ailleurs, dans le cadre de l’ablation d’implants, le dentiste établit une cotation spécifique pour l’acte d’anesthésic et utilise un médicament, dont il

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peut assurer la traçabilité ; que ces cotations spécifiques ressortent de l’avenant n° 2 de la convention nationale publié au Journal Officicl du 31 juillet 2012, étant rappclé que la période d’incrimination court jusqu’en octobre 2013 pour la société E ;

Considérant que suivant la nomenclature des actes professionnels, les actes de radiodiagnostic doivent être matérialisés par un document accompagné d’un compte-rendu ;

Que les films radiologiques sont des dispositifs médicaux enregistrés par l’ Agence Nationale de Sécurité du médicament (ANSM) et sont pris en charge dans le cadre de l’acte global dc radiodiagnostic ; qu’en cas de numérisation, la nomenclature admet la possibilité d’un supplément éventuel ;

Qu’il s’ensuit que la nomenclature tient compte du type de support utilisé, autorisant un supplément en cas de numérisation ; que ladite nomenclature fait d’ailleurs état pour les actes de prévention dentaire de rémunération forfaitaire de l’examen et des radiographies avec une facturation à 42 euros pour l’examen avec 1 ou 2 clichés et 54 euros pour 3 oui 4 clichés (cf. avenant n° 2 de la convention nationale publié au JO du 31juillet /2012) ;

Considérant, encorc, que le soin prothétique qui donne lieu à une prise en charge forfaitaire par l’assurance maladie doit, en vertu des dispositions de l’article L. 1111-3 du code de la santé publique ct de la convention dentaire (avenants n° 2 ct 3), décomposer le prix global de l’acte prothétique pratiqué par le chirurgien-dentiste entre le prix d’achat de la prothè gmenté de quelq is de structure ct les honoraires du praticien, la prothèse n’étant pas prise en charge de manière isolée par l’assurance maladie, mais dans la globalité de l’acte dentaire (prise d’emprointe, fabrication de la prothèse conformes aux exigences essentielles avec lc détail des produits utilisés, pose ct ajustement en bouche) ;

Considérant qu’il ne peut y avoir de soins d’obturation sans amalgames dentaires,

de soins prothétiques sans poudre à empreinte ct sans ciment pour fixer la

prothèse, de cotation d’actes d’anesthésic sans produits anesthésiques ;

Que tous ces produits sont présents dans les catalogues des sociétés GACD et

E ;

Que tous ces produits indispensables sont pris en charge dans le cadre du forfait c soins ;

Qu’indépendamment du fait de la logique de l’incorporation, l’existence d’un seul

produit pris en charge suffit ;

Qu’en tout état de cause, est viséc par les dispositions de l’article I.. 4113-6 du

code de la santé publique, toutc entreprise assurant une prestation ou

commercialisant un produit pris en charge par la sécurité sociale ;

Considérant que le remboursement ne s’effectue pas sur la seule base de la liste de l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, mais de fait par la nécessité d’utiliser ces produits pour pouvoir réaliser l’acte dentaire donnant lieu à une prise en charge par l’assurance-maladie ;

Considérant que l’extraction dentaire ou le plombage sont des soins conservateurs aux larifs encadrés, qui ne peuvent donner lieu à aucun dépassement d’honoraires ; Que ces actes donnent lieu à des facturations d’actes de soins remboursables qui comprennent à la fois la prestation du chirurgien dentiste et les produits inhérents aux soins dentaires ;

Considérant que le chirurgien-dentiste, sauf dans le cas où il prescrit un médicament, nc commercialise jamais directement de produits remboursables mais prodigue des soins associant prestations de soin et produits ;

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Qu’ainsi lorsque cctte prestation est prise en charge par le régime obligatoire de l’assurance maladie, les produits incorporés à la prestation sont remboursés au même titre que le service dentaire ;

Qu’à défaut, le secteur dentaire serait le seul secteur médical auquel le dispositif anti-cadeaux ne serait pas applicable ;

Considérant encore ct ainsi que l’a rappclé Mme N G, inspcctricc-cxpert de la DDPP de Paris, information non contestée par M Y, présent lors de l’audience de la cour, que la base publique de données transp santé Itéc montre que l’entreprise GACD n’a opéré qu’une seule déclaration pour unc hospitalité de 30 euros le 26 mars 2013; Que de même les multiples cadeaux offerts par les sociétés GACD et E n’ont jamais été précédés de lat ission des entions à l’Ordre des chirurgiens-dentistes, lequel n’a pas plus été consulté pour les opérations d’hospitalité (voyages à New-York et autres cadcaux de même nature)

alors qu’il s’agit d’une procédure obligatoire ;

Considérant que si M Y conteste sa volonté de contourner la loi anti-cadeaux et affirme simplement s’aligner sur la concurrence, les différents écrits et déclarations de celui-ci figurant en procédure démontrent sa parfaite connaissance de la réglementation applicable en la matière ;

Considérant, en effet, que le commissaire aux comptes, lui-même saisi par une association d’orthodontic dénonçant le non-respect des dispositions de la loi anti-cadeaux par les cntreprises GACD et E a interrogé M S’TEMMER, président des deux structures, sur les faits dénoncés avant de transmettre Ic dossier au parquet de Paris ;

Que la réponse apportée par M Y au cabinet du commissaire aux comptes, en date du 31 janvier 2011, indique, d’une part, qu’il a cessé toute offre de cadeau aux praticiens depuis le 1° janvier 2007, suite à la prise de position du conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes, affirmant que depuis cette date, la société n’offre plus de cadeaux et arguant que «son système de Programme Privilèges nc peut s’assimiler à un avantage prohibé au sens de l’article L 4113-6 du code de la santé publique» ;

Considérant que M Y fournit également un courrier du 6 décembre 2006, adressé à son concurrent AE sur les pratiques de sa filiale Mega-Dental au regard de l’article L. 4113-6 du code de la santé publique, dans lequel il évoque «la récente prise de position du Conseil National de l’Ordre des Chirurgiens-dentistes – dont on peut douter de la pertinence sur le plan juridique – concernant la loi anti-cadcaux», ce qui illustre sa parfaite connaissance des dispositions réglementaires et sa volonté de ne pas obéir aux recommandations de l’Ordre des chirurgiens dentistes, auquel il est inscrit ;

Considérant, également, qu’entendu le 28 février 2013 par les services de police sur le dossier contentieux GACD, à la question : «Ne trouvez-vous pas que votre pratique commerciale ne vise qu’à inciter les chirurgiens à être vos clients sur la base des nombreux avantages fournis (programme privilèges, cadeaux assistantes, système de promotion par le best-off et les offres festival) ?» M Y répond sans ambiguïté : «Oui car Ie marché l’exige et que je suis en concurrence avec des gens qui ont la même pratique » ;

Considérant qu’il s’évince de |' ble de ces éléments que M Y

a entendu contourner la loi anti-cadeaux :

Considérant encore que contrairement à ce qu’allègue M Y,, les produits du cataloguc Promofidélité constituent des cadeaux, car, d’une part ces

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produits (vins, média, coffrets-cad , quincric, GPS ….) sont intégralement payés auprès des fournisseurs par Ja société PROMODENTAIRI: par le biais de sa centrale d’achat F, d’autre part le dentiste n’opère aucun débours financier cffectif puisque les ristournes accumulées sont portées au débit du compte Rabaïs Remises ct Ristournes, puis au crédit du chirurgicn-dentise ;

Que par ailleurs les seuls débours financiers sont exposés par la société E à la fois pour régler les fournisseurs et pour financer les avoirs RFA qui créditent le compte des chirurgiens-dentistes, l’achat du chirurgien-dentiste restant formel et cet habillage par le biais d’une facturation permettant de dissimuler le manquement à la loi anti-cadeaux ;

Considérant que lors de l’audience de la cour, M Y a indiqué ct plaidé que chaque chirurgien-dentiste disposait après achat de matériel après des sociétés GACD et E d’une remise qu’il pouvait transformer en cadeaux, réduction sur prochaine facture, ou encore conserver comme avoir ;

Considérant, par ailleurs, que les produits du catalogue Promofidélité ne sont pas, contrairement à cc qu’allèguent M Y ct son conseil, des produits utilisables dans le cabinct dentaire, «de valeur négligeable et destinés aux assistantes et aux prothésistes comme cadeaux de fin d’année» ;

Considérant, en effet, que même si certains produits pourraient être utilisés pour le cabinet (téléviseur pour la salle d’attente par exemple), ce n’est pas le cas de la majeure partic d’entre eux ;

Considérant encore que les produits du catalogue Promofidélité, du catalogue assistante et des diverses offres de lots promotionnels ne sont pas proposés pour uncC finalité d’utilisation dans le cabinet dentaire, mais pour la satisfaction personnelle du praticien ou de ses proches (cave à vins, GPS, jeu pour enfants, montres, bijoux, maroquinerie, coffrets-cadeaux … } ;

Que le prévenu ne saurait sérieusement affirmer que «les vins et les montres sont des cadeaux de fin d’année que le dentiste donne à son assistante ou au

prothésiste» ;

Que d’ailleurs, aucun élément, document écrit ne vient du reste conforter cette affirmation, et que bien au contraire, il sera observé l’existence d’un catalogue spécifique pour les assistantes ;

Qu’en toutes hypothèses, cette justification n’est pas recevable, puisque les avantages sont interdits de manière directe ou indirecte ;

Considérant encore que la notion de « valeur négligeable » des cadeaux ne saurait être retenue ;

Que l’examen du palier d’ouverture à 35 euros est loin du seuil toléré par l’Ordre pour les petits cadcaux qui s’élève à 30 curos annuel, cadeaux qui doivent rester en rapport avec l’excrcice de la médecine ;

Considérant, en effet, que pour la société GACD), le seuil est fixé à 60 euros ;

Considérant, par ailleurs, que le budget consacré par la société PROMODENTAIRI: à ces divers avantages est important ; qu’en effet, les constatations du procès-verbal d’incrimination montrent que les comptes rabais ct remises (RRR) octroyées qui correspondent à la gestion des RFA sont élevés ;

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(

Que notamment au débit des RRR apparaissent la totalité du programme Promofidélité, c’est-à-dire les montants ci-après :

—  924.796,13 euros en 2010,

—  899 682,13 euros en 2011,

—  1.072.009,49 euros en 2012 ;

Considérant que le système pratiqué correspond à la pratique habituelle des cartes de fidélité (choix entre un cadcau et une remise) qui sont autorisées entre le consommateur et les professionnels, mais interdites aux professionnels de santé du fait du dispositif de la loi anti-cadeaux ;

Considérant que s’agissant des ventes par lots dentaires avec cadeaux qui peuvent être obtenus non seulement par le catalogue Promofidélité, mais également par le biais de « ventes de lots dentaires associés à des cadeaux non dentaires», comme une chaîne hi-fi, tablette IPAD, champagne, GPS, vélo de ville, barbecue, tireusc à bière, sac C, que l’intérêt de l’achat par lot par rapport à l’achat à l’unité d’un produit dentaire réside essentiellement dans l’obtention du cadeau ; Que la composition même du lot (produit dentaire associé à des produits non dentaires) n’est pas conforme à la réglementation anti-cadeaux en vigueur (interdiction pour une entreprise de proposer ou procurer des avantages) ; que le système pratiqué est donc contraire à la législation en vigueur ;

Considérant que s’agissant des gratuits, l’examen des factures d’achat des produits dentaires par les chirurgiens-dentistes montre des cadeaux sur quasiment toutes les factures ;

Que la fréquence de ces gratuits et les montants concernés

largement les 30 curos annuels recommandés par l’Ordre des chirurgiens dentistes, auquel M Y est inscrit ;

Considérant que toute la politique commerciale de l’entreprise E tourne autour de la remise de cadeaux et d’avantages : (programme Promofidélité, cadeaux assistantes, ventes par lots et système de primes auto-payantes, gratuits, plus que sur les diminutions de prix par remises à la ligne sur produits ;

Que l’examen matériel des faits, la qualification professionnelle de M Y , la parfaite connaissance de l’interdiction en vigueur édictée par la loi anti-cadcaux promulguée en 1993 et étendue aux entreprises en 2002, montrent, sans contestat é ibles, que l’élément matériel ct moral du délit sont réunis, la progression sensible du chiffre d’affaires établissant le profit tiré du comportement délictueux adopté ;

Considérant que les comptes-cadeaux réservés exclusivement aux praticiens, s’élèvent à :

—  74.415,71 euros en 2010,

—  93, 067,47 euros en 2011,

—  65.900,93 euros en 2012 ;

Considérant sur ce point, des cadeaux d’hospitalité d’un niveau important, sont prévus sans saisine préalable du Conseil National de l’Ordre (alinéa 3 de l’article L.. 4113-6 du code de la santé publique), «l’hospitalité offerte doit être d’un niveau raisonnable, rester accessoire ct nc pas être étendue à des personnes autres que les professionnels directement concernés» ;

Considérant, en outre, qu’un voyage ct un séjour à Pointe-à-Pitre offerts pour un

praticien métropolitain ct sa famille contreviennent à la loi anti-cadeaux, qui prohibe la pratique d’accompagnement ;

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Considérant, enfin, qu’une «une convention doit obligatoirement être transmise aux Ordres» concernés «par l’entreprise», pour les «activités de recherche ou d’évaluation scicntifique» (alinéa 2 de l’article I. 4113-6 du code de la santé publique) et pour les «manifestations de promotion ou lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel et scientifique» (alinéa 3 de l’article L, 4113-6 du même code) ;

Considérant que la société E n’a pas effectué la démarche prévue par la réglementation en vigueur pour les «manifestations de promotion» (art L. 4113-6 du code de la santé publique et R. 4113-104 à R. 4113-10 du même code dans leur version issue du décret n° 2007-454 du 25 mars 2007) ;

Considérant s’agissant de la présence dans le catalogue de la société

AO AL de produits donnant directement lieu à une prise en charge

par l’assurance maladie, que M Y a reconnu que le cataloguc de

produits dentaires comportait quelques produits pris en charge par l’assurance

maladie, ct notamment de celle de films radiologiques ct d’anesthésiques entaires ;

Que le critère déterminant l’application de l’article L .4113-6 du code de la santé publique est celui de «la prise en charge par les régimes obligatoires de la sécurité sociale» ; qu’il importe peu que cc produit ou ce service ne représente qu’une infime portion du chiffre d’affaires réalisé ; que la société E entre donc dans le champ d’application de l’article susvisé ;

Que le fait que les films radiologiques et d’anesthésiques ne représentent qu’une faible partie de son chiffre d’affaires, ne l’exonère pas pour autant du respect des interdictions prévues à l’article susvisé ;

Considérant, par ailleurs, que si les amalgarnes et les prothèses dentaires ne sont pas directement remboursés par la sécurité sociale, ils le sont néanmoins via la prise en charge de la prestation du chirurgicn-dentiste ; qu’ainsi, les obturations ne peuvent être réalisées sans amalgame, les traitements prothétiques sans prothèse et ciment ; que ces actes remboursés ne pourraient être réalisés sans l’incorporation, l’emploi ou la consommation de produits de santé spécifiques, voire même l’utilisation de matériels spécifiques ;

Que par suite, les dispositions de l’article L. 41 13-6 du code de la santé publique sont également applicables aux entreprises qui fabriquent et/ou commercialisent des produits qui ne sont pas remboursés directement par la sécurité sociale mais qui sont utilisés pour la réalisation de prestations prises en charge par la sécurité socialc ;

Considérant, par ailleurs, que la cour observe l’existence d’un risque de distorsion de concurrence au détriment d’opérateurs ne pratiquant pas la politique de cadeau ; que celle-ci étant, en effet, très coûteuse et ne pouvant être ainsi pratiquée que par les plus puissants du marché, le non- respect de la loi anti-cadcaux constitue une barrière à l’accès pour les nouveaux entrants potentiels ;

Considérant que lors de l’audience de la cour, M Y a indiqué et plaidé que chaque chirurgicen-dentiste disposait après achat de matériel après des sociétés GACD et E d’une remise qu’il pouvait transformer en cadeaux, réduction sur prochaine facture, ou encore conserver comme avoir ;

Que le choix pour le chirurgien-dentiste de choisir des cadeaux était un choix personnel de ce dernier et ne caractérise pas l’élément matériel de l’infraction prévue et réprimée par les articles L. 4113-6, L.4113-8 et 4163-2 du code de la

santé publique ;

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Considérant, cependant, que la différence majeure entre un cadeau et la remise réside essentiellement en son bénéficiaire ;

Que la remise, quel que soit par ailleurs son mode de calcul, constitue un avantage commercial accordé au cabinet dentaire ct vient en réduction immédiate ou différée du prix d’achat mentionné sur le tarif ;

Que par contre, le cadeau n’a pas cette fonction e1 s’adresse uniquement à la personne physique (le praticien, l’assistante dentaire) et n’a aucune incidence sur les comptes de la structure professionnelle de l’acheteur ;

Qu’ainsi, alors que les différents avantages commerciaux (remises, ristournes, avoirs …) profitent à la comptabilité de la structure professionnelle en abaïssant les coûts d’équipement et de fonctionnement et sont licites lorsqu’ils sont appliqués conformément aux dispositions du code de commerce (transparence et facturation notamment) et du code de la santé publique (les remises et ristournes ne sont pas libres sur ic marché du médicament), les cadeaux tels que le cadeau écran LED (page 31 du cataloguc Promofidélité édition 2010) d’une valeur de 4 400 euros, piscine hors sol (page 41 du catalogue Promofidélité édition 2010) d’unc valeur de 6 600 euros, réfrigérateur multi-média (page 57 du cataloguc Promofidélité édition 2010) d’une valeur de 2 640 euros, montre homme Tagheuer (page 65 du catalogue Promofidélité édition 2010) d’unc valeur de 4 510 euros n’ont pas vocation à demeurer dans Îc cabinet dentaire, ce que lc prévenu Armant Y n’a pas contesté lors de l’audience de la cour ;

Considérant enfin que la qualification professionnelle de M Y ainsi que sa parfaite connaissance de l’interdiction en vigueur édictée par la loi anti-cadcaux de 1993 et étenduc aux entreprises cn 2002 établissent, sans contestation possible, que les éléments tant matériel que moral du délit de proposition ou fourniture d’avantage à un membre d’une profession médicale ou assimilé par une entreprise dont les services ou produits sont pris en charge par la sécurité sociale sont constitués ;

Considérant, enfin, que l’ordonnance 2017-49 du 19 janvier 2017 relative aux avantages offerts par des personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé n’a pas enlevé aux agissements de M Y, des sociétés GACD et E leur caractère répréhensible, puisque ladite ordonnance a étendu le champ des entreprises concernées par l’interdiction d’offrir des avantages aux professionnels de santé, prévue à l’article L. 4113-6 du code de la santé publique (applicable lors de la commission des faits) ainsi qu’au dernicr alinéa de l’article 1..5512-10 du même code, à l’ensemble des personnes fabriquant ou commercialisant des produits de santé à finalité sanitaire ou de prestations de santé, les produits proposés et commercialisés par les sociétés GACD et E ayant cette inalité ;

Considérant qu’il se déduit de l’ensemble de ces éléments que la culpabilité des prévenus M Y, SAS GACD et SAS E est acquise et que le jugement déféré sera réformé et les prévenus déclarés coupables des faits qui leur sont reprochés ;

Sur _l’infractio la législation sur ratio ochéèes à M Y et aux sociétés F et GACD

Considérant que la cour observe qu''alors que la relation commerciale entre les sociétés GACD et AO AL et les chirurgiens-dentistes est simple et directe, le système de facturation apparaît particulièrement opaque ;

Considérant qu’il est reproché à la société F et à M Y le délit d’achat ou de vente de produit ou prestation de service pour une activité

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(D

professionnelle sans facturation conforme pour avoir établi, dans leurs relations avec la société E, des factures ne comportant pas la dénomination précise des biens vendus, leur prix unitaire, les conditions d’escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles ;

Considérant que sur la facturation spécifique F/E, ne figurc dans celle-ci ni de dénominaticen précise des produits, ni de prix unitaire, les facturcs faisant seulement apparaître des montants globaux par taux de TVA applicable rendant nécessaire de se reporter à un document annexe pour obtenir des informations précises s’y rapportant ;

Considérant que pour relaxer la société F des faits qui lui sont reprochés, le tribunal a considéré que chacune des factures papicrs était accompagnée de pièces jointes informatiques, lesquelles comportaient l’ensemble des mentions cxigées par le législateur, le code de commerce n’imposant pas que la facture soit nécessairement sous forme papicr dans son intégralité ;

Qu’en outre, le tribunal a retenu que l’existence même de l’ensemble des mentions cxigécs par la loi démontre la parfaite bonne foi de la SAS F et l’absence totale de volonté délictueuse ;

Considérant que la cour ne fera pas sienne cette analyse ;

Considérant, en effet, que la facture doit se suffire à elle-même et comporter l’ensemble des mentions obligatoires sans qu’il soit nécessaire de se reporter à un autre document ;

Considérant que le dirigeant de la société F, M Y a omis de se conformer aux règles de facturation concernant les factures délivrées par celte société à la société E dans les termes de la prévention ;

Considérant qu’il se déduit de l’ensemble de ces éléments que la culpabilité de la société F et de M Y, prévenus, est acquise et que le jugement déféré doit être réformé et les prévenus déclarés coupable des faits qui leur sont reprochés ;

Considérant qu’il est également reproché à la SAS GACD et à M Y le délit de vente ou achat de produit ou prestation de service pour une activité professionnelle sans facturation conforme pour avoir à Paris dans les régions Rhône-Alpes, Lorraine, Aquitaine et Alsace, durant les années 2009, 2010 et 2011, en tout cas sur le territoire national ct depuis temps non couvert par la prescription, dans le cadre d’ tivité professi Île, étant vendeur de produits ou prestations de services, établi une facture ne comportant pas le nom des parties, leur adresse, la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, le prix unitaire hors TVA des produits ou des services rendus, tous rabais remises ou ristournes chiffrables, les conditions d’escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles, en l’espèce notamment en ne mentionnant pas sur les factures les ristournes acquises à chaque commande de produits, et en ne mentionnant pas non plus la dénomination précise des réductions accordées dans le cadre du « programme privilèges » souscrit par les clients ;

Considérant qu’en application des dispositions de l’article L. 441-3 du code de

commerce, la facture doit mentionner : « … toute réduction de prix acquise à la

date de la vente ou de la prestation de services ct directement liée à cette opération

de gente ou de prestation de services, à l’exclusion des escomptes non prévus sur a facture » ;

Cour d’Appel de Parls – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 15/8797 – arrêt rendu le 29 ruars 2017 – Page 50

Considérant qu’en l’espèce, les faciures émises par la société dans le cadre du «Programmc Privilèges» ne font pas apparaître les ristournes acquises, ni en valeur monétaire, ni en couronnes alors que celles-ci ont un caractèrc certain ct s’accumulent à chaque commande de produits dentaires et qu’il est précisé dans les «Conditions Particulières du Programme Privilèges» que les couronnes sont calculées dès l’enregistrement de l’adhésion ;

Que les couronnes doivent, en conséquence, apparaître dès que le premier palier du barème est atteint ;

Considérant que le caractère automatique, systématique, sans condition des ristournes n’est pas contestable, la simple adhésion au «Programme Privilèges» ouvrant droit aux paliers de ristournes sans autres exigences ;

Que les ristournes, calculées à partir d’un barème de concordance couronnes/remises diffusé dans divers documents de la société ou du groupe GACD, sont immédiatement connues et certaines ;

Qu’elles doivent, dès lors, figurer sur les factures émises dans le cadre du

«Programme Privilèges » ;

Considérant, s’agissant de la facturation non conforme, que le défaut de facturation relevé dans la procédure concernant la société GACD, constitué par l’absence de mention sur les factures des réductions de prix acquises au moment de la vente, M Y a affirmé que cette omission résultait d’une insuffisance informatique, les clients pouvant obtenir l’information du niveau de couronnes atteint sur simple appel téléphonique et le nouveau système informatique mis en place le 25 février 2013 ayant réparé cc défaut ;

Considérant, néanmoins, que lors de l’audience de la cour, il n’a pas été justifié par la défense du respect par les prévenus du respect des règles inhérentes à la acturation ;

Considérant, per ailleurs, que la cour observe qu’à l’inverse des remises et rist touj bsentes sur les factures émises par la société GACD), lorsqu’il s’agit de promotions ponctuclles, les remises et avantages accordés sont systématiquement mentionnés sur les factures adressées aux chirurgiens-

dentistes :

Considérant qu’en outre, les conditions d’escompte, le taux de pénalités de retard et la date précise du règlement ne sont pas non plus mentionnés, alors que les factures en cause représentent un montant significatif de 409.734 euros ;

Considérant qu’il se déduit de l’ensemble de ces éléments que la culpabilité de la société GACD et de M Y, prévenus, est acquise et que le jugement déféré sera réformé et les pré déclaré pables des faits qui leur sont reprochés ;

b/ sur les peines :

Considérant que les infractions reprochées de facturation non conforme, délit prévu et réprimé par les articles L. 441-3 et L. 441-4 du code de commerce et de fourniture d’avantages à des professionnels de la santé, délit prévu et réprimé par les articles L. 4113-6 et L. 4163-2 du code de la santé publique, reprochées à M Y, titulaire d’un doctorat cn chirurgie dentaire, par ailleurs toujours inscrit à l’ordre des chirurgicns-dentistes, à la tête d’un véritable empire commercial dans le domaine de vente de produits dentaires, sont multiples, graves, ont perduré plusieurs années (de 2009 à 2011), et s’inscrivent, compte

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chsmbre 8 – n° rg 15/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 51

C

tenu de l’importance financière des avantages procurés et du montage mis en place, dans une stratégie ayant pour finalité de corrompre le secteur dentaire ;

Considérant que la pratique des sociétés gérées par M Y consistant à adosser les ventes notamment de films radiologiques et de produits ancsthésiques sur des avantages personnels des chirurgiens dentistes ou à des personnes de leur proche entourage (assistants dentaires, conjoints) porte également atteinte par nature à l’indépendance même des chirurgiens-dentistes à la fois dans leurs relations avec les fournisseurs de dispositifs médicaux, et dans l’appréciation de la qualité intrinsèque de ces produits :

Que la pratique « d’arroser » par des avantages directs ou indirects de toute nature, largernent les chirurgiens-dentistes, et accessoirement leurs collaborateurs, en recourant, par ailleurs, à une facturation incomplète, ne saurait être tolérée au motif que les concurrents directs recourraient au même système ;

Considérant que la cour considère que le prononcé d’une amende correctionnelle de 75.000 curos constituera une sanction bien proportionnée à la gravité des faits, bien adaptéc à la personnalité de son auteur, en tenant compte dc ses ressources et de ses charges, telles que déclarées à l’audience de la cour, sans toutefois cn justifier, méconnaissant les dispositions de l’article 390 alinéa 3 du code de procédure pénale, rappeclées dans la citation délivrée;

Considérant que les infractions de facturation non conforme, délit prévu et réprimé par les article L. 441-3 et L. 441-4 du code de commerce ct de fourniture d’avantages à des professionnels de la santé, délit prévu et réprimé par les articles L. 4113-6 et L. 4163-2 du code de la santé publique, reprochées à la société GACD, ont pcrduré plusieurs années (2009 à 2011), et s’inscrivent compte tenu de l’importance financière des avantages procurés ct du montage mis en place, dans une stratégie ayant pour finalité de corrompre le secteur dentaire ;

Que les profits financiers retirés par la société GACD, qui compte 18 000 clients, sur les 36 000 chirurgicns-dentistes répartis sur l’ensemble du territoire français, et dont le bulletin n° 1 du casicr judiciaire nc mentionne aucune condamnation, ontété considérables (résultats bénéficiaires en 2011 : 3.715.068 euros, 3.451.192 euros en 2012, 3.451.912 euros en 2009 et 1.648.335 euros cn 2008) ; Considérant que la cour considère que le prononcé d’unc amende ti Il de 75 000 euros constituera unc sanction bien proportionnée à la gravité des fai et aux résultats bénéficiaires obtenus ;

Considérant que l’infraction de fourniture d’avantages à des professionnels de la santé, délit prévu et réprimé par les articles L. 4113-6 et L. 4163-2 du code de la santé publique, reprochées à la SAS E a perduré plusieurs années (2010 à 2012), et s’inscrit compte tenu de l’importance financière des avantages procurés et du montage mis en place , dans une stratégic ayant pour finalité de corrompre le secteur dentaire ;

Que les profits financiers retirés par la SAS E, qui compte 10 000 clients actifs, sur les 36 000 chirurgiens-dentistes répartis sur l’ensemble du territoire français, de la vente de sa gamme des articles offerts, dont des produits anesthésiques avec autorisation de mise sur le marché, ont été considérables : 1.296.028 curos en 2010, 1.554 .436 euros en 2011 et 1.199.688 euros en 2012 ;

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Considérant que toute la politique commerciale de l’entreprise E repose autour de la remise de cadeaux et d’avantages pour capturer la clientèle des chirurgiens-dentistes ;

Que les deux sociétés GACD et PROMODENTAIRES apparaissent dans le secteur médical comment concurrents alors qu’il n’en est rien ;

Considérant que la cour considère que le prononcé à l’encontre de la société E d’une amende correctionnelle de 40.000 euros constituera une sanction bien proportionnée à la gravité des faits et aux résultats bénéficiaires

obtenus ;

Considérant que l’infraction de facturation non conforme dont est reconnue coupable la SAS F, centrale d’achat, filiale de la SAS GACD, dont la principale activité est l’achat auprès de divers fournisseurs des produits dentaires ct non dentaires qu’elle revend aux filiales du groupe GACD (E et ITANA), mais également dépositaire pharmaceutique pour les produits anesthésiques, a porté sur des marchés d’objcts divers très importants ;

Qu’ainsi, la SAS F a facturé la somme de 54.723,43 euros HT. de coffrets-cadcaux à la société GACD pour l’année 2011, que le compte « cadeaux à la clientèlc » de la société GADC s’élève pour l’année 2011 à 646.239,84 euros, les cadeaux étant achetés à l’origine par la société F qui les revend à ia société GACD ;

Que la société F a, par ailleurs, vendu des produits dentaires et non dentaires à la société E au cours de l’année 2010 pour un montant de 1.217.784 euros ct 1.543.956 euros pour l’année 2011 ;

Que les budgets des achats de vins et de champagne auprès de divers fournisseurs et celui des coffrets-cadeaux destinés à la société PROMODENDAIRE courant 2011 se sont élevés respectivement à 339.361 euros ct 30.919 euros, les biens acquis n’ayant pas pour vocation l’équipement de cabinets dentaires ; Considérant que la cour considère que le prononcé d’une d ti Il de 20. 000 euros constituera une sanction bien proportionnée et aux bénéfices obtenus ;

Considérant, enfin, que la cour ordonnera à titre de peine complémentaire la mesure de confiscation des scellés, ceux-ci ayant directement servi à la commission des infractions ou en étant le produit ;

P E T

LA COUR,

Statuant publiquement, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi, et contradictoirement à l’encontre de la société CADLNCE, morale prévenue intimée représentée par M Y, de la société GACD, personne morale prévenuc intimée représentée par M Y, de la société E personne morale intimée représentée par M Y, de M Y, personne

physique, prévenu intimé,

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 15/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page S3

Déclare recevable l’appel du procureur de la République de Paris, Rejette l’exception de nullité des poursuites exercées contre la société CAD

3

Rejctte l’exception de non-conformité de la législation anti-cadeaux à la législation européenne et notamment aux dispositions des articles 94 ct 95 de la directive 2001/83/CE,

Vu l’ordonnance n° 2017-49 du 19 janvier 2017 relative aux avantages offerts par les personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé,

Infirme le) jugement déféré, et statuant à nouveau :

Déclare M Y coupable des délits, d’unc part, de proposition ou fourniture d’avantage à un membre d’une profession médicale ou d’une autorité

sanitaire par une antreprise dont les services ou produits sont pris en charge par la sécurité sociale, d’autre part, de vente ou achat de produits ou prestation de serviéc pour’ 'une activité professionnelle sans facturation conforme,

Déciare la société GACD coupable des délits, d’une part, de proposition ou fourniture d’avantage à un membre d’une p une personne morale dont les services ou produits sont pris en charge par la sécurité sociale, d’autre part, de vente ou achat par personne morale, de produits ou prestation de;service pour une activité p le sans facturation conforme,

Déclarc la société E coupable du délit de proposition ou fourniture d’avantage à un membre d’une profession médicale ou assimilé par une morale dont les services ou produits sont pris en charge par la sécurité soci

Déclare la société F coupable du délit de vente ou achat par personne morale, de produits ou prestation de service pour une activité professionnelle sans facturation conforme,

Les condamne en répression : – M Y à une amende correctionnelle de 75.000 euros,

— la SAS GACD à une amende correctionnelle de 75.000 euros, – la SAS E à une amende correctionnelle de 40.000 euros, – la SAS F, à une amende correctionnelle de 20.000 euros,

Ordonne la confiscation de l’ensemble des scellés.

Compte tenu de l’absence du condamné au prononcé de la décision, le président l’aviser, conformément aux dispositions des articles 707-3 et R55-3 du de procédure pénale, que : – s’il s 'acquitte du montant de l’amende et du droit fixe de procédure mentionné ci-dessous, dans un délai d’un mois à compter de ce jour, ce montant est diminué de 20% (réduction maximale de 1 500 euros), – le paiement de l’amende ne prive pas le condamné du droit de former un

pourvoi en cassation.

Le tout en RD dues des dispositions des articles visés à la prévention et des articles 406, 410, 485, 509, 512, 513, 515, 707-2 et 707-3 du code de procédure

pénale, 101 8 À du code général des impôts.

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 14/8757 – arrêt rendu le 29 mars 2017 – Page 54

Ainsi fait et jugé par Monsieur BURKEL président de chambre, siégeant avec Monsieur I et Madame J, conscillers, présents lors des débats et du délibéré,

et prononcé par Monsieur BURKEL, président de chambre, en présence de Monsieur Pierre DARBEDA, avocat général.

En foi de quoi, la présente minute a été signée par Monsieur BURKEL, président, et par Madame K, er, présent lors des débats et du prononcé de l’arrêt.

| | LE GREFFIER |

La présente décifion est assujettie à un droit fixe de procédure d’un montant de 169 euros dont «ft redevable le condamné. Ce montant est diminué de 20% en cas de paiement dans le délai d’un mois:

— à compter du jour du prononcé de la décision si celle-ci est contradictoire,

— à compter de la signification si l’arrêt est contradictoire à signifier ou par défaut.

LE PRÉSIDENT

1 Î vw *

f

Cour d’Appel de Paris – pôle 2 -chambre 8 – n° rg 14/8757 – arrêt rondu le 29 mars 2017 – Page 58

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Cour d'appel de Paris, 29 mars 2017, n° 15/08757